Rechercher dans ce blog

lundi, mars 26, 2007

45 - Lundi 26 mars

Lundi 26 mars 2007

J’ai dormi comme pas un loire, mais comme il faut. Jour de départ. Un saut au cyber d’en face. Je salue tout le monde. Me. est au travail. Mi. me devance sur Marseille à 15 heures. Mon Tgv est à 18 H 34.

dimanche, mars 25, 2007

44- Samedi et dimanche

Samedi 24 mars 2007

12 heures, Ma. m’a invité chez un restaurateur à la tête et classe de turc. Nous avons commandé un délicieux plat, dont le nom s’est volatilisé aussitôt sortis. Direction le Salon. Algérie bis repetita. Nous sommes arrivés à l’heure pour la rencontre avec des auteurs nouveaux ou confirmés : Anouar Benmalek, Nadia Sebkhi, Djamel Mati, Fatiha Nesrine, Fayçal Ouaret. Nombreux étaient les spectateurs, intéressés ou curieux.

J’ai pris énormément de notes que malheureusement j’ai égarées. De mémoire : Les interventions furent intéressantes, notamment celles de la poétesse Sebkhi « une simple Algérienne qui ose écrire, qui aime l’Islam médiéval. » Islam médiéval dont elle est à la recherche et qu’elle oppose à l’Islam contemporain. « l’écriture est d’abord universelle » dit-elle.
Sebkhi est venue défendre son « Sous le voile de mon âme », un récit hors temps, hors espace et qui n’est pas autobiographique a-t-elle inutilement insisté. La chute légère de son intervention m’a fait sourire : « Tout va bien en Algérie, la preuve, il y a des défilés de mode ». Léger. Très.

Autre intervention assez captivante, celle de Nesrine, venue pour « La baie aux jeunes filles ». Elle y a tenté a dit l’auteure d’y multiplier les sens, de libérer la parole ; Tous les genres y figurent, poésie, chansons… Dans son roman, le personnage principal , une maman, « refuse de reconduire l’ordre social établi, elle veut participer à un changement social. Elle est rationnelle, courageuse, elle travaille chez elle comme couturière. Pour elle, inscrire sa fille à l’école c’est tout simplement lui permettre l’accès au savoir et pour elle l’accès au savoir c’est une porte qui ouvre sur d’autres portes. »

Ainsi que la précédente, Nesrine a tenu à préciser que « si le roman est écrit à la première personne, il n’est nullement autobiographique. » Cela ne me convainc pas. Fayçal Ouaret (Terres noires, journal de Pauline Roland à Sétif) a quant à lui, dérapé. Ses paroles ont bousculé sa pensée : « Pour moi la colonisation a été bénéfique, j’ai découvert Dinet et Pauline Roland ». Il a maladroitement tenté de rectifier à la suite de mon interpellation. Autre parole incompréhensible de ce même Ouaret, « On écrit toujours dans l’urgence ». Djamel Mati nous a expliqué que son roman Aigre-doux, « vogue entre réel et irréel ». Arrive enfin « Anouar Benmalek que je n’ai pas besoin de vous présenter » jubilait l’opportuniste modérateur Lazhari Labter, ancien soutien du Conducator Ceausescu, qui s'est
reconverti dans les affaires de l'écrit (presse et livres) et qui omet que le propre des écrits ("Révolution africaine") est de semer des traces !

Benmalek (Vivre pour écrire, O maria), habitué des plateaux, a gesticulé hardiment durant toute son intervention, a plaisanté et engagé une parade séductrice et bien huilée en direction du public attentif et courtois (mais sans plus). « Je dirais que moi personnellement je ne me considère pas comme un écrivain Algérien. Je suis, en un seul mot, écrivain et Algérien. Je veux dire par là que le lieu de naissance n’est pas fondamental, il ne définit pas ce que j’écris. » Généralités. Mais Benmalek n’a quasiment pas répondu à mes interrogations, ni les autres intervenants :

Lorsqu’on dit qu’il y a un contrat scellé entre l’écrivain et le lecteur cela signifierait que l’écrivain écrit pour autrui, ce que personnellement je ne pense pas.
Régis Jauffret (Microfictions, Asiles de fous, Univers univers) dit "Je ne veux pas faire le trottoir pour que les gens me lisent. Si je devais répondre au besoin du lecteur lambda, j'entrerais alors dans l'industrie éditoriale (...) L'art ne va pas vers les gens, c'est à eux de faire le pas vers lui." (in Télérama du 21 courant)

Autre question, celle de la « réalité » ; Se trouve-t-elle incarnée dans l’esthétique ou bien est-elle (banale) que nous renvoie le référent ? (Lire à ce propos ce qu’en disait Sarraute in « L’ère du soupçon »).

Ailleurs (Editions de L’Aube) Maïssa Bey a fait faux bon. Un peu plus loin c’était la cohue autour de Ramadan, flashs et bousculades polies.

A16 heures 30 nous avons quitté le Salon car on nous attendait à Pigalle. Oui je sais, Pigalle … Bien non, Ha., Mi., Ma. et moi sommes très comme il faut. Nous avons louvoyé puis nous avons attéri à l’hôtel. C’est Ha. qui a décidé d’arroser. La discussion (parfois débat) a enfourché des chemins banals, anodins, difficiles, politiques et la nostalgie aussi bien sûr. Il y a si longtemps que nous n’avons vu notre pédiatre Mi. arrivé du bled il y a quelques jours pour cause de congrès international et point pour notre Salon. A chacun ses vices et vertues.

Dimanche 25 mars 2007

Mi. m’attend sur les quais du métro, direction Chatillon. Je l’emmène découvrir le Salon. Stand Algérie. Dédicaces d’inconnus (Chaalal Omar). Mediène est prévu pour mardi (pour son « Issiakhem »). J’ai acheté son pavé sur Yacine mais je n’ai pas eu le temps de le lire. On tourne au grès du vent si tant est qu’il y en a . Il en faudrait. La chaleur est torride. A l’extérieur il fait bien froid. On tourne donc. Au niveau du stand H91 la cohue est indescriptible. Rien à voir avec celle qui a entouré Ramadan. Là c’est l’hystérie. Nous réussissons tout de même à voir le coq gaulois métissé, notre Bové national, fier et heureux d’ête ainsi sollicité. Il dédicace son dernier ouvrage « Un autre monde est possible ». Un peu plus loin chez Chaulet-Achour, le calme est saisissant. Elle me reconnaît « Stockholm ! » Elle va bien me dit Christiane, toujours à Pontoise. Elle me dédicace un livre de claire de Duras « Ourika » qu’elle a préfacé. Ce livre est paru pour la première fois en 1823. Duras fut une duchesse du 18° qui tenait salon. Elle était proche de Madame de Staël et de Chateaubriand. Mi. et moi ne nous attardons pas.
Il ne me faut pas abuser de la patience et de la politesse de mon ami Mi. Ha. nous a rejoint à Place Clichy. Un pot au Petit Poucet. Je rentre chez Me. Un bon tagine et une discussion familiale.

vendredi, mars 23, 2007

43- Vendredi 23 mars 2007

Vendredi 23 mars 2007

Je suis arrivé à Paris tard dans la soirée du mercredi. Hier jeudi j’ai profité du temps libre pour retrouver mes places et espaces préférés. Comme aujourd’hui il a fait froid.
Je me suis jeté dans la ville tentaculaire dont je me languis les avenues, les odeurs si particulières lorsque en passant devant des bouches de métro on prend en pleine face des senteurs indescriptibles voguant entre chlorophyle, tabac, papier usé et que sais-je encore. J’ai pris le métro à la station Basilique de Saint Denis pour en sortir à Montparnasse Bienvenüe. J’ai déambulé depuis, de rues en avenues, d’avenues en boulevards, de boulevards en places jusqu’à la place justement du Chatelet où j’ai attendu mon ami Ma. qui est arrivé avec un retard, justifié comme à chaque fois… Nous avons longé l’avenue de Rivoli jusqu’à la place de la Concorde puis avons pris à droite l’avenue de l’Opéra puis encore quelques avenues et rues pour enfin atteindre Saint Lazare où nous attendait notre ami commun Ha. Palabres durant des heures. Je n’ai pas rêvé.

Il est 10 heures. Mes jambes sont lourdes et pour cause. Comme hier il fait froid donc, comme hier je m’installe devant un des nombreux PC d’un Cybercafé sis sur l’avenue Gabriel Péri où je loge. Il pleut dans le cœur de Saint-Denis comme il flotte sur Paris. 11 heures 45, Salon du Livre. Il n’y a pas encore la foule des week-ends et pour cause, nous ne sommes pas encore en fin de semaine. La première visite que je m’impose je l’effectue au stand Algérie. Après celui de la presse bien sûr. Là je m’y fais établir un badge et récupère un book-presse. Je devrais dire stands au pluriel pour l’Algérie car cette année et c’est tout à fait nouveau (par mésentente ou par choix ?) il y a plusieurs petits emplacements posés côte à côte sur deux angles d’ailes, L et H. Sont présentes les éditions Chihab, Enag, Enap, Casbah d’un côté,Tell, Média Plus, Alpha, Dar El Gharb, Apic etc. de l’autre. De nombreux ouvrages, essais et romans, livres d’Art et d’Histoire, sont posés sur les tables. Des éternels Kateb Yacine and C° aux écritures plus fraiches. Certains titres sont mis en avant ainsi « Pousse avec eux » de Hakim Laalam qui s’étale sur plus d’un mètre carré. Il n’y en a que pour lui, mais nous ne savons, on ne nous dit rien sur l’auteur ni l’écrit. Il y a « Je t’offrirai une gazelle » de Malek Haddad, « Le développement durable, un pari gagnant » de Chantal Bonnet, « Kan ya Makan… » de Zineb Labidi « Guide d’Algérie » de Marc Cotte, « L’arbiraire » de Bachir Hadj Ali, « Les exilés du matin » de Hakim Skif, « Le temps d’une halte » de Abdelaziz Ferrah, « Les écrivains Algériens » (‘bizarement’ j’y figure) de Achour Cheurfi, « La cuisine moderne algérienne » de Mokhtaria Rezki. Une cuisine donc. De nombreuses séances de dédicaces sont prévues. Aujourd’hui, Chantal Bonnet, Marc Cotte, Abdelaziz Ferrah, Zineb Labidi. Jouxtent les stands marocain, tunisien et haïtien.

Sur un autre stand d’éditions françaises, à peine visible, très discret, le chikh à son âge fait mine de lire un quotidien. J’ai nommé notre ami et respectable Salim Bachi. Il me remercie pour notre dernier entretien et me donne quelques explications sur ses « Douze contes de minuit ». Je les porterai sur mon blog (ses explications).

samedi, mars 17, 2007

42- Le Salon est à notre porte


Le Salon de Paris accueille l'Inde cette année.



Une quarantaine d’organsimes et éditeurs algériens seront présents au salon du livre 23 au 27 mars 2007. Les écrivains suivants y présenteront leur dernières parutions :

Maïssa BEY (l’ombre d’un homme qui marche au soleil), Salim BACHI (les douze contes de minuit), Rachid BOUDJEDRA (Hôtel saint George), Anouar BENMALEK (vivre pour écrire), Kamel ABDELLAOUI (comme un brin de paille), Anissa BOUAYAD (l’art et l’Algérie insurgée), Amina BEKKAT (Edouard Saïd, variations sur un poème), Omar CHAALAL (Le fugitif- kateb Yacine l’homme libre), Soraya DAHMANI (la nuit des anges), Rachida DOUADI ( l’Algérie en France), Fatima EL-AYOUBI (prière à la lune), Abdelaziz FERRAH (le temps d’une halte), Wadi BOUZAR (les papillons, la nuit) et d'autres...


samedi, mars 10, 2007

41- La littérature en péril de Tzvetan TODOROV

J’ai fini le dernier Todorov « La littérature en péril » (chez Flammarion – 2007). Assez amer le Tzvetan, amertume et colère raffinée. Pas content du tout du sort réservé à la littérature dans les collèges et lycées de France et de Navarre. A qui la faute ? (car il y en a une) : à la conception réductrice véhiculée par le structuralisme exacerbé ces dernières années (depuis mai 1968), structuralisme au sein duquel Todorov a baigné de nombreuses années et jusqu’au cou – il en a été un des leaders en France – Pour Todorov la littérature devrait cesser de se gratter le nombril (ce qu’il appelle ‘l’appareil interne’). La littérature doit se mettre au garde à vous du réel. C’est bien d’apprendre les théories et les techniques littéraires dit-il (l’appareil interne) mais il ne faut pas qu’elle deviennent fin en soi. Todorov n’aime pas les formalistes, vainqueurs d’hier et d’aujourd’hui. On n’étudie que la relation des éléments de l’œuvre entre eux. Aujourd’hui ajoute-il la littérature dominante est sans rapport avec le réel. Mais en fin de l’essai il relativise son propos et parle de curseur à bien positionner. Il faut un équilibre entre le dedans de l’œuvre et le dehors, le monde du réel. Enfin Todorov regrette qu’il y ait aujourd’hui deux littératures qui s’opposent : la littérature de masse en prise directe avec la vie quotidienne, dédaignée par la seconde, la littérature d’élite, lue par les professionnels qui ne s’intéressent qu’aux seules prouesses techniques.

Je ne suis que très peu d’accord, notamment avec sa conception du réel. Qu’est ce que ce réel dans un roman linéaire ou plutôt plat, sans relief, sans le fameux ‘appareil interne’ qui fait le beau ?

Ceci n'est qu'un jet en vrac. Un jour, il me faut trouver le temps, j'en ferai une recension.

samedi, mars 03, 2007

40- Nouvelle: Au 37° Lacis

Au 37° lacis

Durant de nombreuses années mes grands parents et leurs enfants ont eu pour voisine une famille qu'ils appréciaient sans limite. Je la nommerai Révétsi. Une famille nombreuse. Les Révétsi à leur tour et sans le change, aimaient bien la compagnie des miens. Les plus jeunes de leurs enfants étaient mes amis les plus proches. D’aucuns disaient de cette famille qu'elle venait d'Italie de Malaisie ou de Tataouine. D’autres affirmaient qu’elle était des nôtres depuis la nuit des temps. Ma préférence juvénile s’arrimait à la jupe irisée de M..., la plus belle de mes connaissances. Elle était tout à la fois ma Mrs Dalloway, ma Nedjma, je veux dire mon étoile. Nous avons traversé ensemble notre enfance dans une atmosphère peu encline à la sérénité.

Elle était jolie ma Révétsi. Mon éducation sentimentale se nourrissait à son sourire naïf et à sa peau métissée. Ses étreintes maladroites enserraient mon regard dès lors qu'il s'alanguissait pesamment. Elle était polie, avenante et tout et tout, éclatante de mille feux, mille arcs-en-ciel, mille vérités. Ma Révétsi était un kaléidoscope. Cela me peinait de la voir affronter seule et dans le silence, les tourments qu’infligent les dogmes. Le contexte aliénait, aveuglait beaucoup de nos semblables - et je ne m'en exclus pas malgré des circonstances atténuantes que je peux évoquer, ma jeunesse d'alors – nos semblables dis-je à la recherche d'une issue monochrome quelle qu'elle fut, noire ou blanche ou jaune, au détriment parfois de leurs convictions ou de l'évidence élémentaire. Elle m'a fait aimer le Capitaine Fracasse ma Révétsi, Moby Dick ainsi que les nuances des pastels de Cézanne et Pissarro.

Plus tard, l'adolescence traversée, nous nous sommes séparés. J'avoue avoir été responsable de la rupture de la relation qui se tissait patiemment entre nous deux, tant bien que mal au gré des jours. Les lauriers de notre jardin commun furent coupés. Il demeure en moi le regret de n'avoir jamais su ou pu adopter alors son unique défaut : l'intransigeance. J'aurais gagné du temps. Il lui était intolérable que l'on évoquât en mal ou même égratignât, ses frères ses cousines ou ses parents, ses proches. Quelles que soient les critiques, elle les récusait avec une grâce toute personnelle qu'elle savait envelopper dans un argumentaire choc cousu de fil d’or. Avec ou sans subterfuges, nul ne parvenait à la cheville de ses démonstrations. A son âge, entre le rose et le rouge, entre le rouge et le noir elle fricotait avec les aventures de la dialectique sans même le moindre remord à l’ère du soupçon généralisé. Lorsque sa force sa pertinence et sa faconde me montaient au nez, souvent et souverainement ; je me consolais de n'être jamais seul à y être assujetti. J'étais toujours perdant, mais jamais seul dans la défaite, dans la chute. Tout cela me donnait forcément la nausée. Flairant la rupture elle se ravisait modérément, atténuait ses élans et même parfois se reculait puis lançait l'un de ses mots scapulaires étoffés comme "lis !" terme qu'elle ponctuait d'une exclamation qu'elle me plaquait aux oreilles, impérative qu'elle était, et qu'elle est encore j'en suis convaincu ; "lis !" disait-elle, ou bien lorsque nous tentions une intimidation en meute, "lisez !"

Un jour, au sortir de l'adolescence, alors que mes arguments me revinrent encore une fois à la figure comme un boomerang éclaté, fissuré ; mes combinaisons erratiques abandonnèrent lamentablement. Démuni, je renonçai définitivement à la partie, humilié tout de même. J'ai alors mis à profit la liberté que m'offraient mes nouvelles connaissances qui commençaient à s'échafauder au-delà des premiers cercles spatiaux. Lorsqu'elles se firent nombreuses et disparates elles m'incitèrent à larguer les amarres. Ma futile jalousie s'estompait. Jusqu’à la rupture.

Nous nous sommes séparés donc. Je suis devenu l’étranger. Mon unique soulagement fut que je n'étais pas seul dans la confrontation achevée, définitive alors. Je m'en suis remis à la comédie humaine, et aux âmes mortes. Le sac à dos et quelques monnaies de singe pour uniques compagnons de fortune, m'éloignèrent pour longtemps de ma Vérité puérile. Je me suis jeté corps et âme dans le bruit et la fureur du monde tel l'Ulysse de nos rêves mythiques ; de Samarkand au ventre de Paris en passant par et cetera...

Plus mes désirs d'éloignement de M... se prenaient en charge, plus je pénétrais l'univers des crimes et châtiments, plus le temps passait et plus une force intérieure inconnue, façonnait minutieusement ma conscience mon être et mon néant, irrémédiablement, tel un Rodin de Claudel otage de ses passions. Elle me dictait les mots d’une loi que peu à peu j'assimilais. Elle m'ordonnait de revenir à ma Révétsi de mon berceau, de ma source opaline. Cela dura des années et des années au terme desquelles j'ai entrepris de la retrouver. Alors j'ai cherché, cherché, car évidemment, elle aussi, naturellement, vivait sa vie. Cette recherche de ma Révétsi, cette recherche du temps perdu ne fut pas vaine. Le serment des barbares n'avait désormais plus prise sur mes convictions débarbouillées, armées des mots mâts de ma Révétsi, des mots totems et tabous, que j’ai embrassé.

Les eaux ont coulé jours et nuits sous tous les ponts Mirabeau et sous ceux de toutes les certitudes, de tous leurs messages et de tous leurs procès inhérents. Elles craquelèrent de toutes parts telles des remparts sablonneux. Le jour et les soupçons se sont définitivement levés alors que j’étais loin des miens, bien avant l'année dernière, à Marienbad.

Ma Révétsi m'accompagnait sans être physiquement à mes côtés. Elle me guidait, m'encourageait, m'ouvrait au nouveau monde retrouvé. Dans mes solitudes souvent noctambules, devant l'affront que lançaient à mon désarroi des lignes entières de romans, j'implorais son aide. Dans ma quête quotidienne je ne percevais pas de solution qui fasse l'impasse sur ma Révétsi.

Aujourd'hui à mon âge, j'avoue... Je dis qu'aujourd'hui à mon âge, j'avoue fièrement que les passions de mon âme pour M... sont plus fortes que jamais. Elle est ma conviction, ma force, ma vie. Elle est mon salut, mon arc-en-ciel, mes fruits d'or, ma vérité métissée. Elle est ma Révétsi. Elle est là dissimulée - comme un intrus, mais sans l'être - dans ce dédale de mots, tapie derrière le premier homme, entre le planétarium et le livre de sable... Elle s'y trouve, blottie, éclatante telle un kaléidoscope et patiente telle Grisélidis, la Révétsi. Je continue de l’y rechercher.

Ahmed Hanifi, octobre 2004