Mahmoud DARWICH a donné un récital à la Cité du livre, le vendredi 08 décembre 2006 à 2O h 15 à l’amphithéâtre de la Verrière. Salle comble : 300 personnes.
Mahmoud DARWICH était accompagné de Elias SANBAR pour la lecture en français.
La soirée était rehaussée par la présence de Leïla CHAHID, Déléguée générale de Palestine auprès de l'Union Européenne, de la Belgique et du Luxembourg.
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Intervention de monsieur Gilles EBOLI directeur de la Cité du livre d’AIX-en-PROVENCE :
« Bienvenue et merci de nous avoir rejoints si nombreux pour cette rencontre avec Mahmoud DARWICH et Elias SANBAR Annie CARRIER la directrice des Ecritures croisées (Cité du livre) va dans un instant vous en dire plus long que moi et vous décrire notamment le déroulement de cette soirée. Je voudrais pour ma part très rapidement vous dire combien nous sommes heureux et fiers d’accueillir à nouveau à la Cité du livre Mahmoud DARWICH. Nous avions eu le privilège de le rencontrer en mai 2003. Nous en avons tous gardé un souvenir ébloui. Monsieur DARWICH avait promis de revenir, il tient sa promesse, merci. Je voudrais aussi remercier pour sa présence à la Cité du livre madame Leïla CHAHID qui nous a fait l’amitié de nous rejoindre. Je passe la parole à Annie CARRIER. »
Annie CARRIER : « Je ne peux pas m’empêcher de dire mais quel bonheur Mahmoud, quel bonheur de vous retrouver ici ce soir. Certes nous vous avions accueilli bien d’autres fois, trois fois, nous avons compté avec tant de joie et tant d’émotion. Cette fois-ci encore c’est le même bonheur, la même chance inouïe. Je voudrais remercier infiniment Leïla CHAHID de sa présence et surtout de nous avoir fait cette surprise incroyable puisqu’il y a deux jours encore nous ne savions pas qu’elle allait venir et être à nos côtés. Merci, merci beaucoup vraiment. Une grande grande joie. Elle nous manquait beaucoup. Dire aussi à Elias SANBAR que nous lui devons cette rencontre de ce soir et que je l’en remercie de tout mon cœur. Je le remercie d’avoir permis de nous retrouver. Je voudrais dire s’il en était besoin, à Mahmoud DARWICH combien le fil de l’amitié est resté tendu entre nous ici et lui là-bas où il demeure. Ce fil de l’amitié que nous avions déjà largement évoqué il y a trois ans, et lui dire que c’est une chance inouïe qu’il soit là, je le redis, de retrouver aussi sa poésie, retrouver sa voie si belle si forte si généreuse si lucide à la fois et qui nous permet d’échapper un temps à la désolation et de ne pas nous laisser enfermer dans la tristesse. Lui dire aussi que nous veillons avec lui avec tant de fraternité et d’amitié, lui redire aussi combien j’aime votre terre Mahmoud de Palestine et combien je formule le vœu intense et ardent que nous retrouvions ensemble, c’est un rêve mais vous nous y incitez tellement, que nous retrouvions la vie. Merci, merci infiniment de l’amitié et de l’honneur que vous nous faites, d’être là, avec nous. Dire que nous allons maintenant vous écouter Mahmoud, vous allez lire pendant un temps que nous n’avons pas chronométré, le temps, le plus beau temps et ensuite nous allons écouter la Compagnie Philippe Lacarrière - la semaine dernière nous avons rendu hommage à Jacques Lacarrière qui a beaucoup compté pour nous. Donc Philippe Lacarrière qui a mis en musique un cycle de poèmes de Mahmoud. Il s’agit des onze astres sur un épilogue andalou. Avec au chant : Dominique Devaels, Batterie et chant : Hubert Colau, Percussions et chant : Fabrice Lesellier Thierry Bretonnet, composition, basse, contrebasse : Philippe Lacarrière.
Le concert s’enchaînera à la suite de la lecture de Mahmoud. Après cette belle, magnifique et inouïe soirée nous, boirons le verre de l’amitié ensemble. Merci beaucoup d’être là. »
Mahmoud DARWICH a lu 13 de ses poèmes repris en français, au fur et à mesure par Elias SANBAR (durant 50 minutes). A suivi un concert magnifique de deux heures de la Compagnie LACARRIERE.
Voici le début de chacun des poèmes déclamés par Mahmoud DARWICH dans l'ordre de lecture.
01- Sa yagi-ou yaoumoun akhar (Un autre jour viendra)
02- Fi mithli hada el yaoum (en un jour, à ce jour pareil)
03- Saqata el hissanou (Le cheval est tombé du poème)
04- Fi el Qodsi (A Jérusalem)
05- La yandourouna wara-ahoum (Ils ne se retournent pas)
06- Lem yas-alou hada wara-a el maoutou (Ils n’ont pas demandé qu’y a-t-il)
07- Essaouratou enkassaret (Le cypress s’est brisé)
08- Tounssa ka-annaka lem takoun (On t’oublieras comme si tu n’as jamais été)
09- Edillou (L’ombre)
10- La chaï-a yaagibouni (Rien ne me plaît)
11- Houwa hadioun yaagibouni (Il est paisible, moi aussi)
12- Wasfou el ghouyoum (La description des nuages)
13- fi el intidari (Dans l’attente).
En voici dans leur totalité :
La 04- Fi el Qodsi (A Jérusalem)
À Jérusalem, je veux dire à l’intérieur
des vieux remparts,
je marche d’un temps vers un autre
sans un souvenir
qui m’oriente. Les prophètes là-bas se partagent
l’histoire du sacré … Ils montent aux cieux
et reviennent moins abattus et moins tristes,
car l’amour
et la paix sont saints et ils viendront à la ville.
Je descends une pente, marmonnant :
Comment les conteurs en s’accordent-ils pas
sur les paroles de la lumière dans une pierre ?
Les guerres partent-elles d’une pierre enfouie ?
Je marche dans mon sommeil.
Yeux grands ouverts dans mon songe,
je ne vois personne derrière moi. Personne devant.
Toute cette lumière m’appartient. Je marche.
Je m’allège, vole
et me transfigure.
Les mots poussent comme l’herbe
dans la bouche prophétique
d’Isaïe : "Croyez pour être sauvés."
Je marche comme si j’étais un autre que moi.
Ma plaie est une rose
blanche, évangélique. Mes mains
sont pareilles à deux colombes
sur la croix qui tournoient dans le ciel
et portent la terre.
Je ne marche pas. Je vole et me transfigure.
Pas de lieu, pas de temps. Qui suis-je donc ?
Je ne suis pas moi en ce lieu de l’Ascension.
Mais je me dis :
Seul le prophète Muhammad
parlait l’arabe littéraire. "Et après ?"
Après ? Une soldate me crie soudain :
Encore toi ? Ne t’ai-je pas tué ?
Je dis : Tu m’as tué … mais, comme toi,
j'ai oublié de mourir.
_____________________
La 07- Essaouratou enkassaret (Le cyprès s’est brisé)
Le cyprès s’est brisé comme un minaret
et il s’est endormi
en chemin sur l’ascèse de son ombre,
vert, sombre,
pareil à lui-même. Tout le monde est sauf.
Les voitures
sont passées, rapides, sur ses branches.
La poussière a recouvert
les vitres … Le cyprès s’est brisé mais
la colombe n’a pas quitté son nid déclaré
dans la maison voisine.
Deux oiseaux migrateurs ont survolé
ses environs et échangé quelques symboles.
Une femme a dit à sa voisine :
Dis, as-tu vu passer une tempête ?
Elle répondit : Non, ni un bulldozer …
Le cyprès s’est brisé. Les passants sur ses débris ont dit :
Il en a eu assez d’être négligé,
il a sans doute vieilli
car il est grand
comme une girafe,
aussi vide de sens qu’un balai
et il n’ombrage pas les amoureux.
Un enfant a dit : Je le dessinais parfaitement,
sa silhouette est facile. Une fillette a dit :
Le ciel est incomplet
aujourd’hui que le cyprès s’est brisé.
Une jeune homme a dit :
Le ciel est complet
aujourd'hui que le cyprès s’est brisé.
Et moi, je me suis dit :
Nul mystère,
le cyprès s’est brisé, un point c’est tout.
Le cyprès s’est brisé !
_____________________
La 09 - Edillou (L’ombre)
L’ombre n’est ni masculine ni féminine
Grise, même si j’y mettais le feu
Elle me suit, grandit puis se réduit
Je marchais elle marchait
M’asseyais et elle s’asseyait
Courais et elle courait
J’ai dit je vais ôter mon manteau bleu et la piéger
Mais elle m’a imité et s’est débarrassé de son manteau gris
J’ai pris un chemin parallèle
Elle a emprunté un chemin parallèle
J’ai dit je vais sortir du couchant de ma ville et la piéger
Mais je l’ai vue me précédant dans le couchant d’une autre ville
J’ai dit je vais revenir appuyé sur des béquilles
Elle est revenue sur des béquilles
J’ai dit je vais la prendre sur mes épaules mais elle s’est rebellée.
J’ai dit je la suivrai pour la piéger
Je suivrai par ironie ce perroquet de la forme
J’imiterai son imitation
Ainsi mon double se fondra dans son double
Je ne verrai plus mon ombre et elle ne me verra plus.
À Jérusalem, je veux dire à l’intérieur
des vieux remparts,
je marche d’un temps vers un autre
sans un souvenir
qui m’oriente. Les prophètes là-bas se partagent
l’histoire du sacré … Ils montent aux cieux
et reviennent moins abattus et moins tristes,
car l’amour
et la paix sont saints et ils viendront à la ville.
Je descends une pente, marmonnant :
Comment les conteurs en s’accordent-ils pas
sur les paroles de la lumière dans une pierre ?
Les guerres partent-elles d’une pierre enfouie ?
Je marche dans mon sommeil.
Yeux grands ouverts dans mon songe,
je ne vois personne derrière moi. Personne devant.
Toute cette lumière m’appartient. Je marche.
Je m’allège, vole
et me transfigure.
Les mots poussent comme l’herbe
dans la bouche prophétique
d’Isaïe : "Croyez pour être sauvés."
Je marche comme si j’étais un autre que moi.
Ma plaie est une rose
blanche, évangélique. Mes mains
sont pareilles à deux colombes
sur la croix qui tournoient dans le ciel
et portent la terre.
Je ne marche pas. Je vole et me transfigure.
Pas de lieu, pas de temps. Qui suis-je donc ?
Je ne suis pas moi en ce lieu de l’Ascension.
Mais je me dis :
Seul le prophète Muhammad
parlait l’arabe littéraire. "Et après ?"
Après ? Une soldate me crie soudain :
Encore toi ? Ne t’ai-je pas tué ?
Je dis : Tu m’as tué … mais, comme toi,
j'ai oublié de mourir.
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La 07- Essaouratou enkassaret (Le cyprès s’est brisé)
Le cyprès s’est brisé comme un minaret
et il s’est endormi
en chemin sur l’ascèse de son ombre,
vert, sombre,
pareil à lui-même. Tout le monde est sauf.
Les voitures
sont passées, rapides, sur ses branches.
La poussière a recouvert
les vitres … Le cyprès s’est brisé mais
la colombe n’a pas quitté son nid déclaré
dans la maison voisine.
Deux oiseaux migrateurs ont survolé
ses environs et échangé quelques symboles.
Une femme a dit à sa voisine :
Dis, as-tu vu passer une tempête ?
Elle répondit : Non, ni un bulldozer …
Le cyprès s’est brisé. Les passants sur ses débris ont dit :
Il en a eu assez d’être négligé,
il a sans doute vieilli
car il est grand
comme une girafe,
aussi vide de sens qu’un balai
et il n’ombrage pas les amoureux.
Un enfant a dit : Je le dessinais parfaitement,
sa silhouette est facile. Une fillette a dit :
Le ciel est incomplet
aujourd’hui que le cyprès s’est brisé.
Une jeune homme a dit :
Le ciel est complet
aujourd'hui que le cyprès s’est brisé.
Et moi, je me suis dit :
Nul mystère,
le cyprès s’est brisé, un point c’est tout.
Le cyprès s’est brisé !
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La 09 - Edillou (L’ombre)
L’ombre n’est ni masculine ni féminine
Grise, même si j’y mettais le feu
Elle me suit, grandit puis se réduit
Je marchais elle marchait
M’asseyais et elle s’asseyait
Courais et elle courait
J’ai dit je vais ôter mon manteau bleu et la piéger
Mais elle m’a imité et s’est débarrassé de son manteau gris
J’ai pris un chemin parallèle
Elle a emprunté un chemin parallèle
J’ai dit je vais sortir du couchant de ma ville et la piéger
Mais je l’ai vue me précédant dans le couchant d’une autre ville
J’ai dit je vais revenir appuyé sur des béquilles
Elle est revenue sur des béquilles
J’ai dit je vais la prendre sur mes épaules mais elle s’est rebellée.
J’ai dit je la suivrai pour la piéger
Je suivrai par ironie ce perroquet de la forme
J’imiterai son imitation
Ainsi mon double se fondra dans son double
Je ne verrai plus mon ombre et elle ne me verra plus.
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La 10- La chaï-a yaagibouni (Rien ne me plaît)
Rien ne me plaît
dit le passager de l’autobus, ni la radio
ni les journaux du matin,
ni les fortins sur les collines.
J’ai envie de pleurer.
Le conducteur dit : Attends le prochain arrêt
et pleure seul tout ton saoul.
Une dame dit : Moi non plus. Moi non plus,
rien ne me plaît. J’ai guidé mon fils
jusqu’à ma tombe.
Elle lui a plu et il s’y est endormi
sans me dire adieu.
L’universitaire dit : Moi non plus,
rien ne me plaît. J’ai fait des études d’archéologie mais
je n’ai pas trouvé mon identité dans les pierres.
Suis-je vraiment moi ?
Un soldat dit : Moi non plus. Moi non plus,
rien ne me plaît. J’assiège sans cesse un fantôme
qui m’assiège.
Le conducteur dit, énervé : Nous approchons
notre dernière station, préparez-vous
à descendre …
Mais ils crient :
Nous voulons l’après dernière station, roule !
Quant à moi, je dis : Dépose-moi là. Comme eux,
rien ne me plaît.,
mais je suis las de voyager.
Et puis ce poème unique, inestimable, bouleversant, que Mahmoud DARWICH n’a pas clamé hélas ce soir-là.
BITAQATOU HOUWIYYA
Inscris !
Je suis Arabe
Le numéro de ma carte : cinquante mille
Nombre d'enfants : huit
Et le neuvième... arrivera après l'été !
Et te voilà furieux !
Inscris !
Je suis Arabe
Je travaille à la carrière avec mes compagnons de peine
Et j'ai huit bambins
Leur galette de pain
Les vêtements, leur cahier d'écolier
Je les tire des rochers...
Oh ! je n'irai pas quémander l'aumône à ta porte
Je ne me fais pas tout petit au porche de ton palais
Et te voilà furieux !
Inscris !
Je suis Arabe
Sans nom de famille - je suis mon prénom
« Patient infiniment » dans un pays où tous
Vivent sur les braises de la Colère
Mes racines...
Avant la naissance du temps elles prirent pied
Avant l'effusion de la durée
Avant le cyprès et l'olivier
...avant l'éclosion de l'herbe
Mon père... est d'une famille de laboureurs
N'a rien avec messieurs les notables
Mon grand-père était paysan - être
Sans valeur - ni ascendance.
Ma maison, une hutte de gardien
En troncs et en roseaux
Voilà qui je suis - cela te plaît-il ?
Sans nom de famille, je ne suis que mon prénom.
Inscris !
Je suis Arabe
Mes cheveux... couleur du charbon
Mes yeux... couleur de café
Signes particuliers :
Sur la tête un kefiyyé avec son cordon bien serré
Et ma paume est dure comme une pierre
...elle écorche celui qui la serre
La nourriture que je préfère c'est
L'huile d'olive et le thym
Mon adresse :
Je suis d'un village isolé...
Où les rues n'ont plus de noms
Et tous les hommes... à la carrière comme au champ
Aiment bien le communisme
Inscris !
Je suis Arabe
Et te voilà furieux !
Inscris
Que je suis Arabe
Que tu as raflé les vignes de mes pères
Et la terre que je cultivais
Moi et mes enfants ensemble
Tu nous as tout pris hormis
Pour la survie de mes petits-fils
Les rochers que voici
Mais votre gouvernement va les saisir aussi
...à ce que l'on dit !
DONC
Inscris !
En tête du premier feuillet
Que je n'ai pas de haine pour les hommes
Que je n'assaille personne mais que
Si j'ai faim
Je mange la chair de mon Usurpateur
Gare ! Gare ! Gare
À ma fureur !
Merci pour ce poème à : http://mahmoud-darwich.chez-alice.fr
dit le passager de l’autobus, ni la radio
ni les journaux du matin,
ni les fortins sur les collines.
J’ai envie de pleurer.
Le conducteur dit : Attends le prochain arrêt
et pleure seul tout ton saoul.
Une dame dit : Moi non plus. Moi non plus,
rien ne me plaît. J’ai guidé mon fils
jusqu’à ma tombe.
Elle lui a plu et il s’y est endormi
sans me dire adieu.
L’universitaire dit : Moi non plus,
rien ne me plaît. J’ai fait des études d’archéologie mais
je n’ai pas trouvé mon identité dans les pierres.
Suis-je vraiment moi ?
Un soldat dit : Moi non plus. Moi non plus,
rien ne me plaît. J’assiège sans cesse un fantôme
qui m’assiège.
Le conducteur dit, énervé : Nous approchons
notre dernière station, préparez-vous
à descendre …
Mais ils crient :
Nous voulons l’après dernière station, roule !
Quant à moi, je dis : Dépose-moi là. Comme eux,
rien ne me plaît.,
mais je suis las de voyager.
Et puis ce poème unique, inestimable, bouleversant, que Mahmoud DARWICH n’a pas clamé hélas ce soir-là.
BITAQATOU HOUWIYYA
Inscris !
Je suis Arabe
Le numéro de ma carte : cinquante mille
Nombre d'enfants : huit
Et le neuvième... arrivera après l'été !
Et te voilà furieux !
Inscris !
Je suis Arabe
Je travaille à la carrière avec mes compagnons de peine
Et j'ai huit bambins
Leur galette de pain
Les vêtements, leur cahier d'écolier
Je les tire des rochers...
Oh ! je n'irai pas quémander l'aumône à ta porte
Je ne me fais pas tout petit au porche de ton palais
Et te voilà furieux !
Inscris !
Je suis Arabe
Sans nom de famille - je suis mon prénom
« Patient infiniment » dans un pays où tous
Vivent sur les braises de la Colère
Mes racines...
Avant la naissance du temps elles prirent pied
Avant l'effusion de la durée
Avant le cyprès et l'olivier
...avant l'éclosion de l'herbe
Mon père... est d'une famille de laboureurs
N'a rien avec messieurs les notables
Mon grand-père était paysan - être
Sans valeur - ni ascendance.
Ma maison, une hutte de gardien
En troncs et en roseaux
Voilà qui je suis - cela te plaît-il ?
Sans nom de famille, je ne suis que mon prénom.
Inscris !
Je suis Arabe
Mes cheveux... couleur du charbon
Mes yeux... couleur de café
Signes particuliers :
Sur la tête un kefiyyé avec son cordon bien serré
Et ma paume est dure comme une pierre
...elle écorche celui qui la serre
La nourriture que je préfère c'est
L'huile d'olive et le thym
Mon adresse :
Je suis d'un village isolé...
Où les rues n'ont plus de noms
Et tous les hommes... à la carrière comme au champ
Aiment bien le communisme
Inscris !
Je suis Arabe
Et te voilà furieux !
Inscris
Que je suis Arabe
Que tu as raflé les vignes de mes pères
Et la terre que je cultivais
Moi et mes enfants ensemble
Tu nous as tout pris hormis
Pour la survie de mes petits-fils
Les rochers que voici
Mais votre gouvernement va les saisir aussi
...à ce que l'on dit !
DONC
Inscris !
En tête du premier feuillet
Que je n'ai pas de haine pour les hommes
Que je n'assaille personne mais que
Si j'ai faim
Je mange la chair de mon Usurpateur
Gare ! Gare ! Gare
À ma fureur !
Merci pour ce poème à : http://mahmoud-darwich.chez-alice.fr
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MAHMOUD DARWICH : émouvant poème en hommage à Mohammed AL DURA, l'enfant palestinien de 12 ans assassiné en direct devant les caméras par les soldats de l'Etat d'Israël en septembre 2000
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