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vendredi, février 27, 2009

136- Contibution et... Confusion: Francophonie, nationalité...

Impressions à chaud: Voici un article dur à l'encontre des écrivains algériens d'expression française qui devraient selon cet écrivain-universitaire avoir honte de rechercher la gloire et la reconnaissance internationale.
L'article introduit des confusions. Les algériens ont chassé la France d'Algérie, il n'y a pas aujourd'hui à rechercher à intégrer la francité écrit-il. Il écrit aussi que ces Algériens se définissent comme tels mais agissent en Français, sans expliquer ce qu'il entend par cette sentence.
Selon A. Merdaci le problème fondamental des Algériens serait leur difficile recherche de positionnement dans la langue, la culture et les institutions françaises.
Confusions et contradictions. Il écrit en effet en substance que les écrivains Algériens des années de guerre (dont K. Yacine) s'inscrivent dans une "démarche d'accompagnement bienveillante, qui pour généreuse qu'elle fut, n'était pas exempte d'arrières-pensées".

Ces démarches d'accompagnement bienveillante et les arrières pensées coloniales eurent-elles sur K. Yacine et d'autres des influences telles que ces derniers se renièrent?. Assurément non. D'ailleurs A. Merdaci le dit lui même plus loin dans son article en se contredisant donc. Alors pourquoi ce serait le cas aujord'hui dans un environnement apaisé?
Merdaci vise Sansal le "harrag" sans le nommer explicitement. Merdaci rêve d'un "écrivain Algérien de langue française qui imposerait son oeuvre non plus à Partir de Paris, mais d'Algérie (et non d'Alger. Il y a comme une forme de lapsus ici), comme si cela ne tenait qu'à l'écrivain de le décider. Sansal n'écrit pas de Tataouine mais d'Algérie. S'il est reconnu ici il n'en tient qu'à ceux qui l'ont ainsi désigné auteur de talent.
Ecrire que ce dernier (comme d'autres) a abandonné voir renié sa nationalité algérienne est d'un raccourci manifeste qui frise la malhonnêteté. Monsieur Merdaci ne semble pas avoir lu " Poste restante: Alger" ou "Petit éloge de la mémoire..."

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Le Soir d'Algérie: 25 février 2009

Culture : CONTRIBUTION

Francophonie, nationalité et insularité littéraire (1e partie)

Par Abdellali Merdaci


Jamais la question de l’identité nationale des expressions culturelles ne s’est posée de manière aussi nette en Algérie qu’en ces dernières années. La double nationalité triomphe aujourd’hui dans la peinture, le cinéma et la musique. Et même, au nom de motivations diverses, dans la littérature.

Par Abdellali Merdaci



Dans cette quête – souvent déçue, toujours malheureuse — de nouvelles qualifications juridiques aux productions culturelles et à leurs auteurs, il y a pour une nouvelle génération d’artistes, nés et ayant grandi en Algérie, l'abandon de leur nationalité. Leur rapport à l’ancienne puissance colonisatrice est-il si prégnant pour tracer les frontières d’une insularité culturelle ? Ni la génération de la guerre d’indépendance qui continue à conduire le pays ni celles de l’indépendance n’ont su exorciser le passé colonial de l’Algérie et plus précisément ses crises identitaires. L’indépendance et la formation d’une nouvelle nation ont-elles réellement donné une nouvelle identité propre aux anciens indigènes ? Aujourd’hui, non seulement dans le champ culturel, mais aussi curieusement dans le champ politique, beaucoup d’acteurs restent indéterminés dans leur identité. Ils sont à la fois Algériens, mais aussi Français, parfois même Marocains, Américains et Canadiens. Cette labilité de l’identité juridique, cet «entre-deux» insurmontable, n'est-elle pas tragiquement vécue dans le microcosme littéraire qui reste entre tous le plus désemparé ? Elle engage parfois des comportements intempérants que souligne l’actualité. Faut-il ainsi donner acte au romancier Yasmina Khadra de son irritation devant les choix des jurys littéraires parisiens qui ne rendent pas justice au travail des écrivains de langue française d’Algérie, largement exprimée en France et en Algérie sur les plateaux des télévisions et dans les colonnes des journaux ? Il est, certes, vrai que la marginalisation en France des auteurs algériens, résolument absents des listes des prix littéraires de l’automne, n’est rien de moins qu’évidente et leur présence dans l’écriture française plus fragile. Il y a sans doute, dans la période actuelle, dans le sillage de Yasmina Khadra des écrivains algériens de langue française prometteurs, souvent cités, jamais promus. Leur attente de récompenses littéraires parisiennes traduit au mieux un décalage par rapport au réel politique et culturel de leur pays. Et aussi une incompréhension de son histoire coloniale et nationale. L’ouverture – très mesurée – du prestigieux Prix Goncourt aux romanciers étrangers leur donne-t-elle raison ? Il est, certes, vrai que du Suisse Jacques Chessex au Polonais Roman Gary, du Marocain Tahar Ben Jelloun au Libanais Amin Maalouf, de l’Américain Jonathan Litell à l’Afghan Atiq Rahimi, le Goncourt a souvent couronné des écrivains étrangers de langue française, même s’ils le furent le plus souvent en leur qualité d’écrivains naturalisés français. Conviendrait-il ici d’incriminer dans l’absence d’œuvres de qualité de romanciers algériens dans les palmarès des académies parisiennes les seuls vieux réflexes coloniaux ? Ou encore les mutations du champ littéraire français de ce début de XXIe siècle ? Le problème fondamental des Algériens qui n’ont jamais obtenu de grands prix littéraires français reste aujourd’hui, près d’un demi-siècle après l’Indépendance, leur difficile recherche de positionnement autant dans la langue et dans la culture françaises que dans leurs institutions, non seulement en Algérie, mais en France aussi. Ils se disent Algériens, mais ils agissent – consciemment ou inconsciemment – comme s’ils sont des nationaux français. Pour différentes raisons qui ne relèvent pas toujours de la seule clôture du champ politique algérien, ils ressentent le besoin d’être reconnus plus à Paris qu’à Alger. Comment donc s’étonner que l’ancienne puissance coloniale, définitivement séparée de leur pays, reste plus que jamais pour eux le seul arbitre des sanctions et des légitimités ? Trois axes permettent d’envisager ici une réponse.

1. UNE QUESTION FRANCO-FRANÇAISE

Longtemps la réception éditoriale et critique des œuvres et des auteurs algériens a nourri en France un paternalisme de mauvais aloi. Cette situation trouve une explication, depuis la fin du XIXe siècle, dans l’histoire des littératures de langue française dans l’espace colonial algérien et, plus précisément, dans leur présence et leur influence dans l’édition française. Pendant plus d’un demi-siècle, depuis le Sang des races (1898) de Louis Bertrand, jusqu’au début des années 1950 et au reflux parisien de l’École d’Alger, dernier regroupement structuré de la littérature coloniale, très peu d’auteurs indigènes d’Algérie sont accueillis dans l’édition parisienne et dans le champ littéraire français, plus ouverts aux œuvres et aux auteurs coloniaux. Il y a eu pendant tout ce temps dans l’édition parisienne un refus explicite d’une expression littéraire indigène en langue française. La seule légitimité qui pouvait alors être décrétée par les institutions littéraires françaises était celle de l’expansionnisme colonial et de ses expressions littéraires, de Robert Randau et Marius-Ary Leblond à Gaston de Pouvourville. Jusqu’à la veille de la Grande Guerre, la littérature coloniale triomphante, unanimement célébrée par les académies littéraires, dont le Goncourt, récompensant cinq de ses œuvres dans la première décennie du XXe siècle, était perçue comme une bouée de secours pour une littérature française anémiée. Au-delà des sensibles transformations du champ littéraire, soldant la crise de la littérature française du début du XXe siècle, de l’émergence de doctrines littéraires nouvelles et de positionnements anti-coloniaux d’auteurs issus de la gauche française et internationaliste, il n’y a pas dans l’entre-deux-guerres un basculement de l’édition française qui aurait suscité un intérêt pour l’écriture indigène algérienne de langue française émergente. C’est tardivement, en Algérie même, aux rencontres littéraires de Sidi-Madani, dans la région de Blida, qui se tiennent au début de l’année 1948, que se nouent des perspectives d’échanges entre auteurs français – notamment Brice Parrain, Louis Guilloux, Jean Cayrol – et indigènes. Les portes de l’édition française ne font alors que s’entrouvrir. Dans le demi-siècle d’histoire littéraire algérienne, si les cas du Capitaine Ben Cherif et de Mohammed Dib, parrainés par le gouverneur général Célestin Jonnart et par Jean Cayrol, sont les plus manifestes, les débuts de Kateb, encouragés par le gouverneur général Chataigneau, de Feraoun, de Mammeri et bien d’autres auteurs du début des années 1950, s’inscrivent aussi dans cette démarche d’accompagnement bienveillante, qui pour généreuse qu’elle fut, n’était pas exempte d’arrière-pensées. La guerre d’indépendance changeait considérablement les enjeux éditoriaux dans le champ littéraire français et redéfinissait son regard sur des auteurs algériens nouveaux, aux qualités certes reconnues, surgis dans les feux et les déchirements de la guerre.

(A suivre)

A. M.

Écrivain-universitaire.

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Le Soir d'Algérie: 26 février 2009

Culture : CONTRIBUTION

Francophonie, nationalité et insularité littéraire (2e partie et fin)

Par Abdellali Merdaci

De l’indépendance à nos jours, les relations de l’édition française – et singulièrement parisienne – avec les auteurs algériens se fixent dans le registre désuet d’un effarant spectacle de montreurs de singes savants : la littérature algérienne de langue française n’est tenue que de satisfaire l’imparable curiosité du fameux notaire de Carpentras, une sorte d’archétype de lecteur, né dans les limbes de la classe moyenne française, «sudiste» par choix, un rien raciste, un rien revanchard – notamment sur le chapitre des anciennes colonies – et dont l’appétence littéraire ne s’éveille qu’aux prophètes du malheur algérien.

S’ils soulèvent – au mieux – une curiosité compatissante, ces Algériens, qui parlent et écrivent le français, ne sont toujours pas, malgré l’onction d’immortalité de Mme Djebar, reçus dans les académies littéraires. Le parcours et l’aura des écrivains algériens ne sont pas, le plus souvent, mesurés dans le champ littéraire parisien à l’aune d’un travail authentique de création, mais aux écœurantes gesticulations sur les affaires politiques internes de leur pays. Et Yasmina Khadra parle juste lorsqu’il désigne à Si Kaddour M’hamsadji les limites d’une réception critique du fait littéraire algérien et de ses acteurs par les opérateurs institutionnels en France et en Europe : «Pour Paris, comme pour l’Europe, pour être écouté, il faut s’inscrire dans la dissidence (…) Pour eux, il faut être dissident pour être perçu. Ils se fichent royalement de nos arts, de nos talents, de notre érudition. Les seuls tremplins qu’ils nous proposent sont la prison, les tracasseries avec le pouvoir, si bien que certains de nos intellectuels privilégient la provocation outrancière pour choquer, déclencher des réactions extrêmes et susciter l’intérêt» ( L’Expression, 12 novembre 2008). Position lucide, mais cela reste à vérifier.

2. Une problématique double nationalité littéraire

Je ne comprends pas que Yasmina Khadra qui présente une analyse pertinente du commerce étroit de l’édition française avec ses auteurs algériens puisse faire, pour son propre parcours d’écrivain, de la surenchère. Il est en effet difficile, pour lui comme pour ses compatriotes, de reprocher aux Français de vivre selon leur volonté leur littérature et leurs institutions littéraires. Mais alors pourquoi Yasmina Khadra, écrivain de nationalité algérienne, de surcroît ancien officier supérieur de l’armée algérienne et haut fonctionnaire de l’État algérien, revendique-t-il plus d’égards des jurys des prix littéraires parisiens ? Il y a certainement ici une erreur d’appréciation, un malentendu. Et aussi beaucoup de confusion. S’il est admis que l’écrivain écrit pour se constituer un lectorat, présent et à venir, il peut paraître troublant qu’il s’occupe à revendiquer, toute honte bue, gloire et consécration de toutes sortes, quand bien même il est un champion des ventes en librairie. Il l’est encore plus en France, pour un écrivain étranger, personnage officiel de l'État algérien, de faire un mauvais procès aux institutions de l'État français qui lui ont tout donné, du titre de chevalier de la Légion d'honneur à celui d'officier des Arts et lettres, en sus d'une dizaine de distinctions. Or, aujourd’hui, avec la semblable et implacable férocité jamais assouvie dont témoigne Yasmina Khadra, les écrivains algériens demandent et exigent beaucoup de la France qui ne doit se préoccuper dans ce domaine de la littérature – comme dans beaucoup d’autres – que de ses propres enfants. Ces Algériens dont les parents ont hier chassé la France d’Algérie, avec les armes et le bulletin de vote, en sont aujourd’hui à user de leur talent pour retourner dans la francité. Et à en faire leur unique horizon. Lorsqu’ils n’arrivent pas à avoir la nationalité française par le mariage ou par quelque compliquée opération de retour dans la nationalité d’origine pour les plus âgés, ils entretiennent volontairement l’ambiguïté sur leur identité nationale. Soit ils récusent leur nationalité algérienne, soit ils se muent dans une improbable universalité de l’écriture, bradant effrontément leurs ancrages historiques qui sont paradoxalement leur seule raison d’écrire. Je ne suis pas de ceux qui mettent des frontières entre les littératures, facteur de rapprochement des peuples et des cultures, mais un écrivain ouigour, croate, colombien, congolais ou algérien n’entre potentiellement dans l’universalité que par sa singularité locale. Est-ce une des nombreuses avanies des études littéraires postcoloniales ? Ces derniers mois, j’ai recensé dans les journaux algériens pas moins d’une douzaine de déclarations d’auteurs algériens qui raclent jusqu'à l'os cette insolite resucée de l’universalité de l’écriture. Cela n’a-t-il pas été répété à l’envi lors d’un colloque estival à Riad El- Feth et plus encore dans les cafés littéraires du dernier Sila ? Souvent sentencieusement, dans une emphase toute caricaturale, pour appeler de saines réparties. La question de la nationalité des hommes et des femmes de culture originaires d’Algérie a été ainsi récemment posée en des termes forts par le romancier Salim Bachi, dénonçant un «déni d’identité ou de nationalité» aux artistes algériens expatriés ( El Watan Arts & Lettres, 26 octobre 2008). S’il faut dénoncer sur cette question sensible la tentation de l’exclusion, il faut aussi pouvoir en parler, sans être diabolisé. C’est désormais un fait établi que des écrivains algériens, lorsqu’ils arrivent à poser un pied dans le Quartier latin, sont plus soucieux de tourner la page de leur pays. Ni l’intégrisme sanglant, ni l’irréductible dictature du groupe politique issu de la guerre d’indépendance, ni la médiocrité des institutions algériennes, ni la hogra, ne peuvent expliquer et justifier un abandon de la nationalité algérienne, en dehors de la recherche d’un confort personnel égoïste. N’y a-t-il pas plus d’honneur chez les footballeurs algériens qui s’expatrient pour rechercher une fortune sereine, sans en payer l’inexpiable ternissure du reniement, que chez des intellectuels infatués, honteux quêteurs d'amères provendes ? Il y a en vérité ici un inextricable problème d’appartenance à une littérature et à une culture nationales. La littérature française, qui constitue sans doute un phénomène majeur de la littérature mondiale, ne peut appartenir qu’à la France et aux seules personnes qui la choisissent sereinement comme leur pays. Il en va ainsi pour l’Algérie et pour sa littérature, quand bien même elle reste une littérature mineure. Il n’est pas indifférent de ce point de vue d’observer que beaucoup d’écrivains des années 1950-1960, Français par leur mariage, père d’enfants français, faisant une carrière française, soient restés jusqu’au bout dans la nationalité littéraire algérienne. La nouvelle génération d’écrivains n’a pas ces prévenances : plusieurs écrivains, certains formés dans le vivier de la défunte Enal, n’hésitent plus à décliner leur nationalité française en quatrième page de couverture de leurs ouvrages. Ils restent libres de leur choix et il est légitime que leur œuvre soit inscrite dans le patrimoine littéraire de leur nouveau pays d’adoption. Mais il est tout à fait indécent qu’ils puissent jouer sur la double nationalité. Il n’y a qu’une littérature française et qu’une littérature algérienne ; il ne saurait, dans les limites d’un juridisme excessif, exister de double nationalité littéraire.

3.Une nécessaire décolonisation de la littérature algérienne

Cette course effrénée des écrivains algériens vers un ailleurs, la nationalité française et cet impensable avatar de l’universalité, ne cache-t-elle pas un malaise d’être dans une position et un statut indécidables dans leur propre pays et dans leur identité juridique ? Voilà donc une autre forme de harga, il est vrai moins préjudiciable pour l’image du pays. Cette désaffection d'écrivains – leur repli désespéré et leur fuite éperdue – reste-t- elle paradoxale si on la rapporte à ce qui a fondamentalement changé cette dernière décennie. Jamais en effet la langue française n’a été aussi massivement diffusée, lue et parlée en Algérie, favorisant un nombre important de nouveaux écrivains et aussi de respectables contingents de lecteurs. Ces remarquables acquis se trouvent, en partie, compromis par un retard structurel de l’édition et de la diffusion, au moment où la critique et les instances académiques tardent à se mettre en place. L'Algérie devrait pourtant pouvoir assurer les conditions d'une véritable vie littéraire pour tous ses écrivains et dans toutes ses langues. Peut-on rêver d’un écrivain algérien de langue française qui imposerait son œuvre non plus à partir de Paris, mais d’Algérie ? N’est-il pas temps de plaider pour la décolonisation de la littérature algérienne, en fondant son autonomie, en modelant ses institutions et en ouvrant la voie aux nécessaires compétitions et gratifications de carrière en Algérie. L’État, soutenu par les associations civiles, peut encourager les métiers de l’édition, de la diffusion et de la librairie, et surtout promouvoir la lecture à travers ses nombreux établissements scolaires. Des solutions existent pour donner à beaucoup de créateurs actuels et à venir le désir de vivre intensément une carrière d'écrivain dans leur pays, sans cette indicible souffrance et ce désaveu humiliant de leur art qui les en éloigne. Le travail remarquable de découverte de jeunes talents de la Fondation Mohammed Dib, le Prix Apulée et celui des libraires, créé lors du dernier Sila, inscrivent déjà l’incontournable présence de l’auteur et de l’écriture dans notre société. Ils devraient asseoir une sûre tradition dans le champ littéraire algérien. Je me souviens que Waciny Laredj avait suggéré, il y a quelques années, la création d’un grand prix littéraire algérien. Ce serait une première approche, en attendant bien d'autres. Ce prix qui valorisera indistinctement toutes les expressions littéraires algériennes, au-delà de leur véhicule linguistique, ne relevant pas de l’initiative de l'État, est nécessaire. Les œuvres d'authentiques écrivains algériens, qui n’auront pas à se cacher derrière ce lamentable cache-sexe de l'universalité, qu’elles portent l’estampille d’un éditeur algérien ou étranger, ne recevraient alors leur toute première consécration que de leurs lecteurs algériens. Et ensuite, s'ils en ont le talent, du reste du monde. Aucun écrivain algérien n’a le droit de dire qu’il écrit pour les Algériens, s’il n’a que le seul souci d’une carrière parisienne, plus dans l'ambiguïté – et souvent l’indignité – que dans la clarté. Face au spleen parisien d’un Yasmina Khadra, il serait utile de dire qu’il y a plus de mérite pour un écrivain de qualité d’être un Naguib Mahfouz, au Caire, qu’un produit d’acculturation dans une capitale étrangère, fusse-t-elle celle de la francophonie.

A. M.

Écrivain-universitaire.

Dernier ouvrage paru : Algérie, une suite allemande, Médersa, 2008.

lundi, février 23, 2009

Camus Bosco et Lourmarin
































































































Maïssa Bey et Albert Camus

in: la-plume-francophone.over-blog.com


Maïssa Bey : L’hombre d’un homme qui marche au soleil.

Ed Chèvrefeuille.

Albert Camus : une œuvre et des femmes

Par Sandrine Meslet

Savez-vous que « que je n’étais rien dans ce que j’ai dit ni écrit » ?

(Maïssa Bey, L’ombre d’un homme qui marche au soleil Réflexions sur Albert Camus, Algérie, Ed. Chèvrefeuille étoilée, 2004)

Pour ceux qui ne connaissent que trop l’auteur Albert Camus, Maïssa Bey propose un portrait plus personnel et intimiste de l’auteur dans ce court essai intitulé L’ombre d’un homme qui marche au soleil.Elle entame son récit avec ces mots :

Il m’a fallu du temps, beaucoup de temps pour oser à mon tour passer de l’autre côté du miroir, de l’autre côté de la page […] D’aller au-delà du culte, de rechercher la dimension humaine en lui

Il m’a fallu pour cela écouter attentivement celui qui, au sommet de la gloire, a osé écrire « Il y a en moi un vide affreux, une indifférence qui me fait mal »

Il s’agira donc aussi pour la romancière d’évoquer l’importance de l’œuvre de Camus dans son propre passage à l’écriture. Ceci explique en partie le choix de faire parler Camus par l’intermédiaire d’une voix qui nous semble surgir d’outre-tombe et qui apparaît dès les premières lignes du récit.

Libre à vous de vous acharner à me voir autre, à vouloir coûte que coûte découvrir qui je suis dans ce que je dis, à tenter de me chercher sous les masques, à traquer ma vérité en chacun de mes personnages

Maïssa Bey ne renonce pas à la fiction dans son récit mais la détourne afin de célébrer au plus près un homme complexe proprement hanté par l’image des femmes. Car, au cœur de la poétique d’Albert Camus, se dessine le visage d’une femme et d’une mère « D’abord la mère. Car, précise Camus, ‘Tout homme est le premier homme, c’est pourquoi il se jette aux pieds de sa mère », muette et solitaire, au nom de laquelle l’écriture du fils vient combler le silence :

Pour tout homme, et c’est un lieu commun que de le souligner, au commencement il y a la mère. La première femme. L’on sait d’ailleurs l’importance de la mère pour Camus, son attachement pour l’être qu’il place « au centre de son œuvre »

Elle illustre la complexité des liens qui l’unissent à sa mère, la mère demeurant un sujet inépuisable et inépuisé par la poétique de l’auteur, et à ce mutisme maternel semble répondre la parole prolixe d’un fils acharné à découvrir la vérité de celle qui se cache « Là encore, ou plutôt déjà, l’aveu conscient et douloureux d’une impuissance à communiquer avec l’être dont on se sait le plus proche. » Jusqu’à l’aveu d’impuissance et la demande de pardon qui lui fait suite, l’échec de Camus résonne comme une prière, une confession à laquelle il emprunte son lexique religieux « Ô mère, pardonne ton fils d’avoir fui la nuit de ta vérité. »

Le mélange de propos issus des Carnets rédigés par l’auteur d’une part et d’extraits de son œuvre romanesque d’autre part est intéressant dans la mesure où il confronte deux types d’écrits, l’un personnel et l’autre romanesque, et en illustre les infinis prolongements. On ne réussit plus vraiment à distinguer la parole propre à la fiction de celle bien réelle de l’auteur, à savoir si toutefois une telle délimitation est opérable chez un écrivain, et le lecteur est amené à reconnaître en Camus une âme de personnage. La réflexion de l’auteur sur un sujet tel que l’amour ne révèle rien de plus sur sa personnalité mais trace le portrait d’un être complexe et versatile, recherchant sa vérité sans jamais la trouver.

Que des personnages reflètent ou non des aspirations propres à leur auteur, la question est pour le moins insoluble et elle n’a d’ailleurs que bien peu d’importance en ces termes. Au demeurant, l’un des principaux attraits de la littérature réside dans cette tension narrative qui peut se résumer en ces termes : nous savons qui parle sans toutefois savoir ce qu’il pense. Investir le champ du personnage et se reconnaître dans cet être de fiction apparaît comme l’unique mission du lecteur :

La sensualité et elle seule, régnait dans ma vie amoureuse. Je cherchais seulement des objets de plaisir et de conquête…même pour une aventure de dix minutes, j’aurai quitté père et mère, quitte à le regretter amèrement. Que, dis-je, surtout pour une aventure de dix minutes et plus encore si j’avais la certitude qu’elle serait sans lendemains

Que le personnage de La Chute nous permette de lire le cœur de Camus et de mieux le comprendre, rien n’est moins sûr car l’auteur aime se cacher loin de nos regards inquisiteurs. Cependant que le questionnement du personnage rejoigne l’universelle question du sentiment amoureux et l’herméneutique qui s’y rattache, il en est certainement question ici :

Qui peut-être sûr d’aimer ? Mais tout le monde sait reconnaître l’émotion. Cette chanson, ce visage, cette fois profonde et souple, cette vie ingénieuse et libre, c’est tout ce que j’attends et j’espère. Et s j’y renonce, ils demeurent néanmoins comme autant de promesses de libération et comme cette image de moi-même dont je ne puis me détacher

La contradiction ne fait d’ailleurs pas peur au personnage de Camus puisque, quelques pages plus loin, on peut lire « Bien entendu le véritable amour est exceptionnel deux ou trois par siècle, à peu près. Le reste du temps, il y a la vanité et l’ennui » qui nous démontre une fois encore combien l’auteur se joue de nous au sein de la fiction en faisant dire au personnage tout et son contraire.

A nous, lecteurs, de ne jamais oublier la phrase de Camus, extraite du premier homme et citée par Maïssa Bey, « j’en ai assez de vivre selon l’image que d’autres donnent de moi. Je décide l’autonomie
» en nous montrant, nous lecteurs à la hauteur de la fiction et du jeu qu’elle implique.
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HENRI BOSCO




"Face aux vents, aux pluies et aux neiges
Je me dresse et j'arrête les tempêtes,
Car je suis l'antique Témoin des origines.
Depuis des millénaires
Je recueille et rassemble souterrainement
Les eaux fluviales,
Et ainsi je nourris des lacs et des lacs que je cache
Sous le toit des plateaux dans mes profondeurs
Les anciens hommes le savaient
Quand ils m'ont couronné de pins, de cyprès, de chênes
Et ainsi procuré l'alliance des arbres.
Par eux j'attire encore et dompte les nuages,
Et les nuages hivernent sur mes crêtes.
Mais pendant la dure saison
Je me protège paternellement,
Etant le Génie tutélaire du lieu
Les blés, les maisons et les vignes.
Pourtant je vais plus loin que la pensée des hommes,
Les loups m'ont aimé jadis et les aigles,
Mais les temps sont passés des bêtes nobles.
De leur races sauvages

C'est à peine s'il reste un ou deux sangliers
Qui errent dans mes solitudes
Et qui donc s'en soucie ?
Pourtant il est, dit-on, des hommes qui y pensent
Et qui en parlent quand ils se rencontrent.
Quelques uns même en font des songes..." H.B.


dimanche, février 22, 2009

134- Mirabeau




« Allez dire à ceux qui vous envoient que nous sommes ici par la volonté du peuple et que nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes ».

133- Jean Giono et Manosque







« Celui qui ne connaît pas Manosque et y arrive pour la première fois peut être enchanté, quoique, convenons-en la ville elle-même a beaucoup perdu de son caractère et de sa beauté, mais celui qui a tous ses souvenirs faits avec les territoires qui ont organisé cette ville entend ou goûte, dans la grondante profondeur de la nuit, dans une qualité de l’air qu’il respire, la vie magique des vastes espaces. » Jean GIONO "La Provence"

132- Lourmarin

Sur les traces de Camus et de Bosco....(à suivre)

dimanche, février 15, 2009

131- Les mots de LAABI sur la langue

JACQUES ALESSANDRA : Voilà un écrivain A. Laabi qui n’a jamais cessé d’œuvrer pour inventer sa propre langue son propre langage mais ce qui est intéressant dans les rapports à la langue d’un écrivain c’est que c’est un rapport historique, par exemple la langue française a été imposée et il est évident que le rapport que l’écrivain peut avoir avec la langue française imposée est particulier. C’est un rapport violent. Il n’est pas de même lorsque le langue est choisie. L’espagnol par exemple que Laabi a appris lorsqu’il était en cellule, est une langue qu’il aime. Je ne sais pas…il faudra lui poser la question s’il est capable de créer en espagnol.

Les enjeux de l’utilisation de la langue sur le plan littéraire ne sont pas les mêmes selon que cette langue est imposée ou choisie. Puis même dans le cas d’une langue imposée, ça a évolué aussi. Encore une fois l’exemple de Laabi est flagrant. Il a commencé comme tous les écrivains Maghrébins de sa génération par bouleverser par faire violence à la langue française mais aujourd’hui non. Aujourd’hui bien que ce soit une langue qui reste imposée si on regarde l’histoire, mais elle est apaisée. Donc je pense que c’est ça son évolution. Il est passé d’un engagement à non pas à un désengagement, parce que ce serait renier toutes ses idées, tout ce qu’il a vécu, mais a un dégagement, une libération. Il est libéré. Et étant libéré il utilise le français d’une façon beaucoup plus différente que la langue qu’il utilisait au début.


ABDELLATIF LAABI : Les combats que j’ai menés ne sont pas des combats idéologiques. C’est vrai que je me suis toujours défini comme un écrivain qui a deux casquettes : l’écrivain le poète, celui qui fait son travail littéraire, l’autre casquette étant celle de l’intellectuel citoyen et je ne peux pas séparer ces deux dimensions qui sont au centre de ma vie. Les combats que j’ai menés n’ont rien avoir avec l’idéologie, non. Je suis un veilleur de la condition humaine. Quand l’humanité est touchée quelque part, pas seulement chez moi dans mon pays d’origine, mais partout où l’humain est mutilé ou lorsque la dignité de l’homme est foulée au pied. J’estime que ce n’est pas une question de devoir, c'est-à-dire que je ne peux pas me définir, je ne peux pas concevoir ma vie sans cette vigilance-là, sans cette présence à la souffrance des autres, au combat des autres pour des valeurs sans lesquelles ma vie n’aurait aucun sens. Ces valeurs étant la dignité humaine, la vie, la liberté, l’égalité etc. Et cela n’a rien avoir avec l’idéologie.
Je n’accepte pas que les Palestiniens soient écrasés comme des cafards. Cela me révulse, cela m’empêche de dormir, cela me rend malade. D’abord et avant tout cela travaille en moi, dans mon corps, peut-être même avant ma conscience.

Je vous donne un exemple, quand Florence Aubenas a été kidnappée j’ai écrit un texte parce que je l’imaginais dans une nuit terrible, elle vivait dans une solitude terrifiante, lui écrire c’était pour moi lui dire ‘je suis là’ et cela n’a rien avoir avec l’idéologie. Je ne peux personnellement dissocier la littérature de ce fondement-là. Chaque écrivain est libre de concevoir sa pratique littéraire comme il l’entend, mais moi en tout cas je ne peux pas concevoir de sens à ce que j’écris si je ne suis pas dans cet état de veille permanente, si je ne suis pas capable à chaque fois que la condition humaine est menacée quelque part de tirer la sonnette d’alarme. C’est quelque chose qui est d’abord physique, d’existentiel.

La langue d’un écrivain n’est pas seulement la langue dans laquelle il écrit. C’est vrai que le fait d’avoir écrit dans une langue qui m’a été imposée au départ, de part l’histoire coloniale, c’est une situation différente par exemple de celle d’un écrivain français « de souche » comme on dit, qui écrit en français. Il y a une différence mais après tout, ce n’est pas si important que cela. J’ai une très longue histoire avec la langue française, c’est une langue qui m’a été imposée. Je lui ai tordue le cou à un certain moment pour la maîtriser, pour la mettre au service de mes urgences personnelles ensuite il y a eu une accalmie dans nos relations, c’est devenu très serein. J’ai habité cette langue et cette langue m’a habité à son tour. Mais en même temps je suis quelqu’un d’assez particulier quant au rapport à la langue d’écriture. Vous entendrez souvent des écrivains français ou des écrivains arabes faire des mamours ou des déclarations d’allégeance à la langue dans laquelle ils écrivent. Certains animateurs d’émissions tentent d’arracher absolument à n’importe quel écrivain non français d’origine, l’aveu que le français est une langue merveilleuse, universelle, incroyable et que s’il n’avait pas écrit en français il n’aurait jamais réussi à s’exprimer etc. Cela me révulse. Je ne fais pas allégeance à la langue française. C’est une langue avec laquelle j’ai une histoire qui me permet de faire mon travail d’écrivain, basta, c’est tout. Et je ne fais pas d’allégeance non plus à la langue arabe. Quand j’entends certains écrivains arabes dire que l’identité de l’écrivain arabe c’est la langue, alors moi qu’est-ce que je suis ? Ca ne va pas. La langue n’est pas mon passeport elle n’est pas ma carte d’identité d’autant plus que la langue arabe dans laquelle la plupart des écrivains arabes écrivent aujourd’hui c’est la langue arabe classique ou moderne ce n’est pas ma langue maternelle. Ce n’est pas la langue de mon enfance, de mon milieu traditionnel de la ville de Fès.
Il me semble personnellement que la langue d’un écrivain ce n’est pas simplement le corps, disons la structure linguistique. Personnellement je suis un lecteur féroce, je lis énormément. Je lis les littératures du monde entier avec une prédilection pour la littérature latino-américaine, la littérature japonaise. Je lis énormément et depuis très longtemps. Et il me semble qu’on écrit aussi avec sa culture et notamment sa culture littéraire. Les trois-quarts de votre culture littéraire, de la mienne, ce n’est pas des écrits, des livres qui ont été publiés à l’origine en français. Nous lisons en traduction, davantage que des ouvrages écrits directement en français. Donc, il me semble que la langue d’un écrivain, et ma langue en tout cas, elle s’est construite, enrichie et structurée aussi en fonction justement de tout ce balayage que je fais depuis des décennies dans la littérature universelle même quand c’est traduit.

Tels écrivains Latino-américain ou Tchèques écrivent avec leur langue. Et cette langue d’origine a réussi à transmettre ce qu’elle avait à transmettre même en ayant été traduite. Voilà quelle est ma situation par rapport aux langues, en tout cas je me suis libéré depuis longtemps de cette malédiction qu’on nous a accolée dès le départ quand on a commencé à écrire en français. C’était une malédiction que d’écrire dans la langue qui n’est pas votre langue maternelle qui est la langue de l’exil etc. Je suis très serein sur cette question-là. J’ai mis ces questions derrière moi. Et dans le travail que je fais depuis des années c’est plutôt l’expérience humaine qui est déterminante.


[Lire aussi à Rubrique n° 126]

130- Entretien avec Abdelkader DJEMAI

Entretien réalisé en marge du Salon des livres maghrébins.

Ahmed HANIFI: Quels sont vos derniers écrits ?
AD : Les derniers qui viennent de sortir « Un moment d’oubli » aux ed du seuil il est sorti le 5 février. Et parallèlement à la sortie de ce livre-ci il y a une reprise en poche dans la collection ‘Point’ d’un roman qui s’appelle « Mémoire d’un nègre » qui est un roman long aux ed Seuil.

AH: De quoi traitent vos derniers romans ?
« Un moment d’oubli » c’est l’histoire d’une personne, Jean Jacques Sérano qui arrive dans une ville qu’il ne connaît pas, d’où il prend le train pour aller à Bâle en Suisse mais il ne va pas à Bâle. Il va à Troie, Chaumont, Mulhouse. On ne le sait pas. Ce jour-là il pleut, il va tourner dans la ville. Il va rester dans cette ville durant deux ans et demi parce qu’il lui est arrivé dans sa propre vie quelque chose d’épouvantable et c’est un ancien flic, un ancien inspecteur de police. A la fin on comprendra pourquoi il a choisi de partir. C’est en quelque sorte un immigré de l’intérieur. C’est à dire que ça a un regard inversé, c’est moi qui regarde maintenant cette histoire franco-française. Il n’y a rien de Maghrébin dans l’histoire.

AH: Est-ce que c’est un questionnement sur le voyage ?
Surtout sur l’errance. Ce n’est pas un SDF. C’est quelqu’un qui erre et ça on s’en aperçoit quand on voyage beaucoup dans les villes comme j’ai la chance de le faire. On s’aperçoit qu’il y a des gens qui sont là avec sac à dos, chaussures solides, et qui se mettent à tourner dans les villes. On ne sait même pas pourquoi ils sont là. Je me demande s’ils le savent eux-mêmes. En tout cas ils sont silencieux.

AH: Et « Mémoires de nègre » ?
C’est l’histoire d’un vieux salopard, d’un vieil escroc qui veut s’écrire une histoire d’ancien moudjahid, tous ses ailleux c’étaient des savants des guerriers. Il veut s’offrir une autobiographie comme un arbre de noel

AH: Il va se construire artificiellement ?
Exactement. C’est comme les gens qui ont des fiches communales et qui n’ont rien fait de leur vie et qui s’inventent un passé glorieux et historique. C’est cette métaphore-là c’est cette histoire de mémoire de nègre. Le nègre c’est l’histoire de quelqu’un qui écrit l’histoire des autres en l’occurrence un jeune qui lui, décide de prêter sa plume à ce vieil escroc analphabète mais multimilliardaire qui a la ville sous sa coupe.

AH: Sur le plan de l’écriture elle-même est-ce qu’on retrouve la même écriture qui est la vôtre c’est à dire très ramassée
Oui, je fais court pour ne pas faire long (si vous permettez). J’estime que l’écriture c’est du musc et de l’os. Ce n’est pas de la graisse ce n’est pas de tirer à la ligne. Je n’ai pas envie de faire de la littérature selon les normes. Et je le dis sans prétention aucune. Je crois que chaque mot a sa force, a son poids. Et ce n’est pas pour faire beau ou joli ou pour faire gros. Ce n’est pas ça. C’est essayer de faire juste.

AH: Il y a Maïssa Bey qui écrit aussi avec minutie ( ?), avec concision
Oui il s’agit de faire précis. Il ne s’agit pas de faire de la littérature, de faire tant de pages

AH: Mais…
Je peux faire lourd, la question n’est pas là. C’est comme l’histoire de l’artichaut. Vous voulez avoir une salade d’artichauts. Celui-ci est joufflu, bien plein, le marchand ajoute de l’eau alors vous en prenez deux ou trois pour faire une salade, vous passez votre temps à éplucher et vous tombez sur un cœur malade, et vous ne pouvez pas faire votre salade. Donc ce n’est pas la peine. Je préfère faire court. Pas par paresse pas du tout.

AH: C’est un choix d’écriture ?
C’est un choix volontaire, assumé. Je me refuse de faire de la littérature

AH: Votre écriture est très enthousiasmante.

vendredi, février 13, 2009

129- Un mémoire sur "Tuez-les tous" par B. MEZIOUD

UNIVERSITE MENTOURI DE CONSTANTINE
MEMOIRE DE MAGISTER
Intitulé :
ANALYSE INTERTEXTUELLE ET INTERCULTURELLE DE
TUEZ-LES TOUS DE SALIM BACHI
Réalisé par : Melle. Besma MEZIOUD
Dirigé par : Dr. Nedjma BENACHOUR


INTRODUCTION :
Ce mémoire porte sur une analyse intertextuelle et interculturelle de Tuez les tous du jeune romancier Salim Bachi qui fait partie de la génération des écrivains algériens qui ont publié à partir des années 2000. La production littéraire de Salim Bachi s’engage dans une actualité marquée par des événements de violence et de terreur. Dans le rapport de l’écriture au terrorisme, nous citons quelques romanciers dont les textes parus entre 2000-2006 ont pour thème majeur la violence inspirée par l’actualité immédiate, tels que Les funérailles, de Rachid Boudjedra , Dis-moi le Paradis et L’enfant fou de l’arbre creux de Boualem Sansal et L’attentat de Yasmina Khadra.

Nous éprouvons le besoin de situer le roman de notre corpus dans le cadre de la littérature algérienne dite « du terrorisme », puisqu’il a pour sujet l'attentat du 11 septembre 2001. Désormais, ce fait historique tant médiatisé, exploité, démystifié ne cesse d’inspirer, de part le monde, des auteurs, avec des titres tels que :La Guerre contre la vérité : 11 Septembre, désinformation et anatomie du terrorisme de Nafeez Mosaddeq Ahmed, Windows on the World de Frédéric Beigbeder, La face cachée du 11 Septembre de Eric Laurent ouLes Moines Dans la Tour de Carrier Roch, sans pour autant, négliger les cinéastes qui ont contribué pleinement à cet événement aussi bien pour le fictif que pour le documentaire, nous mentionnons des titres de films les plus marquants comme : 11'9"01 SEPTEMBER 11 produit par Alain Brigand, Le Monde Selon Bush réalisé par William Karel ou Loose Change (1ère et 2ème éditions) par Dylan Avery.

La suite est ici:

[http://www.limag.refer.org/Theses/MezioudBachi.pdf]

128- Deux nouvelles de Sansal: Ma mère - Mohand

J'en dirai un mot bientôt

lundi, février 09, 2009

127- Dernier jour lundi 9 février Le boeuf de SNOUCI

Jour gris. Jour de départ. Je mets à jour mon blog. Je traîne...
Départ pour le Sud, le beau sud. TGV à gare de Lyon. Peu de monde. Monde peu pressé. Trois heures ont passé. Tiens il fait meilleur.

Samedi Snouci B. a fait un beau boeuf à Barbès avec Mostafa (?) le guitariste . Il y avait une dizaine de personnes dont Mahmoud et moi.

dimanche, février 08, 2009

126- Au 15° salon des livres Maghrébins (suite) Dimanche

Dimanche 8 février.

Je retourne à place d’Italie. Il est 11h, je déambule à travers le marché du boulevard Auguste Blanqui. Puis continue le long du bd des Gobelins jusqu’à la rue Mouffetard où je déjeune. Vers 12h30 je reviens vers le Salon du livre en passant par une belle et petite place dont le nom un moment m’a expédié à Oran : « place Emir Abdelkader, héros national Algérien »

En salle1 se déroule « écritures de femmes ». 60 personnes. IL y a Leïla Sebbar, Maïssa Bey, et Christine Durasi Serfaty.

A un moment on évoque la question de l’identité féminine à travers l’écriture. Sebbar et Bey récusent. Il n’y a pas d’identité féminine, une écriture particulière, une sensibilité féminine… On donne l’exemple de Yasmina Khadra dont l’écriture (thèses de doctorat) a été désignée comme typiquement féminine. Au passage Leïla Sebbar juge l’écriture de Khadra « vraiment nulle ! ».

Voici précisément la question de la salle à ce propos:

Q: Comment en tant que femmes avec votre propre sensibilité de femme pouvez-vous faire parler un homme dans vos romans ?

L. Sebbar : C’est une question que je ne me pose pas. J’ai l’impression d’avoir comme ça, peut-être par mon métissage, d’avoir accès aux deux sexes et d’avoir accès à tous les étrangers parce qu’il y a de l’étranger en moi. J’ai ce sentiment, cette prétention."

M. Bey : Très souvent lorsqu’on lit des textes écrits par des hommes on ne se pose pas ce type de question, mais on la pose souvent aux femmes. Lorsque j’ai écrit « bleu blanc vert » qui est le récit d’un couple juste après la colonisation, j’ai fait alterner deux voix, celle d’un homme et celle d’une femme. Lorsque j’écrivais je me suis glissais dans la peau du personnage masculin tout aussi facilement que je me glissais dans celle du personnage féminin. A partir du moment où j’écrivais les passages au masculin je ne me posais pas la question de la vraisemblance de ce qu’il ressentait ou disait parce qu’il y avait de ma part une empathie pleine et entière."

A la suite de la rencontre j’échange avec M. Bey qui me dit ne pas avoir dans sa programmation de déplacement sur le Sud de la France. Elle dit aussi par rapport à cet enfant qui traverse le siècle (compléter)

En salle des mariages un hommage est rendu à Charles-André Ageron par Jean-Pierre Roux et Benjamin Stora.

A 14h15 je reviens la salle 1. 8° café littéraire : « l’enfance en soi » autour de trois auteurs : Fadéla M’rabet, Akli Tadjer et Mabrouck Rachedi (Petit Malik) : l’histoire d’un marchand de glace qui ne sait pas rendre la monnaie…

15h30 : Je croise entre deux portes Driss el Yazami. Echanges de quelques mots. Il s’apprête à rejoindre le débat sur le « rôle de la monarchie dans la construction de l’état marocain »

La grande salle ou « la librairie » est noire de monde. Je rencontre notre ami Abdelkader Djemaï. Il m’accorde un entretien (détails plus tard)

9° café littéraire avec Jacques Alessandra et Abdellatif Laabi. Le premier a écrit « Traversée de l’œuvre », livre consacré au second. En écrivant ce récit dit JA « j’étais l’hôte et l’ôtage de l’œuvre de Laabi »

A.HANIFI : Je ne voudrais pas être déplaisant ni provoquer. Le contenu de ma question est celui-ci. A propos de la langue d’écriture est-ce qu’on vous a sommé ici en France de vous prononcer sur la francophonie ?


A. LAABI : "ce que j’ai dit sur mon rapport à la langue française est suffisamment éloquent. Je ne suis pas un tirailleur Sénégalais de la francophonie. C’est l’écrivain et poète Ashiya Oukassi Kya qui l’a dit. Nous ne sommes pas des tirailleurs Sénégalais de la langue française. Nous sommes des écrivains qui écrivent dans cette langue parce que il y a une histoire qui a fait que nous avons été obligés d’écrire dans cette langue. On en prend acte et puis ça suffit. Je refuse absolument d’être manipulé ou instrumentalisé dans une politique de la francophonie. C'est-à-dire que je n’ai rien contre par exemple qu’il y ait des instruments des institutions ici en France qui défendent la langue française, sa présence à travers le monde, c’est très bien. C’est très bien qu’une langue comme la langue française puisse exister au même titre que l’anglais ou l’espagnol, mais je ne vais pas être l’arbitre si vous voulez de cette concurrence à l’échelle universelle. Cela ne me regarde pas. Ce qui me regarde c’est qu’il y a plusieurs langues qui aient ce statut de niveau de rayonnement y compris la langue arabe ou la langue espagnole qui pour moi compte beaucoup. Même si je n’écris pas en espagnol, mais enfin c’est une langue que j’ai apprise par désir et par envie et qui ne m’a pas été imposée."

Salle des mariage, dernière rencontre. « Les français Maghrébins dans la vie politique » avec Fawzi Lamdaoui, Catherine Wihtol de Wenden, El Yamine Soum, Kaïs Marzouki, Myriam Salah-Eddine.

(Détails à Rubrique N° 131)

17 heures : je quitte le Salon du livre Maghrébin. M m’attend à la sortie. Nous marchons jusqu’au bd de Strasbourg où nous prenons le métro.

125- Au salon de livres Maghrébins (suite) Samedi 07


Samedi 07 février

Je vais à la mairie du 13° où se tient le 15° Salon des livres Maghrébins. Il y a peu de monde. Je m’installe en salle 1. Khadra (écrivain et directeur du centre culturel algérien de Paris) arrive, les flashes crépitent devant 80 personnes. « 40 lycéens de Paris et de Pas de Calais ont travaillé sur la guerre d’Algérie à travers la BD de Jacques Fernandez (carnets d’Orient) et sur la situation au Proche Orient à travers les livres de Y. Khadra (l’Attentat, Les sirènes de Bagdad). Il y a aussi Jean Lacouture. Les questions sont diverses Fernandez dit « On se demande comment le lecteur va percevoir nos écrits qui sont comme une bouteille lancée à la mer ». Khadra commence par poser une question aux élèves puis oublie sa question et s’en va dans des développements tos azimuts de ses idées.

13h. Sous une pluie fine mais continue, je par à la recherche d’une Sandwicherie (à l’intérieur de la mairie où se tient le Salon il est improbable de manger sereinement. La foule devant la restauration (chère) est impressionnante).

14h30, salle des mariages, archicomble (150 personnes) : hommage à Mohamed Charfi, le Jules Ferry du monde arabe dit B.Delanoe (une semi-bourde quand on sait ce que furent les positions de Ferry vis à vis des colonies)

En salle 1 on traite des « banlieues multiples » avec Jérôme Bouvier un ex de France-Cu et Rachid Santaki, un jeune qui a écrit sur Clichy sous bois « la petite cité dans la prairie »

(visiter le site : www.clichysanscliche.com ) On en vient à évoquer la nouvelle de Sansal, une nouvelle écrite sur commande : « Mohand ou la mort au coin de la rue » (écrite en juin dernier).

Vers 16 heures je me fais tirer le portrait par www.etpourtoicestquoilafrance.com

Au paravent il faut répondre par écrit à la question. J’ai noté trois phrases, spontanément :

« C’est un territoire, un imaginaire qui rencontre un territoire hors fiction. C’est un lieu où se malaxent l’imaginaire et le réel. C’est un monde qui nécessairement froisse. »

Vers 17 heures est attribué le prix Beur FM. Le lauréat est Matthieu Belizi avec « C’était notre terre ». C’est une fresque qui montre l’Algérie qui est au bord de la guerre. C’est l’histoire d’une famille scindée en deux : communistes et colons la constituent. Le thème est important dit-on, mais ce qui l’est plus c’est la description qui en est faite. Dans la salle je croise un ancien du FFSI, Yanat Mahfoud qui prend des photos. Après l’attribution du prix, en aparté, je propose à Roger Morin de réfléchir à la faisabilité de décentraliser « Le Maghreb des livres » dans le sud de la France. « C’est une bonne idée… »

Je quitte le Salon vers 17H30 pour me diriger vers Barbès où j’ai rendez-vous avec M., S. et T. S. m’apprend que T. est en Suisse (je l’ai perdu de vue depuis environ 25 ans). S. nous emmène chez un réparateur en tout genre : Téléviseurs, magnétoscopes, caméras, radios… C’est un bazar extraordinaire où les appareils s’entassent comme les produits d’un marchand quelconque d’un Souk de Fès ou d’Istanbul. Et la j’ai eu un choc, celui de rencontrer un ressuscité. ALLA en chaire et en os. J’étais persuadé qu’il était décédé d’une maladie il y a de cela quelques années. Je suis vraiment heureux de discuter avec lui. Il est bien vivant, il a répondu à mes interrogations : Libération, Nidam, Bidon II, Farid el Atrache… Il a même parlé d’une connaissance commune de Taghit, aujourd’hui installée à Gambetta, Oran : Miloud S. Photo bien sûr. Ecoutez ses morceaux, il est absolument unique.

Nous quittons Alla pour aller à quelques centaines de mètres plus loin, dans un bistro formidable situé dans la rue Affre non loin de la rue de la Goutte d’Or. Senouci a participé à un bœuf avec l’interprétation de « El Hmam » de El Anka. M. et moi rentrons à Bobigny. Discussion comme à l’habitude. M. tient à mettre certains points sur des I de l’année dernière (concernant un commentaire que j’ai porté sur ce blog et qui l’a fâché vert). Je comprends très bien.

vendredi, février 06, 2009

124- Sud - Paris: 15° Maghreb du livre

J'ai pris le train hier matin jeudi. Arrivé à Gare de Lyon à 11h30. Aussitôt je dépose la valise aux consignes et me dirige vers la bibliothèque F. Mitterand. J'y travaille jusqu'à 17 heures: Corriger Amer J. L'année dernière à la même époque j'avais déposé une version auprès de différents éditeurs, sans succès. J'ai entièrement repris sa composition. En fin de journée je répurère la valise et vais chez M. à Saint-Denis.

Ce matin je reprends le travail de relecture. Je ne pense pas finir à temps. Tant pis j'enverrai le travail fini à partir de Marseille. Je ferme l’Amer J et décide de m’aérer franchement. J’ai rendez-vous avec mon ami M. à 15 heures. Là j’ai le temps d’aller faire un tour au Soug de St Denis en passant devant le 129 bis de l’avenue Gabriel Péri (1902-1941 Résistant fusillé). Le 1° étage a abrité pendant plusieurs années (1995 et plus pour ce qui me concerne) les joutes du FFSI (dont j’ai été un moment membre du bureau). Je pense à Mouhoub, Abbas, Farid, Tarek et des centaines d’autres. Que sont-ils devenus ?

14 h, je prends le tram pour Bobigny où je retrouve mon ami M. Direction Paris Gare du Nord. De là nous entamons une marche qui nous mène à rue Rochechouart, Gare St Lazare, St Michel… Le soir est tombé. Et Paris est toujours aussi splendide (lorsqu'on y passe quelques jours. Y vivre est une autre histoire!) Retour à Bobigny.


lundi, février 02, 2009

123- Agresion d'Israel - Médias partisans

Médias «neutres»

par M. Saâdoune, Le Quotidien d'Oran, 1er février 2009

Des centaines de manifestants se sont rassemblés, hier, à l'appel du Mouvement des Indigènes de la République devant le siège de France Télévisions à Paris. «Israël assassin, médias complices». Le mot d'ordre était répété par les manifestants qui protestaient contre la couverture biaisée et partiale du carnage de Ghaza par la soldatesque israélienne. Beaucoup disaient leur colère devant le refus des médias de nommer les choses par leur nom et de montrer la réalité du carnage subi par les habitants de Ghaza. «On a beaucoup vu les angoisses des gens de Sderot, on n'a pas vu les hurlements de douleur des bébés «traités» au phosphore», notait un manifestant. Beaucoup, pour être informés correctement, se sont branchés sur la chaîne Al Jazira en anglais dont l'audience a été multipliée durant le martyre de Ghaza.

A l'évidence, la gestion de l'information, quand il s'agit d'Israël, n'obéit pas aux standards jugés universels. Le problème est que cela est devenu trop visible. L'émergence de nouveaux médias comme Al Jazira et surtout l'internet dévoile cette gestion très orientée de l'information. Cela n'a pas empêché pourtant les opinions publiques en Occident, malgré le travail assidu des «faiseurs d'opinions», de constater les grandes oeuvres sanglantes de la «seule démocratie» au Moyen-Orient. Un journaliste, de retour des Etats-Unis, raconte qu'il a surpris ses interlocuteurs en leur expliquant que Ghaza n'était pas un Etat, mais une sorte de réserve indienne encerclée de tous les côtés par l'armée des Etats-Unis. La mise en exergue des «roquettes du Hamas» sert à donner du crédit à ce mensonge factuel et à occulter le fait que l'on s'attaque à des populations civiles désarmées sous blocus.

Des avocats dans plusieurs pays occidentaux s'attellent d'ailleurs à constituer les éléments factuels pour engager des poursuites contre les militaires israéliens pour crime de guerre. A l'évidence, ce n'est pas sur les chaînes de télévision occidentales qu'ils se sont informés. Pour nous journalistes des médias du «tiers-monde» qui recevons régulièrement des étiquettes faciles d'absence de professionnalisme, voire d'être des journalistes du pouvoir, la gestion des médias occidentaux du carnage de Ghaza relève très clairement d'un parti pris. A la limite, il aurait été compréhensible s'il était clairement assumé. Ce n'est pas le cas, la propagande avance masquée. On peut trouver des journalistes qui trouvent normal et compréhensible qu'une occupation provoque une résistance, y compris armée, sauf pour les Palestiniens. Israël doit rester intouchable et comme beaucoup l'ont noté, les journalistes israéliens sont plus libres de parler d'Israël que leurs homologues occidentaux.

Le comble a été atteint par la BBC qui a refusé de passer un appel lancé par des organisations caritatives pour aider Ghaza. Venir en aide à un enfant mutilé de Ghaza, c'est faire de la politique et manquer au devoir de «neutralité». C'est tellement absurde que cela a provoqué une levée de boucliers et une manifestation devant la BBC. Le caractère militant du traitement de l'information par les grands médias occidentaux commence à susciter des oppositions de plus en plus vives dans une opinion de moins en moins encline, toutes les enquêtes le démontrent, à accorder sa confiance aux grands médias. La réunion d'hier a rassemblé bien plus de monde que ce qu'espéraient ses initiateurs.


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http://www.acrimed.org/article3051.html

Gaza - Médias en guerre (1) : Sous couvert de neutralité
Publié le 6 janvier 2009 par Yves Rebours

Qu’ils le veuillent ou non, les médias sont toujours, volontairement ou pas, des acteurs des guerres qu’ils prétendent observer. Et force est de constater que la plupart des quotidiens nationaux (si l’on excepte L’Humanité) soutiennent explicitement la guerre israélienne que les médias de consensus (comme le sont les radios et les télévisions qui tentent de fédérer les publics les plus larges) soutiennent tacitement. Ce soutien peut être délibéré (même si cela ne va pas sans quelques contorsions) dans les éditoriaux de la presse écrite ; il est parfois plus ou moins involontaire quand l’information, sous couvert de neutralité, présente comme équivalents les adversaires en présence et, du même coup, privilégie le plus puissant d’entre eux.

Premier relevé du champ de bataille de l’information que des analyses plus précises viendront peu à peu étayer, préciser et, le cas échéant, modifier.
La plupart des médias ont commencé par présenter les bombardements israéliens contre Gaza comme des « représailles » contre la reprise des tirs de roquettes ou une riposte de « légitime défense » contre ces mêmes tirs. De l’aveu même des responsables israéliens (qui ont même fini par en convaincre quelques médias français), l’armée israélienne avait mis à profit la trêve pour préparer, non pas préventivement, mais offensivement les opérations militaires (tandis que le Hamas de son côté se préparait lui aussi à la rupture officielle de la trêve).
Variante : la plupart des médias ont présenté les bombardements comme une réponse à la rupture de la trêve par le Hamas. Or, de l’aveu même de quelques-uns de ces médias, la trêve n’a jamais vraiment eu lieu : non seulement les premières ruptures militaires sont venues de l’armée israélienne, mais le gouvernement israélien n’a jamais respecté les conditions de cette trêve, à commencer par la fin du blocus imposé à la population de Gaza.
Il n’empêche : épousant les premières déclarations du gouvernement israélien, la plupart des médias ont présenté les objectifs de l’offensive militaire israélienne comme une tentative de mettre un terme aux tirs de roquettes et, pour cela, de détruire l’infrastructure militaire du Hamas. Or, de l’aveu même de responsables du gouvernement israélien, c’est l’existence même du Hamas et de l’autorité qu’il exerce à Gaza qui est visée. Mais il fallut plusieurs jours de bombardements pour que quelques médias français finissent par s’en rendre compte.
Il n’empêche : épousant encore les déclarations du gouvernement israélien, la plupart des médias ont présenté les cibles les bombardements comme des cibles militaires, mais ils ont soigneusement gardé pour eux le fait que pour l’armée israélienne tous les membres et sympathisants du Hamas sont des militaires (qu’il s’agisse de ceux qui agissent comme tels, de la police ou plus simplement de sympathisants sans armes) et, que pour ces mêmes militaires, toutes les infrastructures administratives et civiles de Gaza sont des repères d’islamistes.
Il n’empêche : la plupart des médias, dès le début, ont affecté de croire que les bombardements israéliens n’ont fait qu’accidentellement des victimes civiles… Ainsi s’établirait – c’est un distinguo qu’affectionne le gouvernement israélien – la différence entre le terrorisme du Hamas et la guerre d’Israël. Or même si les victimes civiles ne sont pas intentionnellement visées, c’est intentionnellement que sont menées des opérations militaires qui les rendent inévitables. Un massacre n’est pas une « bavure » : la plupart des médias français peinent manifestement à l’admettre, même quand ils finissent par s’inquiéter des risques d’une « catastrophe humanitaire ».
De même, le blocus imposé à Gaza par le gouvernement et l’armée israéliens relève des actes (et même des actes de guerre) qui visent délibérément la population civile que l’on tente ainsi de désolidariser du Hamas. Le blocus, pendant 18 mois, a sans doute fait plus de victimes civiles (y compris de morts prématurées) que les tirs de roquettes. Dire cela, ce n’est en rien justifier la fin poursuivie et les moyens employés par le Hamas : c’est énoncer un simple fait.
Il n’empêche : Le Monde qui ajuste régulièrement le droit international à ses convictions, a pu, dans un éditorial, réserver aux effets des tirs du Hamas l’accusation de « crimes de guerre »… et réserver quelques larmes aux victimes palestiniennes. Et la plupart des médias français d’expliquer ou de laisser entendre qu’il fallait distinguer entre les victimes fâcheuses du blocus et des opérations de l’armée israélienne et les victimes innocentes des actions du Hamas. Quant à s’alarmer de la formidable différence du nombre des victimes, ce serait sans doute nuire à la clarté des distinctions juridiques ou morales !
Ainsi, avant même que ne commencent « les opérations terrestres » (comme on dit pour éviter d’avoir à parler d’une invasion) des informations étaient taillées à la mesure des commentaires. Or ceux-ci, dans la plupart des quotidiens nationaux ont déploré, pour reprendre le langage des plaidoiries diplomatiques, un « usage disproportionné de la force », en condamnant non seulement la politique du Hamas, mais aussi, comme ils l’ont toujours fait par le passé, toute résistance des Palestiniens, et en adressant au gouvernement israélien les admonestations morales et les conseils politiques dont il ne tient aucun compte depuis soixante ans.
Pourtant, Laurent Joffrin, dès le 29 décembre, était déjà inquiet d’une éventuelle dégradation de la « supériorité morale » d’Israël (sic) [1].
C’était avant l’invasion de Gaza…
A suivre, hélas.
Yves Rebours
PS. Une fois n’est pas coutume : cet article sera peut être complété ou modifié ultérieurement. Titre complété le 11-01-2009.

Gaza – Médias en guerre (2) : De sources bien informées ?
Publié le 12 janvier 2009 par Henri Maler, Olivier Poche
Dans un précédent article – « Médias en guerre (1) : Sous couvert de neutralité » - nous avons effectué un premier relevé du champ de bataille de l’information, avant que les bombardements de l’armée israélienne sur Gaza ne soient soutenus par une invasion terrestre. Depuis, à grands renforts de reportages déséquilibrés et d’informations mal regardantes sur les sources, la plupart des médias ont confirmé qu’ils sont toujours, volontairement ou pas, des acteurs des guerres qu’ils prétendent observer...
...Et dans le cas présent, trop souvent, des auxiliaires du plus puissant d’entre eux quand, dans (l’innocente ?) intention de respecter un impartial – et toujours virtuel – équilibre, ils maltraitent, effacent, voire renversent des déséquilibres bien réels. Peut-être que, comme le déclare un gradé israélien, « pour mener une bonne guerre, il faut garder les journalistes à l’écart [1]. » Il paraît encore plus sûr de les garder dans son propre camp.
Où sont les caméras ?
Les principales chaînes de télévision françaises ne disposent d’aucun correspondant permanent à Gaza, à l’exception de Talal Abou Rahmeh, journaliste reporter d’images (JRI) palestinien qui travaille avec Charles Enderlin pour France 2, et de Radjaa Abou Dagga, correspondant de France 24 (qui intervient occasionnellement sur France 3). Jusqu’a ce jour, la quasi-totalité des envoyés spéciaux des chaînes françaises ne peut pas accéder à Gaza. Dans ces conditions, quels reportages et quelles enquêtes les télévisions peuvent-elles effectuer, si l’on excepte les reportages, balisés par l’armée israélienne, effectués dans les villages israéliens placées sous les tirs des roquettes du Hamas ?
L’effet de cette exception est garanti. La prétendue recherche d’une information équilibrée se traduit par une présentation totalement asymétrique des risques encourus par les populations civiles : une présentation qui ne tient aucun compte (même si l’on tient à jour une macabre comptabilité) de la disproportion écrasante de l’ampleur des destructions et du nombre des blessés et des morts. Mais surtout ces enquêtes, presque totalement unilatérales en l’absence quasi-complète de témoignages directs des Palestiniens de Gaza, accréditent, qu’on le veuille ou non, la légitimité de la guerre israélienne.
Un exemple, qui commence à se donner pour ce qu’il est, notamment sous l’effet de la « frustration » des journalistes coincés aux portes de Gaza : Sderot.
Le 8 janvier, un article du Monde – « La presse, tenue à distance, rumine sa frustration » – décrit les conditions de travail des journalistes retenus à la frontière avec Gaza, et notamment à Sderot : « Vidées de ses habitants qui se claquemurent dans leur maison, les rues de la ville ont été transformées en un "journalistland" géant. Les vieux routiers des conflits y traînent leur désœuvrement au milieu d’une nuée de porte-parole de l’armée et du gouvernement israélien à l’affabilité insistante. » Mais que nous importe, au fond, la « frustration » des journalistes, quand on mesure les conséquences de ce prétendu « désœuvrement » ?
Entre le 27 décembre et le 4 janvier, les téléspectateurs de TF1 ont profité de la visite guidée de Sderot, à cinq reprises, (trois fois dans le 20 heures, deux fois dans le 13 heures), avant de s’apercevoir, si toutefois ils lisent Le Monde, que cette fréquence ne relève pas tout à fait du pur hasard.
Premier reportage, le 28 décembre : notre vaillant reporter suit un charmant grand-père le guidant dans une visite qui semble assez rodée : la toute première maison touchée par les roquettes, des familles « terrorisées », puis le musée des roquettes – comme dans le « Gaza Border Tour » évoqué dans l’article du Monde [2]. Comme l’annonçait le journaliste en ouvrant le sujet, l’attaque israélienne est pour les habitants qu’il rencontre « un soulagement pour les 15000 habitants de Sderot » : « Après huit ans d’attaques, je suis soulagé. Merci Ehud Barak, notre ministre de la défense, il a enfin fait ce qu’il fallait faire. On attendait cela depuis longtemps. ». Une prise de position que ne viendra pas tempérer la prise de position des pacifistes qui, eux, ne sont malheureusement pas au programme du « Gaza Border Tour » (mais dont un article de Benjamin Barthe, paru dans Le Monde du 7 janvier décrit fort bien le désarroi, sous le titre : « Au kibboutz Saad, près de Sderot, la colère et le désespoir de l’association "Une autre voix" »).
Second reportage, le 31 décembre, le seul du jour consacré à la situation au Proche-Orient, intitulé « vivre sous les tirs à Sderot ». Un reportage en toute liberté, sans doute grâce au « jeune [et sympathique] soldat qui nous accompagne… », et avec qui on vit une alerte en direct. Dialogue :
- « Ça peut être combien de fois par jour ? »
- « Ça peut être très … 60 fois, 10 fois, 14 fois… C’est épuisant. »
Puis c’est un couple avec « Shirel, leur fille de cinq mois », qui vit dans la peur. « La petite doit subir des examens médicaux, mais les tirs de Qassam les dissuade de toute sortie : “ Je ne veux pas que ma fille grandissent dans des conditions pareilles, qu’elle subisse la peur et l’anxiété” ». En attendant de pouvoir ressortir, ils ne consomment plus que du surgelé » (preuve par l’image). On termine avec un entrepreneur qui veut aller « plus loin » dans l’offensive pour « les mettre à genoux ».
Est-ce parce qu’il n’existe aucun autre sujet de reportage disponible en provenance de Gaza ? Est-ce parce qu’on ne se lasse pas de reproduire quasiment les mêmes ? Toujours est-il qu’un troisième reportage, le 4 janvier, sera consacré à un thème original : « Vivre à Sderot, sous les tirs de roquettes ». Alertes, maison détruite… Et on termine sur un habitant qui s’interroge : « Tout le monde dit dans le monde que ce que fait Israël à Gaza ce n’est pas bien, que l’armée israélienne n’a pas le droit. Pourquoi ne viennent-ils pas là, pour connaître ce que l’on ressent ? ».
Pourtant, pendant plusieurs jours, seuls ou presque les Israéliens menacés par les roquettes du Hamas ont pu témoigner directement des souffrances qu’ils endurent (et qu’il n’est pas question de nier), alors que celles des Palestiniens restent presque totalement privés de mots recueillis par des journalistes. Il est possible que, contrairement au vœu exprimé par l’ habitant de Sderot, TF1, comme les autres, ne « vienne » pas là pour comprendre pourquoi l’armée israélienne « a le droit » de faire la guerre à Gaza. Mais comment ne pas voir que, dans la « configuration » médiatique du conflit, la répétition de ces reportages sert au mieux les objectifs et la politique d’Israël, qui d’ailleurs les encourage et les facilite par tous les moyens.
Dire cela, ce n’est en rien justifier la fin poursuivie et les moyens employés par le Hamas : c’est énoncer un simple fait. Un fait reconnu par certains journalistes comme ce journaliste de RTL qui selon l’article du Monde déjà cité, déclare : « Nous sommes des journalistes captifs. Pendant que les gamins du camp de Jabaliya [site d’un bombardement israélien qui a fait quarante morts, mardi 6 janvier] se font massacrer, les médias parlent de ceux de Sderot qui collectionnent les morceaux de Qassam. C’est tout bonus pour Israël. ».
D’où cette simple question : pourquoi accepter de tourner ces reportages tant que l’armée israélienne refuse de laisser les journalistes enquêter à Gaza ?
Selon les comptages effectués par le site d’Arrêt sur images (lien payant), les 20h de TF1, France 2 et France 3, entre le 27 décembre et le 5 janvier, ont ainsi proposé 6 reportages intégralement consacrés aux civils israéliens, contre 2 aux civils palestiniens. Cette disproportion est encore plus prononcée, si l’on prend en considération les JT de 13h. Selon notre propre relevé, sur TF1, le rapport est de 5 contre 1, et même de 6 contre 1 en tenant compte d’un reportage de deux minutes consacré à la famille de Gilad Shalit [3] diffusé au 20h du 2 janvier, par ailleurs seul reportage du jour consacré au "conflit" en cours. Sur l’ensemble de la période considérée, un seul reportage consacré aux civils palestiniens, diffusé uniquement au 20h, met en scène, sans le moindre propos politique, une famille relativement aisée de Gaza (comme nous l’apprend un reportage… de France 2 où le même couple franco-palestinien est interrogé [4]) et peu représentative par conséquent de la situation vécue par la majorité des Gazaouis. Et si l’on ajoute France 2, on atteint en tout 10 reportages contre 2 – là encore, le 13h ayant jugé bon d’évoquer Sderot, mais pas Gaza.
Peut-être faut-il faire crédit, sous réserve d’examen de leur contenu, aux auteurs des reportages « du côté israélien » de ne pas contribuer délibérément à la propagande de guerre de l’Etat-major israélien : le déséquilibre global de l’information n’est pas de leur fait ou de leur seul fait. Peut-être faut-il, également, faire crédit aux responsables de l’information de TF1 ou de France 2 de l’absence de volonté de privilégier le point de vue des officiels et des témoins israéliens : il n’en resterait pas moins qu’informer à partir des données disponibles – des reportages du côté israélien et, pour l’essentiel, des images de source fréquemment indéterminée du côté de Palestiniens de Gaza – sans s’interroger sur leur source et leur sens se traduit par une distorsion telle de l’information qu’elle constitue une forme de désinformation.
Tout se passe comme si l’inconscient journalistique des responsables de rédaction et de certains journalistes leur dictait de produire l’information en fonction de l’emplacement des équipes de reportages. Et l’on peut même supposer que cet inconscient n’est pas mis au service d’une volonté délibérée ; les procès d’intention ne sont pas indispensables quand la critique en irresponsabilité suffit : les effets sont pratiquement les mêmes.
Encore ne s’agissait-il que d’un aspect de l’information télévisée avant l’invasion terrestre de Gaza par l’armée israélienne…
D’où proviennent les informations ?
Faute de moyens pour recueillir directement à Gaza les informations sur Gaza, la plupart des médias en sont réduits à accueillir, sans pouvoir les recouper et les vérifier, des informations des sources les plus diverses, généralement mentionnées et, souvent, avec les précautions d’usage. Mais des précautions manifestement très insuffisantes quand on constate :
- Que les déclarations et informations de source israéliennes sont infiniment plus nombreuses que les informations et déclarations émanant des forces palestiniennes, comme si les secondes étaient par définition plus frelatées que les premières.
- Que les informations en provenance d’Al Jazeera, seul média présent à Gaza ne sont pratiquement jamais reprises, même avec précaution, comme si elles étaient par définition dénuées de fondement [5].
- Que les informations en provenance des agences de l’ONU et des associations humanitaires sont traitées avec autant de précautions que celles qui émanent du gouvernement et de l’armée israélienne, comme si elles étaient également sujettes à caution.
- Que, par conséquent et par contraste, même livrées avec prudence, les informations de source israélienne bénéficient de facto d’un surcroît d’exposition et de légitimité, même si le crédit relatif qui leur est accordé n’est pas intentionnel et peut partiellement s’expliquer par la plus grande proximité des journalistes occidentaux avec les sources officielles israéliennes : proximité culturelle, linguistique, géographique (pour les correspondants permanents qui résident en général en Israël pour couvrir le conflit… israélo-palestinien),…voire personnelle ? [6]
Faute d’une présence massive de journalistes à Gaza (et, ajoutons-le, de journalistes suffisamment indépendants et idéologiquement divers), les seules informations qui soient peu soupçonnables d’être conditionnées par la propagande de guerre émanent des organismes de l’ONU et des associations présentes sur place. Et pourtant, si les déclarations des autorités israéliennes sont régulièrement reprises et données à l’antenne, c’est loin d’être le cas des sources « humanitaires ».
Ainsi, le bombardement, le 6 janvier, des trois écoles de l’ONU où s’étaient réfugiés des civils palestiniens a été largement médiatisé [7]. Or, en raison du nombre de morts et de blessés qu’elle a provoqué, l’attaque contre l’école de Jabaliya a bénéficié d’une « couverture » qui a éclipsé d’autres informations non moins significatives.
- D’abord l’information sur les bombardements de deux autres écoles à Gaza et Khan Younès (sud) a été minimisée. Ce sont ces bombardement, semble-t-il, que mentionne fugitivement, une reportage de Michel Scott au 13h de TF1 : « […] une chose est sûre, deux écoles, gérées par l’ONU, l’une ici dans le sud du territoire palestinien, l’autre à Gaza ville, dans le nord, ont été touchées ce matin. Cinq palestiniens au moins y ont été tués sans que l’on sache s’il s’agit de civils ou de combattants. » Informations classées sans suite… Le 20 heures de France 2 évoque ces bombardements en une seule phrase – et quelle phrase : « L’armée israélienne n’a pas confirmé deux autres bombardements sur des établissements de l’ONU au cours des douze dernières heures ». Ou comment soumettre une information (de l’ONU) à la confirmation (de l’armée israélienne) - et comme si cette confirmation était indispensable à l’établissement de la vérité.
- La destruction, la veille, de trois cliniques mobiles de la Croix rouge [8], sauf erreur ou omission de notre part, n’a pas ou peu été diffusée par les médias… alors qu’il semble pour le moins difficile de la justifier par la présence de militants du Hamas [9].
Mais surtout la présentation du massacre de Jabaliya et de la controverse qu’il a suscitée en dit long sur le privilège relatif accordé aux sources israéliennes
La réaction du gouvernement et de l’armée israélienne n’a en effet pas tardé, affirmant que les Israéliens avait essuyé des tirs en provenance de cette école, que la destruction avait été provoquée par une explosion interne qui pourrait être celle d’un dépôt d’armes et, plus généralement, que les combattants du Hamas se servaient des civils comme boucliers et avaient l’habitude de s’abriter dans des édifices, notamment onusiens, occupés par des civils.
Le lendemain, l’agence de l’ONU pour l’aide aux réfugiés palestiniens (Unrwa) a contredit cette version, en affirmant notamment, par la bouche de son porte-parole, être sûre « à 99,9% qu’il n’y avait ni activistes ni d’activités militaires dans l’école » [10]. Or nombre de médias qui la veille avaient fait état de la version israélienne, n’ont pas tous, loin de là, fait état de ce démenti.
Ainsi, les téléspectateurs de TF1 n’en auront aucun écho. On leur resservira au contraire le réchauffé de la veille, un réchauffé qui commence à avoir un très mauvais goût. Le journaliste évoque en effet la « lueur d’espoir » que constitue l’arrêt pendant trois heures des bombardements : « Geste de bonne volonté après la journée d’hier particulièrement meurtrière : la frappe contre une école aux couleurs des Nations-Unies a soulevé une vague de protestation internationale, malgré l’explication israélienne selon laquelle le site aurait servi de zone de tir au Hamas . » Comme si « l’explication israélienne » était au dessus de tout soupçon et aurait dû suffire à contenir une « vague de protestation », que le micro à nouveau tendu à un porte-parole de l’armée israélienne achève de rendre injustifiable : « le Hamas se protège derrière des enfants dont il se sert comme bouclier humain. C’est inacceptable. Chaque fois qu’il y a des morts ils en sont responsables ». Point final. Du moins pour TF1 au sommet de son art.
Or même en diffusant l’information sur les bombardements d’écoles et les deux versions – onusienne et israélienne - en présence, nombre de médias l’ont présentée comme si sa source onusienne était, par nature, aussi peu crédible qu’une source militaire. Le 20h de France 2, à cet égard, est exemplaire : « la polémique rebondit : les établissements gérés par les Nations-Unies abritaient-ils des membres du Hamas ? "Oui", dit Israël. "Quasi impossible", répond l’ONU ». Suit deux interventions de même longueur, celle du porte-parole de l’UNRWA, celle de la porte-parole de l’armée israélienne.
Variante, avec un soupçon de malhonnêteté en plus : tenter de concilier les deux version. Ainsi, sur le site du figaro.fr, sous le titre « Gaza/école : l’ONU veut une enquête », on pouvait lire le 7 janvier une dépêche d’Associated Press qui après avoir mentionné la certitude à 99,99% de l’UNRWA, ajoutait : « Cette affirmation ne contredit pas nécessairement l’affirmation israélienne selon laquelle les militants du Hamas lançaient leurs attaques à proximité de cette école . » Or les autorités israéliennes n’affirmaient rien de tel. Ainsi le porte-parole du gouvernement israélien, Mark Regev avait d’abord déclaré : « Les premiers éléments dont nous disposons est qu’il y a eu des tirs hostiles contre une de nos unités depuis le bâtiment de l’ONU . Notre unité a répondu. ».
De surcroît, le très scrupuleux exercice d’équilibre dans le traitement des sources a conduit nombre de médias à omettre, consciencieusement d’autres informations, disponibles sur le site de l’ONU, comme celle-ci : « Près de 15.000 personnes sont en ce moment à l’abri dans des locaux des Nations Unies à Gaza, notamment dans 20 écoles qui servent de sanctuaire parce que la population ne peut fuir le territoire palestinien, a ajouté le Secrétaire général. John Ging a dit que l’armée israélienne avait reçu les coordonnées GPS de tous les bâtiments des Nations Unies, y compris les écoles, et qu’elles avaient été mises à jour récemment . Il a appelé à l’ouverture d’une enquête. A cet égard, le Secrétaire général s’est dit « profondément consterné qu’en dépit de ces efforts répétés ces tragédies aient eu lieu. ». En réponse à une question d’un journaliste, le Coordonnateur de l’Unrwa a précisé que les militants palestiniens n’avaient pas violé l’immunité des bâtiments des Nations Unies et qu’il serait inacceptable qu’ils le fassent. » On ne peut imaginer plus clair démenti aux allégations du porte-parole du gouvernement israélien, qui ont été rapportées ainsi : « “Il y a eu ensuite des explosions, sans commune mesure avec l’artillerie que nous avons utilisée”, a-t-il ajouté, soulignant que les “spéculations” étaient possibles sur la raison de ces explosions, en allusion à la présence d’explosifs dans l’école. Il a aussi souligné que dans le passé les groupes armés palestiniens avaient utilisé des bâtiments de l’agence de l’ONU pour les réfugiés (Unrwa) à Gaza pour mener des attaques ou stocker des armes. ».
Certes, en l’absence d’une enquête indépendante, les faits ne sont pas totalement établis. Mais à quelle version accorder le plus de crédit, même provisoire : à celle de l’ONU ou à celle d’un gouvernement en guerre ? Les placer sur le même plan, c’est déjà participer à la propagande – inévitable – de ce dernier, alors qu’aucun doute n’est permis sur l’essentiel.
Aucun média, à notre connaissance, n’a évoqué une éventuelle justification, par l’armée israélienne, de la destruction de cliniques mobiles de la Croix-Rouge (mentionnée plus haut et généralement omise) par la présence de combattants du Hamas. Et pour cause. Mais surtout l’affirmation selon laquelle les bâtiments de l’ONU pourraient abriter de tels combattants comporte, malgré elle, une information de première importance qui n’a pas été relevée. Supposons un instant que des militants du Hamas étaient réfugiés dans l’Ecole de l’ONU bombardée par cette armée que la plupart désigne affectueusement sous le nom de « Tsahal », il en résulterait, de l’aveu même des responsables israéliens, cet autre fait : l’armée israélienne bombarde délibérément des cibles qui abritent majoritairement des civils dès lors que, à ses yeux, ces abris servent également de refuge à des hommes en armes. N’est-ce pas une information ? Pourquoi n’a-t-elle pas, en général, été diffusée comme telle ? Pour ne pas avoir à appeler des massacres par leur nom ?
A suivre, hélas…
Henri Maler et Olivier Poche

- Grâce à la documentation réunie avec Denis, Jamel, Marie-Anne et Raul.
PS. Une fois n’est pas coutume : cet article sera peut être complété ou modifié ultérieurement
Notes
[1] Général de réserve Doron Almog, cité par Le Monde daté du 09/01/09.
[2] « Sur la porte d’entrée du centre social qui tient lieu de salle de presse, une note indique le nom des officiels de permanence et les langues étrangères qu’ils parlent. Anglais, allemand, français, espagnol, portugais et même luxembourgeois ! A l’intérieur, un paquet de brochures résume les activités proposées par The Israel Project, l’un de ces organismes privés financés par la diaspora juive américaine, qui, sous couvert de services à la presse, mouline la bonne parole du gouvernement. Au menu du jour, le "Gaza Border Tour". Une excursion qui passe par le "musée des Qassam", l’entrepôt où sont entassés les reliquats de toutes les roquettes tirées sur la ville (causant la mort d’une dizaine de personnes). » (Le Monde daté du 9 janvier). Outre cet article du Monde, on peut consulter aussi un article d’arrêt sur images (lien payant) sur les activités de l’association The Israel Project, qui, entre autres, fournit aux journalistes la liste des victimes des roquettes du Hamas, avec numéro de portable, langue(s) parlée(s), etc.
[3] Soldat israélien détenu par le Hamas. Ce reportage n’a pas d’équivalent de "l’autre côté", alors qu’il ne paraît pas impossible de trouver des familles de combattants palestiniens emprisonnés en Israël.
[4] Le reportage précise que cette famille vit dans les « quartiers chics » et la montre dans une tentative – infructueuse- de quitter Gaza
[5] Télérama du 7 janvier 2008 rapporte et commente ainsi les propos d’un journaliste à propos d’Al Jazeera, : « “ Comme elle dispose sur place d’une véritable rédaction coordonnée, elle peut répartir les sujets, couvrir des angles différents, rendre compte des différents aspects de la vie quotidienne des Gazaouis” , estime Alexis Monchovet. Problème : ses images sont exclusives, et les chaînes françaises n’ont pas forcément les moyens de les acheter. Sans compter l’accusation de partialité qui ne manquerait pas de leur tomber dessus si elles utilisaient une telle source. Pourtant, elles diffusent allègrement les images fournies par l’armée israélienne… »
[6] C’est ce que semble indiquer cette réaction échappée à Frédéric Barreyre sur France inter le 7 janvier, quand Olivier Rafowicz, porte-parole de l’armée israélienne, rejette la responsabilité des bombardements d’écoles : « quelque part faut aussi que la presse se demande et demande aussi au Hamas, puisqu’ils nous demandent à nous israéliens, pourquoi le Hamas utilise des installations humanitaires et de l’ONU comme base de tir. Quelque part faut aussi enlever la naïveté… » Frédéric Barreyre l’interrompt : « Olivier, Olivier, Olivier, laissez-nous entrer ! Olivier , laissez-nous entrer ! On ira leur demander. »
[7] A titre d’exemple, voici la version proposée par le site du Nouvel Observateur : « Mardi [6 janvier], trois écoles gérées par l’agence de l’ONU d’aide aux réfugiés (Unrwa), où des dizaines de civils s’étaient réfugiés, ont été bombardées. L’attaque la plus meurtrière, à Jabaliya (nord), a tué 43 Palestiniens, selon les services d’urgences palestiniens. L’ONU, dans un communiqué, a fait état de 30 morts et 55 blessés. Cinq autres personnes ont trouvé la mort dans des attaques contre deux écoles de l’ONU à Gaza et Khan Younès (sud), alors qu’au moins 12 membres d’un même clan familial, dont sept enfants, ont péri dans le bombardement de leur maison à Gaza, selon des sources médicales. »
[8] « Trois cliniques mobiles, clairement marquées du signe de la croix rouge et parquées dans les locaux d’une organisation médicale, ont été détruites par l’aviation israélienne dans la nuit du 5 janvier. « Nous avons été en mesure d’aider les blessés jusqu’à présent parce que nos véhicules étaient à l’intérieur de Gaza. Cette capacité d’assistance en urgence est maintenant détruite. Nous sommes profondément choqués que ces bombardements israéliens empêchent les efforts de l’aide humanitaire », déclare Henrik Stubkjær, secrétaire général de DanChurchAid ». Source : Communiqué DanChurchAid, 6 janvier 2009. Paru sur le site de Contreinfos.
[9] Il en va de même du bombardement dont fait état Michel Scott dans le sujet déjà mentionné du JT de 13 h du 6 janvier sur TF1 : « […] des secouristes du Croissant Rouge ont même été visés, comme le raconte cette activiste étrangère [sic], l’une des rares encore présents à Gaza : "Nous étions bien visibles, quatre ambulances qui se rendaient vers le lieu d’une frappe aérienne. Et pourtant le F16 est revenu et a tiré sur la même maison. C’est un miracle si nous sommes encore tous en vie." »
[10] A titre d’exemple, sur le site du Nouvel Observateur, sous le titre sans équivoque « Pas de combattant dans l’école de l’Onu dans l’Ecole attaquée » : « L’ONU a démenti mercredi 7 janvier la présence de combattants palestiniens dans une école qu’elle gère dans la bande de Gaza, où plus de 40 personnes ont été tuées la veille dans une attaque israélienne. Israël a affirmé avoir tiré à l’artillerie en direction de l’école où, selon lui, des combattants palestiniens s’étaient positionnés pour tirer des obus de mortier contre ses forces qui mènent une offensive sans précédent contre le mouvement islamiste Hamas. "Suite à une enquête préliminaire, nous sommes sûrs à 99,9% qu’il n’y avait ni activistes ni d’activités militaires dans l’école", a affirmé à l’AFP Chris Gunness, le porte-parole de l’agence de l’ONU pour l’aide aux réfugiés palestiniens (Unrwa)."Nous appelons à une enquête indépendante. Si les lois de la guerre ont été violées, les coupables devront être présentés à la justice", a-t-il ajouté. »

Gaza – Médias en guerre (3) : « Bavures » audiovisuelles
Publié le 19 janvier 2009 par Henri Maler, Olivier Poche
Au moment où cet article paraît, la plupart des médias ont, depuis plusieurs jours, amorcé de légères inflexions dans le traitement de l’invasion israélienne de Gaza : critiques acerbes du blocus imposé aux journalistes interdits de séjour à Gaza par l’armée israélienne, constats moins édulcorés des crimes perpétrés par cette même armée, etc. Et l’annonce, le 18 janvier, d’une trêve d’une semaine par le Hamas et d’un cessez-le-feu israélien contribuera à effacer les traces du traitement médiatique pendant les semaines qui ont précédé.
Raison supplémentaire de lutter contre l’amnésie par le rappel de quelques prouesses : la désinvolture des présentateurs et des interviewers, l’adoption, notamment par le vocabulaire employé, du point de vue israélien sur les raisons et les objectifs des bombardements et de l’invasion (ainsi que sur les résultats escomptés et les risques encourus). Echantillon…
Ce relevé, présenté chronologiquement, de quelques « bavures » significatives, commises entre le 27 décembre et le 10 janvier, ne porte pas sur les commentaires qui se présentent comme tels (et presque tous favorables à la version israélienne) n’est ni exhaustif, ni exclusif de reportages et d’analyses plus ou moins irréprochables que l’on a pu voir ou entendre par ailleurs.
27 décembre : « Plomb durci » contre « le Hamas »
Nous l’avons relevé d’emblée (« Médias en guerre (1) : Sous couvert de neutralité ») les motifs qu’invoque le gouvernement israélien (des « représailles »), les objectifs qu’il affiche (en finir avec les tirs de roquettes) et la cible qu’il prétend fixer à l’armée (le Hamas) sont enregistrés comme des informations indiscutables.
27 décembre 2008 à 20 h. Les titres du JT de TF1 nous apprennent qu’Israël « bombarde le Hamas à Gaza en représailles contre les tirs de roquettes ». Et comme il va de soi que les bombardements ne visent que le Hamas et n’atteignent que cette cible, TF1 peut affirmer, sans citer la moindre source : « L’opération israélienne de ce matin a touché avant tout des infrastructures de sécurité et des dépôts d’armement des islamistes du Hamas ».
Il faudra attendre quelques jours, quand l’aviation israélienne aura bombardé délibérément trois écoles de l’ONU, pour que les affirmations deviennent moins péremptoires : « Deux écoles touchées » [charmant euphémisme…] titrera France 2, « une école de l’ONU bombardée », précisera TF1 [1] : des titres subitement mis à la voix passive qui évitent de nommer le responsable ?
Le même jour, à la même heure, sur France 2, Marie Drucker reprend la même information : « Israël affirme ce soir qu’il n’y avait d’autre solution que la voie militaire. Israël qui a lancé ce matin des raids aériens massifs contre le Hamas à Gaza. ». Mais elle ajoute aussitôt : « Objectif affiché : en finir avec les tirs palestiniens de roquettes de ces dernières semaines », laissant entendre mais sans le dire qu’il pourrait y avoir d’autres objectifs. Encore un effort et l’information sera fournie avec le recul nécessaire !
Des « raids aériens massifs » qui, selon l’armée israélienne, ne viseraient que le Hamas, cela ne va pas sans « risques ». Mais lesquels ?
29 décembre : David Pujadas interroge
Le 29 décembre, David Pujadas reçoit Avi Pazner.. Auparavant, un sujet revient sur l’histoire du Hamas et conclut : « Les tirs de roquette sur les villages israéliens poussent le ministre de la défense Ehoud Barak à bombarder Gaza , ce qui n’est pas sans risque politique ». Le « risque », ou plutôt la certitude, de tuer un nombre conséquent de civils, n’a en effet pas dû peser bien lourd face au « risque politique » (de récupérer quelques points dans les sondages ?) : autant ne pas le mentionner.
David Pujadas pose alors trois questions à Avi Pazner. Trois questions qui permettront à ce dernier de détailler pendant près de deux minutes sa vision, parfaitement neutre, des opérations militaires que le gouvernement dont il est le porte-parole mène depuis trois jours. La première porte sur l’avenir de l’opération « Plomb durci », ce qui permet de ne pas évoquer son passif, notamment en termes de victimes civiles : « Est-ce que l’armée israélienne va entrer dans Gaza, se prépare à entrer dans Gaza ? ». La deuxième s’appuie sur un rappel dont on se demande le rôle exact : « Alors Monsieur Pazner, pensez-vous vraiment que la solution contre le Hamas dont la plupart des pays du monde s’accordent à penser qu’il s’agit bien d’un mouvement terroriste , pensez-vous que cette solution est militaire et uniquement militaire ? ». Quant à la troisième, qui épouse le point de vue israélien (« Mais Monsieur Pazner, est-ce qu’en augmentant la pression militaire sur le Hamas vous n’en faites pas encore plus un martyr, vous ne faites pas finalement son jeu ? », elle évite soigneusement la question de la « pression militaire » qui pourrait « martyriser » la population civile de Gaza.
29 décembre 2008 : Harry Roselmack comptabilise
Le 29 décembre, 16 minutes et 20 secondes après le début du journal, Harry Roselmack, se résout à « lancer » un premier « sujet » sur la situation à Gaza : « Les raids israéliens se sont poursuivis sur des édifices du Hamas et contre les forces de sécurité du mouvement palestinien . Le dernier bilan fait état de 345 morts parmi lesquels une cinquantaine de civils » Or le commentaire, dans le « sujet » qui suit, annonce : « les bombardements auraient fait plus de 340 morts dont une soixantaine de civils ». S’il est vain d’exiger un bilan « exact » – qui serait le même sur toutes les chaînes – dans un contexte où les informations contradictoires se succèdent, un bilan qui de toute façon ne veut pas dire grand-chose, on peut en revanche s’attendre à ce que les titres correspondent au moins aux propos tenus dans les reportages qu’ils annoncent. On objectera peut-être qu’il n’y a « qu’ »une dizaine d’écart. Une dizaine de morts civils. C’est-à-dire autant que les victimes civiles israéliennes en huit ans de « harcèlement » par le Hamas à Sderot, comme le rappelait par exemple un reportage de la veille (et bien d’autres) : « En huit ans, 700 roquettes se sont abattues sur la ville, faisant dix morts et 150 blessés ». En trois jours, combien d’obus sur Gaza ?
31 décembre : De même que… de même
Sur TF1, le 31 décembre 2008, à 20 heures, 22 minutes et 15 secondes après le début du journal, il est temps d’évoquer la situation à Gaza. Après quelques brèves informations et l’inévitable reportage à Sderot (voir notre article précédent), la transition « équilibrée » est toute trouvée : « Les frappes israéliennes se poursuivent, pour le cinquième jour, de même que les tirs de roquettes palestiniens sur le sol de l’Etat Hébreu. Ce matin une vingtaine d’engin ont explosé dans différentes localités israéliennes proches de la bande de Gaza. »
1er janvier 2009 : Roselmack interroge
Le 1er janvier 2009, le « 20 h » de TF1 diffuse une interview (enregistrée à l’ambassade d’Israël) de Tzipi Livni, ministre des Affaires Etrangères d’Israël, par Harry Roselmack, qui laisse libre court, pendant 2 minutes 40, à la propagande attendue. Comment pourrait-il en être autrement, quand la question la plus informée et la plus effrontée posée à une ministre directement responsable de la guerre que mène son gouvernement est la suivante : « Est-ce que la position, l’argument, de certains évoquant la disproportion des moyens et des bilans dans cette crise… est-ce que ces arguments-là vous les entendez et est-ce que vous en tenez compte ? » Sauf erreur ou omission de notre part, aucune « voix » palestinienne ne bénéficiera d’une interview similaire sur TF1.
2 janvier : Objectif affiché
Sur France 2, le 2 janvier, il est impossible d’évoquer les manifestations des Palestiniens à Jérusalem et dans les territoires occupés par Israël, sans le faire du point de vue du gouvernement israélien et des objectifs qu’il affiche : « Des milliers de Palestiniens sont descendus aujourd’hui pour soutenir les habitants de Gaza pris sous les bombes israéliennes. [...] Dans tout le territoire palestinien, les frères ennemis du Fatah et du Hamas ont même défilé côte à côte. C’est une conséquence de cette offensive d’Israël , en voulant assurer sa propre sécurité, le pays semble avoir ressoudé contre lui le peuple palestinien dans son ensemble.
6 janvier : Un premier chef d’œuvre de Jean-Pierre Pernaut
Ce jour-là, le journal est construit autour d’un fil conducteur : le froid et la neige, bien sûr . Mais ce qui est censé nous tenir en haleine, et ce qui fait périodiquement apparaître un sourire prometteur chez Jean-Pierre Pernaut, c’est le reportage sur Tahiti promis pour la fin du journal. Plus de 9 minutes après le début du journal, JPP rassure les téléspectateurs : il n’a pas fini de parler du froid. Et il leur promet de se réchauffer. Mais entre temps, entre le grand froid et le grand soleil, il faut bien parler d’autre chose :

- Jean-Pierre Pernaut : « Voilà. On reparlera du froid et de la neige tout à l’heure et on ira aussi se réchauffer [un sourire s’esquisse en promettant les alléchantes images] un petit peu comme tous les jours cette semaine à Tahiti. Venons-en maintenant à la situation toujours aussi préoccupante, très préoccupante, au Proche-Orient ».
L’examen de cette situation « préoccupante » et même « très préoccupante » ne préoccupe pas longtemps Jean-Pierre Pernaut qui lui consacre moins de temps qu’au seul reportage sur Bora Bora (qui s’inscrit dans une série de carnets de voyages), et deux fois de temps qu’aux reportages sur le froid et la neige en France qui occupent 14 minutes 24, soit 34 % du journal. Les effets de la météo et le tourisme à Bora Bora ne prennent que 50% de la durée du JT, et si l’on ajoute un reportage d’une longueur inhabituelle sur… le patois bourdonnais, on atteint le chiffre de 24’20, soit 60% du JT. C’est, en effet, « préoccupant, très préoccupant »…
6 janvier : « Bavure » ?
Le 6 janvier sur TF1 à 20 h, Laurence Ferrari interroge Denis Brunetti : « Est-ce qu’on peut dire que cette attaque qu’une école qui a fait 43 morts au moins parmi les civils palestiniens est la première grosse bavure de l’armée israélienne ? » Le délicat vocabulaire de la « bavure » est de retour… Il se répandra partout, notamment dans la presse écrite [2]
Le même jour France 2 est elle aussi saisie par le doute : « Faut-il parler de bavure militaire ? Il est encore trop tôt pour le dire ». Mais il est déjà trop tard pour s’apercevoir que le terme de « bavure » est parfaitement déplacé, que la version israélienne soit confirmée ou non. Plus généralement, ce sont tous les mots de la guerre qui se sont répandus : nous les avions, à propos de lainsi nomé « conflit israélo-palestinien », déjà relevés dès 2002 (« Les mots et les images (1) : Des mots innocents ? »), puis en 2007 (« 24 heures d’information ordinaire sur France Culture »), comme nous l’avons fait pour de nombreuses guerres depuis 1999 [3].
6 janvier : Laurence Ferrari s’inquiète
Ce même 6 janvier, sur TF1, il faut attendre 20h09 avant que Laurence Ferrari « s’inquiète » dans les termes suivants : « Situation très inquiétante qui ne cesse de s’aggraver à Gaza. La violence des combats frappe de plein fouet la population civile palestinienne prise au piège entre l’armée israélienne et les combattants du Hamas. L’illustration la plus terrible en a été le bombardement d’une école aujourd’hui. 43 personnes qui s’y étaient refugiées ont trouvé la mort. L’armée israélienne affirme avoir répliqué à des tirs de mortier. »
« Très inquiétant » : qu’en termes délicats, ces choses-là sont dites ! Si les mots ont un sens, il faut comprendre que la population civile palestinienne subit au même titre les combattants du Hamas et l’armée israélienne… qui l’enferme dans Gaza et bombarde ! Et les 43 victimes civiles seraient une « illustration ». Une « illustration » ! Et de quoi ? D’ un « piège » tendu avec le concours des « combattants » du Hamas, et non d’un bombardement de l’armée israélienne, dont la version est livrée sans recul.
7 janvier : Laurence Ferrari perçoit une lueur
Le 7 janvier, à 20 h, 21 minutes après le début du journal, Laurence Ferrari est moins inquiète que la veille : « A Gaza première lueur d’espoir aujourd’hui avec la trêve de trois heures qui a permis aux habitants de souffler un peu et de faire entrer de l’aide humanitaire. Autre signe encourageant, Israël se dit d’accord pour négocier un cessez-le-feu, proposé par Nicolas Sarkozy et le président égyptien Hosni Moubarak. »
Une « lueur d’espoir » ? Mais pour qui ? Pour une population civile martyrisée qui a « bénéficié » à Gaza-ville (et non sur toute l’étendue du territoire) non d’une « trêve », mais d’une suspension des bombardements, dont les associations humanitaires diront le jour même que sa durée est trop courte pour que l’aide parvienne effectivement à la population ? Un « signe encourageant » ? Comment dire cela alors que le gouvernement israélien s’est déclaré prêt à un cessez-le-feu, mais à des conditions qui le rendent impossible tant que l’opération « Plomb durci » ne sera pas achevée. Même pas une « lueur » puisque on apprend le jour même que l’invasion doit se poursuivre et même s’intensifier.
Le commentaire, dans le reportage qui suit, est du même acabit : « Les bombardements ont cessé pendant trois heures cet après-midi. Un répit durant lequel la population de Gaza a pu souffler, sortir dans les rues, et surtout s’approvisionner après quatre jours d’intenses opérations terrestres… L ’armée israélienne a décidé de cesser ses opérations de 13h à 16 h chaque jour dorénavant, pour permettre aux convois humanitaires de circuler. Geste de bonne volonté après la journée d’hier particulièrement meurtrière : la frappe contre une école aux couleurs des Nations-Unies a soulevé une vague de protestation internationale, malgré l’explication israélienne selon laquelle le site aurait servi de zone de tir au Hamas. »
Une vague de protestation sans objet donc, puisque l’armée israélienne a « expliqué »… et « explique » encore, par la voix d’un porte-parole que l’on entend à nouveau : « le Hamas se protège derrière des enfants dont il se sert comme bouclier humain. C’est inacceptable. Chaque fois qu’il y a des morts ils en sont responsables ». Les déclarations de l’ONU contredisant la version israélienne du bombardement de l’école ne sont manifestement pas des « explications », puisque TF1 ne juge pas utile d’en faire état.
Quant à la présentation des positions en présence sur l’éventualité d’un cessez-le feu, elle vaut son pesant d’ « équilibre » : « Pendant l’enterrement des victimes de l’école de Jabaliya, un représentant du mouvement islamique a refusé de soutenir pour l’instant l’initiative franco-égyptienne , un plan de cessez-le-feu qui doit selon lui clairement exiger le retrait des troupes israéliennes au préalable. De son côté le gouvernement Olmert, lui, l’a accueilli avec intérêt, suscitant une lueur d’espoir [image d’un soldat souriant sortant d’un char], à condition que le Hamas cesse ses tirs et que Gaza soit démilitarisée ». Les conditions mises par le Hamas équivalent à un « refus » ; les conditions mises par le gouvernement israélien n’altèrent pas « l’espoir » : information ou commentaire de parti-pris ?
7 janvier : Renaud Revel interroge…
Au cours de l’émission « J’ai mes sources » sur France Inter, le 7 janvier 2009, Renaud Revel interroge Olivier Rafowicz sur les conséquences de l’interdiction opposée par le gouvernement israélien à l’entrée de journalistes à Gaza. Des conséquences pour l’information ? Nenni. Pour les palestiniens ? Encore moins. Seulement sur l’avantage qui serait ainsi donné à la propagande du Hamas, au détriment de celle de l’Etat israélien :
- Renaud Revel : - « En interdisant les journalistes à pénétrer à Gaza, est-ce que vous ne prêtez pas le flanc à la propagande du Hamas , dans la mesure où si on va sur Internet aujourd’hui, internet regorge d’images effectivement des combats qui ont lieu en ce moment ? Et qui sont données notamment par le Hamas ?
- Olivier Rafowicz : - « Vous avez raison au niveau des images, des images qui sont propagées… Vous savez on a ici affaire à une politique médiatique d’un groupe islamiste intégriste. »
Dans une émission qui, selon sa présentation sur le site de France 2 prétend s’interroger sur le « monde complexe » des médias – « Les médias, tous les médias, rien que les médias » –, c’est ainsi qu’on interroge un porte-parole de l’armée israélienne, qui peut s’exprimer sans contradicteur et sans débat sur la « politique médiatique » du gouvernement qu’il représente.
8 janvier : Un second chef d’œuvre de Jean-Pierre Pernaut
Le 8 janvier, au 13h de TF1, après 17 minutes et huit sujets consacrés à la baisse des températures, Jean-Pierre Pernaut conclut, souriant devant les images d’une plage enneigée : « Un bien bel hiver comme on en rêvait depuis longtemps. ». Et enchaîne aussitôt, en se départissant à grand peine de son sourire : « Autre chose, plus sérieux , le conflit israélo-palestinien […] »
Reprenons avec lui : « Autre chose, plus sérieux, le conflit israélo-palestinien et un regain de tension après les espoirs de paix d’hier. » Les espoirs de paix ! Les bombardements se poursuivent, mais JPP découvre un simple « regain de tension ». Lequel ? La précision est donnée dès la phrase suivante : « Pour la première fois dans cette crise [sic], le Hezbollah a lancé des roquettes sur Israël depuis le Sud-Liban. Il y’a eu 5 blessés légers. », informe l’hivernal Jean-Pierre Pernaut qui introduit ainsi un « sujet » qui propose des informations totalement différentes : « Une personne a été légèrement blessée à la jambe , mais beaucoup ont été seulement choqués. Selon les premiers éléments, ces roquettes anciennes ne proviendraient pas du Hezbollah , mais d’un petit groupe palestinien installé au Liban. » [4]
Au cours du même JT, les téléspectateurs auront encore quelques informations sur les « objectifs » de l’armée israélienne : « Pour l’instant Israël maintient sa décision de suspendre ses opérations pendant 3 heures chaque après-midi, mais l’offensive générale elle continue avec pour objectif d’aller chercher les forces du Hamas partout où elles se trouvent. ». En revanche, aucune précision sur les effets de la suspension des opérations. Aucun mot sur le bilan des victimes.
8 janvier : Ferrari hiérarchise
Au 20h de TF1, 18 minutes après le début d’un journal dont les titres ne disent pas un mot du conflit, Laurence Ferrari lance un « sujet » dans lequel on apprend que l’agence de l’ONU chargé des réfugiés palestiniens (UNRWA) a « suspendu ses activités après que des obus eurent touché un de ses convois ». Le communiqué de l’ONU était nettement moins allusif, évoquant des « tirs israéliens contre un convoi », et expliquant que « des travailleurs humanitaires ont été la cible de l’armée israélienne ». Ban Ki Moon a d’ailleurs « condamn[é] l’attaque israélienne contre un convoi de l’ONU qui a fait au moins un mort », comme le précisera Ferrari après le reportage. Cette « attaque », la condamnation de celle-ci, et surtout la décision aux conséquences dramatiques qu’elle a entraînée n’en ont pas moins été traitées en deux phrases en tout et pour tout. Pourtant ce jour-là, les titres du journal annonçaient que François Fillon avait jugé « la situation inacceptable ». Mais il s’agissait des embouteillages marseillais. Il avait, ce même jour, jugé « la situation humanitaire à Gaza intolérable ». Mais on ne le saura que 17 minutes après le début du journal, dont une dizaine consacrée, inévitablement, au froid et à la neige…
8 janvier : Les « frappes » d’Elkkabach
Jean-Pierre Elkkabach, sur Europe 1, le 8 janvier 2009, interroge d’abord Jessica Pourraz, responsable de Médecins Sans Frontières à Gaza :
- Jean-Pierre Elkkabach : - « Mais, est-ce que les habitants de Gaza peuvent demander, ou pourraient demander, au Hamas d’arrêter les tirs de missiles qui ont provoqué les représailles d’Israël ? » Question d’autant plus suggestive de la prise de position hors de propos (mais tellement suggestive…) d’Elkkabach qu’elle s’adresse à une organisation non gouvernementale !
Jessica Pourraz pourra cependant, pendant quelques minutes, évoquer la situation humanitaire catastrophique à Gaza. Pour maintenir l’équilibre, après l’interview d’une responsable humanitaire qui refuse de répondre à toute question ayant une dimension politique (comme la précédente), Elkkabach s’entretient alors avec… Avi Pazner. Inutile de préciser que, comme sur TF1, aucune voix palestinienne n’aura, avant ou après, le privilège d’être interviewée dans cette émission. De cet entretien, on retiendra en particulier cet échange :
- Jean-Pierre Elkkabach : - « Est-ce que vous vous excusez ? Ou le gouvernement d’Israël présente des excuses pour ce qui s’est passé à l’école des Nations-Unies, Monsieur Pazner ? »
- Avi Pazner : - « Eh bien, je vais vous dire, Monsieur Elkabbach, ce qui s’est passé à cette école : le Hamas a placé une batterie de mortier dans cette école même , qui tirait sur nos troupes. Nos troupes ont répondu sans savoir qu’il y avait là-bas des civils . Nous regrettons… »
- Jean-Pierre Elkkabach : - « D’habitude… »
- Avi Pazner : - « Nous regrettons profondément la mort de civils innocents. Mais il faut bien comprendre que c’est le Hamas qui utilise ces civils comme boucliers humains. »
- Jean-Pierre Elkkabach : - « D’habitude, Tsahal vise mieux . […]. »
Un compliment, même sarcastique et indécent, vaut manifestement mieux que le démenti que Jean-Pierre Elkkabach, journaliste bien informé, aurait pu opposer aux mensonges éhontés d’Avi Pazner (voir notre article précédent).
10 janvier : Frédéric Barreyre informe
Le 10 janvier 2009, sur France Inter, Frédéric Barreyre évoque la situation à Gaza : « Cet après-midi, la trêve a été violée des deux côtés ». Comme s’il s’agissait d’une véritable « trêve » – qui supposerait un accord entre les deux parties en conflit… Comme si la décision unilatérale d’Israël de suspendre ses bombardements pendant trois heures n’avait pas concerné, du moins pendant plusieurs jours, la seule ville de Gaza (et non pas les quartiers périphériques), sans changement notable pour les populations civiles, comme le relevait déjà Médecins sans frontières… trois jours plus tôt [5], et comme aucun des JT ne l’a précisé. En « cet après-midi », seul Israël a « violé » ses engagements, comme du reste il l’avait fait la veille, selon la même source : des engagements dont on serait au moins en droit d’attendre que nos zélés informateurs se demandent s’ils ne sont pas une composante de la propagande de guerre.
Il est vrai que depuis deux cessez-le-feu distincts ont été annoncés – l’un d’Israël, l’autre du Hamas. La guerre n’est pas finie pour autant…
A suivre, hélas.
Henri Maler et Olivier Poche
- Grâce à la documentation recueillie et aux transcriptions réalisées avec Denis, Jamel et Raul.
Notes
[1] Sur le site de la chaîne. A l’antenne, on est encore plus allusif : « Tragédie humanitaire ». Notons qu’il faut additionner les deux JT pour disposer d’une information exacte : trois écoles bombardées On aimerait pouvoir en rire.
[2] Quelques exemples. Le 7 janvier, Ouest France relève « de nombreuses bavures ». Le 9 janvier 20 minutes.fr titre « Ces bavures qui commencent à saper l’offensive israélienne ». Et Le Monde, pourtant prompt à dénoncer les « crimes de guerre » du Hamas, de gémir dans un éditorial daté du 8 janvier et titré « Sinistre scénario » : « C’est toujours le même sinistre enchaînement : il faut attendre l’inévitable “grosse bavure”, et l’émotion qu’elle provoque, pour que les solutions diplomatico-humanitaires commencent à être envisagées. » On est prié de mettre entre guillemets les « grosses bavures » de l’éditorialiste anonyme du Monde…
[3] Guerre du Kosovo : « Bavures à Libération » ; Guerre d’Afghanistan : « Guerre des mots, mots de la guerre » ; Invasion de l’Irak : « Les mots de la guerre contre l’Irak ».
[4] Et sur le site de TF1, ce « sujet » est résumé ainsi : « Des tirs de roquettes du Liban sur le nord d’Israël fait planer jeudi le risque d’une escalade militaire à la frontière entre les deux pays. Le Hezbollah nie être à l’origine de ces tirs. » Un « regain » de précision !
[5] Lire, sur le site de MSF : « Gaza : “la trêve des bombardements, ça n’a aucun sens” ». Extrait des déclarations de Jessica Pourraz, responsable MSF dans le territoire palestinien : « La trêve ne change rien . La trêve n’apporte rien de différent. Elle n’a eu lieu que sur la ville de Gaza, pas dans les périphéries urbaines . Les chars ont commencé à rentrer dans les zones urbaines périphériques de Gaza-ville qui sont des quartiers comme Beit Lahya, Beit Hanoun, Sijaya, Zeïtoun. Il y a de plus en plus de civils blessés, c’est là qu’il faut aller chercher les blessés. Il ne faut pas se leurrer, la trêve n’aide en aucun cas le travail des humanitaires et l’accès des gens aux hôpitaux. »
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