Ces derniers jours
(et jusqu’à aujourd’hui) il a fait très beau dans le sud-est. Avec C. nous en
avons profité pour nous aérer quelque peu. Nous sommes allés au nord ouest de Manosque, la ville de
Jean Giono (que nous avons aussi visitée). Nous avons traversé le parc régional
du Luberon. Nous avons fait une halte à Roussillon,
le pays de l’ocre, un petit
village du Vaucluse, très touristique. Il se trouve au nord de Lourmarin,
tiens, tiens et même plus, au nord-ouest d’Apt.
Plus au haut, au nord est de Forcalquier se trouve un beau village (mille habitants), au pied de la montagne de Lure, réputé pour son fromage de chèvre, mais aussi et surtout dirais-je pour son immense librairie (près de 200.000 ouvrages) Les Bleuets.
(cf sur mon blog le post 172- Banon, son fromage, son Bleuet ) J’en ai profité pour acheter La mort heureuse, Les Justes et surtout L’Exil et le royaume de Camus. Je ferai une recension de certaines des nouvelles de ce dernier, surtout l’Hôte et La femme adultère (L’exil et le royaume est le dernier ouvrage de Camus publié de son vivant).
A Aix en Provence nous avons visité l’exposition sur Camus.
« Il
regarda l'Arabe, immobile, à la même place, renifla d'un air chagrin et se
détourna vers la porte : «Adieu, fils », dit-il. La porte battit derrière lui.
Balducci surgit devant la fenêtre puis disparut. Ses pas étaient étouffés par
la neige. Le cheval s'agita derrière la cloison, des poules s'effarèrent. Un
moment après, Balducci repassa devant la fenêtre tirant le cheval par la bride.
Il avançait vers le raidillon sans se retourner, disparut le premier et le
cheval le suivit. On entendit une grosse pierre rouler mollement. Daru revint
vers le prisonnier qui n'avait pas bougé, mais ne le quittait pas des yeux. «
Attends », dit l'instituteur en arabe, et il se dirigea vers la chambre. Au moment
de passer le seuil, il se ravisa, alla au bureau, prit le revolver et le fourra
dans sa poche. Puis, sans se retourner, il entra dans sa chambre.
Longtemps,
il resta étendu sur son divan à regarder le ciel se fer- mer peu à peu, à
écouter le silence. C'était ce silence qui lui avait paru pénible les premiers
jours de son arrivée, après la guerre. Il avait de- mandé un poste dans la petite
ville au pied des contreforts qui séparent du désert les hauts plateaux. Là,
des murailles rocheuses, vertes et noires au nord, roses ou mauves au sud,
marquaient la frontière de l'éternel été. On l'avait nommé à un poste plus au
nord, sur le plateau même. Au début, la solitude et le silence lui avaient été
durs sur ces terres ingrates, habitées seulement par des pierres. Parfois, des
sillons faisaient croire à des cultures, mais ils avaient été creusés pour
mettre au jour une certaine pierre, propice à la construction. On ne labourait
ici que pour récolter des cailloux. D'autres fois, on grattait quelques copeaux
de terre, accumulée dans des creux, dont on en- graisserait les maigres jardins
des villages. C'était ainsi, le caillou seul couvrait les trois quarts de ce
pays. Les villes y naissaient, brillaient, puis disparaissaient ; les hommes y
passaient, s'aimaient ou se mordaient à la gorge, puis mouraient. Dans ce
désert, personne, ni lui ni son hôte n'étaient rien. Et pourtant, hors de ce
désert, ni l'un ni l'autre, Daru le savait, n'auraient pu vivre vraiment.
Quand
il se leva, aucun bruit ne venait de la salle de classe. Il s'étonna de cette
joie franche qui lui venait à la seule pensée que l'Arabe avait pu fuir et
qu'il allait se retrouver seul sans avoir rien à décider. Mais le prisonnier était
là. Il s'était seulement couché de tout son long entre le poêle et le bureau.
Les yeux ouverts, il regardait le plafond. Dans cette position, on voyait
surtout ses lèvres épaisses qui lui donnaient un air boudeur. « Viens », dit
Daru. L'Arabe se leva et le suivit. Dans la chambre, l'instituteur lui montra
une chaise près de la table, sous la fenêtre. L'Arabe prit place sans cesser de
regarder Daru.
-
Tu as faim ?
-
Oui, dit le prisonnier. »
L’Hôte,
extrait.
Une partie ne nous a pas été accessible sur le plan photographique. Les
héritiers (madame Catherine Camus) sont très à cheval sur ces question. Pas de
photo. Ils veillent au grain. Dommage. Celle-ci (dans un autre espace) est autorisée.
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A Aix je n'ai pu prendre de Calentica hélas...
---------------Sur la librairie Les Blueuts: