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mercredi, mai 01, 2019

644_ La Révolution du 22 février 2019 racontée à ma petite fille - Acte I






Tu me demandes comment tout cela est arrivé. Je veux bien tout te raconter, mais cela va être bien long ma petite fille. On peut bien commencer par le commencement. Je vais essayer d’aller au plus simple. Quelques semaines auparavant je me posais au pied du plus haut sommet d’Algérie, le mont Tahat. Tout semblait calme alors. Surtout dans le Sahara. Mais procédons par ordre. Si tu le veux bien, pose ton livre d’histoire et assieds-toi là. La Révolution du 22 février, qu’on a également appelée Révolution du sourire, Révolution silmiya, Révolution de velours… n’est pas apparue spontanément comme on jette un caillou dans l’eau, non, pas du tout. Elle couvait depuis longtemps tu sais. De nombreuses grèves, de nombreuses manifestations et mouvements sociaux divers jalonnèrent le paysage, depuis très longtemps et dans de nombreux secteurs, un peu partout dans le pays : les techniciens d’Air Algérie, les médecins résidants, les vétérans de l’armée, les enseignants, les étudiants, les chômeurs… Il est inutile et vain d’en établir l’historique tant ils furent très nombreux.



On n’avait jamais vu autant de monde dans les rues d’Algérie que ce vendredi 22 février 2019, pas même au jour de l’indépendance. C’est vrai qu’à cette époque nous étions à peine dix millions. Le 22 février 2019, ce sont dix à quinze millions, soit plus que le nombre total d’Algériens à l’indépendance, qui sont sortis dire leur mécontentement. Entre 24 et 37% de la population sont sortis manifester.

- C’est beaucoup !?

- Eh oui tiens !



En 2019 il y avait 42 millions d’Algériens. Et depuis ce 22 février, chaque vendredi les Algériens déferlaient dans les rues du pays. Cela a duré des mois.

Comme tu me le demandes, aujourd’hui je vais m’astreindre à ce qui a précédé la Révolution et détaillerai ce qui s’est passé à partir du 22 février. Une autre fois, je te raconterai la suite. Depuis plusieurs mois, voire des années, de magnifiques chants montaient des stades de football et que nous partagions, sur Facebook notamment. En novembre 2018, des appels anonymes appelaient les Algériens à descendre dans les rues. Le samedi 1° décembre, tout le centre d’Alger était bouclé par la police. Plus tard, des habitants de Bejaïa, de Chlef sont sortis crier leur mécontentement.


Je commencerais par cette belle chanson intitulée « Ultima verda » créée par un groupe de supporters appelé « Ouled el Bahdja ». Une vidéo que j’ai trouvée sur Youtube et que j’ai postée sur Facebook le 20 février. Avec un peu de chance, je pourrai la retrouver. Dix jours avant, le FLN tenait meeting à la Coupole du complexe olympique du 5 juillet… Ils ont fait le plein grâce à des jeunes zawaliya payés 500 dinars et auxquels on a distribué des sandwich de cacher. C’était le marché proposé par les représentants du FLN à ces jeunes « vous venez remplir la Coupole et vous offre de l’argent ».

- Tu me prêteras la chanson ?

- Saha, mais écoute bien

Le lendemain, l’entourage du président Bouteflika – son entourage mais pas lui-même, car lui ne parlait presque plus, ne bougeait presque plus – annonçait qu’il se représentait à la candidature pour l’élection présidentielle. Il envisageait un 5° mandat. Dans son clan on embrassait son portrait, on le saluait, on se prosternait devant son image encadrée comme pour une idole. Le responsable du parti du FLN a même dit que Dieu avait envoyé Bouteflika pour sauver l’Algérie. Un prophète quoi. Le 9 février, le FLN réunit des milliers de personnes à la Coupole du Complexe olympique Mohamed-Boudiaf à Alger contre sandwichs et petits billets.

- tu te répètes Jeddi.



Pardon. Le 13 février 2019 et les jours suivants, en réaction à l’annonce de sa candidature, des jeunes ont manifesté à Bordj-Bou-Arreridj « Ya Bouteflika makèch el âhda el khamsa ». Le 16, à Kherrata, des centaines de personnes manifestaient contre le 5° mandat et contre le FLN « dégage ! ». De France aussi il y eut des appels, notamment d’un Youtubeur-Facebookeur nommé Amir DZ, un influenceur suivi par des milliers d’internautes. 


Dans une vidéo ajoutée sur Youtube le 18 février par HellO Dz, deux jeunes de Bordj Bou Arreridj tiennent un discours contre le pouvoir et appellent à des marches  en insistant sur la date « le 22 février », comme ces deux jeunes islamistes dans un appel sur Youtube. Je te montrerai la vidéo.

Le principal un est un « repris de justice » de 34 ans, il porte une sorte de bonnet d’âne ou de toque de cuisinier. Eux aussi appellent à sortir en masse le 22 février. 1’32 : « Le 22 nous ramènerons l’indépendance » qu'il dit. « Chaque wilaya doit descendre » Il  précise clairement qu’il est islamiste et qu’il est contre « âhda el khamissa ». Il dit reconnaître que « Ouled el Bahdja » sont les premiers (à manifester contre le régime). L’un se nomme Mohamed et l’autre El Had.

Il fait de longues références à Dieu, à la probité… puis à la fin, à la 24’10’’ il devient très grossier. Puis revient à Dieu. « Notre Politique, Si Dieu veut elle émanera des mosquées comme l’a dit Cheikh Ali Belhadj »
  
Le matin du mardi 19 février, à Khenchela, près d’un millier de personnes se rassemblent devant la mairie sur la façade de laquelle sont posés sur toute sa hauteur, un drapeau et le portrait du président. Des personnes grimpent pour enlever le portrait géant. Les manifestants crient « enlève le gang (le bandit), pas le drapeau ! » (« nahi el issaba, machi el aâlem ») (Le Matin)
 
 Le mercredi 20 février, je poste une vidéo intitulée « Ultima Verba ». Elle a été diffusée sur Youtube, par Ouled El Bahdja « liyam etrouh we twelli wel batel yebka… » J’écris en titre « Retenez bien » et je transcris les paroles telles qu’on les entend dans la vidéo. « Ooooh…/ Lyam etrouh we twelli wel batel yebka / Hadou khellaw ezzawali ya’chak fel mout / Ki wellet hakda la série bqatelha halqa / Ga’ ma tebkich ya bladi chedda we tfout… » etc. Le jeudi soir les prévisions météo diffusées sur El Jazaïriya One indiquent qu’il fera beau temps sur tout le territoire avec pour le matin 0° à El Bayed, 3 sur la côte ouest et en Kabylie, 5 à Alger, 9 à Tamanrasset… L’après-midi : 16 à Alger et ses environs, 14 à Constantine, 20 à Oran, Ghardaïa, 26 à Aïn Salah, 23 à Béni-Abbes, Tabelbala et Illizi…


Le jour J, le vendredi 22 février, « des dizaines de milliers » d’Algériens sortent à Alger et dans d’autres villes. Dès le matin nombreux étaient dans les rues, avant la prière de la mi-journée. Des manifestations contre la candidature de Bouteflika. « La Bouteflika la Saïd ». L’Internet a été perturbé. Des Imams ont demandé dans leurs prêches à ne pas manifester « contre le gouvernant ». À Annaba, des jeunes ont détruit un portrait encadré du président Bouteflika dans une mairie. À Khenchela, des manifestants ont obligé le maire à faire enlever un portrait géant du président sur la façade de la mairie. Les Algériens ne supportaient plus d’être la risée du monde. Les télévisions du monde entier montraient en effet le président algérien harnaché dans son fauteuil, immobile. Et c’est eux-mêmes qu’ils voyaient ainsi, dégradés. Une image d’eux et de leur pays avilis. Nous avons été avilis, lorsque les dirigeants nous présentaient un Cadre en guise de président et contre lequel certains se prosternaient, plus encore lorsqu’ils nous ont présentés cet homme comme une providence, un « nabi », un prophète.

- Tu te répètes là encore Jeddi.

- Tiens, verse-moi un verre d’eau


Pour ce qui est des imam béni-oui-oui, Bejaia F. écrit sur FB : « Les gens refusent de faire la prière et quittent la mosquée El Kawtar après que l’imam a commencé la khotba sur le sujet El Khourouj an el hakim. Sabrina Z., quant à elle écrit : « c’est bien ce qu’on appelle l’arroseur arrosé ! Vous voulez mettre en garde vos ouailles contre el khourouj an el hakim ? Eh bien vous avez eu droit à un khourouj an essalat. Bravo à nos citoyens conscients de Bejaia. »

- C’est quoi béniwiwi

- Oui, oui, deux fois oui, le contraire de non. Les béni-oui-oui ce sont les gens qui se soumettent sans hésiter.

Je poursuis. Dans le journal Le Point.fr du même jour, Adlène Meddi écrit : Les manifestants algériens démolissent un grand panneau publicitaire avec la photo de leur président actuel, Abdelaziz Bouteflika, lors d'une manifestation contre sa candidature pour un cinquième mandat. Les manifestants (sont) sortis à Alger dès l'après-midi, par milliers, bravant l'interdiction de manifester dans la capitale effective depuis 2011… Tôt dans la matinée, des dizaines de camions de la police antiémeute se sont déployés dans Alger-centre. »

Samedi 23 février 2019



Le lendemain, samedi 23 février, j’écris un texte que je poste sur mon blog (https://blogs.mediapart.fr/ahmed-hanifi/blog/070319/33-algerie-revolution-de-velours).Je l’envoie à Algeria Watch, au Quotidien d’Algérie et à Maghreb Émergent. Inutilement. Le voici : « Les Algériennes et les Algériens aspirent à une Algérie authentiquement démocratique, libre et heureuse. Ils l’ont maintes fois prouvé. Cette Algérie libre et heureuse, authentiquement démocratique, ne peut se concevoir sans la liberté de parole. La libre parole, ce droit premier de l’Homme, doit être accessible dans la rue et dans tous les médias, publics et privés, sans entraves… Les Algériens et les Algériennes, qui ont payé le prix fort, ont soif d’une ‘‘Révolution de velours’’, sans donc aucune violence ni casse, sans qu’aucune goutte de sang soit versée. Une Révolution pacifique, celle qu’appréhendent par-dessus tout, les tenants du ‘‘Système’’ actuel, prêts à toutes les intrigues et violences. N’oublions jamais Octobre 1988, ni janvier 1992 et les années qui suivirent, n’oublions jamais non plus les manipulations de la religion à des fins politiques de certains partis et organisations islamistes dont les paroles ont semé la mort par milliers. Cette Révolution douce algérienne a peut-être commencé hier, vendredi 22 février 2019… »

Younes Saadi écrit dans Maghreb Emergent le 23.02 : « Des centaines de milliers Algériens voire plus ont brisé hier vendredi 22 février le mur de la peur et des interdits en descendant dans les rues des villes pour dire non au projet du 5è mandat et exigeant le départ du pouvoir actuel. C’est un véritable tsunami populaire qui a inondé aussi bien les grandes villes que les petites localités du pays… Les rues des villes comme Alger, Constantine, Oum El Bouaghi, Batna, Bejaia, Annaba, Guelma, Blida, Skikda, Khenchela, Bourdj Bou Arriridj et Bouira n’ont pas pu contenir les foules hostiles au 5è mandat. El Watan titre ce samedi matin « L’Algérie dit NON ! », « L’Algérie se soulève contre les Bouteflika » Le Quotidien d’Oran, réservé : « Marches à travers le pays contre le 5° mandat ».

À la question de savoir si lélection lui paraît jouée d’avance, Antoine Basbous, « l’observateur averti » déclare à Libération.fr (le 24.02) « A mon sens oui. Le clan au pouvoir a déjà préparé les chiffres qu’il publiera le 18 avril au soir : le taux de participation, le pourcentage du président sortant. On parle d’un chiffre autour de 80 %... » et ceci en chapô de l’article : « Pour le politologue Antoine Basbous, ni l'opposition algérienne ni la situation économique ne peuvent empêcher le clan du pouvoir, mené par le frère du Président, de faire réélire un homme gravement malade. » Observateur averti.



Dimanche 24 février



Le dimanche 24 février, le chef de l’État s’envole pour Genève pour recevoir des « soins de santé périodiques », alors que la place Audin (Alger) est noire de monde. Des femmes offrent des fleurs à des policiers. Le jour même, la journaliste Meriem Abdou démissionne de son poste de rédactrice en chef de la Chaîne 3 de la Radio nationale à cause de la censure relative aux manifestations du vendredi 22 février. La veille, elle a écrit ceci sur sa page FB “J’ai décidé, moi Meriem Abdou, de déposer, dès demain ma démission de mon poste de rédactrice en chef, membre de l’encadrement de la Chaîne 3. Je refuse catégoriquement de cautionner un comportement qui foule aux pieds les règles les plus élémentaires de notre noble métier”



En France on commence à paniquer. "Le cauchemar du président de la République, c'est l'Algérie. C'était aussi celui de ses prédécesseurs. Les plus hautes autorités de l'Etat sont terrifiées par la perspective d'une grave déstabilisation de notre ancienne colonie après la mort de Bouteflika [président depuis 1999]." Déclare « un personnage central de la macronie » selon La nouvelObs.com du 24.02.

- Tu n’arrêtes pas de gesticuler, tu en as assez ?

- Non, mais est-ce qu’on peu faire une pause ?




Le lundi 25 février



J’ai noté plusieurs points : Louisa Hanoune demande le report de l’élection présidentielle. Le soir, il y a un beau débat sur la chaîne Aljazaïria One. L’émission s’intitule « Philo-Talk ». Discussion sur les idéologies, l’évolution depuis 1962, « quelle Algérie voulons-nous, ay jazaïr nourid. » 



« Le Général de Corps d'Armée Ahmed Gaïd Salah, Vice-Ministre de la Défense Nationale, Chef d'Etat-Major de l'Armée Nationale Populaire a reçu en audience, aujourd'hui 25 février 2019, au siège du Ministère de la Défense Nationale, Madame Elisabetta TRENTA, Ministre de la Défense Italienne » lit-on sur le site du ministère de la défense, alors que plusieurs associations dont RAJ, SOS Disparus, LADDH, Djazaïrouna… signent un texte à la suite des manifestations : « Les Algériennes et les Algériens ont renoués avec la contestation et les manifestations populaires pacifiques en brisant le mur de la peur et bravant la menace en sortant par centaines de milliers dans toutes les villes du pays pour dénoncer le 5ème mandat et revendiquer le changement du système… »



Prise de court par la force des manifestations de vendredi contre la candidature d’Abdelaziz Bouteflika à un 5e mandat, la mouvance islamiste, toutes tendances confondues, est apparue divisée. Parmi les opposants aux manifestations de vendredi, se trouve le très conservateur Comité national de coordination des imams, qui a relayé l’instruction du ministère des Affaires religieuses. En vain, des imams ont tenté dans leurs prêches, lors de la grande prière de vendredi, de dissuader les fidèles de répondre aux appels à manifester, parce que « nul ne sait s’ils émanent d’un Algérien ou d’un ennemi, d’un musulman ou d’un athée »! (Hacène Zerouky- L’humanité du 25.02). Toujours ce lundi 25, un post sur Facebook montre l’image d’une femme offrant une rose blanche à un gendarme, bras tendu, prêt à la recevoir.

Seddik Chihab, le porte-parole du RND, partie de la défaite, de l’échec et de la corruption (avec le FLN) déclare à TSA (25.02) sans manquer d’air : « Il est rare que les changements par la rue réussissent. Il n’y a qu’à revenir aux révolutions colorées (dans l’Europe de l’Est) ou aux révolutions parfumées, les jasmins (Tunisie) ou les œillets (Portugal). Il n’y a qu’à voir la situation actuelle de la Tunisie. Regardez comment ce pays a reculé. Regardez la démocratie égyptienne… La rue peut être un moteur ou un élément de prise de conscience. La rue ne peut pas être une alternative sérieuse »

Les Algériennes et les Algériens se sont sentis insultés par cette indigne mascarade d’un cinquième mandat qui consiste à imposer un vieillard à l’agonie en tant que candidat de l’espoir et du renouvellement. Cet élément a joué comme un détonateur de mécontentement, la goutte d’eau qui a fait déborder un vase d’indignation et d’amertume. Ce que les populations contestent et rejettent ne se limite pas à la reconduction d’un président-zombie. Le peuple algérien est exaspéré et ne veut plus de cette dictature brutale et incompétente, corrompue au-delà de toute expression et qui conduit, au vu et au su de tous, le pays vers de sombres lendemains. (Omar Benderra- Algeria Watch- 25.02)

Je poste ces mots sur a page FB : « Où que nous soyons, en Algérie (tous les vendredis) ou à l’étranger (tous les samedis), manifestons pacifiquement contre le « Système ». Manifestons contre le candidat, et contre tout candidat de substitution. Manifestons notre opposition à tous ls représentants du régime autoritaire algérien. Disons ‘‘ Non au système ». Ne répondons à aucune provocation, ni à aucune violence. » Puis ces autres mots : « Vivement prochain… et les suivants… Marcher pacifiquement pour une Algérie libre et (authentiquement) démocratique. »

Mardi 26 février :



Le général Gaïd Salah tient deux discours différents, diffusés tous deux à la télé : dans le premier (diffusé à 13h), il adopte un ton menaçant à l’égard des manifestants contre le 5e mandat du président Bouteflika. Il s’élève contre « ceux qui veulent pousser les Algériens vers l’inconnu à travers des appels anonyme ». Dans le deuxième (diffusé à 20 h), il est compréhensif. Il a déclaré que « l’Algérie a payé un lourd tribut afin de recouvrer sa sécurité et sa stabilité » il a ajouté qu’il réaffirmait « son engagement personnel à réunir toutes les conditions favorables au bon déroulement de la prochaine élection présidentielle dans un climat de quiétude, de sérénité, de sécurité ». (Madjid Makedhi- El Watan 28.02). On trouve le même constat à Liberté de la veille : « Après avoir brandi la menace, à peine voilée, à l’égard des manifestants, le général de corps d’armée, Ahmed Gaïd Salah, semble s’être rétracté, puisque le passage évoquant les manifestations et diffusé par la télévision publique, dans son discours tenu hier (26.02) à Tamanrasset, a été supprimé dans le texte publié sur le site du MDN et de l’APS. (Liberté 27.02)

Des milliers d’étudiants manifestent pacifiquement à Alger dans les campus et à l’extérieur contre le 5e mandat du président Abdelaziz Bouteflika. La CGATA (Conf. Générale autonome des travailleurs en Algérie) appelle à manifester le 1° mars et le PST appelle à une grève générale pour contraindre le pouvoir à abandonner son projet de 5e mandat.

Le matin, sur France Inter, à 7h55, Léa Salamé s’entretient avec benjamin Stora : « L’Algérie est à un tournant très important… la différence avec octobre 88 c’est que l’armée utilise les jets d’eau pour disperser les foules, elle ne tire pas sur les manifestants, elle est occupée aux frontières… l’Algérie a changé… » De nombreuses vidéos circulent sur FB dont celles de Dzaïr News, montrant des étudiants manifestant à Alger (fac centrale), à Oran, Constantine (ENSC), Sétif (Univ. Lamine Debaghine), Biskra (Université Med Kheider), El Oued, Bejaïa, Bouira, Médéa, Laghouat, Guelma, Tamanrasset (Centre universitaire Aménokal Hadj Moussa), Annaba (Université El Bouni), Chlef… À Alger ils sont empêchés de quitter l’enceinte universitaire. Au siège de la Radio algérienne des journalistes protestent contre la censure, après Meriem Abdou



Suite à la vision d’une vidéo sur le mur de Nacera M. j’écris : CNEWS n’a trouvé mieux que ce titre et c’est regrettable : « Algérie : des manifestants contre un 5° mandat » et Yasmina Khadra fait pire « les Algériens ne sont pas contre Bouteflika, ils sont contre un 5° mandat » (min 2’45). Les Algériens sont contre « le pouvoir », contre « le système », contre « le 5° mandat », contre « el mamlaka »… Le piège est que justement on ne s’oppose qu’au 5° mandat.



Toujours le mardi 26, je lis un bel article de Djamel Zenati et Lahouari Addi, « L’Ultime appel à la raison » in El Watan : « Djamel Zenati, figure du combat démocratique et Addi Lhouari, sociologue engagé signent une tribune dans laquelle ils estiment que ‘le départ de Bouteflika est une exigence populaire légitime et indiscutable.’» De son côté Liberté écrit : « Dans un appel rendu public, hier, et signé conjointement par Djamel Zenati et Lahouari Addi, le duo a traité de la situation actuelle du pays et a appelé le régime à céder la place, sans recourir à la répression, donc à l’embrasement. »



Sur FB j’écris : L’espoir qu’éclose enfin une Algérie démocratique, libre et heureuse, est non seulement permis, mais tous les jours cet espoir se fait un peu plus réel, il est palpable.  À la suite de la désormais historique mobilisation du 22 février (il y a à peine quatre jours), aujourd’hui mardi 26 les étudiants de la plupart des universités algériennes se mobilisent pour dire NON : « non au système, » « non au 5° mandat »…, crier « Pouvoir assassin » Réclamer « Djazaïr Horra, democratia»…  De très nombreuses vidéos circulent ce matin (en direct) sur FB montrant des étudiants manifestant à Alger (fac centrale), à Oran (USTO), Constantine (ENSC), Sétif (Univ. Lamine Debaghine), Biskra (Université Med Kheider), El Oued, Bejaïa, Bouira, Médéa, Laghouat, Guelma, Tamanrasset (Centre universitaire Aménokal Hadj Moussa), Annaba (Univ. El Bouni), Boumerdes (Univ. Mohamed Bouguerra), Djelfa, Bordj bou Areridj, Batna, Oum el Bouagui…  Et ça continue...



Mercredi 27 février



Dans un message audio (enregistrement anonyme) on entend une discussion téléphonique entre Abdelmalek Sellal (ex 1° ministre) et Ali Hadad (patron du CFE) : « Sellal parle de mobiliser les troupes et veut faire un forcing pour empêcher les autres candidatures. »



Benjamin Griveaux, porte parole du gouvernement français déclare : « On a pris note de la décision du président Bouteflika de se porter candidat à l’élection présidentielle… On souhaite que cette élection se déroule dans les bonnes conditions en assurant la transparence de la campagne». Au centre ville de Annaba, des avocats ont tenu un rassemblement devant le nouveau tribunal, pour protester contre le cinquième mandat. El Watan titre en une : Mobilisation des étudiants contre le 5° mandat, Impressionnant !, et Le Quotidien d’Oran : Contre le 5° mandat et pour le changement, des milliers d’étudiants dans la rue. Il y a comme une nuance. Plus tard dans la journée, El Watan rectifie (à la suite de nombreuses critiques sur FB contre le journal) en ajoutant un article : Les étudiants en marche contre le 5° mandat et le système : la protestation vers de nouvelles conquêtes.



Une vidéo montre un extrait du journal télévisée de la chaîne algérienne arabophone d’hier mardi 26 (20h). Sur Canal Algérie, francophone, on a procédé de la même manière (19h15) que ce qu’on voit et entend dans cette vidéo. Durant une minute, on nous a montré des manifestants portant drapeaux et chantant Kassamen. Aucun slogan contre le système (très nombreux) n’est visible. À part l’exécrable « wontoutri » (exécrable car mots creux, béats, vidés de tout contenu éclairé, intelligent), aucune parole audible, juste un immense brouhaha. Le commentaire du « journaliste » est malhonnête (peut-il agir autrement ?) Il nous explique que tous ces étudiants réclament « des réformes » (« islahiyates » dans la vidéo), alors que les étudiants demandent à ce que les responsables politiques « dégagent ».



Très bel article de Ghania Mouffok sur sa page FB : « La nouvelle prière du vendredi »



Jeudi 28 février

Des partis et des forces politiques de l’opposition rejoignent le mouvement populaire  et soutiennent les manifestations notamment la marche prévue pour ce vendredi 01 mars 2019. Le Front des forces socialistes (FFS) a appelé « ses militants, ses élus, ses sympathisants et l’ensemble du peuple algérien à participer massivement et à œuvrer à la préservation du caractère pacifique des manifestations politiques et populaires ».

Des partis politiques (FFS, UCP de Zoubida Assoul) rejoignent le mouvement populaire  et appellent à manifester notamment le vendredi 01 mars 2019.

Une dizaine de journalistes sont brièvement détenus après avoir participé à un rassemblement dénonçant les restrictions de couverture «imposées par (leur) hiérarchie».

Plusieurs personnalités nationales ont signé une «Déclaration au peuple algérien» dans laquelle elles appellent à participer aux manifestations de demain. Les signataires, parmi lesquels le Commandant de la Wilaya IV, Lakhdar Bouregaâ, l’ancien chef de gouvernement Ahmed Benbitour et l’ancien ministre Abdelaziz Rahabi, saluent le soulèvement populaire pacifique qu’ont connu les villes du pays vendredi 22 février, et appellent les autorités à cesser «de sous-estimer» et «d’insulter» le peuple algérien en soutenant la candidature de Abdelaziz Bouteflika à un 5e mandat.

- Je commence à avoir faim, pas toi ma petite fille ?

- On continue demain ?

- Quand tu veux, mais préviens moi un peu avant que je me libère, même si je suis à la retraite, je travaille beaucoup. Tu le sais.
(à suivre)
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