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jeudi, septembre 11, 2008

110- Salim bachi "nominé" au Goncourt pour : Le Silence de Mahomet

Entretien avec Salim Bachi

El Watan jeudi 11 septembre 2008

- Cela doit être une agréable surprise. Vous vous attendiez à cette nomination ? Quelle a été votre réaction à cette annonce ?
- Je suis le premier surpris, je ne m’y attendais pas. Je suis très heureux de cette première sélection.
- Pourquoi écrire sur le Prophète Mohammed ? Tout a été dit, non ?
- Beaucoup de choses ont été dites, mais toutes ne sont pas connues par tout le monde. Je voulais qu’un large public en sache plus sur la vie du Prophète. Sa vie est extraordinaire et très peu de personnes la connaissent dans ses détails. Je me suis bien entendu inspiré des livres qui ont été écrits sur le sujet, que ce soit La Sîra de Mahmoud Hussein ou de divers essais et biographies qui paraissent régulièrement sur Mohammed. Ensuite, j’ai fait mon travail de romancier, qui a été de donner vie à une figure historique et de l’inscrire dans un roman d’imagination et d’aventure.
- En vous attaquant à ce sujet sensible, aviez-vous des appréhensions ?
- Non. Vous savez, je n’écris pas pour les extrémistes. De même, je n’ai pas composé ce roman pour choquer ou verser dans la caricature. J’ai un profond respect pour cette figure essentielle de l’Islam qu’est le Prophète Mohammed. J’espère surtout lui avoir rendu hommage à travers mon roman. Avoir redonné à cet homme une dimension humaine, image qu’il voulait que l’on garde de lui. Je souhaitais qu’il soit simplement vivant, complexe, hors des clichés que l’on colporte à son sujet. Et qu’il soit aussi, pour la première fois, un personnage de roman.
- Comment analysez-vous le personnage ?
- C’était un homme profondément de son temps et qui échappait à celui-ci : la marque des grands. Il était à la fois ingénu lorsqu’il croyait, et profondément perspicace lorsqu’il s’agissait de prendre en main sa destinée de chef de guerre et d’homme d’Etat. C’était aussi un homme qui aimait les femmes et d’ailleurs j’ai voulu rendre hommage à deux d’entre-elles dans Le silence de Mahomet, à savoir Khadîja et Aïcha, ses deux principales amours. Sans ces deux femmes, l’Islam ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui. La première a cru en son Message, la seconde l’a transmis. Il était temps de remettre les femmes au cœur de l’Islam.
- Quels sont les écrivains qui vous semblent le plus à même d’être vos concurrents dans la liste des 15 sélectionnés pour le Goncourt ?
- Tous ! Et je ne me place pas en état de concurrence. Je suis heureux de ce qui advient aujourd’hui. Je souhaite tout le succès possible aux autres écrivains. Ce métier est un métier de solitude, difficile, âpre et qui demande une certaine force d’âme. Donc, pas de concurrents mais des compagnons de labeur.
- Boualem Sansal, Akli Tadjer, Yasmina Khadra, Malika Mokeddem, ... Cette année a été très riche pour la littérature algérienne. Quel regard portez-vous sur cette création ?
- Je suis content de voir que la littérature algérienne se porte à merveille. Elle est diverse, riche et en perpétuel renouvellement. Elle est aussi bien animée par des hommes que par des femmes de talent. J’aimerais que l’Algérie soit à son image. On s’en porterait bien mieux.


Par Rémi Yacine

[Le journaliste a omis de préciser qu'il s'agit de "LE SILENCE DE MAHOMET" ed: Gallimard, 2008]

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El Watan jeudi 11 septembre 2008

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Prix Goncourt-Salim Bachi nominé : Un Algérien en lice

Parmi les 15 sélectionnés, l’écrivain Salim Bachi pour son livre Le silence de Mahomet (Gallimard). Résultats le 10 novembre et entretien à chaud avec l’auteurA 36 ans, Salim Bachi fait une rentrée fracassante. Pour son quatrième livre, Le Silence de Mahomet, il est sélectionné par le jury de l’Académie Goncourt, qui a accueilli en mai deux nouveaux membres, Tahar Ben Jelloun et Patrick Rambaud.



Paris : De notre bureau

Salim Bachi dresse un tableau éclairant sur la vie du Prophète. Le roman se déroule entre La Mecque et Médine, des sables du désert d’Arabie aux abords de Jérusalem aux alentours de l’an 600. « Nous voyons Maohammed naître, vivre et mourir à travers les confessions de sa première femme, Khadija, de son meilleur ami, le calife Abou Bakr, du fougueux Khalid, le général qui conquit l’Iraq au cours de batailles épiques, et enfin de la jeune Aïcha, devenue son épouse à l’âge de neuf ans », explique son éditeur. Dl’extrait de son livre qu’il a mis en ligne sur son blog, on a déjà un aperçu de sa fougue littéraire. Ainsi, Khadija raconte leur intimité avec une profusion de détails.

« La nuit, Mohammad se retournait sur notre couche, sans trouver le repos. Quand il glissait dans le sommeil, des rêves étranges le tourmentaient. Parfois, il volait avec les oiseaux, et se souvenait de l’armée d’Abraham ; il la regardait avancer dans le désert, se dirigeant vers la Kaaba. Il voyait les hommes de l’Abyssin, fourbus et lamentables ; il poursuivait les chameaux de son grand-père, Abd al-Mouttalib. D’autres fois, il songeait au châtiment des gens de Thamoud. Dieu leur avait envoyé un prophète, Salih, qui, me racontait Mohammad quand il se réveillait, lui ressemblait trait pour trait » Marchand et caravanier prospère visité par Dieu à quarante ans, prophète et homme d’Etat visionnaire à cinquante, amant et conquérant, Mohammed ne cesse de fasciner et d’embraser les âmes plus de quatorze siècles après sa mort à Médine sur les genoux d’Aïcha, son dernier amour, remarque l’auteur.

« Pourquoi un roman sur le prophète Mohammad ? Comment passer à côté d’un tel sujet, à côté d’une personnalité aussi fascinante ? Cet homme est à l’origine d’une religion et d’une civilisation et c’est la seule personne dont les romanciers arabes, musulmans, ne parlent jamais où l’évoquent à peine. Il y a bien sûr eu ce superbe roman de Driss Chraïbi, L’homme du Livre, mais depuis rien. Je voulais réparer cette injustice », a-t-il déclaré.



Par Rémi Yacine