Quels mots pour exprimer mon aversion ? Tuer (assassiner) un homme vulgarisateur de savoir, mais quelle abjection ! Samuel Paty ce professeur de 47 ans, assassiné ce vendredi 16 octobre sur le chemin de son domicile, enseignait au collège du Bois d’Aulne (Conflans-Ste- Honorine, Yvelines) l’histoire et la géographie. Il enseignait comme tous les enseignants des mêmes matières de la République, l’éducation morale et civique, le suffrage universel, le droit, l’égalité entre les citoyens, la séparation « des Églises » et de l’État, la liberté concrète de dire et d’écrire. La liberté de croire ou de ne pas croire. La laïcité c’est cela, c’est pouvoir prier, revendiquer sa foi, quelle qu’elle soit, ou revendiquer son athéisme sans aucun problème et dans le respect d’autrui et dans le cadre de la loi. Sans jamais rien imposer. L’un des objectifs est de donner à l’élève les éléments de la citoyenneté, une « conscience morale » qui lui permette de partager les valeurs humanistes et de vivre en bonne entente avec tous les citoyens.
Parfois le temps alloué à l’éducation à la citoyenneté n’est pas suffisant. J’ai moi-même été enseignant des mêmes matières (plus le français), dans un centre éducatif, et je dois dire que le temps réservé à la citoyenneté, à l’éducation morale et civique était (et demeure) ridicule. Certains élèves nécessitent plus d’attention que d’autres, donc plus d’heures pour appréhender ces questions dont certaines, plus que d’autres (croyances et mœurs), les heurtent profondément. Et ces heures sont très insuffisantes. Certains adolescents évoluent dans un environnement de grande intolérance et de violence. Un environnement d’abord familial et proche, qui n’accepte pas les différences, l’altérité. L’adolescent est confronté à des réalités, à des discours opposés. Parfois même entraîné dans le sillon de la terreur.
Rien ne peut justifier la violence. Quelle qu’elle soit. En attaquant un enseignant, on agresse le cœur de la République. On peut noter ici et là des maladresses de tel ou tel enseignant, marquer sa désapprobation, le signaler auprès de sa hiérarchie. Mais on ne peut en aucun cas se faire justice soi-même. La loi et les dirigeants sont-ils laxistes ? Faut-il bannir de France les citoyens allogènes comme le suggère à demi-mots (parfois ouvertement) l’extrême droite ? Je ne sais si la France « subit une guérilla », mais je suis écoeuré.
Écoeuré par tous les extrêmes, religieux et profanes.
Dimanche 18 octobre 2020
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Kamel Daoud était hier sur France Culture
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