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dimanche, décembre 31, 2023

821_ VOEU QUE L'ANNÉE 2024 SOIT CELLE DE LA LIBERTÉ POUR LES PALESTINIENS

 


820_ La blonde franco-israélienne du Nord et la horde Arabo-Palestinienne du Sud

 La caméra filme de très près le visage (blonde pulpeuse), d’une jeune franco-israélienne, Mia Schem, libérée le Hamas le 30 novembre dernier. Trente jours plus tard elle est autorisée à parler. Elle est filmée. La caméra insiste sur son bras tatoué ‘‘ we will dance again 7.10.2023’’. Puis on la voit se déhancher « au festival techno proche de Gaza quand les terroristes du Hamas surgissent ». Images de voitures et de personnes en fuite. Elle témoigne en hébreu. Très à l’aise, comme dans une série télévisée.






Pas une fois en français. Elle égrène calmement l’impensable suggère-t-on. Elle confirme : « J’ai vécu un holocauste, j’étais enfermée dans une pièce sombre, on me regardait comme si j’étais un animal, j’avais sans cesse peur qu’on me touche, une fois je me suis effondrée en pleurs, on m’a dit ‘‘ arrête de pleurer où je t’envoie dans les tunnels’’, j’avais peur d’être violée (nous avons pu lire sur un bandeau d’une chaîne de TV française « ils me violaient par leurs regards »), j’avais peur de mourir, tout le monde là-bas est un terroriste » (vidéo France2 in Francetvinfo.fr- 29/12/2023). Le mois dernier elle disait ceci (France24.com, 30/11/2023) :  « Ils s’occupent de moi, ils me donnent des médicaments, tout va bien. » ‘‘Ils’’ sont ses geôliers du Hamas.

Cette jeune fille dont on sait presque tout, ses amis, ses parents, son nom et son prénom, Mia, qui a eu peur d’être violée, peur d’être touchée, qui a même pleuré dans sa prison (une chambre de famille)…, cette jeune fille a ému toute la France médiatique, chienne de garde d’Israël (sauf le respect que je dois à une minorité qui bataille dur contre vents et marées pour le droit à la vie véritable, à la liberté, à la vérité globale, au respect du droit international). Cette jeune fille a ému jusqu’au sommet de l’état français. Monsieur Macron qui parle au nom de tous les Français déclare :  « C'est une grande joie que je partage avec sa famille et tous les Français. » Lui qui, comme les médias chiens de garde d’Israël, n’évoque jamais les Palestiniens que comme des « lots », des groupes, hagards, des groupes informes. Qui donnent envie de rien, pas même de les aider. Même leurs désarrois sont insupportables à entendre. Ils ne parlent jamais avec une voix mielleuse comme celle de Mia, jamais à tête reposée (réglage caméra, balance des blancs, autofocus), en mimant son futur « tortionnaire » (holocauste !) d’ailleurs ils n’ont ni nom ni prénom ces Palestiniens. Et ils braillent ! Que d’enfants, que d’enfants ! Des ombres à suivre de loin. Lorsqu’on les évoque, on montre de loin leurs cadavres entassés sous des couvertures, ou sous les décombres. Ils nous sont tellement éloignés ces gens-là à « nous les Blancs ! »

Il n’y a dans les reportages de propagande ou de complicité des médias Chiens de garde d’Israël jamais d’image de belle jeune fille palestinienne (Dieu sait qu’il y en a !) qui pourrait si on se donnait la peine, parler, assise à même les décombres de sa maison, devant un thé chaud ou une galette, une coupe d’huile d’olive, (attention au réglage de la caméra, des balances), parler calmement, avec sérénité, les yeux dans les yeux, parler des « visages de ceux qui jetteront nos enfants… » et se demander comme Darwich « Où irons-nous après les dernières frontières ? » C’est que leur propre terre, la Terre de Palestine ne les contient plus. Cette jeune palestinienne, si on avait pris la peine et le courage, la bravoure, de s’en approcher, d’écouter son histoire avec une grande H, aurait pu parler de ses pères, grands-pères dépossédés de leur terre, des centaines de milliers de morts du fait de la terreur coloniale depuis 1948, elle aurait donné chacun de leurs nom, leur lieu de naissance, leurs branches, leurs racines. On aurait entendu le vent des plaines et leurs cris de douleurs. On aurait entendu le cri du malheur originel de son peuple, « Falastini ». Cette jeune palestinienne, niée, redoutée, aurait commencé par le grand terroriste devant l’éternel, le héros des colons, Ben Gourion. Elle aurait rapporté le Grande histoire de son peuple, celle que lui ont inculquée ses parents, celle qu’elle rapportera à ses enfants. Il n’y aura rien de tout cela. Les chiens de garde d’Israël se délectent des récits de « Tsahal ». C’est assez et c’est bien ainsi. 

Il n’y a rien dans leurs reportages, sur l’alerte très récente (la même semaine) de l’agence onusienne ANPA qui s’alarme : « Les femmes enceintes et les nouveau-nés font face à la guerre, au manque d'hôpitaux et maintenant à la famine à Gaza. » (ANPA- Agence des Nations Unies pour la santé). L’ONU s’inquiète dans le vide. Pas une caméra libre pour ces hordes. Les caméra se bousculent autour de Mia. C’est qu’ils tiennent à protéger leurs arrière-cours. Il n’y a rien à ce sujet dans les reportages de propagande ou de complicité des médias Chiens de garde d’Israël. 

En Australie, de l’autre côté du monde, Zena Chamas écrivait ce jeudi 28 décembre ( abc.net /Australie) : « Au milieu d'une guerre qui fait rage, des femmes accoucheraient sur des sols remplis de décombres, subiraient des césariennes d'urgence sans anesthésie ni soulagement de la douleur, et seraient même mortes après l'accouchement en raison du manque de matériel médical. » 

Nous ne saurons rien de ce côté-ci du Monde Blanc de ces femmes qui ne nous ressemblent pas. Car pas jeunes comme Mia, pas blanches, pas comme elle, pas danseuse comme elle. Pas de tatouages (enfin, pas les mêmes). Rien. Ces femmes à même le bitume n’ont juste plus rien que leurs yeux désorbités. Nous ne verrons pas un seul de leurs visages de femmes non blanches, de leurs bébés (les survivants) non blancs. Elles, sont à l’opposé, de l’autre côté du monde blanc, si loin et parmi nous pourtant. 

Avec cette guerre contre les Palestiniens, cette énième guerre, Le Nord définitivement perdu son honneur. Israël avec lui. Un autre monde l’a bien compris. Il se consolide. Les chiens de garde aboient dans un vide de plus en plus grand. Ils commencent à s’en rendre compte à mots voilés. Mais il est trop tard. Les noms de ces chiens seront écrits à l’encre indélébile sur les murs de l’ignominie.

Lire ici :

http://ahmedhanifi.com/la-blonde-franco-israelienne-du-nord-et-la-horde-arabo-palestinienne-du-sud/


____________________COMPLEMENT_______________






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ARTICLE AUSTRALIEN SUR LES FEMMES PALESTINIENNES


















Voici la traduction du texte (Google)

Des mères enceintes à Gaza auraient subi des césariennes sans anesthésie, des hystérectomies d'urgence et la mort

Par Zena Chamas

 

Publié jeu. 28 décembre 2023 à 19h50jeudi 28 décembre 2023 à 19h50

Le bruit des femmes et des nouveau-nés hurlant de douleur est constant dans les hôpitaux de Gaza.


AVERTISSEMENT : cette histoire contient un contenu pénible.

 

Au milieu d'une guerre qui fait rage, des femmes accoucheraient sur des sols remplis de décombres, subiraient des césariennes d'urgence sans anesthésie ni soulagement de la douleur, et seraient même mortes après l'accouchement en raison du manque de matériel médical.

Malgré le peu d'hôpitaux encore opérationnels à Gaza, on estime que 180 bébés naissent chaque jour dans la zone de guerre.

Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a averti que les femmes, les enfants et les nouveau-nés subissent de manière disproportionnée le poids de la guerre.

« Des femmes enceintes vivant au milieu des décombres »

Yafa Abu Akar raconte qu'une femme qu'elle connaissait a dû subir une césarienne d'urgence sans anesthésie. (Fourni : Oxfam)

Début novembre, l'agence des Nations Unies a signalé qu'il y avait quelque 50 000 femmes enceintes à Gaza, et que 15 pour cent d'entre elles risquaient de connaître des complications liées à l'accouchement ou à la grossesse.

Yafa Abu Akar vit à Khan Younis, à Gaza, abritant des milliers d'autres personnes dans des bâtiments abandonnés.

Elle a déclaré à ABC qu'elle connaissait personnellement des femmes qui s'étaient vidées de leur sang en accouchant à l'hôpital Nasser, le seul hôpital de la région, qui fonctionne à peine en raison des bombardements constants des forces israéliennes.

Elle a déclaré à l'ABC que les médecins avaient pratiqué une césarienne d'urgence sur une femme de 25 ans qu'elle connaissait en raison de complications.

En raison de saignements abondants, la femme a dû se faire retirer l’utérus après l’accouchement – ​​une situation qui aurait pu être évitée si des soins de santé appropriés avaient été disponibles, a-t-elle expliqué.

"Elle est jeune, c'était son premier enfant et elle ne pourra plus avoir d'enfants. Certaines autres femmes n'ont pas survécu du tout à cause d'une hémorragie", a déclaré Yafa.


"Les femmes enceintes vivent au milieu des décombres et les femmes sont confrontées à des circonstances désastreuses dans tous les aspects de leur vie."
En octobre, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a averti que les patients étaient opérés sans esthétique en raison du manque de fournitures médicales.
Depuis lors, la situation s'est aggravée, l'OMS dénonçant la « décimation » du système de santé de Gaza tout en félicitant les professionnels de la santé de continuer à travailler dans des circonstances extrêmes.
Yafa a déclaré qu'une femme qu'elle connaissait à Khan Younis, enceinte de neuf mois, avait enduré une « situation horrible ».
Elle a déclaré que les médecins « ont été obligés de lui ouvrir le ventre pour faire sortir le bébé » sans aucun soulagement de la douleur.
« Son enfant, une fille, a survécu, heureusement, mais après quoi ? [La femme] a perdu toute sa famille dans la guerre », a déclaré Yafa.
L'UNICEF s'est dit préoccupé par le fait que les femmes qui ne pouvaient pas se rendre dans les hôpitaux de Gaza devraient accoucher dans des conditions dangereuses.
Ils prévoyaient une augmentation des décès maternels en raison du manque d’accès à des soins adéquats.
Selon Yafa, ces préoccupations se confirment.
Dans d’autres régions de Gaza, elle a déclaré avoir entendu parler de femmes enceintes qui ne parvenaient pas à se rendre à l’hôpital à temps et qui étaient forcées d’accoucher dans ce qui restait de leur maison.
Certains sont morts et ont laissé des enfants derrière eux, a-t-elle déclaré.
Accoucher à l'hôpital en toute sécurité est « impossible »
Juzoor, partenaire d'Oxfam, est l'une des rares organisations opérant dans le nord de Gaza.
Il prend en charge 500 femmes enceintes parmi 35 000 autres entassées dans 13 refuges dépourvus d’eau potable et d’installations sanitaires adéquates.
Dans certaines situations, jusqu’à 600 personnes partagent une toilette.
Accoucher en toute sécurité dans un hôpital était devenu « impossible », a déclaré la directrice exécutive de Juzoor, Umaiyeh Khammash.
Il a déclaré que dans chacun des 13 refuges gérés par Juzoor, au moins un nouveau-né était décédé pour des raisons évitables au cours du mois dernier.
M. Khammash a déclaré que ce chiffre était « très élevé » et se traduisait par une augmentation significative du taux de mortalité infantile à Gaza.
Selon le réseau de médecins de Juzoor, les naissances prématurées ont également augmenté de 25 à 30 pour cent, les femmes enceintes stressées et traumatisées étant confrontées à une myriade de défis, comme parcourir de longues distances en quête de sécurité, fuir les bombes et être entassés dans des abris dangereux.
Pendant ce temps, l'ensemble des 2,3 millions d'habitants de la bande de Gaza sont confrontés à des niveaux de faim critiques et le risque de famine augmente chaque jour, selon la Classification intégrée des phases de sécurité alimentaire (IPC) de l'ONU.


Au moins un foyer sur quatre – soit 577 000 personnes – à Gaza est déjà confronté à une famine catastrophique, souffrant d’un manque extrême de nourriture, de famine et d’épuisement de ses capacités d’adaptation, a constaté l’IPC.
Le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) estime que 45 000 femmes enceintes et 68 000 femmes allaitantes à Gaza n'avaient pas assez de nourriture, ce qui les exposait à un risque plus élevé de développer une pré-éclampsie, des hémorragies ou même de mourir.
Le FNUAP a déclaré que les femmes souffrant de malnutrition sont également confrontées à la perspective d'avoir des bébés de faible poids à la naissance.
 
« C'est extrêmement difficile d'être enceinte à Gaza »
Natalie Thurtle, directrice adjointe de Médecins Sans Frontières (MSF), revient tout juste de Jérusalem en Australie, où elle était chargée de coordonner la réponse médicale d'urgence de MSF à Gaza au cours des deux dernières années.
"Il est extrêmement difficile d'être enceinte à Gaza en ce moment", a déclaré le Dr Thurtle.
Elle a expliqué que les femmes sortaient de l'hôpital dès qu'elles pouvaient marcher après leur naissance, car elles n'avaient aucun endroit où recevoir des soins postnatals.
"Ces bébés naissent… mais naissent-ils en toute sécurité ? Presque certainement pas", a déclaré le Dr Thurtle.
Les médecins affirment que des problèmes quotidiens qui pourraient autrement être traités avec des soins de santé appropriés sont négligés en raison du manque de continuité des soins.
Ils vont des femmes atteintes de diabète gestationnel aux nouveau-nés ayant besoin de prendre plus de poids.
"Pour les personnes qui ont besoin d'un accouchement géré et qui ont besoin d'une aide médicale autour de leur accouchement, cette aide n'est pas disponible de manière cohérente et durable", a déclaré le Dr Thurtle.
Elle a déclaré que "les soins d'urgence ne sont pratiquement pas dispensés" aux femmes en travail, étant donné le nombre de personnes ayant besoin de soins pour blessures de guerre.
"Tous ces services s'effondrent. Chaque jour, l'espace dans lequel [MSF] peut travailler devient plus petit. Chaque jour, la sécurité se détériore", a déclaré le Dr Thurtle.
Le personnel de MSF a travaillé dans les hôpitaux et cliniques de Gaza tout au long du conflit, mais affirme que les hôpitaux et les ambulances sont assiégés.
L'organisation a déclaré que des patients et du personnel médical étaient blessés et tués, et que l'accès aux blessés et aux malades était entravé par l'insécurité, le manque de carburant et de téléphonie mobile.
MSF a déclaré que des centaines de professionnels de santé ont déjà été tués, dont trois membres de son propre personnel, tandis que près de 60 ambulances ont été touchées et endommagées.
"Nous ne pouvons pas travailler dans un tel niveau de conflit sans qu'une aide suffisante n'arrive, alors que les soins de santé et les infrastructures sont directement ciblés", a déclaré le Dr Thurtle.

"Nous avons désespérément besoin que cela cesse. Jusqu'à ce que cela s'arrête, nous ne pouvons presque pas travailler… c'est presque impossible."
En particulier, le Dr Thurtle a déclaré que la gravité des blessures des enfants à Gaza était « extrêmement confrontante » et la hantait toujours.
« J'entends parler d'enfants qui sont morts à leur arrivée, d'enfants qui ont des blessures aux membres pourris suite à une présentation très tardive aux soins, à cause d'un bombardement.
"Ces enfants sans aucune famille survivante, ce qui est très courant maintenant, qui ont besoin d'une anesthésie, puis lorsqu'ils se réveillent après une opération chirurgicale [en criant].
"Choisissez une histoire, car il y a beaucoup de tragédies."
Les femmes prennent la pilule pour arrêter leurs règles
En plus des luttes quotidiennes pour trouver de l'eau potable, de la nourriture et un abri convenable, pratiquer l'hygiène féminine, y compris l'utilisation et l'élimination des serviettes hygiéniques, est un combat quotidien pour les femmes.
Yafa a déclaré que de nombreuses femmes prenaient des moyens contraceptifs pour arrêter leurs règles en raison du manque d'accès aux serviettes hygiéniques.
"La plupart des femmes utilisent n'importe quel matériel à leur disposition pendant leurs règles", a-t-elle déclaré.
"Ils n'ont pas d'autre choix. Leur santé est faible en raison du manque de nourriture, d'eau et de nutrition.
"La pilule a affecté la santé mentale de nombreuses femmes, leur bien-être en général."
Le Dr Thurtle a déclaré que c'était « vraiment très sombre pour toutes les femmes qui ont leurs règles à Gaza ».
"Si vous envisagez de changer, [et] d'avoir vos règles sans accès aux produits sanitaires, où vous n'avez qu'une seule toilette pour 20 personnes, vous vivez dans un environnement où vous ne pouvez pas rester propre, vous pouvez" Je ne prends pas de douche", dit-elle.
"Ce n'est peut-être pas la manifestation la plus dramatique de la guerre, mais elle reste extrêmement déshumanisante."
Le Dr Thurtle et Yafa ont déclaré que les femmes subissaient le poids de la guerre.
Yafa a déclaré qu'ils étaient souvent obligés de se débrouiller pour leurs familles, avec des hommes blessés, malades ou tués pendant la guerre.
« [Les femmes] doivent trouver du bois pour [cuisiner] la nourriture et un abri pour leurs enfants, en fouillant entre les maisons détruites et partout où elles le peuvent », a déclaré Yafa.
"Ils sont obligés de chercher entre les décombres juste pour survivre."

Publié le 28 décembre 2023

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jeudi, décembre 07, 2023

819 - Gaza, où meurt notre humanité par Edwy Plenel

 


VOICI L'ARTICLE

PROCHE ET MOYEN-ORIENT

PARTI PRIS/ Edwy Plenel, in MEDIAPART, 7 décembre 2023

 

Gaza, où meurt notre humanité


Ce n’est pas seulement une humanité concrète, celle des vies irrémédiablement perdues, qui se meurt au Proche-Orient. C’est l’idée même d’une humanité commune que ruine la vengeance sans frein ni limites de l’État d’Israël contre la population palestinienne de Gaza en riposte au massacre commis par le Hamas.

Edwy Plenel

7 décembre 2023

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Pense Pense aux autres, est le titre et le refrain d’un célèbre poème de Mahmoud Darwich (1941-2008), sans doute le plus grand poète arabe de notre modernité tant son œuvre ne se réduit pas à la cause palestinienne dont il fut le chantre (son œuvre est traduit en français par Elias Sanbar).

« Quand tu mènes tes guerres, pense aux autres. / (N’oublie pas ceux qui réclament la paix.) », dit sa deuxième strophe. Ce poème est aussi un témoignage car Darwich a grandi dans la conscience de ce souci de l’autre, fût-il ennemi, ayant vécu en Israël jusqu’en 1970, appris l’hébreu comme sa première langue étrangère et découvert dans cette langue la littérature européenne.

Penser aux autres. Ne pas s’enfermer dans une identité close. Ne pas laisser l’émotion détruire l’empathie. Ne pas barbariser l’autre au risque de se barbariser soi-même. Ne pas renoncer à cette élémentaire sensibilité où s’exprime notre souci du monde et du vivant. Or c’est peu dire qu’en France, la scène politique et médiatique n’y incite pas, voire s’y refuse.

 

Un refus qui peut aller jusqu’à l’ignominie puisqu’on a pu entendre une éditorialiste faire le tri entre des enfants morts selon qu’ils aient été tués « délibérément » (en Israël, dans l’attaque du 7 octobre) ou tués « involontairement » (à Gaza sous les bombes, depuis). La compassion pour les premiers, proclamés victimes de la barbarie, est à la mesure de la déshumanisation des seconds, décrétés tués par la civilisation.

Contribuant à invisibiliser la durable injustice faite au peuple palestinien, tant qu’Israël en occupe et colonise les territoires (en violation depuis 1967 des résolutions de l’ONU) et que ses gouvernants lui refusent le droit de vivre dans un État souverain (en violation des accords d’Oslo de 1993), le discours qui nourrit cette insensibilité fait comme si l’histoire s’était arrêtée le 7 octobre 2023, avec les massacres commis par les combattants du Hamas qui ont fait 1 200 victimes. 

Brandi en présent monstrueux, sans passé ni futur, sans cause ni issue, cet événement terrifiant devient, pour les gouvernants d’Israël et leurs alliés, l’alibi de leur aveuglement. Organisée par la propagande étatique israélienne, la projection des images des tueries du 7 octobre, attestant de crimes de guerre, sert de justification à une riposte qui, elle-même, viole les lois de la guerre, transformant la contre-attaque militaire face au Hamas en une vengeance meurtrière indistincte contre la population palestinienne de Gaza.

Jamais, depuis la Seconde Guerre mondiale, autant de civils (15 800 morts au récent décompte réalisé par le gouvernement du Hamas), de familles entières, de femmes et d’enfants, de soignant·es et d’humanitaires, de journalistes et de professionnel·les des médias – au moins 56 tué·es, soit plus d’un par jour d’offensive israélienne –, etc., n’ont perdu la vie dans un conflit armé en si peu de temps et sur un si petit territoire.

Jamais, non plus, un tel déplacement forcé de population, dans des conditions sanitaires et humanitaires catastrophiques, ne s’est produit dans cette même unité de temps et de lieu. Environ 1,9 million de personnes, soit 80 % de la population gazaouie, ont dû fuir, quittant leurs habitations, abandonnant leurs biens, perdant leurs repères pour devenir des réfugié·es et des exilé·es. Une fuite sans répit et sans abri puisque, désormais, l’armée israélienne attaque le sud de la bande de Gaza vers lequel ces foules ont convergé.

À cette échelle de violence, il ne s’agit pas de dommages collatéraux mais bel et bien d’une stratégie guerrière qui s’en prend au peuple tout entier dont est issu l’ennemi particulier visé : but de guerre proclamé par Israël, l’anéantissement du Hamas est devenu sous nos yeux la destruction de la bande de Gaza, de ses villes, de son histoire et de sa sociabilité, de son passé et de son futur, de ses lieux de vie et de travail. Avec pour conséquence ultime, l’effacement de son peuple, expulsé de sa propre terre.

 

Entre désespoir et colère, la sidération qu’exprime l’ensemble des organisations internationales, sans en excepter une seule, qu’il s’agisse des agences onusiennes telle l’UNRWA ou des ONG comme Médecins sans frontières, est à la mesure de cette catastrophe inédite. « Nous sommes proches de l’heure la plus sombre de l’humanité », n’hésite pas à déclarer le responsable de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans les Territoires palestiniens occupés.

Solennelle et inhabituelle, tant la neutralité du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) lui enjoint d’ordinaire le silence, la récente prise de parole publique de sa présidente, Mirjana Spoljaric, lance la même alarme : « Le niveau de souffrance humaine est intolérable. Il est inacceptable que les civils n’aient aucun endroit sûr où aller à Gaza et, avec un siège militaire en place, il n’y a pas non plus de réponse humanitaire adéquate possible à l’heure actuelle. »

Confronté à la complicité, et donc à l’inaction, des alliés occidentaux d’Israël, au premier chef les États-Unis, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, essaye, en vain jusqu’ici, de secouer leur indifférence. Pour la première fois depuis le début de son mandat en 2017, il vient d’invoquer l’article 99 de la Charte des Nations unies qui lui donne le droit d’attirer « l’attention du Conseil de sécurité sur toute question qui, à son avis, pourrait menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales ». Un recours justifié, selon le porte-parole de l’ONU, par « l’ampleur des pertes en vies humaines en si peu de temps ».

 

L’Occident est en train de perdre le monde à force de prétention et d’ignorance.

 

Répétition de la politique de la peur qui inspira la réponse des États-Unis aux attaques terroristes du 11 septembre 2001, la stratégie israélienne est une perdition morale. Quels que soient les succès militaires revendiqués par Israël, ils finiront par signer sa défaite politique et diplomatique. Car, loin de garantir la sécurité de son peuple, ils l’entraîneront dans une guerre sans fin. Comment imaginer qu’Israël puisse vivre durablement au Proche-Orient en s’imaginant place forte d’un Occident dominateur, méprisant tous les peuples alentour ? D’un Occident qui, de plus, est en train de perdre le monde à force de prétention et d’ignorance.

Précédée de mensonges éhontés et accompagnée de violations infinies des droits humains jusqu’à la légitimation officielle de la torture, la riposte américaine au 11-Septembre n’a fait qu’accroître la dangerosité internationale, ravageant des États souverains, suscitant de nouveaux terrorismes, humiliant des peuples entiers et fédérant leur ressentiment durable. Le tout au grand bénéfice de la Chine et de la Russie qui, pour l’une, s’est hissée au rang de deuxième et potentiellement première puissance économique mondiale, tandis que l’autre renouait avec une logique impériale agressive, de la Syrie à l’Ukraine, en passant par le continent africain.

Loin des idéaux démocratiques dont se paraient les États-Unis tout en les piétinant, leur intervention n’a aucunement aidé les peuples concernés à gagner en liberté et en démocratie. C’est même radicalement l’inverse. Au résultat final, après le retrait piteux des troupes américaines, les talibans sont de retour au pouvoir en Afghanistan depuis 2021, au désespoir, notamment, des femmes afghanes.

Cible prioritaire de leur prétention à réorganiser la région, la République islamique d’Iran n’a cessé d’accroître son influence géopolitique, d’Irak en Syrie, du Liban au Yémen, sans oublier Gaza via le Hamas, tandis que la théocratie qui la dirige réprime les espérances émancipatrices des Iranien·nes.

Enfin, l’Arabie saoudite, monarchie religieuse qui fut le terreau idéologique d’Al-Qaïda, n’est nullement inquiétée pour ses violations des droits humains mais, en revanche, s’imagine plus que jamais en centre du monde, au point d’avoir été choisie pour accueillir l’Exposition universelle de 2030.

 

Le « coup d’État identitaire » de Benyamin Nétanyahou

À deux décennies de distance, la réaction israélienne n’est cependant pas qu’une répétition de l’aveuglement américain. Elle l’aggrave, au risque d’égarer la planète tout entière, par sa démesure idéologique. Le pouvoir politique qui dirige aujourd’hui Israël et qui par conséquent mène cette guerre, incarne en effet une rupture radicale, ayant poussé jusqu’à ses conséquences extrêmes l’infernale logique identitaire de la colonisation, de supériorité des civilisations et de hiérarchie des humanités.

Sous le règne de Benyamin Nétanyahou (au pouvoir sans discontinuer depuis 2009, à l’exception d’un bref intermède en 2021-2022), l’idéologie nationaliste religieuse a pris les commandes de l’État d’Israël avec un « coup d’État identitaire » comme l’a écrit le journaliste Charles Enderlin. Depuis 2018, une loi fondamentale, soit le plus haut degré possible en l’absence de Constitution, définit Israël comme le « foyer national du peuple juif » sans aucune référence au principe démocratique de l’égalité des droits.

Légitimant une suprématie identitaire qui discrimine les minorités arabe et druze, elle rompt avec la déclaration d’indépendance de 1948 qui enjoignait à Israël d’assurer « une complète égalité de droits sociaux et politiques à tous ses citoyens, sans distinction de croyance, de race ou de sexe ». Loin d’une embardée démagogique, cette radicalisation idéologique marque l’installation aux commandes de l’État d’Israël de forces politiques assumant une rupture avec toute vision universaliste : pas d’égalité naturelle, pas de droit international, pas d’humanité commune.

Pis, cette idéologie est destinée à l’exportation, comme en témoigne la notoriété auprès des droites extrêmes états-unienne et européennes de son théoricien et propagandiste, l’Israélo-Américain Yoram Hazony, auteur d’un best-seller traduit dans une vingtaine de langues, Les Vertus du nationalisme. Ce n’est rien de moins qu’un recyclage contemporain du nationalisme intégral de Charles Maurras, l’antisémitisme en moins, dont l’édition française est préfacée par un propagandiste d’extrême droite, Gilles-William Goldnadel.

Dénonçant le « fanatisme de l’universel » et « l’internationalisme libéral », ce plaidoyer pour l’avènement d’un « ordre des États nationaux » entend mettre fin aux valeurs supranationales promues par la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, dans la conscience que des États-nations pouvaient devenir les pires ennemis du genre humain. Ce nationalisme radical implique que les nations ne doivent avoir de comptes à rendre qu’à elles-mêmes, refusant « de transférer les pouvoirs du gouvernement à des institutions universelles ».

« Nous ne devrions pas tolérer que la moindre parcelle de notre liberté soit transmise à des institutions étrangères, quelle qu’en soit la raison, écrit Yoram Hazony. Il en va de même par rapport aux lois qui ne sont pas celles de notre propre nation. » Ce rejet de tout principe universel accompagne une conception ethnique de la nation, revendiquant son « homogénéité interne » face aux « minorités nationales et tribales » dont les revendications pourraient la défaire.

La page ouverte en 1948, en même temps que naissait Israël, d’une humanité commune régie par des principes universels opposables aux États-nations serait ainsi refermée. Il ne s’agit rien de moins que d’un retour en arrière jusqu’aux causes mêmes de la catastrophe européenne puis mondiale, ces nationalismes égoïstes, oppresseurs et dominateurs dont les peuples, dans la première moitié du XXe siècle, ont subi les ravages et les crimes, jusqu’à celui de génocide, tant fascisme et nazisme en furent les produits extrêmes.

À l’urgence humanitaire qui, pour le sort des Palestinien·nes comme des Israélien·nes, exige un cessez-le-feu immédiat et durable à Gaza, s’ajoute donc un impératif politique qui concerne toute la communauté internationale si, du moins, elle existe encore : mettre un coup d’arrêt à cette fuite en avant guerrière et identitaire où se meurt notre humanité.


Edwy Plenel

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À LIRE ÉGALEMENT ICI:

http://ahmedhanifi.com/gaza-ou-meurt-notre-humanite/


et ici:

https://www.mediapart.fr/journal/international/071223/gaza-ou-meurt-notre-humanite