« Vies d’exil », une
exposition à la Cité nationale de l’histoire de l’immigration qui se tient au
Palais de la Porte Dorée (12°) (9 octobre 2012 – 19 mai 2013)
Il y a des semaines que je
souhaite visiter cette exceptionnelle exposition temporaire intitulée
« Vies d’exil – des Algériens en France pendant la guerre d’Algérie :
1954-1962 » dont les commissaires sont Benjamain Stora et Linda Amiri.
C’est chose faite, ce 14 février 2013.
Extraits de « parcours
de l’exposition » :
« Cinquante ans après la fin
de la guerre d’Algérie, la Cité propose avec l’exposition Vies d’exils, des
Algériens en France pendant la guerre d’Algérie une plongée inédite dans le
quotidien des travailleurs algériens en France entre 1954 et 1962. Pendant
cette période, l’immigration, loin de ralentir, s’accélère au contraire, la
population algérienne passant au cours de la période de 220 000 à 350 000
personnes.
Fait nouveau dans l’histoire de l’immigration algérienne : il ne
s’agit plus exclusivement d’une immigration masculine, et les familles
rejoignent peu à peu leurs proches dans l’exil. Entre conflits nationalistes et
répression policière, le difficile quotidien n’entame cependant pas la volonté
des immigrés de vivre en s’insérant dans la société de consommation qui se
profile alors en métropole. »
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Le mot des commissaires
Benjamin Stora et Linda Amiri
Cinquante ans après la fin de la
guerre d’Algérie, la Cité nationale de l’histoire de l’immigration propose avec
l’exposition Vies d’exils, des Algériens en France pendant la guerre d’Algérie
une plongée inédite dans le quotidien des travailleurs algériens en France
entre 1954 et 1962.
Pendant cette période,
l’immigration, loin de ralentir, s’accélère au contraire, la population
algérienne passant au cours de la période de 220 000 à 350 000 personnes. Fait
nouveau dans l’histoire de l’immigration algérienne : il ne s’agit plus
exclusivement d’une immigration masculine, et les familles rejoignent peu à peu
leurs proches dans l’exil. Entre conflits nationalistes et répression
policière, le difficile quotidien n’entame cependant pas la volonté des immigrés
de vivre en s’insérant dans la société de consommation qui se profile alors en
métropole.
Cette exposition se propose
d’aborder les diverses réalités de vie des migrants algériens à travers la
question de la vie sociale- travail, école, logement, loisirs… -, de l’accueil
accordé à l’immigration algérienne, entre méfiance, rejet, et solidarité de
leur engagement politique et syndical- la France métropolitaine de l’époque vit
aussi au rythme de la guerre d’Algérie, de la vie culturelle et intellectuelle,
des événements d’octobre 1961 et enfin, de l’indépendance.
Une riche sélection d’objets,
d’œuvres d’art, de documents et de photographies, issue de fonds d’archives, et
de collections tant institutionnelles que privées illustrera ces différentes
thématiques.
Contrairement à une idée reçue,
l’immigration algérienne n’est pas une immigration récente. Les Algériens
s’installent en France dès le début du XXe siècle. Ce sont essentiellement des
paysans originaires de Kabylie envoyés par leur village avec, pour mission, de
renvoyer des mandats postaux à leur famille.
C’est également dès les années
1920 et jusqu’aux années 50 que différentes organisations politiques se
développent sur le territoire métropolitain. En 1926, Messali Hadj - le père
fondateur du nationalisme algérien chez qui de nombreux responsables du Front
de Libération Nationale (FLN) de la guerre d’Algérie feront leurs armes - crée
l’Etoile Nord-Africaine (ENA). Interdite par les autorités françaises, l’ENA
sera remplacée par le Parti du Peuple Algérien (PPA) en 1937, puis par le
Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques (MTLD) en 1946, qui, à sa
dissolution le 5 novembre 1954, donne naissance au Mouvement National Algérien
(MNA).
Ces formations, qui se situent à mi-chemin entre l’idée républicaine et
socialiste, et le sentiment d’appartenance à une identité religieuse, seront de
formidables machines à rassembler et à sensibiliser les Algériens à l’injustice
coloniale. Dans les baraquements du bassin minier du Nord de la France ou dans les
cafés-hôtels des banlieues de la région parisienne, les hommes de Messali Hadj
sont venus à la rencontre des immigrés pour leur prêcher la « bonne parole ».
Dès les années 1930, les cafés-hôtels deviennent ainsi des lieux de vie et de
mémoire. On y prend les nouvelles du « bled », on y écoute de la musique, on y
recherche du travail ou on y fait la prière du vendredi. Le sentiment national
va naître de l’exil. Loin de sa terre l’immigré algérien découvre l’entre soi,
une connivence avec d’autres exilés. Dans le cadre colonial en Algérie, il est
difficile de s’organiser : il est paradoxalement nécessaire de rejoindre cette
France, à laquelle il va falloir s’opposer, pour être en mesure de mettre en
place un mouvement politique.
Pourtant, tous ces hommes resteront
longtemps des « hommes invisibles ». Car comment appeler ces Algériens, qui
venant d’un territoire considéré comme français (l’Algérie est alors considérée
comme intégré à la nation française) ne sont pas de « vrais » citoyens
français, mais se trouvent relégués dans leur condition d’« indigènes musulmans
» ?
La situation juridique évoluera
avec une seconde vague qui arrive entre 1945 et 1954, entre la fin de la
Deuxième Guerre mondiale et le déclenchement de la guerre d’Algérie. Les hommes
viennent maintenant de toutes les régions : du Constantinois (Est), fuyant la
famine de 1944-1945, et de l’Ouest algérien. Les années 1950-1952 voient
surtout le début de l’immigration familiale. On assiste alors à une autre
construction de l’exil algérien. Celui-ci va s’enraciner. Ces immigrés sont
davantage formés que leurs prédécesseurs. Ils comptent de nombreux ouvriers
qualifiés qui investiront notamment les grands bastions de la métallurgie. La
grande majorité de ces ouvriers rejoignent les syndicats, essentiellement la
CGT. Ils sont surtout fortement engagés politiquement dans la Fédération de
France du Parti du Peuple Algérien-Mouvement pour le Triomphe des Libertés
Démocratiques (PPA-MTLD), qui compte, avant 1954, près de 10 000 militants sur
les 200 000 Algériens de France. Le FLN verra le jour à ce moment là, en 1954.
Mais c’est véritablement pendant
la guerre d’Algérie que cette immigration prendra sa physionomie définitive.
L’immigration familiale qui avait débuté timidement à la fin des années quarante
connait en effet durant ces années de guerre une progression constante. Mais
que sait-on réellement de la vie de ces hommes, de ces femmes et de ces enfants
? Cinquante ans après l’indépendance, le temps est venu de lever le voile sur
une histoire méconnue, celle de l’immigration algérienne pendant la guerre
d’indépendance. Tel est le propos de l’exposition Vies d’exil, des Algériens en
France pendant la guerre d’Algérie conçue par Benjamin Stora et Linda Amiri et
produite par la Cité nationale de l’histoire de l’immigration.
Autour d’une thématique inédite,
l’exposition s’appuie sur une iconographie rare où archives, photographies,
son, images et œuvres d’art s’unissent pour mettre en lumière une histoire où
la beauté se mêle à la précarité, la joie à la nostalgie et à la violence.
Cette musique douce-amère que les Algériens nomment El Ghorba, l’exil. Grâce à
la richesse des œuvres mis à jour et aux nombreux témoignages de témoins de
l’époque, le visiteur est plongé dans la société métropolitaine. Travail,
logement et loisirs mais également combat indépendantiste rythment
l’exposition.
L’exposition et le catalogue qui
l’accompagne s’attardent bien évidemment sur la séquence décisive de la guerre
d’Algérie, et sur la façon dont elle a été vécue par les immigrés algériens en
France. Entre les violences policières françaises, comme la nuit tragique du 17
octobre 1961 où périrent de nombreux Algériens en plein Paris, et les cruels
règlements de compte entre nationalistes algériens, ceux du MNA de Messali Hadj
et ceux du FLN, l’immigration algérienne a été confrontée a un moment terrible
de son histoire. Les ouvriers exilés menaient pendant cette période une double
existence. Une fois les sirènes des entreprises éteintes, la vie du militant
débutait. Même si la plupart étaient d’un faible niveau d’instruction, les
immigrés se passionnaient pour la politique. Ils discutaient ou écoutaient
beaucoup la radio, lisaient ou se faisaient lire les journaux. L’image de
l’immigré, ouvrier sans mémoire, sans politique, sans passé, malheureusement
encore tenace aujourd’hui, ne correspond donc pas à la réalité.
Comme beaucoup
de membres de mouvements clandestins, ces hommes et ces femmes ont nourri la
culture du secret. Plusieurs décennies après la fin de la guerre d’Algérie, ils
hésitent encore à parler. Certains, décédés, ont emmené avec eux des pans
entiers d’une histoire tragique. L’exposition Vies d’exil raconte cette
histoire peu connue, placent en pleine lumière ces hommes longtemps invisibles,
dit leur quotidien fait de joies et de peines.
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Vous en saurez beaucoup plus
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