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lundi, février 09, 2015

477_ 21° MAGHREB DES LIVRES


Mercredi 4 février : Le TGV nous dépose à la gare de Lyon à 16h25. Le temps est aussi, sinon plus, glacial que dans le sud. Je retrouve et me fonds aussitôt dans l’agitation parisienne, particulière aux grandes métropoles. Bruits de charriots, de locomotives, d’autocars, s’infiltrent dans tous les recoins et dans toutes choses. Les couleurs abondent et là-bas les parfums des pâtisseries titillent nos narines malmenées par le froid. RER et banlieue…



Jeudi 5 : Je ne retrouve pas mon ami N. et ce n’est pas mes sincères tentatives qui ont manqué. J’ai tourné et retourné dans le quartier : avenue Victor Hugo, Roosevelt, République pairs, impairs. En vain. J’ai égaré son numéro de téléphone et ne me souviens plus exactement de sa nouvelle résidence, autour de la mairie d’A. Je n’y étais venu qu’une seule fois. Je prends le bus, comme on se laisse prendre par la main. Les avenues passent, et l’impression que tout change chaque fois que je reviens à Paris. Les devantures changent de parton ou de forme et de matière. Les enseignes sont parmi les éléments qui nous font le plus perdre le nord. Je descends dans la rue Maubeuge. Magenta est derrière, Rochechouart en aval, droit devant sur ma gauche et ma droite à la fois. Je prends à gauche… puis le forum des Halles, traverse le boulevard de Sébastopol, à moins que cela soit celui de Strasbourg, je les ai toujours confondus, même lorsque je les traversais quatre à dix fois par semaine il y a des décennies, lorsque je résidais dans Paris. Voilà Beaubourg que nous appelions « l’usine ». 

Sur sa façade une immense affiche proclame « 11 janvier 2015, unis. » On y voit la statue de la République autour de laquelle sont agglutinés des dizaines de manifestants portant des drapeaux tricolores, au-dessus desquels règne un autre cinq ou dix fois plus grand. Que le Flunch se soit posé à l’angle des rues Rambuteau/Beaubourg est une excellente idée. C’est l’heure : filet de lieu à la crème, portion de brie et fruit. Les réseaux téléphoniques sont inaccessibles, par conséquent on mange dans une relative tranquillité.

16 heures, mon ami M. est à l’heure du rendez-vous, dans le Forum des halles, au niveau moins trois, à hauteur de l’entrée de la Fnac. L’entrée du Forum est gardée par quatre vigiles qui demandent à ouvrir les sacs, mais ne s’intéressent qu’à quelques-uns, pour leur forme peut-être ou leur marque ou que sais-je. Quoi qu’il en soit la fouille n’est pas systématique, alors… Nous entamons une longue marche, ainsi que nous le faisons systématiquement lorsque nous nous rencontrons après une éclipse de quelques mois. Celle d’aujourd’hui nous mène au quartier Saint-Lazare, via Etienne Marcel, Casanova et la belle Madeleine et la huppée Tronchet. Il fait un froid de marmaille de canards. Sur la rue Saint-Lazare, à l’angle de la rue Caumartin, au café « Le Café » nous prenons un lait chaud et un café. On tisse et retisse le monde et l’on se sépare et de l’effet bénéfique de la consommation (il était temps !) de boissons bisounours. Chacun sa ligne de métro, sa direction.



Vendredi 6 : A l’automobile club association (rue d’Artois) on me conseille de m’abonner et de disposer d’un CPD, un carnet de passage en douane si j’ai l’intention de me rendre en camping-car dans certains pays d’Amérique latine ou d’Asie centrale. C’est excessif, mais rien ne presse. Marche et photos… La Boétie (« Apprenons donc quelquefois, apprenons à bien faire ; levons les yeux vers le ciel, ou pour notre honneur, ou pour l’amour même de la vertu »), Champs-Elysées, Place de la Concorde, et les quais, Anatole France, Voltaire. Le pont des Arts s’apprête à crouler sous le poids des amours cadenassées. Voilà les Grands Augustins. Face à la place Saint-André des Arts, au « Saint-André » je prends un lait chaud. Sur ma droite un joli couple de Chiliens se prennent en photo. Je me propose de les prendre. « Si, yes » fit le compagnon. « Thank you » dira la belle dame en rouge, en portant sa main droite sur le cœur et en se penchant légèrement. Elle ajoute « nice » et le monsieur lève le pouce. La photo leur plait. Eux dans la photo ou bien la prise ?

Le conducteur du RER (direction Versailles) ne s’excuse pas, ne donne que cette explication lapidaire « gros problèmes mécanique, tout le monde descend à Musée d’Orsay ». J’attends le suivant…


Samedi 7 : J’ai une pensée pour les victimes du 7 janvier, ainsi que celles qui suivirent les deux jours suivants. 17 au total.

J’arrive à 11h15 au 21° Maghreb des livres. 




Entrée sud de l'Hôtel de ville de Paris. Des lycéens (Louis Armand d’Eaubonne) présentent leurs perceptions du livre de Azza Filali « Ouatann », sous la direction de leur enseignant Saïd Aliane. La salle est encore froide et le public est très clairsemé. « Dans Ouatann, le roman de la Tunisienne Azza Filali, c’est également d’une maison qu’il s’agit ; au sens propre et au sens figuré. Une maison construite à l’époque coloniale par un Français, monsieur Jacques, dont la tombe occupe un petit coin du jardin luxuriant. Tout tourne autour de cette construction située sur la pointe d’une corniche, un endroit a priori idyllique, face à la méditerranée dont on ne décrit plus la beauté. Cette maison, grande, belle, confortable, est pleine de trappes et de remises, ce qui n’est pas préjudiciable en soi, tout dépendant de l’usage qu’on en fait. Rachetée par Si Mokhtar, vieux commerçant de Tunis, elle n’est ni à l’abandon ni tout à fait habitée. Si Mokhtar pensait à son fils en l’achetant ; mais celui-ci a émigré au Canada où il s’est marié et s’est installé définitivement – ne revenant au pays qu’en coup de vent, pour une ou deux semaines tout au plus. » ( Théo Ananissoh in Lacausecitteraire.fr), chronique d’un drame annoncé dit-on. Je croise quelques écrivains, plus généralement des hommes et des femmes de culture avec lesquels j’échange autour de l’écriture et auxquels j’offre quelques-uns de mes ouvrages : Fadéla M’rabet, Christiane Chaulet-Achour, Marie Virolle. Plus tard il y aura aussi Sofiane Hadjadj, Boualem Sansal, Anouar Benmallek… ainsi que madame la maire de Paris. A l’Espace Entretiens j’attendais Salim Bachi, mais c’est Ahmed Bedjaoui qui est arrivé. Je change de lieu. J’ai discuté avec plusieurs membres de l’association Coup de Soleil dont les sympathiques membres de la section de Montpellier auxquels j’offre mon « Arabe dans les écrits de Camus ».

Vers 15heures, brusquement la foule se fait encore plus compacte… les yeux se tournent vers l’entrée de la librairie. Manifestement une célébrité arrive. C’est madame la maire de Paris, Anne Hidalgo. Elle passe devant les tables, dit un mot à Slim, passe devant Gyps et d’autres. En bout de table, je lui dis quelques mots et lui offre deux ouvrages « L’Arabe… » et « La folle d’Alger » un roman qui a fait un certain bruit lui ajoute-je. Elle me remercie « je suis à vos côtés »…
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Courrier de Mme La Maire, reçu le 03 mars 2015. Ajouté ici le 4.
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16h : salle « Entretiens ». Maïssa Bey arrive, toujours souriante. « Je ne suis pas Marek Halter » plaisante-t-elle, car c’est lui qui venait d’être annoncé par erreur. Elle présente son dernier ouvrage « chaque pas que fait le soleil ». Un peu plus tard elle me dédicacera « on dirait qu’elle danse ». Je prendrai également la pièce de théâtre qu’elle a présenté (Chaque pas…) ainsi que « L’Ombre d’un homme qui marche au soleil ». 

 
Maïssa Bey entretien avec Catherine Pont-humbert


Dans le même espace –où me rejoignent mes amis H. et M.– arrive Abdelkader Djemaï que je ne connaissais pas aussi facétieux. Il narre à l’assistance éberluée des histoires de cochons à dormir debout, à se plier de rire : du Noir de Bigorre, du Large White, du Corse, du Pie Noir du Pays basque... Il y a quelques années il avait quasiment fait l’inventaire des églises d’Oran ! (Le Monde 17 décembre 2009, mais quel rapport ?)



A sa table, où il dédicace son dernier ouvrage (sous la direction de) Aïssa Kadri m’apprend la mort vendredi de Assia Djebar et samedi de André Brink , deux monstres sacrés africains (page blog à venir).



Vers 18 heures H., M. et moi nous quittons les lieux pour aller prendre un (je dirais « des ») verre. Nous le prenons au Prado un sympathique bar bobo de la rue du faubourg Saint-Denis.    
Va pour la première « 16 ». Elle est dédiée aux souvenirs « oui c’était dans le 14°, mais non… ». La deuxième à tel ou tel intervenant, la prie allant à notre ami Djemaï et ses histoires cochonnes (j’abuse).La troisième délie les langues, le ton monte d’un cran, le chahut autour de nous est tout autant catégorique. Nos interrogations virent au vinaigre. Littérature ou couscous ? Une femme (ou un homme) xénophobe et de mauvaises mœurs peut elle être une très bonne cuisinière ? (tout en mangeant des hommes- Glucksmann), ou une sportive de haut niveau ? ou encore un excellent écrivain ? que nenni mon frère qu’oses-tu là ! Quoi, le salaud de Céline grand écrivain ça va pas non ? Même sentence évidemment pour Houellebecq l’islamophobe, Faulkner le négrophobe et Drieu l’antisémite. Dorénavant, je suis averti, la belle cuisine, le beau sport, et les belles lettres se mesurent à l’aune de l’idéologie. Mais alors, que devient par exemple Sarraute dont l’idéologie est portée par la seule musicalité des mots et même en deçà des mots, des seules respirations, de l’Ouvrez au Planétarium en passant par Enfance et Vous les entendez, (et le manifeste des 121 n’a rien à y voir). Je rentre avec un mal de crane gros comme ça.








Dimanche 8 :

Première rencontre au Maghreb des livres, Boualem Sansal. Il se trouve avec un gars,  J.P Oddos  et dont il me dira tout le bien qu’il pense ainsi que du festival qu’il organise annuellement (d’Asprières) « vas-y ».

A l’espace Entretiens a commencé une rencontre autour de Yahia Belaskri, Anouar Benmalek, Azza Filali et Fouad Laroui. L’écriture renvoie-t-elle systématiquement aux origines ?
 

 Certains tentent de nous y assigner dit Benmalek, en nous accolant systématiquement un qualificatif « écrivain maghrébin, d’origine algérienne, tunisienne… » on recherche l’exotisme. Un nouvel orientalisme.

Dans la salle Laurens, de l’autre côté, derrière la salle de restauration, derrière les cuisines, Rodrigo de Zayas et Gilles Képel évoquent « L’Islam en Méditerranée, du Moyen-âge à nos jours » (en 45 minutes !)


Dans le salon Bertrand à 13h30 on traite de la question des Maghrébins dans la Libération de la France et le 8 mai 1945, avec Mehdi Lallaoui, Olivier Lecour-Grandmaison et Tramor Quémeneur.



Au même endroit, dès 15h30 et durant une heure, c’est la mémoire de Rachid Mimouni qui est évoquée, avec Boualem Sansal qui fut son très proche ami, ainsi que Noureddine Saadi et Jacques Fernandez.



 
B. Sansal-1/2



B. Sansal-2/2


On retrouve Sansal dans la salle Entretiens pour parler de son dernier ouvrage, un essai « Gouverner au nom d’Allah », ou comment les hommes de pouvoir dans le monde arabe, et ceux qui y aspirent, manipulent les textes religieux. 


 « La manipulation est un système à étage, dit l’intervenant, les gouvernants locaux, les manipulations de la CIA, elle-même manipulée par l’Arabie saoudite qui ont pour objectif l’hégémonie du monde. »

Dans la même salle, bondée, où aucune chaise, aucun espace ne sont disponibles, arrive Edwy Plenel.  Il scrute les plafonds et leurs peintures, "que de dorures, que de dorures!" dit-il ironiquement


Edwy Plenel 

Edwy Plenel


Formidable comme attendu. Il sera ovationné, une standing-ovation de plusieurs minutes. Pertinent, simple, émouvant. Il alerte, met en garde. « Le plus grave dit-il n’est pas le bruit des bottes, mais le silence des pantoufles. » Il rappelle l’histoire récente de l’antisémitisme et les années qui suivirent. Un parallèle avec « nos amis les citoyens de confession musulmane ».

 




A 17h30 c’est Aïssa Kadri, dans la même salle, qui présente «  Nouvelle génération d’historiens, nouveaux regards sur la guerre d’Algérie », accompagné de quelques un de ses étudiants : Moula Bouaziz, Emmanuel Blanchard, Vanessa Codaccioni et Tramor Quémeneur.



Je quitte mes amis H. et M., car est arrivée la belle MH (amie chère). Un verre à Beaubourg. Souvenirs, souvenirs…

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Ecoutez Fouad Laroui. Ecoutez ses commentaires durant la seconde minute. Pitoyables et minables. "on a donné 250 fois la parole à Tarik Ramadan et à moi, (le grand moi), seulement 2", vous vous rendez compte !  ça lui fera 3 avec cette intervention... patience...
Pour l'intégrale, cf l'émission de Colette Fellous- Carnet nomade- France culture- Samedi 14 février 2015, 20 à 21 heures.
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Rencontrée au Salon,
 

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