Nous
avons laissé un mot sur le Journal d’or de Mustafa et Tahir, les patrons du
Camping de Sultan Hani et avons pris la route pour Konya après un petit tour
dans le village de Sultan Hani. On s’affaire, des groupes de moutons attendent
qu’on les délivre. Ils ne savent pas leur destin…
La fête du mouton est là.
Mais nous ne savons pas sa date exacte.
Konya
est une belle ville. Nous avons visité son centre, très animé, une véritable
ruche, puis la mosquée Alâddin, aidés par un guide non officiel, fort
sympathique et qui s’est gentiment imposé comme tel. Explications… La mosquée
fut construite entre le 12° et 13° siècles. C’était à
l’époque la « Mosquée du Sultan » de Roum. Le mausolée
contient plusieurs membres de la dynastie seldjoukide. Une partie est en cours
de réaménagement et donc inaccessible. Etc.
Le
musée Mevlana est hélas fermé pour cause de fête. Il est abrité par un édifice
du 13° s, avec une belle tour et de la céramique de couleur verte.
Plusieurs
tombeaux de membres de la famille Mevlana y sont abrités ainsi que certains de
leurs disciples.
Le soir, nous avons assisté à une magnifique représentation
offerte par des derviches tourneurs de la ville, dans le très beau centre
culturel : le Mevlana Kültür Merkezi (3000 places environ).
Nous
avons ensuite passé une nuit infernale entre la circulation, les pétards, les
voisins (iraniens- 8 grosses voitures et camping-car) qui ouvrent et ferment
les portes de leurs véhicules, les micros (à fond comme à Oran) de, non pas
une, non pas deux, mais d’une demie douzaine de mosquées. On entend même les
prières dans leur totalité.
Aucun
signe de fête, pas un mouton mort ou vif dans les rues, sinon des banderoles
accrochées aux carrefour, souhaitant « Moubarek Olsin ». Le sacrifice
semble extrêmement contrôlé. Et c’est une bonne chose. La ville est propre -
disons propre de ce qui relève du sacrifice du mouton, pas du reste. La saleté
est partout hélas présente. Et le sang (la violence) est inabordable aux
enfants. Aucun trottoir souillé, aucune devanture, aucune entrée
d’immeuble : rien ne renvoie ni au couteau, ni au sacrifice. Ceci étant,
ce dimanche est une journée morte. La circulation est quasiment inexistante.
Nous
sommes allés à Sille. L’église et le musée sont fermés, pour cause. Sille est
un ancien village grec au nord-ouest de Konya, dans une vallée entourée de collines. L’église Aya
Elena, lieu de pèlerinage pour les Grecs a été construite au 4° s.
Dans
la programmation de notre GPS, nous évitons autant que possible les routes à
plus de 2000 mètres que ni le Nomadeur, ni moi ne supportons. Un ciel bleu en
ce jour d’aïd, débordant de chaleur. Des parcelles de champs à Karahuyut
éclatent de couleurs. Tout est figé. Le vent léger qui souffle, n’a aucun effet
sur l’immobilité environnante.
Voilà
l’entré du village Ogroduz et sa belle mosquée au cône bleu éclatant et vif. En
fin d’après-midi de dimanche, nous sommes arrivés à Egïrdir, autre belle ville
posée sur le lac qui porte son nom. Il est le 4° lac de Turquie (48 km de long
sur 3 à 17 de large et parfois 30 mètres de profondeur). Seule une partie de la
citadelle - sensée à son époque protéger la presqu’île - est restée debout.
En son front on lit le nom
de la ville qu’un immense drapeau turc accompagne. En sa presqu’île se
trouverait une église, St-Étienne ou Aya Stafanos Kilisesi, que nous n’avons
pas trouvée. La ville est très animée. Ainsi, le soir du 1° jour de l’aïd el
Adha, un son et lumière a été donné sur les bords du lac Egïrdir. Exit le
mouton, la fête se transforme en un hymne à la gloire de la Turquie, avec
musique militaire de type Orchestre de l’Armée Rouge, beaucoup moins
sophistiquée. Il était 21h30 et n’étions qu’une quinzaine de spectateurs. Le
son, lui, s’adressait à tout le quartier, tant il était très fort.
À
l’entrée des villes un panneau indique leur nom et le nombre de leurs habitants
ou « nufus » ; Ainsi, ici à Saraköy, 30800 nufus. Le mardi 13
fut, comme un vendredi (13), de malchance. Il arrive ainsi que le ciel, ou la
porte, vous tombe sur la tête. Un pépin anodin, ou plus sérieux… Ce fut le cas
à Pamukkale, ce beau village où « des sources chaudes chargées de sel
calcaire ont modelé la montagne depuis des milliers d’années en une cascade
d’une blancheur éblouissante » (notre guide). Mais enfin nous connaissons
la musique… Plus important sont le voyage et les rencontres. Incroyable, nous
avons constaté qu’en Turquie il y a très peu ou même pas de café du tout. Et,
spontanément à la vente, on vous propose du Nescafé, même le café turc est détrôné
par le çay (thé) que l’on trouve partout au prix de 1 à 6 Tl. J’avoue que notre
cher thé à la menthe maghrébin est mille fois plus savoureux, avec ou sans
sucre. À l’oranaise, à la marocaine ou à la taghitiya.
La
ville de Naziili est traversée par de grands arbres comme l’est Fos-sur-Mer.
Grandes allées plantées de pins et de palmiers accompagnées du chant des
cigales. Manque la Méditerranée. Avant et après Eckichar, de longues routes
montagneuses, larges de deux fois deux voies.
Le
village de Kapikiri, au bord du lac Bafa, qu’on dirait de pêcheurs, semble ne
rien attendre hors du temps qui passe. En retrait du village, au
camping-restaurant-café… trois personnes vous accueillent avec gentillesse
« English ?... »
Une
sympathique basse-cour, tonitruante, vous invite à la sérénité… beau lac. Juste
face au restaurant, un ancien château nous rappelle que des Grecs et des
Romains ont vécu ici. Alentours on trouve des vestiges de monastères byzantins.
À la sortie du bourg nous avions fait face à un troupeau de vaches
nonchalantes, qui, comme ses cousines géorgiennes, ne tiennent absolument pas
compte des véhicules comme des chauffeurs qui les conduisent. Elles sont
« maîtres du jeu ».
Sur
la route d’Izmir une fontaine par-ci, par-là, sont les bienvenues, notamment
aux heures de repas et de repos.
Izmir,
3° du pays vous accueille dans le fracas de ses boulevards, de ses camionneurs,
de son port (le 2° du pays). Dans le cœur de la ville, près de la Petite
mosquée et de la Tour de l’horloge, un groupe de jeunes gens tape des pieds et
des mains dans un ensemble très codifié, en avançant, reculant, faisant un pas
de côté, réalisant ainsi un grand cercle, puis certains quittent le groupe,
remplacés par d’autres… accompagnés par le son amplifié d’un saz (oud) à trois
cordes manié par un musicien doué.
On
se photographie, on se selfie… près de la tour de l’horloge (monument offert
par le Kaiser Guillaume II)
et de la Petite mosquée octogonale (1748). À
l’intérieur de celle-ci on ne tient pas à plus de vingt personnes et nombreux
effectuent la prière tout autour.
En
fin de journée, nous nous sommes installés à quelques dizaines de mètres du
grand parc qui borde le golfe sur les rives duquel, le soir venu, des dizaines
de familles
(disons 200 personnes ce soir) pique-niquent dans la joie de l’aïd
du mouton. Dans la simplicité, dans la convivialité (le seul reproche que l’on
peut leur faire c’est la propreté qui n’est pas certaine du tout).
Sur
la route, la folie des chauffards continue. J’en suis arrivé à rafistoler une
sorte de canne avec, accroché au bout, un chiffon rouge que j’agitais lorsque
nécessaire par la fenêtre du Nomadeur, à gauche ou à droite, selon, pour
signifier à ces chauffards, en plus de mes clignotants, que je tournais.
Après
les champs de maïs, blé et tournesols, voici qu’à 22 km au sud de Bergama,
s’étend un champ énorme de pales d’éoliennes. L’avenir s’annonce venteux dans
la région, et puis d’autres champs d’éoliennes plus loin, prêtes à être
installées. Une cinquantaine de ces mêmes moulins modernes, font tourner leurs
ailes face à la mer Égée du nord, et l’île grecque Lesvos.
À
chaque moyenne ou grande ville, on se dit « là peut-être les chauffeurs
turcs vont agréablement nous surprendre. » Et à chaque fois nous sommes
stupéfaits par leur hardiesse à aller plus avant encore que les
chauffeurs-chauffards des villes précédentes.
Sur
la route de Canakkale, 30 km avant, se trouve le village de Troie,
entièrement dédié aux touristes.
Ici, dans cette région, l’enlèvement de Hélène,
provoqua une guerre homérique… dont nous ne savons si elle eut bien lieu ou
non. Par contre elle donna lieu à quantité de Péplum que mon adolescence a
gravé dans sa mémoire. Je n’oublie pas ces monstrueux blocs de pierres qui s’écrasaient
sur les guerriers qui tombaient raide-morts, mais qui provoquaient, lorsqu’ils
se brisaient sur les chevaux (acteurs) qu’un simple ébrouement suivi d’un
hennissement. Dans la salle sombre du Lido (Gambetta, Oran) ou était-ce à St Eugène à L'Écran des jeunes... nous éclations de
rire par tant de légèreté.
Au
cœur du village de Troie, près du musée, ce sont les bustes en carton-pâte des
héros de l’époque qui vous accueillent, ainsi : Hélène, Paris, Odysseus,
Agamemnon, Ajax, Achille… et Homère bien-sûr.
Les champs de bataille de la
Guerre de troie se sont transformés en champs de maïs, tomates, tournesols… et
les villageois, les hommes, sirotent en paix, en çay, en tapant du domino.
À
Canakkale, non loin de l’embarcadère, nous sommes accueillis par un énorme
cheval de Troie, construit pour un film : « Troy ».
On
quitte Canakkale et l’Asie pour le continent européen et l’autre rive turque.
La traversée du détroit des Dardanelles (la Mer de Marmara) se fait en 30
minutes, sur un de ces nombreux ferries (3 ou 4 toutes les demi-heures) pour 45
Tl pour joindre Kilibatir ou 80 Tl pour Eceabat, notre choix.
Un
français accompagné d’une jeune Turque discute dans le bar du ferry avec un
jeune Turc. Puis le Français lève son verre et dit : à ta santé ! Le
Turc répond : « à ta turque ! » Le français répond aussi
spontanément que possible : « vive Ataturk ! »
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