Rechercher dans ce blog

jeudi, juillet 24, 2014

443_ COMBAT POUR LA LIBERTE et DEONTOLOGIE


A travers ce texte je soulève deux points importants à mes yeux : le premier concerne la perception par les officiels et la presse français de la guerre « Israélo-palestinienne », le second est une mise au point quant au soutien à accorder ou non au peuple de Palestine.

En France les crimes commis par Israël sont officiellement et comme souvent condamnés du bout des lèvres, lorsqu’ils ne sont pas tacitement appuyés, comme l’a fait le président Hollande lors d’une récente déclaration dans laquelle il a appelé l’Etat colonialiste à « prendre toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces (palestiniennes). » Son Premier ministre n’est pas en reste lui qui clamait sur radio Judaïca il y a quelques années qu’il était « lié de manière éternelle à l’Etat d’Israël ». De manière éternelle, sans condition donc. D’autres hommes politiques ont manifesté aussi leur veulerie. Qu’ils soient de droite ou du parti socialiste.
La presse publique ou privée dans son ensemble ne joue pas, tant s’en faut, son rôle de passeur d’information objective. Son parti pris, intelligemment démontré et démonté par Acrimed, aujourd’hui mais hier aussi, est manifeste lorsque par exemple elle reprend des termes comme « Tsahal » ou lorsqu’à la radio on évoque le Hamas en le nommant « Khamas », mimant les Israéliens qui utilisent délibérément ce terme hébreu (Khamas) fortement connoté négativement (« voleur »- cf Ayman E.K.). La presse prend parti lorsqu’elle met sur le même pied d’égalité agresseur et agressé, colonisateur et colonisé. Lorsqu’elle interroge des citoyens israéliens qui justifient en bon français l’agression de leur Etat alors même qu’elle ne trouve aucun Palestinien parlant cette langue. Dans ses justifications, intellectuellement malhonnêtes, elle évoque « la neutralité ». Elle prend parti aussi lorsque, comme récemment, sur les centaines de milliers de manifestants pacifistes à travers toute la France, elle met en avant les saloperies (c’en sont) d’une poignée d’individus antisémites, dont certains (photographiés) n’appartiendraient même pas à la manifestation, et en faire un point de fixation. Elle prend parti dès lors qu’à la suite de ces ignobles (et très peu nombreuses) attitudes, elle se détourne des massacres israéliens pour enclencher sur « le nouvel antisémitisme en France » –à la remorque du Crif, de ses lobbies, du 1° Ministre et d’autres leaders politiques foncièrement pro-israéliens. Nous connaissons depuis longtemps la chanson. Il ne s’agit point de renier l’antisémitisme en France qui est le fait de ces jeunes désaxés se disant musulmans, ni de celui plus franchement ancré dans ce pays, j’entends l’antisémitisme « franchouillard » ou « souchien » et bien blanc donc. Celui des grandes villes, des villages, des montagnes du nord et du sud. Cet antisémitisme existe depuis des lustres, même s’il a reculé depuis la fin des années soixante. Il ne s’agit donc pas de renier ces antisémitismes, non, il s’agit de montrer comment une certaine presse et certains hommes politiques évidemment, peuvent aisément s’extraire d’un sujet brûlant qu’ils ne veulent pas aborder de front pour ouvrir un autre sujet qu’ils jugent politiquement et financièrement plus « portable, rentable ».
Aujourd’hui cette presse se détourne des massacres israéliens pour traiter en Une « le nouvel antisémitisme » donc. En arrière-plan elle commente ces manifestations qu’elle appelle « pro-palestiniennes » et non des manifestations contre les crimes commis par Israël, ce qu’elles sont (photos d’enfants notamment par dizaines). Jusqu’à faire des Unes de ces dérapages et « passer à autre chose », forcer les regards vers d’autres directions que Gaza. Les 700 assassinats (mille ou trois mille demain) ne sont que des chiffres. En tant que tels ils passeront par pertes et profits, comme l’ont été les milliers de morts palestiniens de 2012, 2008, 2006 et d’avant. « C’est la guerre » écrivent les journalistes. Ils n’écrivent pas, ou si peu, que c’est une occupation coloniale. La presse comme les officiels évoque la « défense » d’Israël et met en avant trois « assassinats du Hamas qui ont enclenché la guerre ».  Comme par le passé elle pointe un fait divers et évite de parler d’occupation des terres palestiniennes depuis 1967 ou du blocus de Gaza depuis plus de sept années.

En Algérie, c’est le second point, je déplore et dénonce certains écrits et déclarations qui, d’une certaine manière et objectivement, veulent faire l’impasse sur le soutien des populations au peuple palestinien au prétexte qu’il y a d’autres combats qui n’ont pas été menés ou qui sont à mener. Une injonction est ainsi adressée (parfois teinté d’arrogance à partir d’un bureau de rédaction, d’une terrasse de café ou d’une page de réseau social). En somme nous sommes enjoints de hiérarchiser les luttes. Faut-il que chacun apporte les justifications personnelles, idéologiques, de proximité, etc avant de se lancer dans tel ou tel combat ? Et à qui faut-il qu’il les présente ces justifications? Quel gâchis ! A ce jeu, pas très sain admettons-le, je pourrais à mon tour poser ces questions : Qui en Algérie a soutenu la lutte des peuples amérindiens ? qui a soutenu les minorités chinoises ? et les étudiants de Tien An Men ? qui a dénoncé les exactions commises en Afrique noire, les condamnations à mort en Turquie hier, aux Etats-Unis hier et aujourd’hui ? qui a dénoncé les disparitions forcées au Chili hier, en Algérie récemment ? qui soutenait les minorités en Algérie avant le grand déballage ? qui s’est tranché derrière un clan ou un autre plutôt que d’exiger une démocratie réelle (avec ses droits, ses devoirs et limites) accessible à chacun, quelles que soient ses croyances ou ses proximités idéologiques dès lors qu’elles n’outrepassent pas les règles édictées ? qui est au four et au moulin, qui… ? Nous n’avons pas besoin d’ultimatum, de mise en garde ou d’indexation. S’il le voulait, le passé de chacun parlerait pour lui. Non vraiment, si c’était un jeu de plume et de papier et non de drames qui se nouent, qui se jouent, je dirais que cela est trop facile, trop futile et trop ridicule. Mais, il y a mort d’innocents, de résistants.
Défendre le droit à la vie, le droit à un espace vital, en l’occurrence aujourd’hui pour les Palestiniens est un grand honneur et une obligation pour tous les hommes épris de liberté et de justice. Tout le reste n’est que littérature de chiens écrasés.

Ahmed Hanifi,
Marseille, le 24 juillet 2014
Dernier roman : La folle d’Alger, ed L’Harmattan.