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L’émission 'Répliques' de l’insupportable A.
Finkielkraut était consacrée ce samedi 7 janvier 2017, jour anniversaire des attentats contre le journal Charlie Hebdo, à la question du
terrorisme. « Pour cette
première émission de l'année, Alain Finkielkraut reçoit deux chercheurs rompus
au nouvel environnement mondial : le politologue François Burgat et le spécialiste
de l'islam Gilles Kepel » lit-on en préambule, sur le site de France Culture
J’ai trouvé les deux intervenants très pertinents, avec une
nuance: Burgat introduit une dimension que Kepel relativise ou évacue (quasiment), la
dimension historique ainsi que la responsabilité dans les drames jusqu'à nos
jours de l'Occident qui "fabrique" ces terroristes. Comme il dénonce les pouvoirs arabes et certains intellectuels (et assimilés) Arabes (que reprend béatement Finkielkraut) arrimés à l'idéologie des dominants.
Gilles Kepel insiste plus sur l'objet lui-même, sur l’idéologie des
islamismes, sur leur spécificité, tout en précisant qu’il accorde autant d’importance aux causes
exogènes qu’endogènes.
Dommage qu'effleure entre les deux chercheurs une bataille d'égo ou de leadership intellectuel, du moins sur la question.
Ci-dessous des extraits de leur intervention.
François Burgat
La violence n’est pas unilatérale.
Le terrorisme n’est pas unilatéral. Le plus souvent, le terrorisme est une
contre-violence.
Je ne donne pas la même importance
de la responsabilité à l’idéologie islamiste que lui donne le sens commun.
Je cherche où sont les dysfonctionnements des institutions politiques nationales ou internationale qui
fabriquent des individus qui vont saisir, quelle qu’elle soit, l’idéologie
binaire, clivante, totalisante, conflictuelle, qui va leur permettre d’exprimer
et de légitimer la violence dont les a rendus porteurs, le traitement dont ils
ont fait l’objet.
L’islamisme c’est une dynamique
historique qui ne peut pas être construite intellectuellement en dehors du
contexte de la colonisation et de la décolonisation. Prendre en considération
cette temporalité longue est nécessaire. Une dynamique politique qui a fabriqué
des acteurs politiques aussi différents que le sont Ghanouchi le tunisien qui a
été l’acteur docile d’une transition politique et à l’autre extrémité nous
avons Baghdadi, « le calife ».
Le défi permanent sera de ne pas
faire trop usage de ce terme « islamisme » qui à mon sens fait
beaucoup plus de bruit qu’il ne produit de lumière. Toujours se souvenir que
c’est une très vaste dynamique historique qui n’est pas porteuse d’un concept
mobilisable en sciences sociales pour définir une certaine catégorie d’acteurs
politiques. Il faut réintroduire le pluriel à l’intérieur de cette enceinte.
Gilles Kepel
Bien sûr, il ne faut pas nier le
contexte. Tout mouvement politique, religieux, se déroule dans un contexte
précis, mais à force de sur-évaluer le contexte on manque l’objet… on peut
expliquer par le contexte, par l’exploitation, par la colonisation le tout et
son contraire, pourquoi pas, mais il faut s’interroger sur l’objet lui-même,
sur ce que c’est que la spécificité de ce qu’on appelle l’islamisme ou les
mouvements islamistes plutôt, pour marquer que c’est une idéologie certes, mais
qui était indissociablement liée à une pratique politique, au mouvement,
c’est-à-dire c’est quelque chose qui est destiné à changer un ordre social,
politique, religieux etc. On peut en suivre l’évolution historique et on peut
également voir comment il se divise en un certain nombre de tendances et de
branches qui sont à la fois complémentaires et opposées
On voit bien comment dans une
situation française où là encore le contexte est important, c’est à dire un
contexte où on n’a pas su digérer ou penser notre héritage colonial, la France
est aussi l’héritière de l’Empire colonial, pas seulement des mythiques ou
semi-mythiques ancêtres Gaulois, où il y a dans les quartiers défavorisés 40%
de chômeurs, où les idéaux transmis par l’école, quand les savoirs ne donnent
rien eh bien, les valeurs qui vont avec les savoirs sont jetés comme le bébé
avec l’eau du bain, tout cela crée un contexte, mais ce contexte n’explique pas
exclusivement pourquoi ça prend cette forme-là de réaction, c’est ça qui est
important à comprendre. Ceux qui font simplement un rapport de causalité entre
le contexte et l’action et qui du coup finalement disent que ‘c’est normal il
ne faut pas s’étonner’ se méprennent sur ce qui fait la force particulière de
cette idéologie.
A l’intérieur de la mouvance
islamiste il y a 3 tendances principales :
Les Frères musulmans, le Salafisme,
Le Djihadisme.
a- les Frères musulmans, cette
tendance est plutôt désireuse de contrôler les appareils du pouvoir
b- le Salafisme, qui marque une
rupture à la base avec les valeurs, les mœurs des sociétés qu’elles soient
occidentales ou celles, ‘apostates’ dans lesquelles ces salafistes agissent et
qui apparaît comme une certaine innocuité (qualité de ce qui n’est pas
nuisible) politique, cette tendance est d’ailleurs souvent flattée par un
certain nombre de municipalités qui voient là la défense de la paix sociale,
mais c’est une rupture culturelle radicale.
c- et puis le Djihadisme qui est
une sorte de mélange des deux précédentes tendances, exacerbées, et qui là,
passe à l’acte et qui se traduit par l’Etat islamique ou par ce qu’on a vu ici
(AH : les attentats)
1.2_ G. Kepel et F. Burgat in Répliques - F. Culture. Sa 7 jan 2017
Le son à partir de la 2 ème minute
François Burgat
On a abandonné le registre
analytique d’un phénomène historique complexe pour en venir à
« l’application de la charia sur les bords de la Seine ! ». Je
voudrais refaire une partie du chemin. Je vais vous infliger une métaphore que
vous connaissez bien, vous l’avez subie certainement à plusieurs reprises. Moi
j’ai une autre définition de l’islamisme : C’est le déplacement sur le
terrain culturel et symbolique d’un processus de repositionnement à l’égard de
l’Occident colonisateur qui s’était exprimé par les indépendances avec le
langage de la rupture politique et sur le terrain économique avec le langage
des nationalisations. Donc c’est le passage sur le terrain symbolique,
culturel : « Je ne vais pas utiliser pour m’exprimer, pour exprimer
les besoins de ma société, pour exprimer mes revendications le vocabulaire que
vous, colonisateurs, m’avez imposé comme étant le seul à pouvoir exprimer
l’Universel. Après, on peut traverser la Méditerranée (AH : et parler
d’islamisme… ?)
Je suis surpris que nous
atterrissions dans les franges extrêmes des musulmans de France.
Gilles Kepel
Ce qui me semble important, c’est
comment vous avez parmi nos compatriotes issus pour l’essentiel de
l’immigration musulmane nord-africaine post-coloniale à la fois un grand nombre
d’individus, les femmes en grand nombre, qui s’engagent dans une démarche
d’intégration politique, républicaine, c’est la première fois que cela se
produit, (aux législatives de 2012), et vous avez également et simultanément
,l’exacerbation d’une mouvance salafiste qui va construire à l’intérieur des
quartiers défavorisés dans lesquels ils considèrent qu’il n’y a plus de
solution républicaine si j’ose dire, un système d’enclave qui auront des
relations complexes d’opposition de compromis parfois avec les modes
d’enclavement qui sont ceux de la délinquance, du trafic etc. On ne peut faire
l’impasse, ni sur l’un ni sur l’autre. Il faut arriver à analyser les deux. La
majorité de nos compatriotes musulmans en France détestent profondément Daech,
mais on voit qu’il y a toute une mouvance, une zone grise qui est aujourd’hui
l’objet d’un combat politique extrêmement important.
François Burgat
Dans la conjoncture actuelle nous
sortons d’une phase d’hégémonie, mais nous sommes encore hégémoniques. Au
Proche-Orient les non-musulmans sont hégémoniques dans la société française. On
n’est pas dans un rapport de force où nous sommes tombés de notre trône. Ce que
je m’emploie à dire c’est que notre lexique, nos références n’ont pas le
monopole de l’expression de l’universel, d’autres cultures peuvent fabriquer de
l’universel avec des accessoires symboliques qui ne sont pas ceux auxquels nous
avons tendance à vouloir confier le monopole. Il peut y avoir une culture autre
que celle dont nous avons héritée. Les valeurs universelles existent, mais
elles peuvent être exprimées, légitimées dans les groupes concernés par des
segments de l’Histoire qui ne sont pas inhérents à l’Histoire occidentale. Si
je veux promouvoir la justice sociale, je puis dire, si je suis chrétien, c’est
parce que Jésus nous a bien montré, si je suis communiste dans les années
cinquante, je peux citer Lénine, si je suis musulman, je peux citer le Coran.
Mais, à la fin de la journée, j’aurais participé à la promotion d’une valeur
qui à mon sens est universelle. Est-ce que l’Occident est entrain d’être
détrôné ? il ne l’est pas encore militairement, il encore l’acteur
dominant. Et oui le djihad a existé avant le phénomène colonial. Le djihad est
l’une des expressions de la résistance des sociétés musulmanes à des mécanismes
de la domination. Et je pourrais prendre des exemples extrêmement précis… Les
djihadistes du 19° siècle c’étaient les confréries soufies, c’étaient les
Ben-Laden du 19° siècle, ce qu’on béatifie maintenant comme étant les gentils
musulmans. Il y a toujours eu, à chaque fois qu’il y a eu mécanisme de conquête
des mécanismes de radicalisation de l’appropriation de l’identité au service de
la défense du groupe. Il est très intéressant et je m’y suis amusé dans mon
livre « Comprendre l’islam politique » en refaisant le circuit de mes
séjours dans toutes les régions du monde où le mot djihad a été prononcé, les
djihadiste au sens contemporain du terme, c’est à dire des gens qui ont pris
une Kalachnikov et qui ont dit « on veut restaurer l’hégémonie de notre
culture » qui se trouve être la culture religieuse, ils sont toujours
apparus dans des contextes où une ingérence extérieure était venue perturber
les mécanismes de régulation interne des sociétés, que ce soit au Yémen sous le
fait de l’influence soviétique par Yémen du Sud interposé, que ce soit en
Afghanistan bien sûr avec l’irruption russe, que ce soit en Irak avec
l’irruption américaine, que ce soit en Syrie avec l’irruption russe et
iranienne, ça complexifie un peu le processus, mais les formes les plus
ultimes, les plus inacceptables de notre point de vue de la radicalisation avec
laquelle je ne suis aucunement en empathie, mais encore une fois la meilleure
façon de combattre les djihadistes est de cesser de les fabriquer.
2.2_ G. Kepel et F. Burgat in Répliques - F. Culture. Sa 7 jan 2017
Gilles Kepel
Il n’y a pas exclusivement de
causes endogènes comme il n’y a pas exclusivement de causes exogènes. François
Burgat présente la notion de djihad comme une lutte défensive contre des
intervenants extérieurs qui veulent perturber l’ordre établi des sociétés
musulmanes, ça c’est ce qu’on appelle le djihad défensif. Mais le djihad ne s’y
réduit pas. L’histoire du djihad originel tel qu’il a été appris, enseigné dans
un certain nombre d’écoles dans le monde musulman et tel qu’il est aujourd’hui
réactivé par le discours djihadiste contemporain c’est celui de la conquête et
de l’expansion. Le djihad militaire, le djihad offensif, c’est d’une certaine
manière l’inverse de la Croisade à l’époque médiévale. On aurait pu penser que
ces concepts avaient été simplement replacés dans un contexte historique et
puis que les sociétés se sont affrontées et c’est ainsi, et on n’est pas
obligés de continuer à vivre sur cette lancée, mais précisément, c’est ce
djihad-là qui est repris, exacerbé à partir d’une lecture littéraliste et très
minoritaire sens dans le monde musulman aujourd’hui, on voit par exemple
lorsque l’activiste de Daech, lorsqu’il conquiert des villages yazidi se réfère
à des interprétations du Texte sacré qui considère que les Yazidi n’étant pas
des musulmans, ils doivent être mis à mort s’ils ne se convertissent pas, que
leurs femmes doivent être transformées en esclaves et vendues, leurs enfants etc.
Daech n’est pas né n’importe comment. Il se constitue, se construit
intellectuellement à partir d’une lecture particulière qui se structure dans le
corpus islamique. Après, bien sûr, il ne fait pas l’unanimité. Le problème est
de savoir comment ils arrivent à imposer cela à un moment donné et ça se passe
en particulier dans une société comme la société irakienne, et là je peux faire
un pas dans la direction de Burgat effectivement, où l’invasion américaine en
2005 a complètement détruit les fondements de cette société, a marginalisé
totalement les sunnites coupables de Saddam Hussein, et a fait que les sunnites
irakiens ont vu dans le djihadisme et dans les groupes radicaux l’occasion de
les défendre face à l’hégémonie chiite irakienne. Ceci est le contexte, mais ça
n’empêche pas de chercher les causes endogènes et les causes exogènes.
François Burgat
Je vais faire un pas moi aussi, en
direction de Gilles Kepel et rappeler qu’il est évident qu’on ne raisonne pas
sur un objet comme ça en blanc et en noir et rappeler qu’il est évident qu’à
partir du moment où nous avons poussé, je tiens à ‘nous avons poussé’, des
acteurs vers la porte de sortie de l’expression radicale d’un discours haineux
de rupture, ce discours peut avoir sa propre logique de mobilisation et prendre
un certain coefficient d’autonomie par rapport aux mécanismes qui l’ont
démontré. Mais je voudrais montrer la matrice analytique principale à laquelle
je me tiens, s’il y a montée aux extrêmes, c’est parce que le centre a échoué.
S’il y a montée aux extrêmes, c’est parce que les mécanismes de régulation des
tensions internes à notre société ont échoué… Je peux cautionner que
« d’un côté il y a communautarisme et de l’autre, une France identitaire,
raciste et xénophobe » et je ne déforme pas votre expression Gilles Kepel,
simplement j’ai l’impression que vous vous penchez d’un côté de la fracture et
vous nous proposez des explications, mais de l’autre côté de ces mécanismes qui
ont nourri cette crispation de la majorité des Français, je ne vois pas
l’analyse. Monsieur Kepel, vous n’êtes pas un charlatan, vous n’êtes pas un, je
dirais un « judéo-droitiste » ou un
« christiano-droitiste », tous ces petits noms dont nous sommes
affublé nous-mêmes, hein ? nous sommes des « islamo-gauchistes charlatans »,
moi je n’emploierais jamais cette terminologie car je ne suis pas à court
d’arguments…
J’ai la plus grande admiration pour
les acteurs du monde musulman qui combattent, et c’est difficile, en essayant
d’influencer le cerveau de leurs coreligionnaires, ils ont mon respect sans
réserve. J’ai pas beaucoup de respect pour ceux qui, sur la rive nord de la
Méditerranée, viennent parler aux trippes de mes concitoyens et flatter leurs
penchants… Je ne suis pas surpris que vous citiez Fethi Benslama. Il manque
juste quelqu’un que vous auriez pu dire qu’il s’inscrivait dans le prolongement
de Abdelwahab Meddeb, on aime bien, et de Bernard Lewis dont vous avez un livre
sous votre micro. Ce sont ceux qui ont cautionné l’idée qu’il y avait un
problème inhérent à la culture islamique dans sa profondeur historique. Lors
d’un débat avec Fethi Benslama je lui ai dit à quel point j’avais apprécié son
ouvrage le « Surmusulman » (AH : Un furieux désir de sacrifice,
le surmusulman »). Cette propension spécifique du musulman à se produire
sur le registre du sacrifice et de la violence, et je lui ai dit « j’ai
tellement aimé votre livre que j’attends les deux tomes suivants ». Moi
j’ai besoin pour comprendre le mécanisme dans la tête de Valls tout ça, j’ai
besoin d’un tome sur le surGaulois et puis quand je regarde monsieur Liberman,
c’est quand-même c’est un peu bizarre cette instrumentalisation qu’il fait de
sa culture religieuse en politique dans l’État hébreu, j’ai besoin du surjuif
aussi. J’ai besoin des trois tomes. Et si on ne me présente qu’un seul tome… Je
ne m’en prends pas exclusivement aux Occidentaux, je m’en prends aux dominants,
à ceux qui sont conjoncturellement dans une posture de domination et la preuve
c’est que je m’en prends très violemment aux leaders des États arabes
contemporains que j’appelle les Pinochet arabes. Je suis capable de dénoncer
les instrumentalisations conservatrices de la culture au service de la
pérennité dans le trône du politique. Je ne fais pas de culturalisme,
simplement je m’en prends, prioritairement, à ceux qui sont aujourd’hui dans
une posture d’hégémonie politique, même relative, parce que ce sont eux qui
portent la plus grande part de responsabilité dans les dysfonctionnements qui
stigmatisent, qui périphérisent un certain nombre d’individus. Lorsqu’un
individu sent qu’il ne peut pas être un français à part entière, il est tenté
de devenir un Français entièrement à part (AH : à partir d’une formule
d’Aimé Césaire lors du procès d’indépendantistes Guadeloupéens- Fevrier 1968 :
« les Antillais ne savent pas s’ils sont des Français à part
entière… » ) C’est ce mécanisme-là qu’il me paraît essentiel
d’interroger. Sa réponse ne se trouve pas dans quelque sourate coranique qui
serait en trop et qu’il faudrait changer. Le mécanisme intellectuel là est
perverti. Ce qui est intéressant ce n’est pas de réformer l’Islam, de couper
une sourate à gauche ou à droite, c’est de comprendre pourquoi dans le
supermarché des modes d’appropriation politique de la religion musulmane, un
certain nombre d’acteurs au cours des années écoulées ont une tendance à
choisir la variante clivante, totalitaire, conflictuelle. Et si on s’interroge
à ce niveau-là, on doit retrouver notre part, pas la totalité bien sûr on n’est
pas en blanc et noir, mais notre part de responsabilité qui est essentielle.
Gilles Kepel
Vous avez dit François Burgat que
je m’intéressais uniquement à la logique communautariste de la fracture et pas
à l’autre. Si vous avez lu mon livre « 93 » que vous avez mentionné,
vous aurez pu voir que j’y ai analysé de très près des mouvements comme
« Riposte laïque » et les mouvements identitaires d’extrême droite,
ainsi que la tuerie organisée par Breijvik à Oslo. Je suis tout à fait
conscient de la manière dont les deux mouvements se construisent en opposition
et vous ne pouvez pas me faire le procès de ne m’intéresser qu’à l’un et pas à
l’autre…
Je suis parfaitement désireux
d’analyser le social et le politique dans sa complexité. Cela étant, ce n’est
pas parce qu’on analyse la complexité que la comparaison doit effacer la
spécificité de l’objet. Il ne s’agit pas de chercher dans telle ou telle
sourate un tel ou tel phénomène, mais dans l’interprétation de ce que cette
sourate va donner aujourd’hui et ça c’est la question fondamentale qui se pose :
quelles sont les conditions concrètes, les conditions objectives, les
conditions de misère, les effets d’un certain nombre de dirigeants politiques
qui voient dans la manipulation de ces sentiments l’opportunité de se
construire une clientèle et construire des effets de pouvoir, qu’est-ce qui
fait que cela est possible dans la France d’aujourd’hui.
François Burgat
Je ne suis pas en empathie avec les
extrêmes. Je suis en antipathie avec ce qui nous est proposé notamment par
Gilles Kepel, pour lutter contre les extrêmes. Lorsque je vois que pour lutter
contre les extrêmes nous nous en prenons de façon obsessionnelle à l’énorme
composante associative qui lutte contre Daech… je m’interroge sur le fait de
savoir si nous sommes bien en train de nous défendre contre les extrêmes.
Gilles Kepel
Il faut voir qu’à l’intérieur de
cette victimisation qui est construite aujourd’hui, le véritable problème c’est
que. Il est tout à fait normal que nos compatriotes musulmans en aient marre
qu’on leur demande toujours de se justifier quand il y a un attentat. Ils
détestent les gens de Daech. Et de ce fait on vient leur dire « ah, vous
voyez, c’est parce que la société française est islamophobe et que c’est la
cause de tous les maux », je crois que c’est une posture idéologique qui
est très dangereuse et qui justement va fracturer la société.
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Lire :
- Gilles Kepel : La fracture.
Gallimard/ France Culture.
- François Burgat : Comprendre
l’Islam politique. La Découverte.
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