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Djamel Amrani_ Photo El-Watan 01 03 2015 |
10e anniversaire de la disparition
de Djamel Amrani : Révolutionnaire, poète «maudit»
Djamel Amrani était un grand poète algérien, un révolutionnaire, un
homme de radio et critique littéraire. Les amis de l’auteur de Témoin et
Bivouac des certitudes s’appellent Kateb Yacine, Issiakhem, Jean Sénac, Pablo
Neruda, Françoise Sagan, Barbara, Malek Haddad, Mohamed Zinet, Juliette Gréco,
Florence Malraux, Jean et Simone Lacouture, Jean-Marie Domnac, ou encore Serge
Régiani.
Un pedigree d’amis déclarés l’entourant, défendant sa cause
juste, celle de l’indépendance de l’Algérie, et appréciant le grand poète.
André Breton dira de lui : «Djamel Amrani est immense, il est le plus grand
poète de l’Algérie...». Auteur d’une trentaine d’œuvres (Bivouac des
certitudes, Le dernier crépuscule, L’été dans ta peau, Vers l’amont...), Djamel
Amrani était au service de son prochain, de ses semblables, les humains.
Et de sa patrie, l’Algérie. Pour laquelle il a été un
battant, un combattant, un résistant, un moudjahid sans démagogie, un «mutilé»
de guerre psychologiquement et un enfant prodigue et prodige de la prosodie et
autres allitérations à la consonance balistique, créative et lyrique
algériennes.
Car marqué à vie par la barbarie belliqueuse et coloniale
de l’armée française.«J’ai été torturé, incarcéré, ils ont tué mon père, mon
frère et mon beau-frère…». Dans un entretien inédit datant de novembre 2004,
Djamel Amrani nous avait livré et «délivré» une profonde, béante et
lancinantensouffrance : «Au lycée Bugeaud, à Alger, j’étais confronté aux
colons et non pas à la colonisation.
J’ai eu mon bac envers et contre tous. En 1956, j’étais
impliqué dans le mouvement national, la réunion préparatoire de la grève des
étudiants et lycéens algériens. Il était question que j’aille au maquis avec
Amara Rachid…Et puis, en 1957, lors de la Bataille d’Alger, j’ai été arrêté et
torturé à la villa Sésini.
Ils m’ont massacré. Ils ont tué mon père, mon frère et mon
beau-frère Ali Boumendjel. J’ai été incarcéré durant un an. En 1958, j’ai
été expulsé en France, où Germaine Tillon m’introduira à la gauche, anticoloniale
à l’époque… J’ai traversé cela comme un enfer de couleur corbeau…».
Ayant une voix radiophonique, caverneuse, patriarcale, le
flegme et l’indolence d’un petit vieux à l’espièglerie et le sourire en coin,
la générosité et la grandeur humaine incarnées, tapi dans son transat, un faux
air d’Ernest Hemingway, entre deux volutes de tabac, entre un sourire, un rire
et un rictus, sous une moiteur domestique, respirant et transpirant la bonté
des humbles, Djamel Amrani était dans son coin de Florence. Tant son paisible
havre est une cour des miracles.
Un véritable musée de la photo dédié aux personnes ayant
compté dans sa vie. Ici Lénine ou Che Guevara, le révolutionaire argentin, là,
Kateb Yacine, le brillant écrivain de Nedjma, là-bas, Khalida Toumi, ex-ministre
de la Culture, ou encore les portraits de Azzedine Medjoubi, le comédien fauché
par la folie meurtrière terroriste, Myriam Makeba, la Mama Africa, ou encore
Zahia Yahi et Leïla Boutaleb, des amies et confidentes.
Le 13 juillet 2004, il s’était vu décerner la médaille
Pablo Neruda, à l’effigie de l’illustre poète et progressiste chilien, le non
moins prix Nobel de littérature en 1971 et auteur mythique d’œuvres comme Le
chant général du Chili, L’Espagne au cœur, Tout l’amour, Mémorial de l’île, ou encore
celle posthume, intitulée J’avoue que j’ai vécu. Une distinction au nom de
Pablo Neruda. Son ami, son maître, son frère, pair et père spirituel partageant
cet amour éperdument épris pour les mots et les causes justes et nobles. Cette
gratification au souffle poétique, initiée sous l’impulsion et la proposition
de Khalida Toumi pour une consécration bien que tardive, mais ô combien
significative. «Je n’ai jamais voulu parler de moi, rédiger ma biographie.
C’est être égoïste…», estimait-il.
«Ma plaie dans l’âme, on ne la négocie pas »
Djamel Amrani est né le 19 août 1935 à Sour El Ghozlane.
Issu d’une modeste famille de neuf enfants dont il était le benjamin. D’un père
exerçant la profession de receveur des P et T et d’une mère n’ayant jamais été
scolarisée. Suivant leur père à travers des missions itinérantes, la famille
Amrani séjournera dans plusieurs localités, notamment à Cherchell, avant de
s’installer définitivement, en 1952, à Alger.
Le jeune Djamel y fréquentera l’école communale de Bir
Mourad Raïs. Et c’est en usant ses fonds de culotte sur les bancs d’écolier
qu’il fera une découverte littéralement littéraire et capitale dans sa vie. La
mort du loup, d’Alfred de Vigny, et Les amours de Chopin, de George Sand, qu’il
connaissait par cœur, l’inspireront aux premiers jets poétiquement candides.
Une passion était éclose. «J’étais déjà poète à la base. Je
faisais de la musique. J’étais au conservatoire d’Alger, je jouais du piano à
15 ans. J’étais le seul Algérien à avoir concouru avec la 5e étude de Chopin,
la 7e nocturne de Gabriel Foret et puis suivront La Passionata...», se
souviendra-t-il. Au lycée Bugeaud, le plus réputé d’Alger, où il avait emmené
avec lui ce qu’il appelle des «odelettes» et dont il fera un autodafé car
jugées inintéressantes.
Sa toute première œuvre fut Le Témoin, en 1960, aux
éditions de Minuit. «Ce livre est l’histoire dramatique de ma vie... Je jouais
pour la syntaxe quelle qu’elle soit... C’est un jeu avec mon histoire quand
j’ai appris à lire et à écrire..», commentera-t-il, la gorge nouée. Après un
long séjour à Cuba, de 1962 à 1964, Djamel Amrani officiera à l’état-major,
dans le cabinet du président Houari Boumediène, avec Abdelaziz Bouteflika,
Medegheri et Chérif Belkacem. «La première fois que j’ai rencontré Bouteflika,
il m’a présenté Nelson Mandela…», se rappellera-t-il avec fierté.
A propos de ses amis, il dira avec ironie : «Kateb Yacine,
qui m’a encouragé, et Jean Sénac ont été des frères immenses pour moi. Je me
dois de saluer leur mémoire. Malek Haddad avait été un grand ami... Cela n’a
été que des histoires de bar. On se voyait et on passait notre temps…».
A la fin de l’entretien, Djamel Amrani nous laissera ce
fragment testamentaire d’un poète «maudit» : «L’être humain, poète meurtri, ne
peut pas être finalement guéri d’une histoire. Je n’ai jamais été guéri. Je
n’ai jamais eu l’occasion ou la chance de guérir. Ma plaie dans l’âme, on ne la
négocie pas. Ma plaie est ouverte. Elle est béante !»
K. Smail
In El Watan 01 mars 2015
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http://djamel.amrani.voila.net/biographie.htm
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In: ALGERIE_LITTERATURE / ACTION N° 39/40_ OCTOBRE 2000
De
son vivant, Djamel Amrani considérait qu'un poète, quel qu'il soit, doit
établir, sous une forme ou une autre, un rapport vital avec la vérité ; il doit
s'engager dans une quête de vérité.
Djilali Khellas
In El Watan du 26/12/2005
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«Djamel Amrani demeure le porte-drapeau de la poésie nationale de vocation
francophone […] Il s’est occupé, depuis l’indépendance, à former les jeunes
talents», disait Rachid Boudjedra lors d’un récital poétique en février 2003.
Le drapeau est aujourd’hui en berne. La muse qui pleure le poète disparu se
fera-t-elle entendre par tous ces jeunes talents dont il s’est occupé ?
Aux derniers jours de l’hiver, Djamel Amrani s’en est allé. Quelques jours
après le départ de la dame Aïcha Haddad, le moudjahid, poète, écrivain et homme
de radio, a tiré sa révérence, le mercredi 2 mars. A l’automne de sa vie,
l’homme aux multiples vies fait le dernier voyage, en jetant l’émoi parmi ceux
qui l’ont connu. «Pour la radio algérienne, cette perte est terrible. Elle est
irréparable», déplore Zouaoui Benhamadi, directeur général de l’ENRS. «Il
restera aux différentes générations de notre grande famille qui l’auront côtoyé
leurs yeux pour pleurer mais aussi leurs ardeur et détermination pour de
nouveau, encore et toujours entonner ses poèmes», écrit M. Benhamadi dans un
message de condoléances, qu’il conclut en un message d’amour : «Djamel,
nous t’aimions avec la passion que tu mettais à nous enseigner l’honneur.»
Khalida Toumi, ministre de la Culture, a exprimé, pour sa part, son immense
tristesse à l’annonce du décès de «[mon] ami Djamel Amrani, moudjahid, poète,
écrivain, homme de radio, homme d’art», dans un message adressé à la famille du
poète. «A cet homme généreux, discret, profondément attaché à la jeunesse de
son pays auprès de laquelle il n’a cessé de diffuser et faire aimer poésie,
rythme, amour de l’Algérie, de son peuple, de ses paysages, de son histoire et
de sa culture, je rends hommage et exprime toute ma reconnaissance», conclut
Mme Toumi. Abdelaziz Bouteflika, président de la République, rend hommage à un
homme «resté égal à lui-même, exprimant sans cesse son talent par l’écriture
avec ses qualités bien connues : la modestie et l’humilité. Nous avions en
commun, depuis que je l’ai connu, l’amour de la patrie, et mon respect pour lui
était à la mesure de son immense culture, sa simplicité et sa constance dans la
défense de l’Algérie». Celui qui a consacré sa vie au verbe tient, à 70 ans,
des centaines de poèmes et une voix et une présence radiophonique dans «Poésie
ininterrompue» qui nous a accompagnés durant des années. Né le 29 août 1935 à
Sour El Ghozlane, Djamel Amrani a interrompu ses études lors de la grève des
étudiants en 1955 et fut arrêté en 1957. Après un séjour à Paris puis à Oujda,
il rejoint l’état-major de l’ALN. Après l’indépendance, il fera partie du
premier cercle des poètes francophones. Avec une escale à l’ambassade d’Algérie
à Cuba en qualité de conseiller culturel. De ses œuvres, on citera Bivouac des
certitudes (SNED, 1969), Aussi loin que mes regards se portent, (SNED, 1972),
Jours couleur de soleil, (SNED, 1978), Entre la dent et la mémoire, (SNED,
1981), L’été de ta peau, (SNED, 1982), La Plus Haute Source (ENAL, 1983), Au
jour de ton corps, (ENAL, 1985), ou Déminer la mémoire, (ENAL, 1986). L’été
2004 a doublement fêté Djamel Amrani. Récipiendaire de la médaille Pablo Neruda
à Alger en juillet, il aura également la reconnaissance de ses compatriotes, et
de ses lecteurs, en septembre via le prix des libraires 2004 pour l’ensemble de
son œuvre, octroyé en marge du 9ème Salon international du livre d’Alger. Le
meilleur témoignage-hommage de son vivant émane de Rachid Boudjedra lors d’un
récital poétique en février 2003 : «Djamel Amrani demeure le porte-drapeau de
la poésie nationale de vocation francophone […] Il s’est occupé, depuis
l’indépendance, à former les jeunes talents.»
Y. B.
05 mars 2005_ iN La Tribune _ Le poète interrompu
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Djamel Amrani,
né le 29 août 1935 à Sour El-Ghozlane (Algérie) et décédé le 2 mars 2005 à Alger, est un écrivain algérien d'expression
française.
Djamel Amrani est scolarisé en 1952, à
l'école communale de Birmandres (Bir Mourad Raïs). Le 19 mai 1956, il participe
à la grève des étudiants algériens. En 1957, il est arrêté, torturé et
incarcéré par l'armée coloniale. En 1958, à sa sortie de prison, il est expulsé
vers la France. En 1960, il publie son premier ouvrage aux Editions de Minuit, Le
Témoin. Cette même année, il rencontre Pablo Neruda et crée le journal
"Chaâb". En 1966, il devient producteur d'une émission maghrébine à
l' ORTF, et entame une carrière radiophonique aux côtés de Leïla Boutaleb à la
radio algérienne. En 2004, il reçoit la médaille Pablo Neruda, haute
distinction internationale de la poésie.
In WikipediaWikipedia
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http://www.jehat.com/Jehaat/Fr/Poets/Djamel.htm
--> Djamel Amrani à la voix radiophonique, caractéristique, caverneuse, patriarcale, le flegme et l’indolence d’un petit vieux à l’espièglerie en sourire en coin, la générosité et la grandeur humaine incarnées, tapi dans son transat, un faux air d’Ernest Hemingway, blotti dans son fauteuil, entre deux volutes de tabac, entre un sourire, un rire et un rictus, sous une moiteur domestique, il respire et transpire simplement la bonté des humbles.
« Les poètes nous aident à aimer »
Anatole France
Cet homme, c’est le grand et l’immense poète algérien, homme de radio et critique littéraire, Djamel Amrani, l’auteur du Témoin et Bivouac des certitudes, dans son antre algéroise. Un coin de Florence. Tant son paisible havre est une cour des miracles. Un véritable musée de la photo dédié aux personnes ayant compté dans sa vie. Ici, Che Guevara, le révolutionaire argentin, là, Kateb Yacine, le brillant écrivain de Nedjma, là-bas, Khalida Messaoudi, ministre de la Culture ou encore les portraits de Azzedine Medjoubi, le comédien fauché par la folie meurtrière, Myriam Makeba, la Mama Africa, Zahia Yahi et Leïla Boutaleb, des amies et confidentes. Une idolatrie attendrissante et humaniste déconcertante. Il est d’une pruderie et d’une pudeur maladives.
Il ne veut pas parler de lui. Il est d’une grande humilité. La preuve ! C’est un mécène et un agitateur de jeunes talents qu’il protège, encourage et porte au firmament en adoptant un forcé profil bas. « Je n’ai jamais voulu parler de moi. C’est égoïste... ! » estime-t-il. Et pourtant, ce trouvère vient d’être le récipiendaire d’une récompense internationale révélant la dimension poétique, littéraire, utile, intellectuelle, universelle, humaine et surtout cardinale d’une trentaine d’œuvres (Bivouac des certitudes, Le dernier crépuscule, L’été dans ta peau, Vers l’amont...) au service de son prochain, de ses semblables, les humains. Et de sa patrie, l’Algérie. Pour laquelle il a été un battant, un combattant, un résistant, un moudjahid, sans démagogie, un « mutilé » de guerre psychologiquement et un enfant prodigue et prodige de la prosodie et autres allitérations à la consonance balistique, créative et lyrique algériennes. Car marqué à vie par la barbarie belliqueuse et coloniale de l’armée française.
Le 13 juillet 2004, le destin a voulu que Djamel Amrani se voit décerner la médaille Pablo Neruda, à l’effigie de l’illustre menestrel et progressiste chilien, le non moins prix Nobel de littérature en 1971 et auteur mythique d’œuvres comme Le chant général du Chili, L’Espagne au cœur, Tout l’amour, Mémorial de l’île ou encore celle posthume intitulée J’avoue que j’ai vécu. Une distinction au nom de Pablo Neruda. Son ami, son maître, son frère, pair et père spirituel partageant cet amour éperdument épris pour les mots et les causes justes et nobles. Cette gratification au souffle poétique, initiée sous l’impulsion et la proposition de Khalida Toumi pour une consécration bien que tardive mais ô combien significative a été remise par le président chilien Ricardo Lagos Escobar, et ce, à travers l’ambassade du Chili à Alger lors d’une cérémonie solennelle et fraternelle.
« Pour moi, ce prix est une grande distinction et une énorme surprise. Pablo Neruda, un grand poète et résistant, que je considère vraiment comme un maître pour son combat. C’était un ami. Je l’ai rencontré à deux reprises. La première , à Paris où il occupait le poste d’ambassadeur du Chili et la seconde, à Cuba. C’était lors d’un colloque international littéraire et poétique. J’en garde franchement un souvenir émouvant... » commentera-t-il à propos de cette médaille à l’avers et le revers de son heure de gloire non seulement nationale mais aussi internationale encore une fois. Djamel Amrani est né le 19 août 1935 à Sour El Ghozlane. Issu d’une modeste famille de neuf enfants dont il était le benjamin. D’un père exerçant la profession de receveur des P et T et d’une mère n’ayant jamais été scolarisée. Suivant leur père à travers des missions itinérantes, la famille Amrani séjournera dans plusieurs localités notamment à Cherchell avant de s’installer définitivement, en 1952, à Alger. Le jeune Djamel Amrani y fréquentera l’école communale de Bir Mourad Raïs. Et c’est en usant ses fonds de culotte sur les bancs d’écolier qu’il fera une découverte littéralement littéraire et capitale dans sa vie. La mort du loup d’Alfred de Vigny et Les amours de Chopin de George Sand qu’il connaissait par cœur l’inspireront aux premiers jets poétiquement candide. Une passion était éclose. « J’étais déjà poète à la base. Je faisais de la musique. J’étais au conservatoire d’Alger, je jouais du piano à 15 ans. J’étais le seul Algérien à avoir concouru avec la 5e étude de Chopin, la 7e nocturne de Gabriel Foret et puis suivront La Passionata... » se souviendra-t-il. Au lycée Bugeaud, le plus réputé d’Alger, où il avait emmené avec lui ce qu’il appelera des « odelettes » et dont il fera un autodafé car jugées inintéressantes.
Djamel Amrani sera confronté à l’âpre réalité coloniale : le racisme. Après l’obtention du bac, avec succès d’ailleurs, une revanche contre et envers les fils de colons. En 1956, il sera contacté par Amara Rachid pour monter au maquis aux côtés de leurs frères d’armes de l’Armée de libération nationale (ALN). Ayant participé activement à la réunion préparatoire et à la grève des étudiants du 19 mai 1956, il s’impliquera dans le mouvement national de résistance. Lors de la Bataille d’Alger, en 1957, il sera arrêté, torturé dans la villa Susini et incarcéré. En signe de représailles, les forces d’occupation françaises tueront les membres de la famille de Djamel Amrani. Le père, le frère et le beau-frère, Ali Boumendjel en un mois. « J’ai traversé cela comme un enfer de couleur corbeau... », commentera-t-il. Un cauchemar de flash-back. Il ne sortira de prison qu’une année après avant d’être expulsé vers la France. Et c’est Germaine Tillon qui l’acceuillera pour dénoncer la torture en Algérie dont il était la preuve vivante. Aussi, Djamel Amrani fera de belles rencontres avec ceux de la gauche, à l’époque, Jean et Simone Lacouture, Jean-Marie Domnac, Françoise Sagan, Florence Malraux, Serge Reggiani, Juliette Greco, Barbara et le cercle des poètes d’André Gide. Ces amis l’entouraient, défendaient sa cause, celle de l’indépendance de l’Algérie, et appréciaient le grand poète. André Breton dira de lui : « Djamel Amrani est im- mense, il est le plus grand poète de l’Algérie... »
Supplice de tantale
Sa toute première œuvre fut Le témoin en 1960 aux éditions de Minuit. « Ce livre est l’histoire dramatique de ma vie... », commentera-t-il la gorge nouée. Et puis suivront des pontes aux succès d’estime comme Soleil de notre nuit, en 1964. Dans cette quête intrinsèque à la recherche de sa pierre de touche, Djamel Amrani trouvera ses pairs l’ayant soutenu dans les pires moments. Ils s’appellent Kateb Yacine, Malek Haddad, Jean Sénac, Issiakhem, Mohamed Zinet... « Kateb Yacine et Jean Sénac ont été des frères immenses pour moi. Je me dois de saluer leur mémoire. Malek Haddad avait été un grand ami... » Djamel Amrani se définit tel un révolutionnaire non pas du verbe mais du mot : « Je jouais pour la syntaxe quelle qu’elle soit... C’est un jeu avec mon histoire quand j’ai appris à lire et à écrire... ». Après un long séjour à Cuba, de 1962 à 1964, Djamel Amrani officiera dans le cabinet du président Houari Boumediène, avec Abdelaziz Bouteflika, Medegheri et Chérif Belkacem. Et où il rencontrera un jour un certain... Nelson Mandela.
Il sera aussi, juste avant, l’un des pionniers des médias algériens en éditant le journal Chaâb avec Salah Louanchi et Serge Michel et un autre intitulé Atlas avec Cheriel Lazhari. En 1966, il résidera en France où il s’essaiera à la production d’une émission maghrébine à la télévision française l’ORTF. De retour en Algérie, il intégrera l’équipe de la RTA pour des émissions littéraires. Ce fut la rencontre inespérée de son désormais alter ego, âme sœur et sœur d’armes, la voix féminine délicate des ondes de la Chaîne III, Leïla Boutaleb. Un tandem de chic et de choc d’émissions radiophoniques comme « Psaumes dans la rafale », « Poémérides », « Rhizomes magnétiques » ou encore la fameuse « A cœur ouvert ». Actuellement, Djamel Amrani anime sur cette même station radio une émission poétique « Le temps de vivre ». Parmi les cautions intellectuelles l’ayant encensé, on peut citer celles de Jean Breton : « Jeté à 20 ans dans la lutte pour l’indépendance de son pays, l’Algérie, Djamel Amrani fait partie de cette génération d’intellectuels de la résistance qui prirent tous les risques, à la fois par la plume et par le fusil. Sa poésie d’alors dénonciatrice des bourreaux qui le torturèrent parlait haut et net pour le drapeau et pour la victoire de façon à être comprise de tous. Le don éclate chez Amrani. Amrani réinvente l’élégie à sa manière, à base de “carpediem”... » Serge Brindeau dans la revue Sape saluera le trait cursif de Djamal Amrani : « Un poète algérien en quête des multiples signes du sacré. Il célébre la terre qu’il étreint, la lumière qui se déploie jusque dans les muscles, le sens nouveau des nuits et des jours. Un poète s’avance. Dans La vasque de ses mains, on peut le voir porter un jardin absolu d’orchidées. Il s’appelle Djamal Amrani. ». L’auteur des Chercheurs d’os, Tahar Djaout, n’est pas en reste.
En 1982 dans Algérie Actualité, il décrit Djamal Amrani : « De tous les poètes de la Révolution, Djamal Amrani est celui qui a le plus tenu ses promesses. Non seulement, il a imposé une heureuse continuité alors que tant de souffles se sont éteints. Mais il a, à l’image de ces grands poètes que sont par exemple Mohamed Dib et Jean Sénac, exploré de nouvelles voies, mettant à profit d’autres cordes sensibles, une somme de richesses langagières et de trouvailles oniriques... » Mais Djamal Amrani demeure un poète sans jeu de mots torturé : « Je n’ai jamais eu l’occasion de guérir. Ma plaie reste béante à jamais... » Par K. Smaïl, El Watan
Sour El Ghozlane
A Sour El Ghozlane, mon village natal,
au parfum d’ambre et d’aubépine,
mes désirs enfantins se sont brisés, surpris,
écartés de la vie trop obscure même avec des gazelles
Et tous ces horizons qu’on appelle nos rêves
Là-bas à Sour quand l’aurore derrière les ronces
A Sour El Ghouzlane, j’avais juré de revenir un jour
Vingt-sept années m’enserrent font cahoter ma peine
Sour El Ghozlane construit l’Hommme absolu plus explosif que poète
Et fais en sorte qu’à mon réveil le temps, avocat des miracles,
m’enseigne l’ordre des paix et racornise ma peine In Œuvres choisies ( Editions ANEP)
Parcours :
19 août 1934 : Naissance à Sour El Ghozlane
1952 : Scolarisation à l’école communale de Bir Mourad Raïs
19 mai 1956 : Participation à la grève des étudiants algériens
1957 : Arrestation, torture et incarcération par l’armée coloniale
1958 : Sortie de prison Expulsion vers la France Sortie du 1er recueil Le Témoin aux éditions de Minuit 1960 : Rencontre avec Pablo Neruda
Création du journal Chaâb 1964 : Parution de Soleil de notre nuit 1966 : - Producteur d’une émission maghrébine à l’ORTF
Début d’une carrière radiophonique aux côtés de Leïla Boutaleb à la Radio algérienne
2003 : Parution du recueil La Nuit du dedans aux éditions Marsa
2004 : Médaille Pablo Neruda, haute distinction internationale de la poésie
Djamel Amrani, le troubadour rejoint le firmament
Culture-Le soir d'Algérie-05/03/2005
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DJAMEL AMRANI
Le poète nous a quittés O. HIND
Le talent de ce moudjahid n’avait d’égal que sa mystérieuse personnalité.
Colérique, grincheux, atypique, érudit, volcanique, poète jusqu’au bout du souffle, Djamel Amrani nous a quittés mercredi à l’âge de 70 ans. La voix radiophonique de «poésie ininterrompue» qui passait régulièrement sur les ondes d’Alger Chaîne III ne retentira plus jamais.
Né le 29 août 1935 à Sour El-Ghozlane, Djamel Amrani était de l’acabit d’une Anna Gréki ou de Jean Amrouche, c’était un poète de la Révolution algérienne ayant connu les affres de la torture et de la guerre. Il «trempait», lui, son courage dans l’encre et la littérature pour en faire naître des oeuvres d’une grande qualité artistique. La gouaille de Djamel Amrani n’avait d’égal que sa mystérieuse personnalité. Le moudjahid a reçu le 29 juillet dernier la médaille Pablo Neruda, du nom du célèbre poète chilien, son «maître de combat».
Le 19 septembre, il recevait aussi le prix des libraires pour la totalité de son oeuvre. On notera parmi ses ouvrages le Témoin (1960), Entre dents et mémoire (1981), Déminer la mémoire (1986), Jours couleur de soleil. Depuis quelques années, on s’était habitué à l’écouter lire des extraits de poésie lors de conférences ou de rencontres littéraires en compagnie d’une autre grande dame de la radio, Leïla Boutaleb. Mais il était fait maître et avait pour disciple une jeune fille téméraire et non moins grande poète, Samira Negrouche, qui, avec le temps et l’amour des vers aidant, étaient devenus des amis inséparables, unis par la passion du verbe. Et que diable les années qui les séparaient... Djamel Amrani était vraiment un artiste. Jeune, il s’est adonné à la musique.
Il était au conservatoire d’Alger. Il jouait du piano à l’âge de 15 ans. «J’étais le seul Algérien à avoir concouru avec la 5e étude de Chopin, la 7e nocturne de Gabriel Foret et puis suivra la Passionata...».
Lors de la bataille d’Alger en 1957, il sera arrêté et torturé dans la villa Susini. Après sa sortie de prison un an après, il est expulsé vers la France. Après un séjour à Cuba en tant qu’ambassadeur, il officiera dans le cabinet du président Houari Boumediene.
Touchant aux médias, il aura édité le journal Chaâb avec Salah Louanchi et Serge Michel et un autre intitulé Atlas avec Cheriet Lazhari. Djamel Amrani a marqué son temps.
Il symbolisait l’anti-médiocrité, avec cet air sérieux qu’on lui connaît, il cachait une grande sensibilité et un grand sens de la générosité.
Djamel Amrani au cours de sa vie a côtoyé d’autres grands de ce monde à l’image du «Che» ou encore des écrivains comme Nazim Hikmet, Romain Gary et Ismaël Kadaré... Entré dans les années 70 à la radio, il en sortira hier matin avec les grands honneurs qu’on lui doit puisqu’un ultime hommage lui a été rendu à l’auditorium Aïssa Messaoudi par sa grande famille de la radio avant d’être inhumé au cimetière Sidi Yahia pour le dernier voyage. Mais comme disait une fidèle auditrice d’Alger Chaîne III, hier, «Djamel Amrani n’est pas mort. Il est toujours parmi nous». Dans son message de condoléances, à la famille du défunt, le président de la République a confié son «immense tristesse [qui] a étreint mon coeur à l’annonce du rappel à Dieu le défunt Djamel Amrani».
Il rappellera son âme révolutionnaire et son talent de dire son amour et son attachement à la liberté. Pour sa part, la ministre de la Culture, Khalida Toumi, a souligné le caractère engagé de cet homme de lettres et de parole qui a rejoint la résistance contre le colonialisme français à Alger où il fut arrêté en 1957. et d’ajouter: «Il a fait découvrir à des générations d’Algériens, la poésie du monde entier dite dans toutes les langues, toutes les cultures, toutes les couleurs».
Elle exprimera toute sa «reconnaissance pour cet homme généreux, discret et profondément attaché à la jeunesse de son pays auprès de laquelle il n’a cessé de diffuser et faire aimer poésie, rythme, amour de l’Algérie, de son peuple, de ses paysages, de son histoire et de sa culture».
05 mars 2005 L'Expression DZ.COM
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