Lorsque le 25 avril le
journaliste de Radio Galère de Marseille (qui me recevait pour parler de mon
dernier roman « LE CHOC DES OMBRES » sur la haine, l'islamophobie, l'antisémitisme, en France), me
demanda mon opinion sur « ce manifeste de Philippe Val »
(leparisien.fr – 21 avril), je lui répondis que ce papier agitait les peurs
pour exclure une partie de la communauté ». Mais ma réponse, trop courte,
ne reflétait pas toute ma pensée. Je me suis dit qu’il me fallait prendre le
temps et écrire ma réponse au plus près de ce que je ressens, je pense de ce « manifeste de Val ».
_________
Un manifeste
contre les musulmans
Je
suis outré, révolté contre les criminels, notamment ceux qui tuent au nom de
l’Islam, ma religion. Dans la France du XXI° siècle, des femmes et des hommes
sont tués parce que juifs. Cela est insupportable. Les actes criminels doivent
être clairement dénoncés et leurs auteurs condamnés à hauteur de leur
abomination. Quelles que soient les croyances et l’origine ethnique des
criminels, quelles que soient celles des victimes. Les moins jeunes se souviennent
qu’il n’y a pas si longtemps en France on tirait sur « des Arabes »
(lire Algériens) comme sur des lapins de garenne. Des assassinats par centaines
parce que « Arabes » (« Arabicides », Fausto Giudice).
C’était en France, et c’était il n’y a pas si longtemps.
Qu’il
y ait des réactions fortes aujourd’hui à la suite des derniers drames est un
signe positif. C’est ainsi qu’à la suite de
plusieurs meurtres de citoyens juifs, un « manifeste, rédigé par
Philippe Val et réunissant plus de 250 signataires est rédigé » et publié.
(leparisien.fr) Dans ce type de
circonstances, toute réaction citoyenne forte est louable à la condition
toutefois que tout ou partie d’une composante de la communauté nationale ne
soit pas mise au ban de cette dernière par cette réaction, au prétexte que les
criminels sont membres de la dite composante. La mise au ban, c’est justement
ce à quoi s’emploie, insidieusement, ce « Manifeste contre le nouvel
antisémitisme ». Un mot sur ce mot : le
terme « antisémitisme » a été dévoyé. Le glissement sémantique qu’il
a subi en France nous conduit aujourd’hui à ne considérer sous ce vocable que
« l’hostilité à la race juive » (dixit le lexique du CNRTL), exit les
autres sémites, alors même que le Littré définit ainsi ce terme :
« nom de peuples asiatiques ou africains… Les sémites comprennent les
peuples qui parlèrent ou qui parlent babylonien, chaldéen, phénicien, hébreu,
samaritain, syriaque, arabe et éthiopien » (Littré 2003, tome 6, page
5827).
Je suis citoyen musulman. Et
c’est comme tel, comme musulman que je suis, encore une fois, stigmatisé. Parce
que musulmans, des millions de citoyens français sont mis à l’index par des
groupes aux relents insupportables, voire répugnants. Cette fois-ci ce sont ces
« Quinze intellectuels » très influents dans la sphère
politico-médiatique qui chargent à travers un « manifeste contre le
nouvel antisémitisme. » Exploitant cette affligeante réalité, le
rédacteur, Philippe Val, et ses associés veulent, comme d’autres avant eux, nous
marginaliser, faire de nous des allogènes définitifs. Ils usent d’un alibi
éculé et rance, l’incompatibilité de l’Islam avec le socle judéo-chrétien de la
France. « L’histoire
française est profondément liée à la pensée juive » écrivent-il, et par
déduction ils suggèrent que ce n’est pas le cas pour la pensée musulmane, que
la France s’est faite hors de la « pensée musulmane », un discours
véhiculé par l’extrême droite ancienne
et nouvelle. Ce déni insinué est intellectuellement malhonnête.
Ce procédé malsain me
contraint d’une part à me demander si le dessein réel de ce Manifeste n’est pas
d’exclure les musulmans de la communauté nationale et d’autre part à m’interroger
sur les véritables commanditaires de cette charge.
Philippe
Val compare des actes criminels isolés à « une épuration ethnique »
dont la responsabilité, sournoisement suggérée incombe aux musulmans, à
l’Islam. L’équation est abjecte, même si elle est machiavéliquement atténuée,
« épuration ethnique à bas bruit » est-il précisé.
Les
mots qui suivent, en réaction, reflètent avant tout l’expression de mon profond
ressenti, j’allais ajouter « spontané » et ma profonde colère. Certains éléments que j’avance ont été par ailleurs énoncés,
mais il m’a paru utile de rappeler leur évidence.
L’engagement qui unit le noyau
dur des auteurs du « Manifeste contre le nouvel antisémitisme »
(Philippe Val, Alain Finkielkraut, Bernard Henri Lévy, Pascal Bruckner, Brice
Couturier, Georges Bensoussan, Richard Prasquier (ancien président du CRIF), Élisabeth
de Fontenay, Manuel Valls… ) l’engagement de ce noyau dur, ces « petites
forces », sinon la plupart d’entre les signataires, repose sur une
« logique d’auto-renforcement », un triptyque composé des
positionnements suivants :
- Leur islamophobie. Le terme
est impropre car il s’agit moins de peur (phobie- φόβος) que de rejet (apotheomai- ἀπωθέω) de l’Islam et
des musulmans, ces nouveaux « ennemis de l’intérieur ». Interrogeons
la stigmatisation continue du fichu « voile islamique » (pas
celui des grands-mères chrétiennes, pas celui des mères juives), du burkini…
nous comprendrons mieux cette diatribe contre une partie des citoyens français,
la plus vulnérable, les musulmans.
- Leur génuflexion, poings et
cœurs serrés au pied d’une laïcité dévoyée, belliqueuse, prosélyte, exclusive,
radicale et antireligieuse (antimusulmane en l’occurrence). Ils remettraient en
cause la loi de 1905.
- Leur attachement viscéral,
leur amour éperdu, et même plus pour d’aucuns,
« éternel » à l’État d’Israël où coule « le lait et le
miel » et dont ils ne pipent mot dans leur texte (si, un seul
« antisionisme », j’y reviens)
Demander que « les
autorités théologiques » musulmanes marquent d’obsolescence des versets du
Coran, recourir à ce « blasphème » (Tareq Oubrou), demander à
« l’islam (i minuscule) de France qu’il ouvre la voie », c’est
ignorer ou feindre d’ignorer que celles-ci n’existent pas en Islam. Nous
n’avons pas de Pape. Comme les juifs, les musulmans n’ont pas de clergé. Leur
courage (ou lâcheté) leur dictera-t-il de prier « les autorités
théologiques » juives d’expurger du Talmud les passages sur les
discriminations et les grandes violences, très nombreux versets, contre les
non-juifs, les Goyim ? (merci monsieur Jacob Cohen)
Ils auraient pu évoquer
l’Ijtihad (effort d’interprétation des textes), faire appel à des lumières,
celles et ceux que les médias ignorent ! Ce serait une excellente idée que
de leur donner la parole, cela nous changerait (n’est-ce pas) du très
controversé Chelghoumi (longtemps suspecté par les services de renseignement
français), illustre ignorant, trimballé comme un bouffon médiatique, risée de
la majorité des musulmans français, que le maelstrom politico-médiatique
français a proclamé imam, « imam des lumières » ! (Annette
Lévy-Willard), au lieu et place des musulmans de son quartier. S’il faut bien
lui reconnaître une troupe de fidèles à cet individu, elle serait composée pour
l’essentiel de nombreux journalistes « positionnés ». Écoutons son
génie : « Quand on a vu sur sa première photo de classe que ma fille
n’était entourée que de blacks et de Beurs, on s’est dit avec ma femme qu’elle
ne devait pas rester dans cette école », école de la République. Sages et
fraternelles paroles de l’imam des lumières médiatiques (in Le Figaro.fr).
Mais revenons aux lumières,
les vraies, Val et compagnie auraient pu demander dans leur texte à ce que les
autorités concernées leur fassent appel. Ils auraient pu. Mais les travaux des
penseurs de l’Islam aboutiraient-ils ? La question de la prise de risque
peut se poser. Ces « nouveaux penseurs de l’Islam » ne prendraient-ils
pas un risque à dire haut et fort leurs Ijtihad ? On leur fait parfois
appel, mais le peu de fois qu’ils apparaissent ils se contentent, obligés par
le dispositif médiatique, de redondances futiles. Ils savent qu’ils prendraient
un risque à s’épancher. Claude Askolovitch exprime magnifiquement et avec
retenue ce risque : « J’ai aussi, dans ma vie, expérimenté ce qu’il
en coûte de récuser la vulgate identitaire en France, et j’ai dilapidé quelques
positions sociales, à fustiger l’islamophobie. » Réservé, mais très clair.
Si vous y touchez il vous en coûtera ! (À lire absolument : Le
« Manifeste contre le nouvel antisémitisme » une logique
dévastatrice ». In Slate.fr, 23 avril 2018)
Pour les messieurs et les mesdames
du Manifeste,
l’appartenance à la sphère musulmane
est naturellement sujette à stigmatisation dans la mesure où cette appartenance
est source d’antisémitisme. Ils ne voient pas en moi le citoyen égal à tout
autre citoyen, mais le musulman qui est, de fait, parce que musulman, par définition,
agrégé à une croyance faite d’un bloc unique, et est par conséquent dénué de
capacité de choisir et de critiquer, de nuancer. En suggérant que nous
musulmans, pris individuellement, ne sommes que de simples maillons d’une
chaîne, les auteurs du manifeste ignorent, par calcul ou réellement, l’histoire
et les couleurs du spectre de l’Islam et des musulmans d’une part, et réduisent
les capacités individuelles de chacun de nous à se situer sur ce spectre. Déterministes,
ils nous dénient l’aptitude au libre-arbitre.
Leurs stigmatisations
radicales participent aussi d’une certaine manière à la radicalisation. Ils alimentent la construction d’un dangereux mécanisme dont on
n’ose penser l’aboutissement. Circonscrire la violence meurtrière à la seule source de la
croyance en faisant fit de quantité de facteurs comme l’exclusion sociale, la
discrimination économique, le racisme, la ghettoïsation dans des quartiers
populaires (GE, ZAC, ZUP, REP…), la relégation, la
trajectoire ou carrière individuelle… est pitoyable et dangereux. Si la sociologie ne règle pas tous les problèmes, elle
donne aux Politiques et aux citoyens des clés pour les comprendre, les
expliquer.
L’un des signataires, cet ami
éternel d’Israël (« par ma femme – la quelle ? –, je suis lié de manière
éternelle à la communauté juive et à Israël »), dit « avoir assez de
ceux qui cherchent en permanence des excuses ou des explications culturelles ou
sociologiques… expliquer c’est déjà vouloir un peu excuser. » C’est triste
de constater cette carence – venant d’un ancien premier ministre de la
République –, cette ignorance de l’objet
des sciences sociales. En première année de licence on apprend que connaître
les causes d’un phénomène sociétal, les comprendre, permet d’y apporter des
solutions si besoin.
Cette mise à l’index d’une
composante de la communauté nationale, cette stigmatisation, doit être non
seulement combattue, mais comme l’antisémitisme et le racisme, criminalisée
(A. Lajnef)
Last but not least :
Israël
Cette diatribe contre les musulmans,
cette adhésion sans limites aux thèses de « l’État voyou » sont-elles
nourries par des rancunes ou par des culpabilités personnelles, familiales, ou
même nationales ? Car enfin l’objet des rédacteurs de ce manifeste n’est
bien évidemment pas de combattre uniquement les extrémistes se réclamant de
l’Islam, soyons sérieux, ou par un objectif inavouable ?
Ceux-là mêmes
qui dénonceraient violemment toute référence à un « soi-disant lobby
juif » (lorsqu’il est question de lobby israélien bien ancré chez une
partie de l’élite) insistent dans ce texte sur « un vote musulman »,
mais je leur renvoie cette question « qu’est-ce que un vote
musulman ? » (la « bassesse électorale » qu’ils évoquent
n’est-elle pas un fantasme, le leur ?) Si tous les musulmans de France
votaient comme un seul homme, cela se saurait, c’est tellement élémentaire.
Pour mieux appréhender ce
« Manifeste de la honte » (Marwan Muhammad) il y a lieu, et c’est
important, de s’arrêter devant quelques-uns des cairns indélébiles qui marquent
la trajectoire de nombre de ses signataires. Qui sont-ils, d’où nous
haranguent-ils, quelles positions occupent-ils ? La trajectoire, « la
position dans le champ » médiatique, culturel et politique de ces hommes
(et femmes) sont autant importantes que les seuls mots du Manifeste, ceux-ci ne
se suffisant pas par eux seuls. Derrière les mots il y a tous les non-dits, il
y a un parcours, une filiation, une position sur un échiquier et une
association de connivences...
Le « Manifeste contre le
nouvel antisémitisme en France » a été rédigé par Philippe Val donc. Soit.
À ses côtés on trouve des journalistes influents (producteurs, membres de
Conseils de surveillance…), très influents, des responsables politiques anciens
et actuels, d’ex nouveaux philosophes décomplexés (« des philosophes de
télévision » préciserait Monsieur Pierre Bourdieu qui avait entièrement
dénudé, démasqué leurs dispositifs (leurs réseaux) dans toutes leurs
ramifications déclarées ou non-dites, des hommes et des femmes de culture, des
égarés, et nombre de chiens de garde et autres « prestidigitateurs ».
D’autres enfin, en quête d’un ex-voto…
Ils ont tous en commun un
attachement aveugle à l’État d’Israël :
·
Certains sont
passés « du col Mao au Rotary ». Ils sont notoirement islamophobes.
Islamophobe et botulien pour l’un d’eux qu’un célèbre avocat pénaliste qualifia
de « vieille pompe à merde », une expression qu’il emprunta à René
Magritte). Un autre est poursuivi par le
CCIF, la LDH, le MRAP et… le Ministère public pour incitation à la haine lors
d’une émission d’Alain Finkielkraut (on tourne en rond, nous sommes dans une
« circulation circulaire » chère à l’éminent sociologue)
·
Un autre anime une
émission sur une chaîne publique depuis des décennies. Régulièrement, comme
animé par une obsession, toujours la même, il met en joue les jeunes des
quartiers populaires, immigrés ou Français, « noirs ou Arabes, avec
une identité musulmane », accuse
leurs parents, leur supposée croyance. Il constate assure-t-il leur impossible
« assimilation » et ne supporte pas leur amour pour l’équipe de
France que lui n’aime pas car « elle est black-black-black, ce qui fait ricaner
toute l'Europe » (Haaretz/Israël).
·
Un autre est fils
d’un antisémite déclaré. Un vrai, de ceux de la France des années 40, envahie, mais
libérée – aussi – par des milliers de musulmans, africains, marocains,
tunisiens, algériens, aujourd’hui enfouis auprès de leurs frères d’armes de
toutes confessions, sous une simple épitaphe effacée par le temps, par les
mémoires rancunières et par les identités malheureuses. Un bon fils de nazi,
disais-je, qui admet que parfois son père « vocifère dans ma gorge, prend possession de mes
cordes vocales.» Devrions-nous alors
parler de filiation idéologique du père, réorientée ? devrions-nous relier,
avec ou sans son consentement, l’idéologie du rejeton à celle de son père comme
sont liés les fils de trame aux fils de chaîne ? Non évidemment. Mais que cherchent
les auteurs de ce texte à vouloir faire des musulmans un bloc monolithe ?
·
On trouve
également parmi les signataires un triste humoriste qui fait de l’Islam et des
musulmans le grand combat de sa vie. Pour avoir abusivement limogé un
journaliste au motif « d’antisémitisme » ce que récusa la justice, il
fut, avec son journal, condamné. Cet individu (« en Israël je me sens chez
moi… on est de la même famille, on s’aime ») a noué de vieilles amitiés
duettistes qui font jusqu’en 1996 dans la « pédophilie type obnubilée par
les enfants », l’un et l’autre à Charlie-hebdo. Doit-on juger l’un à
l’aune du comportement du second, et vice-versa ? Certainement pas. Cela
n’a rien avoir avec l’antisionisme, ni l’antisémitisme, ni « la
racaille », je le sais, mais cela fait du bien de le rappeler.
·
Un autre, président de la Confédération des Juifs de France
et des Amis d’Israël (CJFAI), a rencontré le 8 février 2017 dans un restaurant
près de l’Assemblée nationale des membres du FN et s’est félicité de
cette « rupture avec un tabou… le FN n’est plus ce qu’il était »
·
Un autre, chanteur rancunier et aigri, déclare
en recevant « un diplôme » au nom de toutes les unités de l’armée
sioniste : « je suis très ému. Depuis le début de ma vie je me suis
donné corps et âme à l’Etat d’Israël et en premier lieu à Tsahal ».
·
Un autre, né à Oran, fait le panégyrique blanc sur blanc de
cet État d’Israël sans honte, et dans lequel il exprime son dédain pour la
lutte de libération des Algériens (in The Times of Israël, en mars dernier).
·
Etc. Etc.
·
D’autres enfin
nous déçoivent beaucoup. Mais que fichtre viennent-ils faire dans cette
indignité ?
Combien sont-ils dans cette
liste à soutenir sans aucun état d’âme Israël, « le dernier État
colonial » (merci Jacques Derrida), un État « bien installé sur l’axe
du bien » ? Pourquoi ce Manifeste de Val n’en dit pas un seul
mot ? Parce que semblent-ils dire parler du « conflit israélo-palestinien nourrit
l’antisémitisme ». Ils répètent que l’antisémitisme se nourrit du conflit israélo-palestinien,
mais signent un texte qui ne dit rien de la colonisation, des tueries, à peine
y est-il ainsi évoqué « l’antisémitisme d’une partie de la gauche radicale
qui a trouvé dans l’antisionisme l’alibi pour transformer les bourreaux en
victimes » sans autre développement.
Pourtant il nous faut parler de ce « conflit », dénoncer cette
colonisation israélienne.
Leur objectif, en sus de la
stigmatisation des musulmans, est de substituer « le nouvel
antisémitisme » à l’antisémitisme de souche, initial et pérenne, celui qui
pourtant se revigore partout en Europe. Val, et cela dénude ses choix et
positions, ne dit pas un mot dans son texte de la politique criminelle menée
par l’État d’Israël («État-porte-parole des juifs du monde entier »)
contre le Palestiniens depuis plus de 50 ans (huit mille morts, dix mille, qui sait,
depuis 2000, combien depuis 1967 ?)
Cela n’a pas « rien à
voir » avec la France car la politique de l’État d’Israël, véritable
« régime d’apartheid qui opprime et domine le peuple palestinien dans son
ensemble » (rapport de l’ONU, mars 2017), cette politique israélienne
(combinée aux éditoriaux de nombreux médias français en général plutôt
« tolérants » à son égard) alimente l’antisémitisme en France plus
que tout. C’est une évidence. Les colonisations, les dépossessions, et les
crimes de l’armée israélienne (il faut, selon ces médias, dire
« Tsahal » comme l’état-major hébreu), le CRIF les justifie, au nom
de tous les juifs français et leurs institutions. Parions qu’il n’en souffle
mot lors des dîners annuels où se bouscule toute la nomenclature parisienne.
Alors oui je ne peux qu’être antisioniste
et combattre parallèlement l’antisémitisme et tous les racismes, n’en déplaise
à Elisabeth Badinter – une autre signataire (« l’antisionisme,
assure-t-elle, est une façon de libérer la parole antisémite »). Mon opinion antisioniste, exprimée en France, relève de la
hardiesse madame, une gageure.
Alors,
comment ne pas, forcément, convoquer la question initiale, m’interroger sur les
véritables commanditaires de cette charge, comment ne pas poser cette interrogation ? : et si Udo Ulfkotte disait vrai ? (lire son
essai Der Krieg im Dunkeln, La guerre de l’Ombre ») et si, comme ils
auraient procédé notamment durant les révoltes des banlieues de 2005, certains
services israéliens de la Metsada sollicitaient de nouveau « leurs amis
français », leurs soutiens indéfectibles parmi les hommes politiques,
médiatiques, intellectuels influents, très influents, les sayanim … pour, à
partir d’une cruelle et dramatique réalité, tenter de salir et faire haïr par
le reste des concitoyens, tous les musulmans de France et tous les français
musulmans, cette nouvelle « anti-France » quoi. Une interrogation que
j’ai longuement développée dans mon dernier roman « LE CHOC DES OMBRES ». Mais aujourd’hui, hic et nunc, il s’agit de notre réalité, pas de roman.
Ahmed HANIFI,
Auteur.
Marseille, 1° mai 2018
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VOICI CI-DESSOUS "LE MANIFESTE E VAL" suivi d'un texte (Magnifique de Claude Askolovitch)
Manifeste «contre le nouvel antisémitisme»
Société
21 avril 2018, 21h20 | MAJ : 23 avril 2018, 16h33
Ce manifeste, rédigé par Philippe Val et que publie « Le Parisien-Aujourd’hui en France Dimanche », réunit plus de 250 signataires. Parmi eux, un ancien président de la République, trois anciens Premiers ministres, des élus, des intellectuels, des artistes…
Dans un livre à paraître mercredi chez Albin Michel*, quinze intellectuels prennent la plume pour dénoncer le poison de l’antisémitisme. L’ouvrage, préfacé par la philosophe Elisabeth de Fontenay, est écrit avec l’énergie de la colère. Une colère qui prend aujourd’hui la forme d’un manifeste qu’« Aujourd’hui en France Dimanche » a décidé de publier. Elle grandit depuis la mort de Sarah Halimi, Parisienne de 65 ans défenestrée après avoir été rouée de coups le 4 avril 2017. La justice a mis plus de dix mois à reconnaître la circonstance aggravante de l’antisémitisme. Le 23 mars, moins d’un an plus tard, dans le même arrondissement, au cœur de la capitale, l’assassinat de Mireille Knoll, 85 ans, ravivait l’émotion et l’indignation nées de l’affaire Halimi. L’enquête est en cours.Plus de 250 signataires ont répondu à l’appel rédigé par un collectif, dont Philippe Val, l’ancien directeur de « Charlie Hebdo ». Parmi eux, l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy, trois anciens Premiers ministres, l’ex-maire de Paris Bertrand Delanoë, des élus de tous bords, des représentants des différentes religions, des intellectuels, des artistes…
« Cette terreur se répand »
« L’antisémitisme n’est pas l’affaire des Juifs, c’est l’affaire de tous. Les Français, dont on a mesuré la maturité démocratique après chaque attentat islamiste, vivent un paradoxe tragique. Leur pays est devenu le théâtre d’un antisémitisme meurtrier. Cette terreur se répand, provoquant à la fois la condamnation populaire et un silence médiatique que la récente marche blanche a contribué à rompre.Lorsqu’un Premier ministre à la tribune de l’Assemblée nationale déclare, sous les applaudissements de tout le pays, que la France sans les Juifs, ce n’est plus la France, il ne s’agit pas d’une belle phrase consolatrice mais d’un avertissement solennel : notre histoire européenne, et singulièrement française, pour des raisons géographiques, religieuses, philosophiques, juridiques, est profondément liée à des cultures diverses parmi lesquelles la pensée juive est déterminante. Dans notre histoire récente, onze Juifs viennent d’être assassinés - et certains torturés - parce que Juifs, par des islamistes radicaux.
« Une épuration ethnique à bas bruit »
Pourtant, la dénonciation de l’islamophobie - qui n’est pas le racisme anti-Arabe à combattre - dissimule les chiffres du ministère de l’Intérieur : les Français juifs ont 25 fois plus de risques d’être agressés que leurs concitoyens musulmans. 10 % des citoyens juifs d’Ile-de-France - c’est-à-dire environ 50 000 personnes - ont récemment été contraints de déménager parce qu’ils n’étaient plus en sécurité dans certaines cités et parce que leurs enfants ne pouvaient plus fréquenter l’école de la République. Il s’agit d’une épuration ethnique à bas bruit au pays d’Émile Zola et de Clemenceau.Pourquoi ce silence ? Parce que la radicalisation islamiste - et l’antisémitisme qu’il véhicule - est considérée exclusivement par une partie des élites françaises comme l’expression d’une révolte sociale, alors que le même phénomène s’observe dans des sociétés aussi différentes que le Danemark, l’Afghanistan, le Mali ou l’Allemagne… Parce qu’au vieil antisémitisme de l’extrême droite, s’ajoute l’antisémitisme d’une partie de la gauche radicale qui a trouvé dans l’antisionisme l’alibi pour transformer les bourreaux des Juifs en victimes de la société. Parce que la bassesse électorale calcule que le vote musulman est dix fois supérieur au vote juif.
« Nous attendons de l’islam de France qu’il ouvre la voie »
Or à la marche blanche pour Mireille Knoll, il y avait des imams conscients que l’antisémitisme musulman est la plus grande menace qui pèse sur l’islam du XXIème siècle et sur le monde de paix et de liberté dans lequel ils ont choisi de vivre. Ils sont, pour la plupart, sous protection policière, ce qui en dit long sur la terreur que font régner les islamistes sur les musulmans de France.En conséquence, nous demandons que les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants soient frappés d’obsolescence par les autorités théologiques, comme le furent les incohérences de la Bible et l’antisémite catholique aboli par Vatican II, afin qu’aucun croyant ne puisse s’appuyer sur un texte sacré pour commettre un crime.
Nous attendons de l’islam de France qu’il ouvre la voie. Nous demandons que la lutte contre cette faillite démocratique qu’est l’antisémitisme devienne cause nationale avant qu’il ne soit trop tard. Avant que la France ne soit plus la France. »
* « Le Nouvel Antisémitisme en France », Ed. Albin Michel, 213 p., 15 euros.
La liste des signataires
Eliette ABECASSIS ;
Richard ABITBOL ; Ruth ABOULKHEIR ; André ABOULKHEIR ; Laure
ADLER ; Paul AIDANE ; Nader ALAMI ; Waleed AL-HUSSEINI ;
Mohamed ALI KACIM ; Michèle ANAHORY ; François ARDEVEN ; Pierre
ARDITI ; Janine ATLOUNIAN ; Muriel ATTAL ; Charles
AZNAVOUR ; Elisabeth BADINTER ; Patrick BANTMAN ; Laurence
BANTMAN ; Adrien BARROT ; Stephane BARSACQ ; Maurice
BARTELEMY ; Stéphane BEAUDET ; Patrick BEAUDOUIN ; Annette
BECKER ; Florence BEN SADOUN ; Georges BENSOUSSAN ; Gérard
BENSUSSAN ; Alain BENTOLILA ; André BERCOFF ; Aurore
BERGE ; François BERLEAND ; Françoise BERNARD ; Florence BERTHOUD ;
Naem BESTANDJI ; Muriel BEYER ; Jean BIRENBAUM ; Claude
BIRMAN ; Joelle BLUMBERG ; Marion BLUMEN ; Lise BOËLL ;
Jeannette BOUGRAB ; Céline BOULAY-ESPERONNIER ; Michel BOULEAU ;
Laurent BOUVET ; Lise BOUVET ; Fatiha BOYER ; Anne BRANDY ;
Caroline BRAY-GOYON ; Zabou BREITMAN ; Claire BRIERE-BLANCHET ;
Jean-Paul BRIGHELLI ; Pascal BRUCKNER ; Laura BRUHL ; Daniel
BRUN ; Carla BRUNI ; François CAHEN ; Séverine CAMUS ;
Jean-Claude CASANOVA ; Bernard CAZENEUVE ; Hassen CHALGHOUMI ;
Catherine CHALIER ; Elsa CHAUDUN ; Evelyne CHAUVET ; Ilana
CICUREL ; Eric CIOTTI ; Gilles CLAVREUL ; Brigitte-Fanny
COHEN ; Marc COHEN ; Jonathan COHEN ; Danielle
COHEN-LEVINAS ; Antoine COMPAGNON ; Jacqueline COSTA-LASCOUX ; Brice
COUTURIER ; Fabrice D’ALMEIDA ; Eliane DAGANE ; Gérard
DARMON ; Marielle DAVID ; William DE CARVALHO ; Elisabeth DE
FONTENAY ; Xavier DE GAULLE ; Bernard DE LA VILLARDIERE ;
Bertrand DELANOË ; Richard DELL’AGNOLA ; Chantal DELSOL ; Gérard
DEPARDIEU ; Guillaume DERVIEUX ; Patrick DESBOIS PERE ;
Alexandre DEVECCHIO ; Bouna DIAKHABY ; Marie-Laure DIMON ;
Joseph DORE MGR ; Daniel DRAÏ ; Michel DRUCKER ; Richard
DUCOUSSET ; Stéphane DUGOWSON ; Martine DUGOWSON ; Frédéric
DUMOULIN ; David DUQUESNE ; Frédéric ENCEL ; Raphaël
ENTHOVEN ; Francis ESMENARD ; Christian ESTROSI ; Elise
FAGJELES ; Roger FAJNZYLBERG ; Luc FERRY ; Alain FINKIELKRAUT ;
Pascal FIORETTO ; Marc-Olivier FOGIEL ; Renée FREGOSI ; Michel
GAD WOLKOWICZ ; Aliou GASSAMAL ; Lucile GELLMAN ; Jasmine
GETZ ; Sammy GHOZLAN ; Jean GLAVANY ; Bernard GOLSE ;
Roland GORI ; Marine GOZLAN ; Olivia GREGOIRE ; Mohamed
GUERROUMI ; Ghislaine GUERRY ; Olivier GUEZ ; Lydia
GUIROUS ; Talila GUTEVILLE ; Patrick GUYOMARD ; Noémie
HALIOUA ; Françoise HARDY ; Frédéric HAZIZA ; Jean-Luc
HEES ; Serge HEFEZ ; François HEILBRONN ; Marie IBN
ARABI-BLONDEL ; Aliza JOBES ; Arthur JOFFE ; Michel
JONASZ ; Christine JORDIS ; Dany JUCAUD ; Liliane KANDEL
KARIM ; David KHAYAT ; Catherine KINTZLER ; Alain
KLEINMANN ; Marc KNOBEL ; Haïm KORSIA ; Julia KRISTEVA ;
Rivon KRYGIER ; Estelle KULICH ; Philippe LABRO ; Alexandra
LAIGNEL-LAVASTINE ; Lilianne LAMANTOWICZ ; Jack LANG ; Joseph
LAROCHE ; Damien LE GUAY ; Daniel LECONTE ; Barbara
LEFEBVRE ; Yoann LEMAIRE ; Pierre LESCURE ; Bernard-Henri LEVY ;
Maurice LEVY ; Stéphane LEVY ; Michèle LEVY-SOUSSAN ; Marceline
LORIDAN-IVENS ; Christine LOTERMAN ; Patrick LOTERMAN ; Enrico
MACIAS ; Richard MALKA ; Wladi MAMANE ; Yves MAMOU ;
Juliette MEADEL ; Sylvie MEHAUDEL ; Yael MELLUL ; Françoise-Anne
MENAGER ; Daniel MESGUICH ; Richard METZ ; Habib MEYER ;
Radu MIHAILEANU ; Yann MOIX ; Antoine MOLLERON ; Thibault
MOREAU ; Jean-Jacques MOSCOVITZ ; Slim MOUSSA ; Laurent
MUNNICH ; Lionel NACCACHE ; Marc NACHT ; Aldo NAOURI ;
Xavier NIEL ; Sophie NIZARD ; Anne-Sophie NOGARET ; Karina
OBADIA ; Jean-Pierre OBIN ; Edith OCHS ; Christine ORBAN ;
Olivier ORBAN ; Marc-Alain OUAKNIN ; Yann PADOVA ; Brigitte
PASZT ; Dominique PERBEN ; André PERRIN ; Serge PERROT ;
Laurence PICARD ; Céline PINA ; François PINAULT ; Jean-Robert
PITTE ; Nidra POLLER ; Richard PRASQUIER ; Michael PRAZAN ;
Nadège PULJAK ; Jean-François RABAIN ; Marianne
RABAIN-LEBOVICI ; Ruben RABINOVITCH ; Jean-Pierre RAFFARIN ;
Christiane RANCE ; Jean-Jacques RASSIAL ; Renaud RENAUD ;
Jean-Louis REPELSKI ; Solange REPLESKI ; Ivan RIOUFOL ; Jacob
ROGOZINSKI ; Olivier ROLIN ; Marie-Helène ROUTISSEAU ; Catherine
ROZENBERG ; Philippe RUSZNIEWSKI ; Boualem SANSAL ; Georges-Elia
SARFAT ; Nicolas SARKOZY ; Josiane SBERRO ; Jean-Paul
SCARPITTA ; Eric-Emmanuel SCHMITT ; Dominique SCHNAPPER ; André
SENIK ; Joann SFAR ; Vadim SHER ; Stéphane SIMON ; Patricia
SITRUK ; Jean-François SOLAL ; Paule STEINER ; Jean-Benjamin
STORA ; Francis SZPINER ; Anne SZULMAJSTER ; Pierre-André
TAGUIEFF ; Maud TANACHNIK ; Jacques TARNERO ; Michel
TAUBER ; Daniel TECHNIO ; Julien TROKINER ; Cosimo
TRONO ; Monette VACQUIN ; Henri VACQUIN ; Philippe VAL ;
Caroline VALENTIN ; Manuel VALLS ; Sibyle VEIL ; Jacques
VENDROUX ; Natacha VITRAT ; Sabrina VOLCOT-FREEMAN ; Régine
WAINTRATER ; Laurent WAUQUIEZ ; Aude WEILL-RAYNAL ; Simone
WIENER ; Annette WIEVIORKA ; Jean-Pierre WINTER ; Jacques
WROBEL ; André ZAGURY ; Alain ZAKSAS ; Paul ZAWADZKIv Marc
ZERBIB ; Céline ZINS ; Jean-Claude ZYLBERSTEIN.
In:
__________ CI-DESSOUS LE TEXTE DE CLAUDE ASKOLOVITH__________________
Le «manifeste contre le nouvel antisémitisme», une logique dévastatrice
Il fait de la lutte pour les juifs une composante du combat identitaire français, et cette identité exclut. Elle s'énonce dans un syllogisme. La France, sans les juifs, ne serait pas elle-même? Les juifs sont les victimes de musulmans? La France, par ces musulmans, ne sera plus la France.
Un texte est publié pour défendre les juifs, que ma mère partage et que tant de personnes signent, que pour beaucoup je ne peux qu’estimer. Pourquoi, alors, suis-je glacé par ce "manifeste contre le nouvel antisémitisme", qui témoigne d’une idéologie française, par la variété et l’ampleur de ses soutiens? Enfin, des voix s’élèvent, pour «nous», et j’en prends ombrage? Ce texte est glaçant pour la vérité dont il émane comme pour les mensonges qu’il induit. Il est terrifiant pour ce qu’il rappelle de la vie et de la mort de juifs, ici, depuis le début du siècle; et horrible pour ce qu’il nourrit: une mise en accusation des musulmans de ce pays, réputés étrangers à une véritable identité française, sauf à renoncer à leur dignité. Je ne conteste pas la bonne volonté des signataires. Je voudrais, humblement, qu’ils mesurent leur risque et leurs mots.Dangereux syllogisme
C’est une curiosité, en République, de voir ceux qui nous garantissent –anciens gouvernants, philosophes, artistes, patrons de média ou mécène de la nouvelle économie, souscrire à ceci, comme une statistique utile: «Les Français juifs ont 25 fois plus de risques d’être agressés que leurs concitoyens musulmans». Comme s’il fallait étalonner la souffrance juive à l’aune d’une supposée quiétude musulmane, et non pas dans la communauté nationale; comme s’il fallait opposer le juif, enfant de la France, au «concitoyen musulman», que l’on soupçonne tellement musulman et si peu concitoyen? Le grand-rabbin de France Haïm Korsia, ayant vu cette phrase, a demandé sa suppression; Korsia est un républicain. Il ne l’a pas obtenue et a signé quand même. Le grand-rabbin fait de la politique, à son poste, et ne pouvait pas être absent quand les élites se levaient pour les juifs. Mais tout texte collectif est un piège. Il s’imprègne des obsessions de ses premiers auteurs, sous la justesse de sa cause. Comment ne pas rejoindre un texte contre l’antisémitisme, quand depuis les années 2000, des juifs ont subi la violence et l’opprobre? Comment ne pas saluer un texte qui se scandalise du départ de juifs de quartiers populaires vers des havres plus apaisés, de Garges vers Sarcelles, de la France vers Israël? Faut-il s’abstraire pour une phrase? Mais il ne s’agit pas d’une seule phrase mais d’une logique. Elle est attirante et dévastatrice. Elle fait de la lutte pour les juifs une composante du combat identitaire français, et cette identité exclut. Elle s’énonce dans un syllogisme. La France, sans les juifs, ne serait pas elle-même? Les juifs, de musulmans, sont les victimes? La France, par ces musulmans, ne sera plus la France.Assonance. La France, par les musulmans, ne sera plus la France. Cette conclusion hante nos débats et le texte. Le perçoit-on? La défense du juif implique le refus de l’islam. Le propos est habile. Peuvent le signer ensemble de grands bourgeois humanistes, des politiques de gauche ou qui croient l’être encore, un ancien président qui troqua le libéralisme pour l’identitarisme, un chef de parti en glissade vers l’extrême droite, des journalistes de la même eau. Ils ne se ressemblent pas? Puis-je supposer qu’ils n’ont pas les mêmes raisons? Ou quelque chose se dessine, dans un consensus majoritaire, une idéologie dominante, une majorité molle, qui réprouve l’antisémitisme mais admet qu’on place, en porte-à-faux, les musulmans?
La construction du texte est une montée en slogans. Si l’on frappe et tue des juifs en France, c’est par peur de déplaire aux musulmans, «parce que la bassesse électorale calcule que le vote musulman est dix fois supérieur au vote juif». Si l’on ignore l’antisémitisme dans les médias, c’est parce qu’on parle trop d’islamophobie: «La dénonciation de l’islamophobie –qui n’est pas le racisme anti-Arabe à combattre– dissimule les chiffres du ministère de l’Intérieur.» Il faudrait donc, pour être à nouveau heureux comme Dieu en France, savoir fustiger l’islam, ne plus dénoncer l’islamophobie, admettre et encourager le «Ma France sans l’islam» de Philippe de Villiers Valeurs actuelles, et considérer de bonne République que l’on bannisse le hijab des rues? Pourquoi tant d’illogisme? Pense-t-on que la République est consentante ou molle envers les djihadistes par souci d’un «vote musulman»? Saisit-on à quel point cette assertion est cousine des fantasmes de jadis et encore sur le «lobby juif»? En quoi la France vengerait-elle la pieuse Sarah Halimi, en repoussant d’autres femmes qui, comme elle, pour Dieu, se couvrent la tête, quoi que je puisse en penser? Pense-t-on que ces bêtises vont dissuader un seul antisémite, un seul bourreau?
On reproche d’abord aux musulmans d’être, ici, d’ici
Il faudrait, aussi, autre slogan, que «l’islam de France», «nous ouvrant la voie», demande par ses «autorités théologiques», «l’obsolescence» de versets du Coran, «appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants», comme «l’antisémitisme catholique» fut abrogé par le Concile Vatican II. Le bon sens apparent de la comparaison masque mal son absurdité. C’est le propre des slogans de travestir l’histoire. À Vatican II, en 1965, le pape Paul VI, dans le texte «Nostra aetate», révisa les rapports de l’Église avec les confessions non-chrétiennes, désormais reconnues dans leurs quêtes de Dieu, et parmi elles le judaïsme, absous de la mort du Christ, aimable et précurseur: «S’il est vrai que l’Église est le nouveau Peuple de Dieu, les Juifs ne doivent pas, pour autant, être présentés comme réprouvés par Dieu ni maudits.» On parlait théologie, alors, on cessait de prier à Pâques pour les «juifs perfides», et ce n’était pas au hasard d’un paragraphe du dimanche dans un quotidien, que l’on réparait le monde. Les dialogues et l’amitié du pape Jean XXIII, prédécesseur de Paul VI, et d’un grand historien français, Jules Isaac, juif et admirateur de Jésus, avaient précédé le renversement de «l’enseignement du mépris». La Shoah avait dévasté la planète, et le pape prenait sa part du «plus jamais ça».
C’est
une mesquinerie classique, comme les propos doucereux sur l’absence des
musulmans aux manifestations contre le terrorisme, ou des banlieusards à
l’enterrement de Johnny.
En comparaison, l’interpellation du manifeste
du Parisien déroute par sa simplicité. Il n’existe aucun pape en islam, ni
Concile, qui pourrait transformer une religion centralisée. La pratique et le
temps ont lavé les scories du Coran, sauf dans les milieux radicaux,
précisément, sur lesquels nul n’a d’influence, et certainement pas les
institutions. On ne réforme pas, enfin, en assiégeant des croyants. Jules
Isaac, parlant au pape, n’accusait pas les individus catholiques. Exigeant de
l’islam de France qu’il «ouvre la voie», le manifeste rend responsable
chaque musulman de la violence de quelques-uns. C’est une mesquinerie
classique, comme les propos doucereux sur l’absence des musulmans aux
manifestations contre le terrorisme, ou des banlieusards à l’enterrement de
Johnny. On entend moins l’espérance de la fraternité qu’une obsession de la
différence; les musulmans, collectivement, sont toujours en dehors du consensus
et aux marges du bien. Et le manifeste nous rappelle, l’aurions-nous oublié,
que le Coran devrait être expurgé…Une thèse n’est jamais vide de réalité et je partage des vérités de cet étrange texte. Me fera-t-on crédit, sinon de mon judaïsme –cela ne pèse rien en République– mais d’une constance? J’ai écrit sur et contre un antisémitisme des quartiers populaires depuis plus de quinze ans; j’ai écrit, aussi, contre l’indifférence qui entourait cet antisémitisme, singulièrement à gauche; j’ai vécu, ainsi, la répugnance à admettre que l’antisémitisme brutal éructait parmi les victimes du racisme. Je me souviens –dans le Nouvel Observateur, à l’époque, de disputes feutrées dans ma rédaction, où un bon camarade considérait que c’était «communautariser le débat» que me confier le sujet de l’antisémitisme. Je me souviens, dans l’extrême gauche altermondialiste, de cette incapacité tiers-mondiste à condamner Tariq Ramadan, déjà lui, auteur d'une tribune antisémite, et pourtant vedette des forums sociaux européens, caressé de progressisme aveugle. Tout ceci a existé et perdure, comme l’inconscience doucereuse d’organisations musulmanes persistant à inviter des prêcheurs condamnables ou à admirer le terrible Al Qaradawi, coranvangéliste chez Al Jazeera, guide spirituel des frères musulmans, et antisémite bon teint… Mais que croit-on? Une anomie possède son contraire. J’ai aussi, dans ma vie, expérimenté ce qu’il en coûte de récuser la vulgate identitaire en France, et j’ai dilapidé quelques positions sociales, à fustiger l’islamophobie. J’en insiste. La passion nationale pour la laïcité de combat n’est qu’un refus de notre part musulmane. L’idée d’une France devenant un pays «aussi musulman», par certains de ses enfants, est une souffrance indépassable. On reproche d’abord aux musulmans d’être, ici, d’ici. L’antisémitisme est un autre élément à charge de preuve: une bonne raison, progressiste, de détester celles et ceux, voilées, barbus, dont on ne veut pas.
Deux choses peuvent être vraies ensemble. L’islamo-gauchisme existe mais aussi bien que l’islamophobie. L’antisémitisme existe, et l’antisémitisme musulman, mais l’islamophobie prospère aussi bien chez les tremblants de la laïcité. En même temps. Chacun alors choisit son camp. La grande bourgeoisie défend les juifs. Le gauchisme en tient pour les Arabes, et assimilés. Des camps politiques se structurent en choisissant sa victime de coeur. On tourne le dos aux souffrances de l’ennemi. Pour dénoncer l’antisémitisme, adoptez l’islamophobie! Pour combattre l’islamophobie, niez l’antisémitisme quand il vient des cités! Pourtant, tout ne s’échange pas. Je prétends –combien sommes-nous?– qu’il faut récuser chaque enfermement; je prétends aussi –est-ce évident?– qu'on ne fait pas avancer une cause juste avec d’autres haines et quelques mensonges pernicieux.
Slogan faux et liste incomplète
Je lis, dans ce texte, à propos de l’exode des juifs de quartiers populaires, l’expression suivante: il s’agirait d’une «épuration ethnique à bas bruit». L’expression m’en rappelle une autre, aussi dérangeante, l'«année de Cristal à bas bruit» inventée par Alain Finkielkraut pour évoquer les violences antisémites en 2002. Ces mots qui évoquent les crimes de guerre ou contre l’humanité. L’euphémisation (bas bruit, basse intensité) n’est qu’un artefact pour qu’on comprenne bien le message: l’ennemi nouveau, musulman, nous nie absolument. Pourtant, le slogan est faux. L’épuration ethnique suppose une volonté politique, d’expulser d’un territoire convoité une population antérieure. Les violences sont alors une stratégie de conquête: non plus l’expression d’une haine, mais un calcul raisonné, presque froid. Absurdité. Mireille Knoll est morte d’avoir rencontré la haine, pas d’une OPA musulmane sur le Paris populaire! Mais l’idée n’est pas neuve, encore, dans les cercles d’extrême droite, de lier les violences urbaines ou la délinquance au «Grand remplacement» en cours des Français authentiques par les envahisseurs musulmans. Eric Zemmour en a fait une antienne. Imagine-t-on un grand complot, des protocoles des sages de l’islam, qui auraient diligenté des brutes pour s’accaparer chaque appartement de Pantin ou Bobigny? Pense-t-on vraiment que la haine anti-juive n’est qu’une ruse de conquête immobilière? Est-ce cela, l’enjeu d’un tel manifeste? La compassion pour les juifs s’égare d’idéologie. Est-ce si surprenant? L’humanité des victimes, le juif réel, de chair blessée et d’âme écorchée, s’entend si peu, dans cette proclamation?
Je lis ceci, au début du manifeste,
et nul ne songe désormais à le nier. «Dans notre histoire récente, onze
Juifs viennent d’être assassinés –et certains torturés– parce que Juifs, par
des islamistes radicaux.» Ce slogan est contestable, et la liste est
incomplète. Onze juifs, donc? Nommons-les, puisque les pétitionnaires ne
prennent pas la peine de le faire. Ilan Halimi en 2006, Myriam Monsonégo,
Gabriel Sandler, Arié Sandler, Jonathan Sandler en 2012, Yohan Cohen, Philippe
Braham, François-Michel Saada, Yoav Hattab en 2015, Lucie Attal-Halimi en 2017,
Mireille Knoll cette année, tous rassemblés comme victimes choisies
d’islamistes radicaux. L’individualité de leurs tragédies, les dissonances de
leurs destins, comptent moins que l’idéologie. Et pourtant? Si les tueurs de
Toulouse et de l’Hypercacher étaient des djihadistes, les assassins de Ilan
Halimi étaient «simplement» des barbares pétris de lucre et de haine, et rien
n’atteste définitivement des motivations religieuses des tueurs de mesdames
Knoll et Halimi. Pourquoi, alors, réduire leur infamie à une catégorie
politique, l’islamisme radical? Parce que la désignation de l’ennemi surpasse
la vérité des assassinés. La liste est ainsi incomplète. À leur logique, les
pétitionnaires auraient dû ajouter Sébastien Selam, surnommé DJ Lam C, espoir
des fêtes parisiennes, tué et défiguré en novembre 2003,
trois ans avant Ilan Halimi, par un voisin et ami d’enfance, né d’une famille
musulmane, Adel, qui déclara après le meurtre: «J’ai tué un juif, j’irai au
paradis», mais fut jugé irresponsable et schizophrène. Eric Zemmour en fit
un livre, Petit frère, où s’ébrouaient déjà ses thèses, désormais
majoritaires, il faut s’y résoudre, d’une France qui devrait, pour se sauver et
sauver ses juifs, savoir traiter ses immigrés en ennemis. Que Zemmour puisse
passer pour un prophète de la défense des juifs et de la France, lui qui traite
d’envahisseurs les Africains qui risquent la noyade et en pince pour le
Maréchal Pétain, défenseur des juifs, épice l’horreur de comique grinçant. Mais
il reste, avant, une pensée fausse, mais dominante, que l’on ne discute plus.
Il serait urgent, au contraire, de discuter encore de ce qui nous arrive, dans
ce pays déboussolé. Qui est islamiste? Qui est fou? Qui est une brute? Qui veut
tuer un juif et pourquoi?
Nouvel antisémitisme, vraiment?
L’antisémitisme est une histoire vieille; ce qui arrive en France n’a rien de nouveau; c’est de l’avoir oublié que nous perdons pied. L’expression «nouvel antisémitisme» ne se comprend que dans une vision française, où l’on blanchit d’autant mieux Maurras, ces temps-ci, que ce ne sont plus ses adeptes qui matraquent le youpin, mais ces musulmans qui sont nos commodes étrangers. La nouveauté est celle des auteurs, et la France authentique s’en sentirait d’autant plus innocente. Elle se réécrit alors, tranquillement. On nous raconte que notre civilisation européenne et la France même furent indissociables des juifs. Sans doute, mais enfin? De l’inventeur de la Rouelle Louis IX, de l’expulseur Philippe le Bel, de Napoléon même en dépit de l’émancipation, du parti antijuif à la Chambre des députés, de la résurgence, dans l’après-guerre, d’un antisémitisme catholique qui s’indignait que des enfants juifs cachés par l’Église, pendant la Shoah, puissent être rendus à leur famille (l'affaire horrible et oubliée des garçons Finaly), de la rumeur d’Orléans, qui voyait une ville soupçonner des commerçants juifs d’enlever leurs clientes pour les expédier en maisons closes, des «Français innocents» (paroles de Raymond Barre) morts par erreur dans un attentat anti-juif, de la longue prospérité électorale de Jean-Marie Le Pen en dépit du «détail de l’histoire», nous pouvons, Français, rester modestes. Cela ne retire rien au déversoir contemporain, mais le relativise. Nouvel antisémitisme, vraiment, qu’amèneraient simplement des musulmans, vecteur de la peste islamiste dans une France immune, ou guérie? Et si nous n’étions pas immunes, et si nos musulmans n’étaient pas si différents, quand ils se prennent à haïr?On pourrait soutenir que l’antisémitisme actuel n’est religieux qu’en partie, et en rien «nouveau», dans ses intentions ou ses pratiques. Que la jalousie envers les juifs riches, l’idée du juif que l’on pourra enlever et dépouiller pour l’or qu’il cache, est une banalité sordide, et Ilan Halimi comme Mireille Knoll les derniers martyrs d’une longue habitude. Que les pogroms, partout, amenaient contre le juif une sauvagerie insensée, et que les corps des juifs n’étaient pas seulement privés de vie, mais déshumanisés, et le corps supplicié d’un jeune homme français, le corps martyrisé d’une femme française, ne sont pas différents des corps éventrés quand les cosaques razziaient le schtetl, pas différents des corps brûlés sous l’Inquisition ou à Babi Yar, pas différents des corps de ces soldats israéliens déchiquetés par une foule à Ramallah, au début de la seconde Intifada… Il est, dans le juif, pour celui qui le hait, une licence à quitter l’humanité. Ce n’est ni nouveau, ni singulièrement, ni essentiellement musulman. C’est, profondément islamiste, circonstanciellement musulman? Mais cela ne dit pas tout, et ne résume pas l’islamisme, ni l’antisémitisme et certainement pas l’islam de France, sait-on que ce mot est beau?
Nous
nous croyions, Français, exceptionnels dans notre modèle et nos assimilations.
Nous ne l’étions pas.
Notre République se délite dans des passions
qui ne lui ressemblent pas. Nous nous croyions, Français, exceptionnels dans
notre modèle et nos assimilations. Nous ne l’étions pas. Les groupes surgissent
et se renforcent, dans leurs logiques et leurs violences, et leurs régulations.
Nous sommes, brutalement, anglo-saxons. Nous ne savons, de cette culture, ni
les lois ni les codes. Nous rêvons d’unité du peuple quand ailleurs, on admet
que les ethnies se séparent, pour vivre une vie de foi intense, ou pour se
détester de plus loin, chacun y gagne. Dans la vieille Amérique, on peut dire
sans penser à mal –on pouvait dire, dans le Lower East side, au temps de
l’immigration légendaire– que tel groupe humain en détestait un autre, comme
une banalité. Le jeune juif savait, sauf exception, qu’on voyait en lui, chez
les Irlandais ou les Polonais du block d’à-côté, le tueur du Christ, promis à
châtiment viril. On pourrait dire, anglo-saxons, dans une de ces
généralisations commodes, que «les musulmans» n’aiment guère «les juifs», et
l’on n’en ferait pas un absolu. Ce ne serait pas une vérité, mais une ambiance,
un décor, un commencement, pour reconstruire. À l’aune américaine, un
déplacement de populations d’un quartier à l’autre, aussi pour de mauvaises
raisons, n’est que l’expression de la vie. Il nous arrive, Français, des
tragédies que nous ne savons dire. Nous parlons alors, d’autant plus haut. Nous
faisons comme si. On nous écrit des manifestes, comme si des manifestes
allaient sauver les juifs et nous faire renaître au doute? Il fut un temps où
les ratonnades étaient le folklore sanglant de ce pays. On tirait sur des
Arabes, comme une distraction, à Marseille ou ailleurs, c’était un horrible
opium d’une partie du peuple. Les juifs sont désormais visés, par quelques-uns
d’une autre partie du peuple. Juif moi-même, cela me navre et m’affole, et
j’aime, au fond, que l’on s’en alarme. Mais juif pourtant et français, je ne me
console pas que tous ensemble, tant de gens importants m’interdisent d’aimer
mon frère musulman, en dépit de lui-même parfois.Je suis, républicain, perplexe quand tant de personnages pétitionnent, dans des mots que seuls suivront les inconditionnels de la parole politique, des mots qui n’auront jamais aucune influence sur la haine qui ravage la société; des mots qui prétendent simplement pousser le jeune président Macron vers un identitarisme auquel il se dérobe; des mots qui voudraient, par force, arracher quelque nouvelle loi, quelque nouvel oukaze, pour faire de «nos concitoyens musulmans» des Français malheureux, dont chacun se méfiera, qui se méfieront de tous. Ce sera une tragédie de notre société, qu’aura justifié le besoin de me défendre, moi juif, moi prétexte. Je n’aime pas mourir, mais si cela doit venir, j’aimerais au moins savoir de quoi, et au nom de qui? Et pour quelle cause détestable on m’invite, mon martyre est bienvenu? La tradition hébraïque suppose qu’on fasse précéder les noms des disparus d’un acronyme, Zal, pour Zichrono levra’ha, de mémoire bénie. Mireille Knoll, Zal, Ilan Halimi, Zal... De mémoire bénie, et non pas de vengeance, et non pas d’injustice.
in:
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Combattre le racisme, l'antisémitisme.... et l'islamophobie
Dans un texte collectif lancé par Alain et Philippe
Cyroulnik, plus de deux cents personnalités et militant.e.s appellent à
combattre « toutes les formes de racisme quelles qu'elles soient ».
Elles affirment que le Manifeste contre le nouvel antisémitisme, « par les
amalgames qu'il fait, attise et renforce ce qu'il prétend dénoncer ».
Alors que se développent dans toute l’Europe des propos, actes et agressions racistes, xénophobes et antisémites :
Nous dénonçons, combattons l’antisémitisme, et tout acte criminel ou agression à ce titre, comme nous le ferions pour toutes les formes de racisme quelles qu’elles soient.
Nous savons que se taire aujourd’hui, banaliser ces discours et ces agressions ouvre la porte demain aux pires drames que l'histoire récente ou plus ancienne a fait connaître: qu'il s'agisse du génocide des juifs et des Roms perpétré par le nazisme, de celui des Tutsis, du génocide arménien, de l’épuration ethnique en Bosnie ou du génocide actuel des Rohingyas.
Par les amalgames qu'il fait, le Manifeste contre le nouvel antisémitisme attise et renforce ce qu'il prétend dénoncer.
Le délinquant voleur et meurtrier, nourri des poncifs antisémites sur la richesse supposée de toute personne juive, n'est pas le bras de Daesh ni le compagnon d'arme de Mohamed Mehra, Amedi Coulibaly ou Salah Abdeslam.
Les violences antisémites actuelles, aussi insupportables qu'elles soient, sont loin d'être comparables à un pogrom et encore moins à une épuration ethnique !
Assimiler la gauche antisioniste, qui a toujours été au premier rang du combat contre tous les racismes, à une nouvelle forme de l'antisémitisme relève d'une diversion mensongère et scandaleuse.
Assimiler ceux qui dénoncent la colonisation israélienne et son gouvernement d’extrême droite à des complices de l'antisémitisme est un amalgame inacceptable.
Au moment où les agressions contre les Français d'origine maghrébine, africaine et contre les Roms se développent, au moment où dans le débat politique générale, les propos stigmatisants contre les migrants et les exilés se multiplient, au moment où se libère une parole raciste, xénophobe et islamophobe décomplexée :
Nous refusons la notion de responsabilité collective, que cela concerne un peuple ou une communauté religieuse.
Nous refusons l'amalgame entre les actes criminels odieux ou à caractère délirant de certains et les projets ouvertement racistes et antisémites d'exécutions ou de massacres ourdis par d'autres.
Nous rappelons que les premières victimes de Daesh et de ses sbires sont d'abord les populations des pays arabes ou africains et des musulmans.
Nous dénonçons un texte qui assimile tout musulman à un intégriste en puissance, le désigne à la vindicte populaire et exige allégeance culturelle et repentance religieuse.
Les exactions atroces commises au nom des intégrismes de tout genre, des dictatures de toutes espèces ont en commun cette capacité à rivaliser dans l’horreur, la mise en scène de la terreur et le refus radical de notre commune humanité.
Les politiques laminant la vie de millions de personnes et la démission des forces qui devraient défendre les droits sociaux des peuples nourrissent le terreau d'une désespérance. Elles favorisent les régressions identitaires et les passions funestes du terrorisme.
Nous affirmons qu'il faut relever ce défi mortifère et se mobiliser pour arrêter cet engrenage fatal.
Nous affirmons notre solidarité avec toutes les victimes de ces exactions et notre exigence de ne pas refaire ce qui fut fait en d'autres temps : accueillons et défendons toutes celles et ceux qui les subissent.
Signataires :
Alain Cyroulnik
Philippe Cyroulnik
Myriam Martin
Alain Krivine
Samy Johsua
Renée-Claire Glichtzman
Laurent Levy
Bernard Noël
Élias Sanbar
Christine Poupin
Marc Slyper
Philippe Poutou
Annick Coupe
Olivier Besancenot
Anne Rochette
Camille Saint-Jacques
Marcel-Francis Kahn
Sophie Bensaïd
Enzo Traverso
Julien Salingue
Pierre Buraglio
Pierre Khalfa
Dominique Vidal
Pierre Cours-Salies
Laurence De Cock
Philippe Roux
Marie Ducaté
Jacques-Henri Michot
Dominique Angel
Jacques Moulin
Patrick Silberstein
Marie-France Cyroulnik
Michèle Sibony
Paul Alliès
Bernard Dreano
Sophie Zafari
Stéphane Tessier
Pierre Stambul
Catherine Samary
Michèle Krum
Jean-Marc Bourquin
Sonia Casagrande
Nadine Slyper
Claude Bégué
Claude Gutman
Salah Amokrane
Bernard Landau
Jacques Lerichomme
Françoise Laroche
Claude Buraglio
Al Martin
Valérie Jouve
Pierre Stambul
Bernard Cholet
Omar Slaouti
Patrice Leclerc
André Rosevègue
Alima Boumedienne Thiery
Mohammed Ben Yaklhef
Sonia Fayman
Jacques Fontaine
Fafia Djardem
Michel Angot
Pierre Josse
Julien Rivoire
Pierre-Yves Pira
Hélène Adam
Jean Malifaud
Bernard Deswarte
Didier Daïen
Dominique Dehais
Tristan Tremeau
Nathalie Quintane
Jean-Luc Nancy
Jean Marc Cerino
Gérard Chaouat
Bally Bagayoko
Alain Jugnon
Mathilde Ferrer
Pierre Zarka
Lena Coulibaly
Fatou Coulibaly
Michel Ricard
Patrick Chorowicz
Paule Bodilis
Estelle Fredet
Charles Bonn
Barbara Satre
Jean-Paul Ravaux
Michel Henry
Christian Bensimon
Véronique Bourquin-Valzer
Nicky Tremblay
Agnès Denis
Bernard Alleton
Sylvie Amestoy
Arthur Leduc
Jean-louis Griveau
Catherine Bensimon
Marie-José Mondzain
Isabelle Nicoladze
Mouloud Haddak
Jean-Louis Schoelkopf
Marie-Claude Herboux
Patrick Brody
Étienne Adam
François Wouters
Jacques Fath
Michèle Lesbre
Pierre Alferi
Jacques Bidet
Noufissa Nikou
Jean-Marie Gleize
Simon Picou
Fazia Balhi
Nathalie Crubézy
Roland Ceccotti
Didier Epsztajn
Lysia Edelstein
Sonia Ollivier
Pierre Rousset
Merwane Daouzli
Pascal Boissel
Jean-Marie Viprey
Josette Trat
Daniel Guerrier
Pedro Vianna
Eric Meleuc
Zora Perret
Raphaël Giromini
Alexis Cukier
Colin Falconner
Raymond Benhaim
Mehdi Lallaoui
Christian Mahieux
François Gèze
Marcel Seguret
Alice Dula
Bernard Messing
Dominique Terres
Gilles Houdouin
Vincent Genestet
Clémentine Cholet
Michel Faujour
Tatiana Cyroulnik
Pierre Concialdi
Katayoun Jondeau
Rhizlane Laabid
Nicolas Cyroulnik
Eric Laine
Olivier Milleron
Lucien Sanchez Badia
Frédéric Nadolny
Claudine Gleyzes
Guy Ayats
John Mullen
Jean-Pierre Martin
Mohamed Mechmache
Marie-Claude Maclaren
Alistair MacLaren
Philippe Sheppens
Franck Gaudichaud
Louis Weber
Daniel Desmé
Frédéric Bodin
Messaoud Romhdani
Kamel Jendoubi
Dominique Glaymann
Aurore Buvron
Gilles Manceron
Jean Philippe Milesy
Myriam Camipinos-Dubernet
Patrick Vassalo
Mireille Fanon Mendes-France
Franck Mouly
Patrick Fodella
Anne-Marie Faucon
Michel Malacarnet
Arnaud Clapier
Elizabeth Heller
Jean-Jacques Rue
Les Cinémas Utopia
Laurent Esquerre
Marie-Ange Debard
Désirée Debard
Pierre-Yves Freud
Sharon Kivland
Michel Mousel
Jean-Louis Prat
Denis Vicherat
Jean-David Casemajor
Pouria Amirshahi
Tarek Ben Hiba
Brigitte Péret
Gilles Lemaire
Martine Spensky
Henri Mermé
Jean-Marie Fouquer
Caroline Houdin-Bastide
Pierre Granet
Armand Creus
Cécilia Joxe
Alain Joxe
Dominique Grange
Jacques Tardi
Jean-Gabriel Coignet
Madjid Messaoudène
Martine Gazel
Michel Capron
Catherine Tricot
Frédéric Valabrègue
Olivier Martin
Monique Migneau
Guillaume Jondeau
Xavier Milleron
Michèle Guerci
...
In :
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EN ALLEMAGNE: DES MUSULMANES CONTRE L'ANTISEMITISME
AUX USA: DES JUIFS CONTRE L'ISLAMOPHOBIE
In: https://oumma.com/allemagne-des-musulmanes-posent-une-kippa-sur-leur-hijab-lors-dune-grande-marche-contre-lantisemitisme/
______________________
Tribune. L’antisémitisme est chose bien trop grave pour que la
lutte contre ce fléau soit instrumentalisée. Or, oubliant les tragédies qui ont
ponctué l’histoire du XXe siècle et jetant de l’huile sur les brasiers
d’un communautarisme en plein essor, les rédacteurs de l’Appel des 300 [publié
dans Le Parisien] assimilent à une « épuration ethnique » les drames trop
réels qui ont endeuillé au cours des dernières années nombre de familles juives
françaises et le harcèlement inadmissible dont sont victimes des juifs dans
certaines banlieues.
Employée dans le contexte français quand on sait ce qui se passe dans d’autres régions du monde, l’expression est scandaleuse.
L’antisémitisme connaît, il est vrai, une nouvelle jeunesse en France et dans toute l’Europe. Est-il seulement le fait, comme ils le prétendent, de populations que leur appartenance à l’islam rendrait, selon eux, ontologiquement antijuives ? Il ne fait guère de doute qu’une fraction minoritaire de la jeunesse d’origine arabo-musulmane est perméable à la propagande des prêcheurs des mouvances salafistes, qui ont fait de ses frustrations un terrain propice à la propagation de leur haine du juif.
Une « radio de la haine »
Outre le fait que ce « nouvel antisémitisme » ne remplace pas l’ancien, encore bien vivant, d’une France qui fut durant toute la première moitié du XXe siècle à l’avant-garde de l’antisémitisme européen et qui en garde de beaux restes, il convient pour mieux le combattre d’en rappeler les ressorts.
La République n’a pas seulement abandonné ces territoires perdus que sont nombre de banlieues de ses grandes villes, ghettoïsées par l’absence de transports, privées d’opportunités d’emploi, où l’école sans moyens ne peut plus remplir sa fonction d’éducation citoyenne, elle les a remises aux mains d’associations liées aux réseaux de l’islam politique, croyant pouvoir leur sous-traiter un semblant de paix sociale au prix de l’abandon des principes dont elle se proclame la garante. Sous les gouvernements de droite comme de gauche, on a fermé les yeux sur cette salafisation progressive d’une population adolescente passée par pertes et profits par l’Etat.
Mais il y a pis, si l’on peut dire. Ces sommités qui s’indignent, ancien président de la République, ancien premier ministre et autres personnalités d’envergure, sont les mêmes qui n’ont cessé d’accueillir en grande pompe dans les palais de la République les prescripteurs d’un antisémitisme érigé en doctrine d’Etat dans nombre de pays arabes.
Ils ont déroulé le tapis rouge devant un Kadhafi qui, au début des années 1980, avait créé une « radio de la haine » pour inciter ses voisins tunisiens à éliminer ce qui restait dans leur pays de population juive, placé au premier rang d’un défilé du 14-Juillet, ou un Bachar Al-Assad, héritier dynastique d’un homme qui s’est entouré durant sa longue et sanglante carrière de criminels de guerre nazis réemployés pour la propagande antijuive de son régime et fait depuis des décennies les yeux de Chimène à une Arabie saoudite dont le wahhabisme militant sue depuis toujours la haine antisémite.
C’est en effet l’islam et lui seul qui est stigmatisé
Et ceux-là veulent donner des leçons à l’ensemble des musulmans dont beaucoup, en France comme dans leurs pays d’origine, s’attachent à combattre les racines et les propagateurs de l’antisémitisme ? C’est en effet l’islam, et lui seul, qui est stigmatisé, comme si l’on ignorait que tous les textes sacrés se caractérisent par leur ambivalence et sont porteurs en même temps d’amour et de haine, de guerre et de paix, de tolérance et d’exclusion, comme si l’on ignorait que l’antisémitisme chrétien s’est revendiqué des Evangiles et de Saint-Augustin, et que les fondamentalistes du judaïsme brandissent la Torah à l’appui de leurs délirantes dérives.
Enfin, assimilant une fois de plus l’antisionisme, position politique, à l’antisémitisme – modalité gravissime mais parmi d’autres du racisme –, les auteurs enfourchent l’antienne d’une droite israélienne qui tente depuis longtemps d’assimiler toute critique de sa politique à de la haine antijuive.
Or, il faut bien convenir, pour le déplorer et s’en alarmer, que la politique d’un gouvernement israélien passé depuis des années à l’extrême droite représente aujourd’hui un danger pour les juifs du monde. Car sa volonté de faire de l’antisionisme un simple avatar de l’antisémitisme provoque en retour et en miroir une assimilation de tous les juifs à la politique d’un Etat où le déni des droits des Palestiniens et la haine de l’Arabe tiennent désormais lieu de seul horizon idéologique.
Alors, oui, il faut lutter contre un antisémitisme qui relève partout la tête, non pas en stigmatisant une population dont une partie de la jeunesse a été enrôlée dans les chimères de l’extrémisme, non pas en condamnant in globo une religion au texte fondateur ni pire ni meilleur que ceux des autres, mais en unissant en un même combat tous ceux qui croient ici et ailleurs qu’un humain en vaut un autre en droits comme en dignité.
Employée dans le contexte français quand on sait ce qui se passe dans d’autres régions du monde, l’expression est scandaleuse.
L’antisémitisme connaît, il est vrai, une nouvelle jeunesse en France et dans toute l’Europe. Est-il seulement le fait, comme ils le prétendent, de populations que leur appartenance à l’islam rendrait, selon eux, ontologiquement antijuives ? Il ne fait guère de doute qu’une fraction minoritaire de la jeunesse d’origine arabo-musulmane est perméable à la propagande des prêcheurs des mouvances salafistes, qui ont fait de ses frustrations un terrain propice à la propagation de leur haine du juif.
Une « radio de la haine »
Outre le fait que ce « nouvel antisémitisme » ne remplace pas l’ancien, encore bien vivant, d’une France qui fut durant toute la première moitié du XXe siècle à l’avant-garde de l’antisémitisme européen et qui en garde de beaux restes, il convient pour mieux le combattre d’en rappeler les ressorts.
La République n’a pas seulement abandonné ces territoires perdus que sont nombre de banlieues de ses grandes villes, ghettoïsées par l’absence de transports, privées d’opportunités d’emploi, où l’école sans moyens ne peut plus remplir sa fonction d’éducation citoyenne, elle les a remises aux mains d’associations liées aux réseaux de l’islam politique, croyant pouvoir leur sous-traiter un semblant de paix sociale au prix de l’abandon des principes dont elle se proclame la garante. Sous les gouvernements de droite comme de gauche, on a fermé les yeux sur cette salafisation progressive d’une population adolescente passée par pertes et profits par l’Etat.
Mais il y a pis, si l’on peut dire. Ces sommités qui s’indignent, ancien président de la République, ancien premier ministre et autres personnalités d’envergure, sont les mêmes qui n’ont cessé d’accueillir en grande pompe dans les palais de la République les prescripteurs d’un antisémitisme érigé en doctrine d’Etat dans nombre de pays arabes.
Ils ont déroulé le tapis rouge devant un Kadhafi qui, au début des années 1980, avait créé une « radio de la haine » pour inciter ses voisins tunisiens à éliminer ce qui restait dans leur pays de population juive, placé au premier rang d’un défilé du 14-Juillet, ou un Bachar Al-Assad, héritier dynastique d’un homme qui s’est entouré durant sa longue et sanglante carrière de criminels de guerre nazis réemployés pour la propagande antijuive de son régime et fait depuis des décennies les yeux de Chimène à une Arabie saoudite dont le wahhabisme militant sue depuis toujours la haine antisémite.
C’est en effet l’islam et lui seul qui est stigmatisé
Et ceux-là veulent donner des leçons à l’ensemble des musulmans dont beaucoup, en France comme dans leurs pays d’origine, s’attachent à combattre les racines et les propagateurs de l’antisémitisme ? C’est en effet l’islam, et lui seul, qui est stigmatisé, comme si l’on ignorait que tous les textes sacrés se caractérisent par leur ambivalence et sont porteurs en même temps d’amour et de haine, de guerre et de paix, de tolérance et d’exclusion, comme si l’on ignorait que l’antisémitisme chrétien s’est revendiqué des Evangiles et de Saint-Augustin, et que les fondamentalistes du judaïsme brandissent la Torah à l’appui de leurs délirantes dérives.
Enfin, assimilant une fois de plus l’antisionisme, position politique, à l’antisémitisme – modalité gravissime mais parmi d’autres du racisme –, les auteurs enfourchent l’antienne d’une droite israélienne qui tente depuis longtemps d’assimiler toute critique de sa politique à de la haine antijuive.
Or, il faut bien convenir, pour le déplorer et s’en alarmer, que la politique d’un gouvernement israélien passé depuis des années à l’extrême droite représente aujourd’hui un danger pour les juifs du monde. Car sa volonté de faire de l’antisionisme un simple avatar de l’antisémitisme provoque en retour et en miroir une assimilation de tous les juifs à la politique d’un Etat où le déni des droits des Palestiniens et la haine de l’Arabe tiennent désormais lieu de seul horizon idéologique.
Alors, oui, il faut lutter contre un antisémitisme qui relève partout la tête, non pas en stigmatisant une population dont une partie de la jeunesse a été enrôlée dans les chimères de l’extrémisme, non pas en condamnant in globo une religion au texte fondateur ni pire ni meilleur que ceux des autres, mais en unissant en un même combat tous ceux qui croient ici et ailleurs qu’un humain en vaut un autre en droits comme en dignité.
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Agir contre l'antisémitisme
- 3 mai 2018
- Par Philippe Corcuff
- Blog : Quand l'hippopotame s'emmêle...
Des personnalités et des
militant-e-s, issu.e.s de divers horizons de la gauche, appellent à s’engager
résolument contre les violences antisémites, en refusant la stigmatisation des
musulman.ne.s dans leur ensemble portée par le manifeste initié par Philippe
Val.
Après la publication
de l’appel de Philippe Val, signé par Valls-Sarkozy-Wauquiez, par un catholique
intégriste de droite extrême comme Ivan Rioufol, appel ciblant de manière
inadmissible les musulman.ne.s dans leur ensemble, il était nécessaire qu’une
réaction vienne de la gauche. En effet, l’appel Valls - Sarkozy - Wauquiez ne
va pas aider à la lutte contre l’antisémitisme, mais va encourager le racisme
contre les musulman.ne.s, ou supposé.e.s tels. Une réaction s’est exprimée à
gauche, avec l’appel lancé par Alain et Philippe Cyroulnik et paru dans
Mediapart le samedi 28 avril. Cet appel a raison de pointer les dangers de la
stigmatisation des musulman.ne.s, ce à quoi aboutit celui rédigé par Philippe
Val.
Nous pensons qu’il
faut maintenant aller plus loin dans l’analyse des nouvelles conditions de la
diffusion de l’antisémitisme et de ses dangers. L’appel paru dans Mediapart le
signale à juste titre : « Le délinquant voleur et meurtrier, nourri
des poncifs antisémites sur la richesse supposée de toute personne juive, n'est
pas le bras de Daesh ni le compagnon d'arme de Mohamed Merah, Amehdi Coulibaly
ou Salah Abdeslam. Les violences antisémites actuelles, aussi insupportables
qu'elles soient, sont loin d'être comparables à un pogrom et encore moins à une
épuration ethnique ! » Certes, et l’assimilation par l’appel Val de la
montée actuelle de l’antisémitisme à une épuration ethnique est stupide et hors
de propos. Mais, une fois que l’on a dit que l’assassin de Mireille Knoll n’est
pas Daesh et que l’on n’assiste pas à des pogroms, il convient de prendre
en compte l’ampleur considérable de la montée actuelle de l’antisémitisme et
ses dangers. Qu’un voleur pense qu’on peut trouver de l’argent chez une vieille
dame, Mireille Knoll, parce qu’elle est juive, cela renvoie aux préjugés
antisémites classiques et c’est terrifiant. De la même manière, qu’un
déséquilibré tue une autre vieille dame, Sarah Halimi, en la démonisant parce
qu’elle est juive, cela aussi est plus que préoccupant. D’autant que cet
individu fréquentait une mosquée radicale de son quartier, dont l’imam a été
expulsé. Tous ces événements angoissent à juste titre les Juifs et les Juives
et nous devons partir de cette inquiétude pour agir, tout comme à propos du
racisme aux USA par exemple nous partons du point de vue des Noir.e.s. Donc,
loin de relativiser les événements actuels, nous proposons d’agir contre les
actes antisémites.
Malheureusement la
gauche radicale, à laquelle certain.e.s d’entre nous appartiennent, est devenue
bien timide dans ses dénonciations de l'antisémitisme depuis le début des
années 2000. On ne saurait ni ignorer ni relativiser les abstentions lors des
manifestations contre les actes antisémites de ces dernières années, l’absence
de propositions d’actions à ces occasions, de même que les nombreuses analyses
aboutissant à occulter le phénomène et ses spécificités. Si assimiler son
absence d'action à de l’antisémitisme comme le fait l’appel Val est faux et inadmissible,
il nous faut réfléchir ensemble aux explications de cet incompréhensible
passivité pour la dépasser.
Pour nous, il y a
deux raisons essentielles à ces erreurs passées. D’une part la difficulté à
dénoncer des actes antisémites venus de milieux eux-mêmes discriminés, comme ce
fut le cas dans les affaires criminelles concernant les Juifs et Juives ces
dernières années. D’autre part le fait que les mobilisations contre
l’antisémitisme étaient organisées par le CRIF, soutien indéfectible et relais
des politiques des gouvernements israéliens. Or, on peut être conscient de la
présence du poison antisémite dans des secteurs minoritaires des populations
musulmanes, sous l’effet notamment des discours islamistes et de la propagande
djihadiste, à combattre, et lutter fermement contre l’islamophobie. On peut
critiquer les politiques coloniales et répressives mises en œuvre à l’encontre
des populations palestiniennes par les gouvernements israéliens, et
combattre fermement l’antisémitisme.
Aucun acte
antisémite n'est acceptable, quel qu’en soit l'auteur, et ne peut être occulté
ou amoindri pour quelque raison que ce soit. Il nous faut rompre avec les
attitudes frileuses face aux actes antisémites. Nous devons maintenant être
réellement au premier rang dans la lutte contre l’antisémitisme, comme contre
tous les racismes. Ce sera la meilleure manière d’éviter les récupérations
condamnables et de mauvais augure. Il est de notre responsabilité, sur le
terrain de la lutte contre l’antisémitisme comme sur celui de toutes les autres
formes de racisme, de constituer un front le plus large possible, dans lequel
celles et ceux nourris d'internationalisme et d'antifascisme pourront tenir
toute leur place. Cela nous permettra de renouer avec une partie du passé de la
gauche : l’émancipation des Juifs en 1791, la défense de Dreyfus,
l’opposition au nazisme destructeur.
Jean BIGOT
(producteur de films), Martine BILLARD (ancienne députée), Philippe CORCUFF
(universitaire, militant de la Fédération Anarchiste), Bernard DREANO (militant
associatif), Pierre-François GROND (enseignant, militant d’Ensemble !),
Robert HIRSCH (historien, militant d’Ensemble !), Paul-Elie LEVY (militant
associatif et antiraciste, responsable culturel), François LONGERINAS, Antoine
MALAMOUD (militant d’Ensemble !), Denis MARX (militant à Lyon), Robi
MORDER (juriste), Stéphane MOULAIN (syndicaliste enseignant), François PRENEAU
(syndicaliste, militant d’Ensemble ! 44), Raphael QNOUCH (militant de La
France Insoumise), Francis SITEL (responsable d’une revue militante), Stéphanie
TREILLET (universitaire, économiste)
_______________
----------------------
Texte
collectif.]
TRIBUNE. Nous souhaitons,
par ce texte collectif, contribuer aux vigoureuses protestations qui viennent
de s’élever devant la publication par Le Parisien (du 21 avril) d’un « manifeste
» signé par quelques centaines de personnes du monde politique, artistique et
intellectuel et qui, de fait, constitue un appel à la haine et à une guerre
civile larvée qui ne dit pas son nom.
Prétendant dénoncer un «
nouvel antisémitisme », ce « manifeste » impute au seul « islam radical » les
agressions commises à l’égard de citoyens français juifs, sans référence aucune
à l’antisémitisme d’extrême droite qui monte dans toute l’Europe (pays de
l’Est, Allemagne, Autriche) et dont on ne peut ignorer tout autant la présence
en France.
Leur souci d’éviter toute
référence aux courants d’extrême droite actifs, y compris juifs, les conduit à
ignorer ou à taire aussi bien les interventions du groupe Génération
identitaire contre les immigrés que la présence tolérée, lors de la dernière
marche silencieuse, de la Ligue de défense juive (LDJ), qui a tenté de
s’instituer en service d’ordre, alors que ce groupe est interdit en Israël
même. Leur prétendu antiracisme, dont fait partie la lutte contre
l’antisémitisme, est donc à géométrie variable.
Tissu d’amalgames et de
contre-vérités
Au mépris total des faits
et de l’histoire de France, avec une manipulation douteuse des chiffres en
matière d’agressions, ce manifeste ne peut qu’exacerber les tensions sociales
en France. En outre, il prend en otage ceux d’entre nous qui, juifs, se sentent
constamment soumis au chantage d’un péril antisémite, hélas, aujourd’hui réel,
dès qu’ils se démarquent de la politique d’un Etat qui n’est pas le leur.
Il semble condamner tout
communautarisme, mais cherche à imposer la notion de « communauté juive »
supposée intégrer tous les juifs de France sous la bannière du CRIF [Conseil
représentatif des institutions juives de France], qui n’en représente qu’un
nombre infime, et ainsi exacerbe l’antisémitisme qu’il dit vouloir combattre.
Ce manifeste, qui
perpétue le fantasme d’une future et discrète « Nuit de cristal » en France à
travers une prétendue « épuration ethnique à bas bruit », semble aussi ignorer
l’article du Monde du 21 avril [« L’Allemagne s’inquiète d’une recrudescence
des actes violents contre les juifs »] qui nuance les faits : « Qu’un certain
nombre d’agressions soit le fait de personnes de confession musulmane, nul ne
le nie. Reste que les statistiques de la police rappellent que, dans 95 % des
cas, les auteurs de délits antisémites enregistrés en 2017 étaient liés à
l’extrême droite. »
Les textes sacrés restent
sacrés
Aussi, nous dénonçons le
tissu d’amalgames et de contre-vérités qui courent tout au long de ce «
manifeste » :
- Amalgame entre, d’une
part, des violences et des actes meurtriers perpétrés contre des citoyens juifs
français par des terroristes déclarés et, d’autre part, des assassinats de type
crapuleux, comme celui de Mireille Knoll, dont la preuve qu’il relèverait de
l’antisémitisme ne repose que sur la connaissance, par l’auteur du crime, de la
religion de sa victime.
- Amalgame entre une
idéologie politico-religieuse, le salafisme, et une religion essentialisée
comme seule porteuse de violences, l’islam. Quant à la nécessité de réviser les
textes sacrés, ni la Bible ni les Evangiles n’ont été critiqués ou remis en
cause par [le concile œcuménique] Vatican II, qui a fait supprimer de la
liturgie certains passages accusant les juifs de déicide, sauf dans les églises
intégristes qui ne reconnaissent pas l’intervention pontificale. Les textes
sacrés restent sacrés. Seules leur lecture et interprétation ont été
revisitées. S’appuyer sur les prêches et interprétations du Coran des imams
salafistes pour demander que « des versets du Coran soient frappés
d’obsolescence », c’est attribuer à l’ensemble des croyants multiformes
musulmans une attitude haineuse envers les juifs. C’est aussi leur attribuer
une identité ethno-religieuse, à l’instar de l’image façonnée, au cours des siècles,
des juifs comme « race à part ».
- Amalgame entre
antisionisme et antisémitisme, qui assimile la contestation de la politique
coloniale et raciale d’Israël à l’égard des Palestiniens (sans oublier les
discriminations à l’égard des falachas juifs d’Ethiopie et de la récente
émigration africaine, commises notamment par les courants ultraorthodoxes) à
ladite « volonté de destruction des juifs » par des mouvements extrémistes au
Proche-Orient. En oubliant que l’Etat israélien s’autoproclame « Etat juif » et
s’arroge le droit de parler au nom des juifs du monde entier. Amalgame dont
plusieurs personnalités « hors de tout soupçon » ont fait les frais (François
Maspero, Charles Enderlin et tant d’autres) lorsque l’on a cherché à les faire
condamner par la justice comme antisémites ou en les empêchant de continuer à
exercer leur métier. De même pour tous ceux et celles, juifs et juives, qui ont
subi diffamations ou calomnies publiques comme, par exemple, l’ex-ambassadeur
et ancien déporté Stéphane Hessel, auteur du manifeste Indignez-vous !, Edgar
Morin ou l’ancien président du CRIF Théo Klein, dès qu’ils refusèrent de
cautionner inconditionnellement la politique de l’Etat d’Israël. Et
dernièrement, l’actrice Natalie Portman, traînée dans la boue parce qu’elle
avait refusé de participer aux cérémonies du prix Genesis, ne voulant soutenir
ni la politique de Nétanyahou ni « la violence, la corruption, les inégalités
et l’abus de pouvoir ».
Attaques contre la pensée
critique
Il ne faut pas pour
autant négliger, dans les prisons comme dans les quartiers que la République
française nomme de « non-droit », la progression d’idéologies salafiste et
wahhabite qui reprennent la « théorie du complot juif », revisitée par
l’extrême droite et relayée par les réseaux sociaux.
Il faut rappeler que
cette même République a été sourde aux appels de travailleurs sociaux – laïques
et musulmans (mais pourquoi définirait-on certains citoyens par leur
appartenance religieuse ?) – pour lutter contre les prêches de ces imams. Cette
même République a été sourde également aux études des anthropologues et des
sociologues sur la montée des mouvements religieux servant de rempart ou de
colmatage socio-éducatif au retrait des services publics et des pouvoirs
régaliens dans certaines périphéries paupérisées.
Les attaques contre la
pensée critique, appelée par le « manifeste » pensée de la « gauche radicale »,
réduisent les analyses des phénomènes de paupérisation et de ségrégation
sociale – conjugués à la montée du consumérisme et au ressentiment de ne pas
être du bon côté de la fracture – à une position idéologique.
Les détracteurs de la
pensée critique, eux, pensent si bien qu’ils parlent d’épuration ethnique pour
désigner la fuite des quartiers paupérisés vers des quartiers plus « sécurisés
» et gentrifiés de certaines fractions de la population juive. Quand, dans
l’Afrique du Sud post-apartheid, des fractions aisées de la population noire
ont quitté les townships pour des quartiers blancs et que les Blancs ont
déserté ces mêmes quartiers, a-t-on parlé d’une « épuration ethnique » ?
Tant de confusions et
d’amalgames font donc de ce « manifeste », à l’opposé du souhait annoncé de bon
nombre de ses signataires, une véritable incitation à la haine raciste et même
antisémite.
Signataires
Jean-Loup Amselle, anthropologue, EHESS
Jocelyn Aznar, EHESS
Bertrand Badie, professeur Sciences politiques
Etienne Balibar, professeur, université de Paris-Nanterre
Gilles Bataillon, EHESS
Laurent Bazin, anthropologue, CNRS
Annie Benveniste, anthropologue, université Paris-VIII
Rivka Bercovici, mairie de Paris
Renée Blancheton Sciller, enseignante
Véronique Bontemps, chargée de recherche CNRS
Etienne Bourel, anthropologue, université Lyon-II
Michel Carassou, écrivain
Brigitte Chauvin, mathématicienne, professeure, université de Versailles
Hélène Claudot-Hawad, anthropologue, CNRS
Jean-Baptiste Comby, sociologue, université Paris-II
Anne Coppel, sociologue
Annie Cyngiser, sociologue
Claudine Dardy, professeure
Sonia Dayan-Herzbrun, sociologue, université Paris-Diderot
Catherine Deschamps, sociologue, Ecole nationale d’architecture, Paris Val-de-Seine
Rémy Dor, ethnolinguiste
Stéphane Douailler, philosophe, université Paris-VIII
Marie-Dominique Garnier, angliciste, université Paris-VIII
Sabine Dupuy, sociologue
Suzanne Durret
Arlette Farge, EHESS
Franck Fischbach, professeur de philosophie, université de Strasbourg
Pascale Fontaine, EHESS
Jean-Claude Galey, EHESS
Dominique Glaymann, université d’Evry
Mélanie Gourarier, anthropologue,CNRS
Judith Hayem, anthropologue, université Lille-I
Bernard Hourcade, CNRS
Bernard Hours, anthropologue, Institut de recherche pour le développement
Fanny Jedlicki, sociologue, université du Havre
Aissa Kadri, professeure, université Paris-VIII
Fatiha Kaoues, Institut d’ethnologie méditerranéenne et comparative
Salam Kawakibi, politologue
Nicole Khouri, sociologue, université Paris-I
Ariane Lantz, sociologue
Pierre Lantz, sociologue, université Paris-VIII
Estelle Le Touzé, mission Habitat
S. K. Levin, journaliste
Jacques Lewkowicz, président de l’Union des juifs pour la résistance et l’entraide (UJRE)
Alain Mahe, EHESS
Valérie Marange, philosophe, psychanalyste
Joëlle Marelli, traductrice
Mohamed Mebtoul, anthropologue, université d’Oran
Gisèle Miski, chef monteuse
Christian de Montlibert, sociologue, université de Strasbourg
Louis Moreau de Bellaing, sociologue
Barbara Morovich, anthropologue, Ecole nationale supérieure d’architecture de Strasbourg
Véronique Nahoum-Grappe, anthropologue, EHESS
Bertrand Ogilvie, philosophe, université Paris-VIII
Françoise Palumbo, Journal des anthropologues
Juile Peghini, anthropologue, université Paris-VIII
Thomas Piketty, économiste
Philippe Poutignat, sociologue, Unité de recherche migrations et société (Urmis)
Anne Querrien, Chimères
Claude Redele, sérigraphe
Diogo Sardinha, philosophe
Monique Selim, anthropologue, IRD
Guillaume Sibertin-Blanc, professeur, université Paris-VIII
Claude Szatan, fonctionnaire territorial
Pascale Tissier, architecte
Christian Topalov, CNRS
Guy Trastour, Chimères
Maryse Tripier, professeure, université Paris-Diderot
Christian Vaillant, ancien libraire
Chritiane Volaire, philosophe
Pierre Wermeren, professeur Paris-I
Tassadit Yacine, anthropologue, EHESS
Jean-Pierre Zirotti, professeur, université de Nice Day
Jean-Loup Amselle, anthropologue, EHESS
Jocelyn Aznar, EHESS
Bertrand Badie, professeur Sciences politiques
Etienne Balibar, professeur, université de Paris-Nanterre
Gilles Bataillon, EHESS
Laurent Bazin, anthropologue, CNRS
Annie Benveniste, anthropologue, université Paris-VIII
Rivka Bercovici, mairie de Paris
Renée Blancheton Sciller, enseignante
Véronique Bontemps, chargée de recherche CNRS
Etienne Bourel, anthropologue, université Lyon-II
Michel Carassou, écrivain
Brigitte Chauvin, mathématicienne, professeure, université de Versailles
Hélène Claudot-Hawad, anthropologue, CNRS
Jean-Baptiste Comby, sociologue, université Paris-II
Anne Coppel, sociologue
Annie Cyngiser, sociologue
Claudine Dardy, professeure
Sonia Dayan-Herzbrun, sociologue, université Paris-Diderot
Catherine Deschamps, sociologue, Ecole nationale d’architecture, Paris Val-de-Seine
Rémy Dor, ethnolinguiste
Stéphane Douailler, philosophe, université Paris-VIII
Marie-Dominique Garnier, angliciste, université Paris-VIII
Sabine Dupuy, sociologue
Suzanne Durret
Arlette Farge, EHESS
Franck Fischbach, professeur de philosophie, université de Strasbourg
Pascale Fontaine, EHESS
Jean-Claude Galey, EHESS
Dominique Glaymann, université d’Evry
Mélanie Gourarier, anthropologue,CNRS
Judith Hayem, anthropologue, université Lille-I
Bernard Hourcade, CNRS
Bernard Hours, anthropologue, Institut de recherche pour le développement
Fanny Jedlicki, sociologue, université du Havre
Aissa Kadri, professeure, université Paris-VIII
Fatiha Kaoues, Institut d’ethnologie méditerranéenne et comparative
Salam Kawakibi, politologue
Nicole Khouri, sociologue, université Paris-I
Ariane Lantz, sociologue
Pierre Lantz, sociologue, université Paris-VIII
Estelle Le Touzé, mission Habitat
S. K. Levin, journaliste
Jacques Lewkowicz, président de l’Union des juifs pour la résistance et l’entraide (UJRE)
Alain Mahe, EHESS
Valérie Marange, philosophe, psychanalyste
Joëlle Marelli, traductrice
Mohamed Mebtoul, anthropologue, université d’Oran
Gisèle Miski, chef monteuse
Christian de Montlibert, sociologue, université de Strasbourg
Louis Moreau de Bellaing, sociologue
Barbara Morovich, anthropologue, Ecole nationale supérieure d’architecture de Strasbourg
Véronique Nahoum-Grappe, anthropologue, EHESS
Bertrand Ogilvie, philosophe, université Paris-VIII
Françoise Palumbo, Journal des anthropologues
Juile Peghini, anthropologue, université Paris-VIII
Thomas Piketty, économiste
Philippe Poutignat, sociologue, Unité de recherche migrations et société (Urmis)
Anne Querrien, Chimères
Claude Redele, sérigraphe
Diogo Sardinha, philosophe
Monique Selim, anthropologue, IRD
Guillaume Sibertin-Blanc, professeur, université Paris-VIII
Claude Szatan, fonctionnaire territorial
Pascale Tissier, architecte
Christian Topalov, CNRS
Guy Trastour, Chimères
Maryse Tripier, professeure, université Paris-Diderot
Christian Vaillant, ancien libraire
Chritiane Volaire, philosophe
Pierre Wermeren, professeur Paris-I
Tassadit Yacine, anthropologue, EHESS
Jean-Pierre Zirotti, professeur, université de Nice Day
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Le Quotidien d’Oran, jeudi 3 mai
2018
Manifeste judéophile et islamophobe
ou pure diversion ? (1ère partie)
par Omar Mazri*
Le caractère
manifestement islamophobe et judéophile des termes, des intentions et des
figures des personnalités politico-médiatiques dénonçant «une épuration
ethnique à bas bruit» pratiquée par les « islamistes radicaux » contre les bons
citoyens juifs soulèvent quelques questions.
Les questions que nous soulevons ne cachent pas le caractère odieux de l'assassinat ou de la torture de onze juifs français par quelques musulmans français ou résidents en France. Elles ne se dressent pas contre la liberté, la légalité voire la légitimité de manifester ses opinions vraies ou fausses, de déclarer ses sentiments ou ses préjugés, d'afficher ses appartenances idéologiques ou religieuses. Les questions que nous soulevons manifestent notre liberté de pensée et notre devoir de clarification pour que ce qui ressemble à une vaste opération de communication ne soit pas vécue par la communauté la plus fragile de France comme une énième stigmatisation, une énième provocation, un énième amalgame, une sempiternelle diversion Les questions et les réponses à un problème factuel ou narratif ne doivent pas être prisonnier d'une imagination délirante et narcissique mise en scène et livrée à la consommation de masse pour fasciner, hypnotiser, leurrer, détourner, séduire, masquer.
Le problème, ses questions et ses réponses doivent répondre à :
- La réalité (situation objective),
- La vérité (se référer aux positions principielles les plus universelles ou aux affirmations catégoriques et explicites d'un texte sacré religieux ou profane fondateur d'une pensée ou d'une civilisation et non à des valeurs c'est-à-dire à des jugements, des interprétations et des opinions à portée limitée en termes de durée de temps, d'étendue d'espace)
- Le contexte dans lequel se manifestent la réalité et la vérité pour s'imprimer dans la conscience humaine ou pour s'exprimer aux autres consciences.
Le contexte international
L'échec en Syrie et la mise en évidence de plus en plus visible et de plus en plus crédible de l'implication occidentale dans la formation, le soutien et la manipulation des groupes terroristes nommés pour la « bonne cause » « islamistes » ou « djihadistes » impose de faire diversion.
L'impossibilité de cacher les manifestations des Palestiniens revendiquant toujours leur droit au retour avec détermination et conviction et la riposte sanglante et démesurée des forces d'occupation sioniste de la Palestine. A chaque agression sioniste et à chaque effort de résistance palestinienne le monde politico-médiatique vient apporter son soutien à l'entité sioniste et il n'échappe à personne la bataille qui veut confondre l'anti sionisme et le soutien à la résistance avec l'anti sémitisme. Le ridicule de qualifier un arabe d'Afrique du Nord ou du Moyen-Orient pourtant sémite que le juif d'Amérique, de France ou de Russie ne tue plus personne. Cette dérive « sémantique » porte préjudice aux Juifs eux-mêmes, mais eux aussi ils sont victimes des médias et du sionisme.
La réalité :
J'ai froid au dos et j'ai les limbes qui se transforment en morve lorsque je lis ce que les notables politico médiatiques français énoncent comme vérité sacrée :
«Les Français juifs ont 25 fois plus de risques d'être agressés que leurs concitoyens musulmans»,
«Dix pour cent des citoyens juifs d'Ile de France c'est-à-dire environ 50 000 personnes ont récemment été contraints de déménager parce qu'ils n'étaient plus en sécurité dans certaines cités et parce que leurs enfants ne pouvaient plus fréquenter l'école de la République», «Il s'agit d'une épuration ethnique à bas bruit au pays d'Émile Zola et de Clemenceau.»
Le crime et le criminel comme objet de préoccupation intellectuelle n'est pas un fait nouveau, ce qui est nouveau et absurde c'est de l'imputer médiatiquement à une race, à une religion, à une communauté sans apporter de preuves scientifiques et de témoignages vérifiables et incontestables. Le crime et le criminel sont des choses graves et sérieuses, ils relèvent de la compétence des criminologistes, des juristes, des psychologues, des psychiatres. Dans le passé il y a eu des dérives racistes ou des incompétences intellectuelles pour imputer le crime à une race. Aujourd'hui la théorie dominante veut que le crime relève de déviance de la personnalité individuelle ou de troubles pathologiques que les conditions sociales, politiques, économiques et psychologiques aiguisent ou atténuent. On a montré également que l'ignorance des lois et l'irresponsabilité sociale favorisent la délinquance et le crime.
Il est du droit des personnalités ayant signé le manifeste d'exprimer leur peur ou de manifester leur sympathie pour les Juifs et leur antipathie pour les Musulmans, mais il est de leur responsabilité morale et citoyenne de ne pas s'embarquer sur un terrain aussi complexe que la sociologie et la psychologie du crime. En France il y a un homme extrêmement compétent en matière de criminologie, en l'occurrence Alain Bauer, professeur de criminologie appliquée au Conservatoire national des arts et métiers, consultant national et international en sécurité, auteur d'une cinquantaine d'ouvrages sur la criminalité et le terrorisme, descendant de parents juifs. Il serait intéressant, même s'il ne fait pas l'unanimité dans la communauté scientifique, d'écouter son avis sur les assertions infondées et floues du dit manifeste. Il serait intéressant, même si certains lui reprochent sa « proximité avec l'extrême droite » ou sa « haine des Musulmans » de voir comment il explique les connexions du crime organisé et les solutions à apporter à la criminalité au lieu de juger et de punir des communautés sans argument scientifiques, sans volonté d'apaiser et de « civiliser ». Il pourrait nous expliquer pourquoi les «islamistes radicaux» ont droit d'expression sur l'Internet pourtant surveillée, pourquoi ils parviennent à passer à l'acte alors qu'ils sont fichés et surveillés et surtout pourquoi la majorité des ces «radicaux islamisés» proviennent de la délinquance ou du crime organisé ? La réalité que les forces de l'ordre connaissent est bien celle du nombre d'Arabes, d'Africains et d'étrangers assassinés en France. Objectivement aller sur ce terrain et établir des ratios est dangereux, car la plupart des crimes et des agressions ne peuvent être attribués au racisme ou à l'islamophobie. Par ailleurs les ratios ne peuvent rien signifier lorsque l'on sait que les effectifs des communautés sont incomparables, les conditions sociales des communautés sont incomparables.
A titre d'illustration de la lutte idéologique et médiatique du manifeste et de ses affirmations fallacieuses comme celle-ci :
«Dix pour cent des citoyens juifs d'Ile de France c'est-à-dire environ 50 000 personnes ont récemment été contraints de déménager parce qu'ils n'étaient plus en sécurité dans certaines cités et parce que leurs enfants ne pouvaient plus fréquenter l'école de la République».
Tous les gens sensés des HLM, de la sociologie, de l'administration régionale et communale, de la démographie, de la géographie savent qu'il y a un processus d'infiltration et d'exfiltration communautaire dans les cités, les écoles, les lieux de travail par l'écrémage et la ségrégation du fait des conditions sociales, du communautarisme passif (celui mené par les politiques sociales et économiques en échec d'intégration et en confusion sur le droit à la différence qui créé de la diversité et l'obligation d'indifférenciation qui multiplie les variétés dans les mêmes moules sociaux, politiques et médiatiques cultivant le même unanimisme et le même immobilisme). Il n'y a pas que les seuls Juifs qui ont déserté les « quartiers et les écoles de quartiers », mais tous les « Européens » qui ont les moyens de partir et une minorité d'Arabes et d'Africains qui sont parvenus à une « intégration sociale » par le revenu.
L'autre réalité qui n'échappe à personne est le nombre de Musulmans et d'Arabes tués par le terrorisme « islamique ». Il ne s'agit pas de « onze » personnes, mais de millions de personnes en Irak, en Syrie, en Afghanistan depuis peu. Si nous devons comptabiliser les tués par la cupidité et la voracité des prédateurs occidentaux dans le monde il s'agit de centaines de millions. On s'interroge donc sur les mobiles des signataires du Manifeste contre l'antisémitisme lorsque l'un des signataires les plus influents et les plus prestigieux a mis à feu et à sang la Libye pour spolier ses richesses, punir les peuples qui résistent à l'ordre impérial et sioniste.
L'horreur de la réalité du Manifeste est exprimée par le journaliste Claude Askolovitch, qui dans les colonnes du site Slate, dit qu'il s'agit d' «Une mise en accusation des musulmans de ce pays, réputés étrangers à une véritable identité française, sauf à renoncer à leur dignité». Il conteste la quintessence du message qui : «fait de la lutte pour les juifs une composante du combat identitaire français, et cette identité exclut.» Il en déduit que ce texte induit que «la défense du Juif implique le refus de l'Islam ».
Le politico-médiatique français n'a toujours pas compris que l'échec de l'esprit français en Algérie et son idéologie colonisatrice est dû principalement à sa stupide stratégie de monter le Juif contre le Musulman, le Berbère contre l'Arabe, l'assimilé contre l'indigène
L'autre réalité est celle de la fiction d'un Islam français à opposer à l'Islam pour civiliser le monde. Les Américains veulent une OTAN arabe qui combat les Arabes, les Africains et les Asiatiques pour le compte de l'empire au nom d'une certaine idée (fausse) de l'Islam. Ils fondent leur fiction sur la vassalité, la terreur ou la corruption des gouvernants arabes. Les Français, forts de leur culture et de leur intelligence, veulent mieux faire : fabriquer un Islam français puis l'exporter comme on exporte une voiture ou des pommes de terre. Les uns et les autres se croient les dépositaires légaux de l'humanité et de l'universel.
« que les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants soient frappés de caducité par les autorités théologiques, comme le furent les incohérences de la Bible et l'antisémitisme catholique aboli par [le concile] Vatican II, afin qu'aucun croyant ne puisse s'appuyer sur un texte sacré pour commettre un crime».
«Nous attendons de l'islam de France qu'il ouvre la voie»
L'Islam au service des appétits impérialistes et de l'hégémonie culturelle de l'Occident athée et matérialiste nous l'avons vu en œuvre en terres d'Islam et nous avons vu ses bouffons en France. Il faut d'abord tenter de judaïser les Juifs et de christianiser les Chrétiens que vous connaissez mieux que les Musulmans que vous voulez islamiser à la mode de Vatican II. Le manifeste pro sioniste et pro Netanyhou dans son contexte est dans sa réalité intrinsèque une référence à Vatican II pour une raison stratégique : la lutte idéologique.
Le Concile Vatican II (1962-1965) est une référence majeure sur le plan géopolitique : il déclare la guerre contre l'Islam jugé unique et solide rempart culturel, moral et spirituel à l'évangélisation de la planète. Pour s'attaquer à ce rempart Vatican II va réhabiliter les Juifs du meurtre de Jésus, ouvrir les passerelles vers l'Église orthodoxe d'Orient et de Russie, unifier les slaves contre l'union soviétique, considérer les Musulmans comme sans Dieu, sans Livre et sans Prophète, considérer l'Islam comme une religion asiatique à l'image du bouddhisme, une spiritualité en retrait du monde Contre la dialectique de l'existence qui refuse le monopole et le pouvoir unique Vatican II est en harmonie avec l'hégémonie impériale qui ne reconnait pas la diversité et la multipolarité. Le Vatican II est en harmonie avec le matérialisme impérialiste : l'Évangile, parole de Jésus d'inspiration divine est reconnu comme écriture humaine. Le Vatican II correspond à l'esprit de la post modernité : ni Dieu, ni centre, mais pouvoir temporel absolu et sans partage aux mains des communicants ( du nouvel ordre mondial). A suivre
* Auteur et écrivain
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Le Quotidien d’Oran, jeudi 3 mai
2018
Les sionistes français fossoyeurs du
vivre ensemble (1ère partie)
par Chems Eddine
Chitour*
«Dites: Nous
croyons en Dieu, à ce qui nous a été révélé, à ce qui a été révélé à Abraham, à
Ismaël, à Isaac, à Jacob et aux tribus; à ce qui a été donné à Moïse, et à
Jésus; à ce qui a été donné aux prophètes, de la part de leur Seigneur. Nous
n'avons de préférence pour aucun d'entre eux; nous sommes soumis à Dieu».
(Coran « Sourate 2 Verset 136)
Un scoop malsain et dangereux: Plus de 250 personnalités signent un «manifeste contre le nouvel antisémitisme» en France, dénonçant un «silence médiatique» et une «épuration ethnique à bas bruit» dans certains quartiers, dans Le Parisien. Ce brulot infect et dangereux, est dirigé par Philippe Val ancien de Charlie et des caricatures, qui a un problème avec l'Islam et qui pense que son ascension sociale ne peut se faire que s'il cloue au piloris l'Islam Il rameute tous les sionistes de la place de Paris et quelques lampistes tels que les imams compatibles avec la doxa actuelle : «Nous demandons que la lutte contre cette faillite démocratique qu'est l'antisémitisme devienne cause nationale avant qu'il ne soit trop tard. Avant que la France ne soit plus la France», souligne ce texte signé par des personnalités politiques de droite comme de gauche, des artistes, responsables religieux et personnalités pour l'immense majorité ayant une proximité totale avec Israël soit par calcul soit par terreur de déplaire aux gardiens du Temple. C'est une dérive annonciatrice d'un clash voulu.
Curieusement l'un des signataires monsieur Mohamed Guerroumi peut être le responsable de la mosquée Essalem de Nantes avait un tout autre avis cohérent lors d'une interview à Breizh info, en janvier 2015 il déclarait : « Le Coran ne doit-il pas, selon vous, être expurgé de textes qui pourraient être interprétés comme appelant à la violence. M. Guerroumi répond : « Le Coran est la Parole incréée de Dieu Exalté soit-Il. Qui s'autoriserait à en modifier ne serait-ce qu'une infime ponctuation ? Personne bien entendu. ( ) Il est vrai néanmoins qu'un lecteur lambda pourrait être surpris par des versets qui susciteraient la brutalité, telle que nous la réprouvons de nos jours. Cependant, ce serait là une erreur de les interpréter de la sorte si nous les décontextualisons. Il n'y a rien dans le Livre de Dieu qui puisse inciter à l'agression ou à l'injustice. Par contre, Dieu n'interdisant pas la légitime défense, celle ci est tout de même si conditionnée que tout recours aux armes en est de fait dissuadé ».(1)
Haine des juifs en France : fausses solutions pour de vrais problèmes
Une contribution lue sur TSA pose clairement les termes du débats : « Rien ne justifie les meurtres de juifs commis ces dernières années en France, mais il y a comme une mauvaise foi de les rappeler en ce moment précis pour en faire le prétexte d'une entreprise porteuse de dangers infiniment plus dévastateurs : expurger le Coran de certains de ses versets, comme le demandent 300 personnalités qui ont signé un appel ce dimanche. Bernard Henry-Lévy et Boualem Sansal, ou même Nicolas Sarkozy et Manuel Valls, encore plus les deux imams qui ont signé le fameux appel contre le nouvel antisémitisme, ne l'ignorent pas, Cet appel cache aussi une volonté manifeste de fausser le débat, de le détourner, ou carrément de se voiler la face, sachant qu'en ce moment précis, l'urgence est censée être d'arrêter le massacre en cours des Palestiniens dans la bande de Gaza ( ) Onze juifs tués en France parfois le mobile antisémite n'est pas clairement établi suffisent pour indigner la planète, jusqu'à songer à corriger un texte sacré pour plus d'un milliard d'individus et vieux de quinze siècles.
« Depuis au moins la fin de la seconde Guerre mondiale, la classe politique et l'intelligentsia européennes sont hantées par le souci d'éviter de « heurter la sensibilité des juifs ». Le souvenir de l'Holocauste et des pogroms d'Hitler pollue toujours la vision des Etats et des sociétés occidentales et tout acte ou événement impliquant la communauté juive ou un de ses membres est nécessairement vu par le prisme de la haine et de la discrimination raciale. Jusqu'à qualifier de crime raciste le meurtre d'une vieille dame par de jeunes délinquants qui en voulaient à son argent. Comme si des voyous ne pouvaient avoir d'autres bonnes raisons de s'en prendre à une femme riche et solitaire que la haine de sa religion » (2).
Récusant un procès injuste fait aux musulmans et à l'islam de France, Dalil Boubakeur, recteur de l'Institut musulman de la Grande Mosquée de Paris, n'a pas retenu sa colère en écrivant : «Les citoyens français de confession musulmane majoritairement attachés aux valeurs républicaines n'ont pas attendu la tribune publiée dans le quotidien national Le Parisien pour dénoncer et combattre depuis des décennies l'antisémitisme et le racisme antimusulman sous toutes ses formes.» Et de rappeler que la Grande Mosquée de Paris a été aux premières loges dans les années 1940 pour aider les juifs à échapper à l'extermination nazie. «Le procès injuste et délirant d'antisémitisme fait aux citoyens français de confession musulmane et à l'islam de France à travers cette tribune présente le risque patent de dresser les communautés religieuses entre elles dans une hystérie qui défie la réalité sociale et politique», ajoute Dalil Boubakeur. Pour Abdallah Zekri, président de l'Observatoire national contre l'islamophobie, délégué général du Conseil français du culte musulman, «des hommes politiques sur le déclin et en mal de reconnaissance médiatique ont trouvé dans l'Islam et les Musulmans de France leur nouveau bouc émissaire. Il en est ainsi de Manuel Valls qui, avant de quitter la France pour se lancer dans une carrière politique hypothétique en Espagne, veut semer la discorde entre les Français. ) » (3)
Commentant à son tour l'« épuration ethnique à bas bruit », la « faillite démocratique » qui mériterait d'être « cause nationale avant qu'il ne soit trop tard » et « que la France ne soit plus la France », Pierrick Tillet eut le courage de nommer, les choses il écrit : « Si l'antisémitisme est toujours une triste réalité, en France et ailleurs, il n'est (heureusement) plus le fléau le plus marquant d'une réalité française et internationale autrement plus sinistre. Quid de la pauvreté galopante créée par des voyous que vous soutenez pour la plupart ? Quid de la précarisation grandissante de masses populaires de plus en plus nombreuses ? ( ) Je vais vous dire franchement ce que je pense, moi, père d'enfants juifs par descendance, de votre «manifeste» faux-cul hypocrite ? Une très vulgaire diversion, un écran de fumée sur les véritables tragédies actuelles de notre monde, une instrumentalisation d'un drame crapuleux (le meurtre de la malheureuse Mireille Knoll) pour masquer la politique ignoble d'Israël à Gaza gageons que le CRIF et autres officines d'acabit identique ne manqueront pas de profiter de votre appel pour cadenasser un peu plus l'antisémitisme à l'antisionisme. Alors je vais vous dire, chères «personnalités» : votre manifeste, sorti opportunément du chapeau comme le lapin par le magicien pour faire illusion et détourner l'attention, on l'emmerde ! Vous en faites trop, vous comprenez ? Ça ne prend plus » (4).
Dans une contribution précédente, j'avais tenté de montrer qu'il ne faut pas amalgamer entre antisémitisme qui doit être combattu et l'antisionisme On se souvient de Manuel Valls et son glissement sémantique visant à amalgamer antisionisme et antisémitisme pour empêcher toute protestation à l'endroit de la politique israélienne. Non, l'antisionisme n'est pas un antisémitisme réinventé (5)
Les Juifs sauvés par les musulmans à l'époque du Veld'hiv
Les choses doivent être dites les Juifs ont été protégés en terre musulmane et ont vécu pour la plupart en bonne intelligence avec les pouvoirs musulmans. Les pogroms, ne sont pas nés en terre d'Islam. Il fut une époque où les Juifs n'avaient pas le droit d'enterrer leurs morts intra muros à Paris ! .La Reconquista espagnole a jeté sur les rivages maghrébins des dizaines de milliers de Juifs qui trouvèrent refuge, purent vivre en toute quiétude en terre d'Islam. Les musulmans ont sauvé les juifs pendant la seconde guerre mondiale pendant que les adeptes du maréchal nous voilà participaient à la curée ; La Mosquée de Paris avec le recteur Benghebrit sauva plus de 1500 juifs, rappelant le sauvetage de plusieurs milliers de Chrétiens lors des émeutes de Damas fomentées par la France et la perfide Albion vers 1860 . Un tract kabyle pour ne pas être compris des allemands, demandaient aux travailleurs émigrés musulmans de sauver les enfants juifs : « Ammarache annagh » « ils sont comme nos enfants »(6) Même un site israélien en parle (7)
Il n'y a aucun juste musulman algérien à Yed Vasshem. Il n'est pas étonnant que des hommes sans honneur viennent dicter aux Musulmans comment charcuter le Coran pour être laïco- compatible ou encore crifo-compatible ! Ce texte à majorité communautariste auxquels on a adjoint celles et ceux qui à des degrés divers, par allégeance à la communauté du Crif ont signé sans mesurer toutes les conséquences . On y trouve deux imams, quelques repentis qui font allégeance pour être bien vu à la fois par le pouvoir mais aussi et surtout par le CRIF qui de près ou de loin gère d'une façon invisible une République qui apparemment ne peut rien lu refuser.
La force du CRIF gouvernement de l'ombre
Il est vrai que l''antisémitisme qui vise aussi les Arabes qui sont aussi sémites- est un fléau inacceptable. Ce qui l'attise dans les banlieues, ce sont les images des F16 Israéliens et les vetos successifs Américains pour l'impunité de l'occupant israélien qui continue à coloniser. L'importation du conflit du Proche-Orient en France et son impunité grâce au Crif est aussi une autre cause Le CRIF a demandé ouvertement au président Macron de soutenir la décision de Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale indivisible d'Israël et le CRIF Deux exemples nous permettent de comprendre la stratégie du CRIf pour arriver à ses fins. Il n'y a pas un homme politique en France, qui se suiciderait politiquement en s'en prenant aux « manœuvres » du CRIF. Nous le voyons chaque année avec le tribunal dinatoire selon le mot pour une fois juste de l'islamophobe Alain Finkielkraut. Chacun fera tout pour être invité et faire à cet effet, acte d'allégeance pour être adoubé. Pour l'histoire quand Hubert Vedrine a été pressenti pour le poste des Affaires étrangères sous la mandature de Sarkozy, le Crif a vu cela comme une déclaration de guerre et l'a fait savoir ; Résultat Sarkozy a reculé, exit Vedrine, bienvenue au sioniste Kouchner.
Pascal Boniface le directeur bien connu de l'IFRI invité par l'Institut français a eu peur pour sa vie arrivé en Israël où il a été pris )à partie par un comité d'accueil à cause de ses positions objectives concernant la cause palestinienne. Nous résumons : « ( ) Pour beaucoup, critiquer le gouvernement israélien équivaut à être antisioniste et donc antisémite. Depuis 17 ans, un mauvais procès m'est dressé alors que j'ai toujours combattu toute forme de racisme et d'antisémitisme. Mais, ceux qui ont répandu cette haine sont les mêmes qui privilégient depuis 2001 la sanctuarisation du gouvernement israélien sur la lutte contre l'antisémitisme. Cette agression a été condamnée par le Consulat de France à Jérusalem. L'ambassade de France en Israël et le quai d'Orsay sont restés muets. On peut penser que si un intellectuel français était pris à partie par certains individus mécontents de ses positions sur le Proche-Orient dans un pays du Maghreb, les réactions auraient été beaucoup plus vives. De même, si un intellectuel israélien était pris à partie à Roissy, ses agresseurs auraient été interpellés et l'ambassade d'Israël en France réclamerait des comptes à l'État français. Mais l'inverse n'est pas vrai ». (8) A suivre
*Professeur - Ecole Polytechnique Alger
1. https://www.breizh-info.com/2015/01/16/21732/nantes-entretien-exclusif-avec-m-guerroumi-responsable-de-la-mosquee-assalam
2. https://www.tsa-algerie.com/haine-des-juifs-en-france-fausses-solutions-pour-de-vrais-problemes/
3.Walid Mebarek http://www.elwatan.com/international/la-colere-noire-des-musulmans-de-france-25-04-2018-366941_112.php
4.
https://yetiblog.org/antisemitisme-instrumentalise-par-250-personnalites/
5. C..E.
Chitourhttp://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/une-verite-a-marteler-l-182110
6. Chems Eddine Chitour
http://www.legrandsoir.info/an-nom-des-valeurs-humanitaires-de-l-islam-les-musulmans-qui-ont-sauve-les-juifs-des-massacres-d-hitler.html
7. http://www.un-echo-israel.net/Des-Musulmans-sauvent-des-Juifs le 24 janvier 08
7. http://www.un-echo-israel.net/Des-Musulmans-sauvent-des-Juifs le 24 janvier 08
8. http://francefrexit.com/index.php/2018/04/26/leurope-est-une-idee-racialiste/
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Val ou le patriotisme antimusulman
·
25 avr. 2018
·
Par blaz
·
Blog : Nils Holgerson: "qu'est-ce
que tu vois de là-haut ?"
Indéniablement, les cohabitations
intellectuelles, artistiques, relationnelles entre ‘juifs’ et ‘musulmans’ sont
rares en France. Elles gagneraient à se multiplier certes, mais elles existent
et personne ne peut les nier. A elles seules, ces expériences destituent le
prisme manichéen tenant au « patriotisme antimusulman » de Monsieur
Val and Co.
Dans son identité malheureuse,
Finkielkraut mettait en garde le Français contre le péril de l’oïkophobie. La
France dénigrait ses racines, l’ennemi désigné fut alors le multiculturalisme.
Cinq ans plus tard, bazardé par P. Val, paru dans le Parisien, signé par 300
personnalités de renon, l’ennemi hier anonyme est ouvertement livré à la
vindicte populaire dans le "manifeste contre le nouvel
antisémitisme". Il s’agit du musulman, plus exactement, de l’antisémitisme
musulman.
Que Monsieur Val recompose l’histoire à
sa guise n’étonne plus personne par ici. L’homme est le reflet de ses méthodes.
Que cette « sainte-alliance » médiatique rassemble 300 signataires,
parmi eux, d’indéfectibles républicains, des hommes de vertu, des crasseux, des
teigneux, désarçonne plus gravement l’orgueil de la raison. L’adage enseigne
que « la figure de l’ennemi commun structure » bien qu’une putréfaction
fétide émane de ce régiment chargeant momentanément, (jusqu’à quand ?) le
simulacre de l’ennemi intérieur comme un seul homme. Imaginer ne fusse qu’une
seconde que des personnalités issues d’horizons aussi éloignés que la gauche
républicaine, la droite réactionnaire, de gouvernement, la chanson française
soit le fruit d’un mariage de la raison relève purement et simplement de la
démagogie. Cette alliance contre les « musulmans de France » est
stratégique. Fallacieuse sur le fonds, la tribune signée par Val contente bien
des intérêts, des arrière-pensées. Elle s’empare d’une menace réelle,
l’antisémitisme recrudescent ces derniers mois en France (qui s'inscrit comme
le rappelle Monsieur Vidal dans une diminution générale de l'antisémitisme en
France) pour imposer un essentialisme culturel, un déni de l’histoire.
La première supercherie de cette tribune,
non des moindres, revient à dédouaner l’antisémitisme européen étroitement lié
à une histoire des idées occidentale quasi fossilisée dans le disque dur de ce
pays en lui opposant l’émergence d’un antisémitisme musulman. La ficelle est un
peu grosse. Cette ruse de l’éristique arrange plutôt les « conservateurs
de droite » dont les rangs sont traditionnellement poreux à
l’antisémitisme mais désormais surpassés par les antisémites de la dernière
heure, les musulmans. Eux-mêmes semblent éberlués par l'épaisseur de l'arnaque.
Qu’un tel procédé gruge le citoyen lambda peut se comprendre vu l’état post-traumatique
ambiant. Que des intellectuels lucides s’y laissent prendre relève davantage de
la cuistrerie intellectuelle. Car, sans insister ici sur les détails,
l’antisémitisme européen préfigure une construction sémantique bâtie sur des
concepts, des méthodes rationnelles, des modes de confinement spatial,
esthétique, symbolique ayant façonné des siècles durant un imaginaire de
l’altérité sémitique. La grande faute intellectuelle de Val (lui ne comprend
rien on le sait), celle des signataires de cette tribune surtout, tient dans le
fait de dérober le musulman de l’altérité sémitique. Si l’Islam fut quelque
jour antisémite, Renan n’eût jamais pris la précaution de voir dans le
monothéisme mohamettan l’achèvement de la pensée sémitique (qu’il lie à la langue
arabe) tandis qu’il s’acharnait ailleurs à romaniser le christianisme lui aussi
d’essence sémitique comme chacun sait. Val peut instrumentaliser à son profit
l’évènementiel, la longue durée aura toujours le dernier mot sur
l’antisémitisme.
La deuxième supercherie de cette tribune
atteste d’un déni flagrant de l’héritage révolutionnaire. Déni qui considère le
citoyen français de confession musulmane comme un musulman avant d’être un
citoyen Français, ce qui renverse l’esprit républicain. Plus pernicieux, il
dénie le choix individuel du citoyen français de confession musulmane pour le
rattacher à une communauté organique dirigiste et surplombante. C'est l'Islam
hypnotique. Rappelons que la notion de « droit naturel » élevée dans
les écrits de Rousseau définit une conception faisant de chaque individu un
acteur de l’histoire. Cette dernière s’est lourdement opposée au courant
anti-Lumières défendant l’idée d’une société organique irréductible d’un destin
providentiel où l’homme n’est qu’un rouage mis au service de la nation. Dénier
la responsabilité individuelle d’actes antisémites perpétrés sur le sol
français par des citoyens français, entre autres choses, fraichement convertis
à l'Islam, c’est sombrer à une réduction fasciste de l’histoire. Le
maurrassisme n’a rien fait de plus lorsqu’il fustigeait l’alliance des
« quatre états confédérés ».
La troisième supercherie de cette tribune
revient au fait de solidariser les citoyens de confession musulmane sécularisés
dans leur grande majorité, aux actes antisémites actuels. D’abord, si cet
antisémitisme renait en France, il doit être considéré comme un phénomène
français bien que la mondialisation et les technologies numériques produisent
aujourd’hui des évènements, des liens sociaux, des idéologies ubiquistes. On ne
peut réduire un système à une partie et la partie à un tout. La question
palestinienne est aujourd’hui bien plus nouée à une communion d’avanie en
banlieue qu’à une appartenance religieuse. Comprendre cela, c’est s’écarter de
l’explication culturaliste « magique » pour saisir la
psychopathologie soudée à un monde désormais voyeuriste et interconnecté. Les
souffrances du monde sont interconnectées et la vie d'un Palestinien ne vaut
pas une clop. Les néo-convertis n’ont plus de religion car l’exhibition du monde
est devenue despotique. Elle annihile cette part d’intimité vitale à notre
espèce en la livrant à la sauvagerie puis, au contact de la culture, à la
barbarie. Telle que nous l’enseigne la philosophie, la barbarie est l’apanage
des sociétés civilisées et le couple malsain formé entre la technologie et la
mort en dit long sur les paradoxes de la modernité. Marcuse affirme quelque
part (L'homme unidimensionnel) que la rationalité instrumentale a
désormais domestiqué l’imagination. Il n’a pas tort. Le rituel exhibitionniste
de la mort s’est esthétisé par la médiation presque exclusive de la
technologie. Il n’y a rien de la tradition musulmane là-dedans. L’Islam a une
prédilection pour le symbole (ramz), telle que l’attestent son art, son
architecture, son économie affective et ses mœurs. L’exhibition de la mort est
le contraire du symbole.
Malheureusement, plus personne ne prend
le temps de penser la complexité. On en arrive à chercher une essence
totalitaire à l’Islam. Cette paresse intellectuelle fait l’affaire de bien des
hobereaux. Les uns pour des intérêts d’ordre hégémonique, d’autres pour des
enjeux électoraux, d’autres encore, pour abdiquer l’antisémitisme à la mémoire
courte, la réduire à l’analphabétisme. Si l’Islam fut totalitaire telle que
l’affirme dernièrement une sociologie « ballon de baudruche » faite
avec les pieds, les convulsions que traversent aujourd’hui le monde musulman
n’auraient aucun sens. Le totalitarisme est l’infléchissement total des
institutions au pouvoir d’un seul. Dire cela du monde musulman actuel est
simplement grotesque.
Mais la tribune de Val va plus loin. Elle
vise à destituer la solidarité musulmane du corps national par une sorte de
pétition de principe implicite. Si le manifeste des 100, aujourd’hui des 300,
se gargarise d’un rappel des valeurs démocratiques, les Français de confession
musulmane sont tout aussi concernés par l'émission de ce message. Ils le sont
d’autant plus qu’ils sont créanciers d’un mal porté en leur nom ici et ailleurs
et qu’eux-mêmes ne comprennent pas. Ils sont désamparés. C’est en cela que la
tribune de Val manifeste l’expression d’un « patriotisme
antimusulman ». Il isole les Français de confession musulmane au titre
exclusif de leur appartenance religieuse sans reconnaître en cet "autre"
dépourvu comme lui d’une tribune médiatique, l’épouvante qui hante les jours
regrettés de sa "douce" France. Le musulman est potentiellement
complice de la barbarie au titre seul de son appartenance confessionnelle et
refuser de se démarquer, refuser ce chantage démagogique, c’est se solidariser
de la barbarie.
La quatrième supercherie de cette tribune
dérobe une crasseuse essentialisation. Monsieur Val oppose juifs aux musulmans
en se servant d’une comptabilité macabre quand il ne rabâche pas les truismes
les plus abjects du « grand remplacement » en oubliant de mentionner
que des miliers de ménages "musulmans" n'aspirent qu'à fuir les
quartiers populaires malfamés mais qu'ils n'ont pas les moyens de le faire.
Etrange là encore ce philosémitisme qui s’accommode si bien du vocabulaire de
l’extrême droite.
Evidemment, dans ce jeu de dupes, les
expériences philo-sémitiques n’ont aucune place tout comme leurs corolaires,
les carrefours de la civilisation judéo-musulmane. L’on ne reviendra pas ici
sur la situation particulière des juifs marocains décrétés « citoyens
marocains » contre le péril de la déportation française il n’y a pas si
longtemps encore. On peut aussi se pencher aujourd’hui sur les rencontres
apaisées entre Français de confession musulmane et juifs de France. Benzine a
coécrit dernièrement un ouvrage avec une femme rabbin, Mme Delphine Horvilleur,
Benjamin Stora l’a précédé en partageant sa plume avec le regretté Abdelwahab
Meddeb, Rochdi Zem embarque Chaplin dans son « Chocolat », quant au Monde
diplomatique, il reste un exemple d'hospitalité entre intellectuels juifs et
musulmans.
Mais le temps se gâte. Pour les musulmans
surtout, nulle concurrence victimaire ici, rien ne sert de renverser
l’histoire. La salve des obus a enseveli 5 millions de personnes ces 50
dernières années dans le monde musulman. Sans oublier le Rwanda. Ces
morts ne vallent pas une clop. La dernière sortie d’Yvan Attal sur l’humoriste
d'origine marocaine Bouder est pitoyable. Elle révèle un état d'esprit. Comment
nommer autrement cette situation digne d’un match de boxe de Buster Keaton ?
Bouder bricole sa vie comme il peut. Il tente de faire rire des quartiers où le
deuil, l'indigence culturelle encombrent les chaumières. La noblesse d'esprit
d’Attal est vraiment exemplaire sur ce coup. Il a comme qui dirait, trouvé un
adversaire à sa taille.
Indéniablement, les cohabitations
intellectuelles, artistiques, relationnelles entre ‘juifs’ et ‘musulmans’ sont
rares en France. Elles gagneraient à se multiplier certes, mais elles existent
et personne ne peut les nier. A elles seules, ces expériences destituent le
prisme manichéen tenant au « patriotisme antimusulman » de Monsieur
Val and Co.
En guise de conclusion: les appels à la
"guerre civile", à l'inquisition en France doivent cèder au devoir
d'hospitalité. Nous n'avons d'autre choix dans nos contrées que de nous offrir
en partage.
BOUHOUT Abdelkrim, auteur d'Essai sur la
visibilité des migrants relégués, L'Harmattan, 2015
https://blogs.mediapart.fr/blaz/blog/250418/val-ou-le-patriotisme-antimusulman
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L'Union Juive Française pour la Paix
Le manifeste de la haine islamophobe
Un manifeste « contre le nouvel antisémitisme » écrit par Philippe Val a été signé par 300 personnalités. Vous avez dit antiracistes ? Qui sont ces éminents antiracistes qui nous viennent en aide ? Il y a Manuel Valls, qui expliquait en septembre 2013 que « les Roms ont vocation à retourner en Roumanie ou en Bulgarie ». Il y a Nicolas […] En savoir plusUn manifeste « contre le nouvel antisémitisme » écrit par Philippe Val a été signé par 300 personnalités.
Vous avez dit antiracistes ?
Qui sont ces éminents antiracistes qui nous viennent en aide ? Il y a Manuel Valls, qui expliquait en septembre 2013 que « les Roms ont vocation à retourner en Roumanie ou en Bulgarie ». Il y a Nicolas Sarkozy qui a passé son quinquennat à pourchasser les sans-papiers et dont un ministre déclarait à propos des Arabes : « Quand il y en a un, ça va, c’est quand il y en a plusieurs que ça peut poser des problèmes ». Il y a Laurent Wauquiez qui fait du copier-coller de Marine Le Pen sur l’immigration. Il y a Alain Finkielkraut qui déclarait sur l’équipe de France de football : « Elle n’est pas black-blanc-beur, elle est black-black-black, ce qui fait ricaner toute l’Europe ».
On pourrait continuer longtemps cet inventaire à la Prévert. Bien sûr, ces braves gens vont s’étrangler si on parle de racisme d’État ou de racisme structurel encouragé par l’État, par les administrations, par la politique de ségrégation territoriale…
L’antisémitisme en France
L’antisémitisme, c’est notre histoire intime. L’attribuer aux musulmans est une contre-vérité meurtrière. Pétain, Laval et les auteurs de la rafle du Vel d’hiv n’étaient pas musulmans. En cette période, ils disaient des Juifs ce qu’aujourd’hui certains disent des immigrés : « inassimilables », « n’ont pas vocation à vivre en France ». Prenez ce qu’on dit aujourd’hui des Noirs, des Roms, des Arabes et des musulmans et mettez à la place le mot « juif ». Vous avez les discours des années 30 et on sait où cela a mené. Simplisme et contrevérités.
Quand on parle de racisme, on ne parle pas comme au café du commerce, à moins de vouloir faire des simplifications populistes comme le Front National. D’où sortent ces chiffres abracadabrantesques : « les Français juifs ont 25 fois plus de risques d’être agressés que leurs concitoyens musulmans. 10% des citoyens juifs d’Île-de-France… ont été contraints de déménager » ? Nos statisticiens amateurs ont sûrement fait des recherches sur les violences subies par ceux qui habitent dans ce qu’ils appellent avec mépris « les quartiers ».
Le texte parle de la « radicalisation islamiste ». Nous y voilà. Toutes les études sur les auteurs d’attentats antisémites ou sur ceux qui sont partis en Irak ou en Syrie montrent que le cheminement a été majoritairement un passage par la délinquance et la prison puis la découverte d’un discours « radical ».
Épuration ethnique ?
On pourrait croire que les signataires de ce texte parlent du nettoyage ethnique de 1948 contre les Palestiniens, cause d’une guerre coloniale qui dure depuis des décennies. Eh bien non ! Ces gens confondent sciemment antisionisme et antisémitisme. Ils essaient de faire croire que tous ceux qui critiquent Israël, à commencer bien sûr par la « gauche radicale » et les « musulmans », sont des antisémites.
La guerre du bien contre le mal
Les signataires de ce texte s’inscrivent dans la logique du discours de Georges W Bush contre l’axe du mal » en 2002. Le mal pour eux, c’est bien sûr l’islam. Pas tout l’islam, pas le roi d’Arabie Saoudite. Ce régime féodal et patriarcal est dans le camp du « bien ». L’ennemi, c’est le musulman des quartiers.
L’islam, voilà l’ennemi
Nos signataires veulent expurger les textes religieux coraniques de propos inacceptables.
Pourquoi ne demandent-ils pas aussi aux Chrétiens de retirer des Évangiles le texte qui dit que les Juifs demandent aux Romains de tuer Jésus ?
Nous autres, Juifs, pouvons leur proposer d’en profiter pour nettoyer certains textes de la Torah repris par les colons passés depuis longtemps aux « travaux pratiques » sur le terrain de la Palestine : « Annihilez les Amalécites du début jusqu’à la fin. Tuez-les, et dépouillez-les de toutes leurs possessions. Ne leur montrez aucune pitié. Tuez sans arrêt, l’un après l’autre. Ne laissez aucun enfant, aucune plante, aucun arbre. Tuez leur bétail, des chameaux aux ânes ». Ils vont sûrement exiger qu’on cesse d’assimiler les Palestiniens aux Amalécites.
Vivre ensemble dans l’égalité des droits.
C’est la seule issue non barbare, en France comme au Proche-Orient. Nous refusons la division, la stigmatisation, le racisme sous toutes ses formes. Et nous serons toujours aux côtés des victimes de ce racisme.
Le Bureau national de l’UJFP
le 24 avril 2018
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Communiqué d'Une Autre Voix Juive sur
l’Appel des 300
Paris le 25/04/2018
Un collectif de personnalités vient de
publier un texte relatif à l’antisémitisme en France ; pourrions-nous en
féliciter les initiateurs ?
Sa dénonciation de l’antisémitisme en
France rejoint pour une part les déclarations successives de Une Autre Voix
Juive ; or , à peine cette thématique nécessaire est-elle abordée que ce
texte dérape. C’est pourquoi Une Autre Voix Juive ne s’y joindra pas.
Le texte évoque le «vieil antisémitisme
de l’extrême droite » mais c’est aussitôt pour évoquer ce qu’il nomme le
« nouvel antisémitisme d’extrême gauche » ; en fait le
« vieil antisémitisme » est ainsi en quelque sorte relégué à
l’arrière-cour et cela au moment même où l’extrême droite en France et dans
l’Union Européenne relève la tête de façon inquiétante; en France celle-ci ne
se réclame pas de Hitler mais de Pétain dont les lois antisémites et les
exactions sont ou devraient être dans toutes les mémoires .
Le vrai danger selon ce texte c’est le
radicalisme musulman « qui a trouvé dans l'antisionisme l'alibi pour
transformer les bourreaux des juifs en victimes de la société » : ce
propos est inacceptable ; il reprend sur le mode majeur l’identification
d’un point de vue discutable, l'antisionisme, avec l'antisémitisme, un délit
passible de poursuites judiciaires. UAVJ a constamment mis en garde contre
l'utilisation de la thématique de l'antisionisme en lieu et place de la
dénonciation de la politique actuelle de l’Etat d'Israël.
Non seulement l'Appel des 300 reprend la
propagande israélienne actuelle dans ce qu’elle a de pire, il désigne un ennemi
intérieur. C’est tellement évident que le texte chute sur une exigence absurde
relative à la modification de textes religieux. L’aggiornamento du corpus
dogmatique de l’Eglise catholique s’est produit longtemps après la tentative
hitlérienne et ne saurait faire oublier ni la responsabilité des autorités de
l’Eglise catholique au plus haut niveau ni le fait qu’en France nombreuses et
nombreux ont été nos compatriotes chrétiens qui se sont illustrés dans le
sauvetage de nombreux compatriotes juifs parmi lesquels des enfants en nombre
promis à une mort certaine et organisée.
Une Autre Voix juive s’élève avec force
contre une assimilation d’actes criminels gravissimes mais isolés avec
l’organisation de la « solution finale ». Il s'agit là d'une
expression qui frise le négationnisme.
De bien trop nombreux jeunes sont
victimes d’un ordre social qui les stigmatise, les humilie à raison de leur
origine supposée. Certains, et c'est profondément regrettable, cherchent un
bouc émissaire face aux profondes injustices qu’ils subissent. Mais il est
impossible de faire l’impasse sur le fait que les clichés qu’ils sont tentés de
véhiculer sont exactement ceux du « vieil antisémitisme » d’extrême
droite, laquelle se frotte les mains de combattre ce qu’elle appelle islamisme
jusqu’au dernier juif. Haine de l'islam et antisémitisme sont les deux faces
d’une même pièce gangrenée.
Des compatriotes juifs se sentent en insécurité
et sont amenés à partir : c'est un symptôme terrible; ces compatriotes
sont victimes de la politique qui frappe leurs quartiers depuis des
années : c’est la guerre des pauvres contre les pauvres qui à bas bruit
est assumée par cette politique de misère sociale, de précarité, d’abandon des
services publics, de la police de proximité ; c’est elle qui est en cause
avec en toile de fond une propagande délétère attisée par l’extrême droite qui
vise à identifier nos compatriotes juifs au soutien inconditionnel à la
politique israélienne contre une population identifiée à un peuple arabe dont
on dénonce sans cesse le danger potentiel en osant parler d’ »épuration
ethnique » .
La grande absente de «l'Appel des
300 » est – on ne s’en étonnera pas au vu des signataires – la politique
israélienne actuelle et sa propagande insupportable. Cette politique est le
meilleur aliment contemporain de l'antisémitisme que l'Appel prétend combattre.
Ce texte fait coup double : il
innocente les exactions permanentes d’un Etat qui se proclame indûment
porte-parole des juifs dans le monde et il innocente les responsables
politiques français et ceux de l’Union Européenne qui couvrent d’un silence
complice une telle politique.
Une Autre Voix Juive persiste : la
reconnaissance par la France de l'Etat de Palestine, et la suspension de
l’Accord de coopération entre Israël et l’Union Européenne sont les objectifs
que doivent se fixer celles et ceux qui veulent au Proche Orient une paix
juste, durable, négociée, qui fasse respecter les droits fondamentaux du peuple
palestinien par application des résolutions de l’ONU et garantisse la sécurité
de tous les peuples du Proche Orient.
Quiconque se soucie de combattre
l'antisémitisme et tous les racismes en France et dans le monde, mais ignore
les impératifs d'une paix juste et durable au Proche Orient fait preuve d'un
aveuglement coupable.
https://blogs.mediapart.fr/pascallederer/blog/260418/une-autre-voix-juive-sur-lappel-des-300
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Pour combattre l’antisémitisme, criminaliser toutes les stigmatisations
·
25 avr. 2018
·
Par Anice Lajnef
·
Blog : Le blog de Anice Lajnef
En France, les lois s’appliquent à des
personnes physiques ou morales. L’appartenance à un groupe racial,
confessionnel ou éthnique, ne doit pas nuire à l’intégrité, l’honneur ou
l’image de quiconque : il faut impérativement criminaliser la stigmatisation
qui est la mère de tous les maux.
L’antisémitisme du XIX siècle était
abjecte car des banquiers et industriels n’ont été vus que par le prisme de
leur confession : des théories stigmatisaient les juifs en bloc. Ce n’était ni
le banquier usurier ou l’industriel capitaliste qui étaient visés, dans leurs
actions individuelles, mais «le juif».
Tout jugement sur un ensemble d’individus
conduit irrémédiablement à la stigmatisation. Le critère peut être
confessionnel, racial, éthnique, peu importe. Juger un ensemble d’individus à
partir des actions d’une minorité issue de ses rangs, ou de préjugés, conduit à
la haine, qui mène aussi à la violence.
Cette haine peut conduire au pire, allant
même à l’extermination des individus stigmatisés.
Après le génocide des juifs d’Europe, il aurait été souhaitable de théoriser sur ces mécanismes qui mènent au pire, pour apprendre des erreurs du passé et éviter le pire dans le futur.
Après le génocide des juifs d’Europe, il aurait été souhaitable de théoriser sur ces mécanismes qui mènent au pire, pour apprendre des erreurs du passé et éviter le pire dans le futur.
Cependant, la démarche collective a
consisté à rester dans le cas particulier, en mettant en avant le concept
d’antisémitisme propre à un seul type d’individus : les juifs, ceux qui avaient
payé le prix des instincts les plus bas de l’homme. Il aurait été sûrement
préférable de pousser l’analyse, pour comprendre que la racine du mal était la
stigmatisation de tout un groupe d’individus, et la parole libérée qui jette à
la vindicte populaire une partie de la Nation. Toute stigmatisation est une
incitation à la haine contre un groupe, peu importe les intentions, le résultat
final est sans équivoque.
L’Histoire bégaie. Les acteurs ne sont
pas les mêmes. Mais le résultat peut mener au pire si nous n’agissons pas au
plus vite.
Il faut éteindre le feu qui prend sous
nos yeux et éviter les passions qui jalonnent les débats médiatique. Certes ce
brouhaha populiste permet aux médias une audience lucrative, mais il sème aussi
petit à petit les graines de la haine. Pour mettre un frein à cette dynamique
qui nous mènera tout droit à la guerre civile si rien n’est fait, il est urgent
de criminaliser la stigmatisation : tout jugement péjoratif sur un ensemble
d’individus jugé homogène.
Toutes « confessionnalisations », «
ethnicisations », « racialisations », d’agissements ou de crimes, doivent être
pénalisées lourdement par nos lois. Beaucoup de troublions médiatiques se
retrouveraient au chômage du jour au lendemain.
Mais la société civile y gagnerait en
justice sociale, mais surtout en paix civile. La meilleure façon de mettre en
place le « plus jamais ça », est de légiférer contre les semeurs de haines,
ceux qui pointent sur un groupe, tous les maux de la société.
Le manifeste contre l’antisémitisme des
250 personnalités paru le 22 Avril 2018, est particulier car il
confessionnalise un crime, l’antisémitisme, en prétendant défendre la
stigmatisation contre un groupe confessionnel, les juifs. Ce manifeste est un
comble : il stigmatise les musulmans, pour combattre la stigmatisation des juifs.
Dans le monde idéal, ce manifeste serait hors-la-loi.
Une telle loi aurait aussi l’avantage de
nous débarrasser de tous les hommes et les femmes qui vivent du commerce de la
haine : certains hommes et femmes politiques, des organes médiatiques, des polémistes,
des soi-disant comiques... Mais pour atteindre cette paix des sages, il faut
une prise de conscience collective, une volonté politique, et une concession de
la part des médias pour qui l’apaisement des débats risque de coûter cher.
https://blogs.mediapart.fr/anice-lajnef/blog/250418/pour-combattre-l-antisemitisme-criminaliser-toutes-les-stigmatisations
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LA FRANCE EST-ELLE ANTISEMITE ?
·
25 avr. 2018
·
Par Rabia Franoux Moukhlesse
·
Blog : Le blog de Rabia Franoux
Moukhlesse
Je me dois ici de vous rappeler que tous
les musulmans ne sont pas arabes et que tous les juifs ne sont pas hébreux mais
bon, nous ne sommes plus à une approximation près.
A FRANCE EST-ELLE ANTISEMITE ?
Encore une fois l’évènementiel guide la
réaction et la réflexion. Après un énième acte anti juif, des intellectuels,
des politiques actuels et anciens, des gens des arts, enfin tout ce qui compte
à signer cette tribune, cet appel et dans le cadre des dénonciations des actes
barbares, des mentalités haïssables et du mieux vivre ensemble, je ne peux
qu’acquiescer à cette initiative.
Ceci étant, il y a un point qu’il me faut
évoquer. La langue de Molière est fantastique et il existe une Académie des
immortels qui est là pour la défendre et la faire évoluer. Pour nous les
petites gens qui n’avons pas de culture, les gens qui s’en croient dotée ou qui
préfèrent utiliser tel ou tel mot pour une meilleure compréhension ou pour
mieux vendre leurs arguments, ces gens ont tendances à utiliser des mots chocs
ou d’acceptation commune moderne. Ainsi, l’antisémitisme dans son acceptation
actuelle concerne tous les actes faits contre les tenants de la religion juive.
Il me faut quand même préciser que les sémites, si l’on reprend le
dictionnaire, désigne tous les peuples ayant une parenté de la langue et en ce
sens on parle bien de l’hébreu, de l’araméen (langue morte aujourd’hui) et de
l’arabe. Et oui, si l’on veut être précis le terme sémite regroupe les hébreux
et les arabes. Et comme en France on confond beaucoup de chose, cela veut dire
qu’être antisémite c’est ne pas aimer les gens de confession juive et les
arabes de toute confession. Seulement voilà, on ne mélange pas les chiffons et
les torchons, donc pour les actes anti-juifs on parle d’antisémitisme et
lorsque l’on pense aux arabes, on parle d’islamophobie.
Je me dois ici de vous rappeler que tous
les musulmans ne sont pas arabes et que tous les juifs ne sont pas hébreux mais
bon, nous ne sommes plus à une approximation près.
Donc la vraie question est de savoir si
la France est anti juifs ? A cette question il faut malheureusement répondre
oui. Mais qui est anti juif en France. Et bien nous pouvons classer dans cette
catégorie les ultra-catholiques qui pensent encore que les juifs ont crucifié
le Christ, les fachos adeptes de la théorie des races qui placent les juifs
dans les derniers rangs de leur échelle, les musulmans intégristes qui ont une
lecture primaire voire primale du Coran, les musulmans loulous des banlieues
qui confondent la religion juive avec la politique de l’Etat d’Israël vis-à-vis
de leurs soit disant frères de Palestine et enfin toute une partie
franchouillarde de la France qui pense que les juifs et les francs-maçons sont
toujours aux commandes de l’Etat et le font au détriment des pauvres petits
français. Il est possible d’appartenir à plusieurs catégories. Donc en ce sens,
il faut bien reconnaître et les chiffres le prouvent que les français sont
anti-juifs. Et que l’on ne vienne pas minimiser la partie français de souche au
profit de la partie immigrée de seconde ou troisième génération car la France
d’il y a 70 ans a bien prouvé sa nature anti juive lorsqu’il y avait 40
millions de Pétainistes ou à travers son histoire plus ancienne lorsqu’il
s’agissait d’organiser des expulsions ou des buchers de juifs quand Roi ne
voulait pas honorer ses dettes ou que le peuple avait besoin d’une bête
expiatoire pour justifier une grande épidémie ou une mauvaise récolte.
L’autre partie de la question est de
savoir si la France est islamophobe ? Et là, je ne peux que malheureusement
acquiescer à nouveau. La faute à qui ? Et bien pour partie aux médias qui
représentent les musulmans comme des terroristes assoiffés de sang depuis les
attentats de 2001, pour partie à l’Etat et aux élus qui depuis les grandes
vagues d’immigrations des années 60 ont parqués les fils de cette main d’œuvre
peu chère en les ghettoïsant dans les grands ensembles et en leur faisant
comprendre qu’ils sont des français de seconde zone et, pour être honnête et
dresser un panorama assez complet en peu de ligne, à cause de l’Islam lui-même
et de la possibilité qu’il laisse à n’importe qui de se faire proclamer voire
de s’auto proclamer Imam c’est-à-dire prêcheur, enseignant et expliquant d’un
texte complexe dont même les intellectuels ont du mal à pratiquer
l’interprétation et l’exégèse car qui aujourd’hui a entendu parler de l’Islam
des lumières ? A cela se rajoute les plus radicaux et fanatiques qui présentent
un Islam politique et revendicatif qui devrait s’imposer à tous les peuples de
la terre.
Dans ce contexte, le judaïsme n’ayant pas
vocation à s’étendre outre mesure car le peuple élu n’a qu’un nombre limité de
place, les protestants étant méfiants par nature car la dernière fois qu’ils se
sont dévoilés ils se sont fait massacrés et les catholiques ayant
définitivement abandonnés les croisades en Europe au 15ème siècle et n’ayant
pas été en odeur de sainteté avec les institutions françaises depuis, on
comprend bien que cette religion qui voudrait s’imposer est insupportable pour
le français « normal » que l’on ne doit pas emm… avec des histoires de religion
dont il s’est affranchi il y a pas mal de temps et qui ne l’intéresse guère.
Donc, oui, la plupart des gens sont anti-musulmans et il n’y a que quelques
intellectuels et activistes qui se battent encore pour faire bouger les
curseurs des possibles de cette religion.
Donc oui, la France est bien antisémite
dans son acceptation anti religion juive et anti religion musulmane. C’est un
fait, c’est indéniable. C’est peut-être pour cela qu’elle s’est dite à un
moment laïque. Et si cette même République se veut égalitaire comme elle le
proclame haut et fort, cela implique qu’elle doit gérer l’antisémitisme dans sa
compréhension globale. Nul aujourd’hui ne devrait être violenté ou subir des
actes de par son appartenance religieuse c’est indéniable et les vrais juifs
que je connais et que j’aime ont bien fait la différence entre leur religion et
les agissements de l’Etat d’Israël. De la même façon les bons musulmans que je
connais et que j’aime font bien la différence entre leur pratique, leur
acceptation du texte et les ahuris qui se disent proches d’Allah.
C’est peut-être en communiquant mieux sur
ces points et sous l’égide d’une République qui ne prend pas partie au lieu de
pratiquer toujours le deux poids deux mesures mais qui applique les lois que la
France retrouvera son vivre ensemble quel que soit la confession de ses
citoyens que nous apporterons un début de solution à l’antisémitisme.
https://blogs.mediapart.fr/rabia-franoux-moukhlesse/blog/250418/la-france-est-elle-antisemite
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VIDEO
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Qu’alliez-vous faire, Annette, dans cette galère ?
·
26 avr. 2018
·
Par dominique vidal
·
Blog : Dominique Vidal
Annette Wieviorka, je vous connais
depuis des décennies et j'ai pour vous sincèrement beaucoup d'estime
intellectuelle : on compte sur les doigts d’une main les meilleur(e)s
historien(ne)s de la Seconde Guerre mondiale et du génocide nazi. Mais...
https://www.franceinter.fr/emissions/le-telephone-sonne/le-telephone-sonne-24-avril-2018
Vous avez, il est vrai, joué de malchance : le premier auditeur vous a interrogés sur le conflit israélo-palestinien. « Stupéfiant », répondez-vous : « Ce n’est pas le sujet. Nous parlons du nouvel antisémitisme et non d’Israël et de l’antisionisme. » Sauf que votre Manifeste parle bel et bien de l’antisionisme, qu’il amalgame scandaleusement avec l’antisémitisme. Sauf que nombre de vos camarades de signature nous expliquent depuis des années que l’antisémitisme tient à l’« importation du conflit israélo-palestinien ». À cette notion d’importation près (un rien complotiste s’agissant d’un pays qui compte, en Europe, le plus de Juifs et de musulmans et se passionne donc naturellement pour le Proche-Orient), il est indéniable que les massacres de Gaza, par exemple, suscitent plus de rage antisémite que tous les Versets contestés du Coran. Surtout quand des dirigeants irresponsables du CRIF justifient les crimes de Tsahal au nom des Juifs de France…
Ces sourates, parlons-en. Votre interlocuteur met « au défi » quiconque d’en citer une seule qui appelle au meurtre des juifs ou des chrétiens. Et d’expliquer l’effort nécessaire de pédagogie pour replacer ces textes dans leur contexte et travailler sur leur interprétation. Un peu larguée, vous avouez: « Je suis très très ignorante en matière de Coran. Je ne vais pas en discuter.» Mais, vous fait-on remarquer, vous avez signé un Manifeste qui en parle ? Alors vous soufflez : « On signe un Manifeste qui est très long. On le signe globalement. Sur chaque point, on pourrait discuter. » Donc c’était un point secondaire ?
Votre épreuve ne s’arrête pas là. Le débat évoque les religions qui, comme le judaïsme ou l’islam, n’ont pas de clergé, pas de Pape. Impossible d’imaginer un Vatican II juif ou musulman. « C’est vrai, reconnaissez-vous, l’islam ne fonctionne pas comme l’Église. Mais les musulmans doivent avoir de l’imagination et trouver leur voie propre… comme Vatican II. »
Votre interlocuteur écartant toute comptabilité morbide des victimes des violences, vous renchérissez : « Pas de comptabilité. » Mais vous ajoutez aussitôt : « Depuis 10-15 ans, les meurtres n’ont visé que des Juifs. » Poliment, Anouar Khbibech vous fait observer – pour la troisième fois, mais jusqu’ici vous ne l’aviez même pas entendu - que Merah a commencé par assassiner un soldat musulman. « Oui, dites-vous, mais dans une série qui aboutissait à tuer des enfants juifs. On n’a pas égorgé un imam dans un mosquée, mais on a égorgé le Père Hamel. On n’a pas tué des enfants musulmans dans une école musulmane. Il y a quand même quelque chose. » Visiblement, chère Annette, vous avez pris de longues vacances à l’étranger en 2015 et 2016. Sinon, vous sauriez qu’un très grand nombre de victimes du Bataclan ou de Nice, entre autres, étaient musulmanes…
Et pourtant vous parlez, peu après, de « terrorisme intérieur et extérieur ». Et vous reprenez : « Il faut comprendre ce qui se passe. Je n’ai pas de réponses. » L’auditeur naïf doit se demander alors ce que vous faites au micro de France Inter et pourquoi vous avez signé le Manifeste. « Que se passe-t-il, poursuivez-vous, pour qu’une frange se revendiquant de l’islam devienne meurtrière. Y a-t-il un lien ou non ? Comment agir si on ne comprend pas ? » Bref, vos formulations se font plus prudentes.
Hélas, un auditrice protestante conteste votre analyse. Vous lui rappelez alors – elle les avait certainement oubliés - les massacres perpétrés contre les Huguenots en France. Et ce souvenir vous arrache une conclusion lamentable. Qui commence bien « Il n’y a pas de religion meurtrière. » Et finit mal : « Mais il y a des périodes où des religions deviennent meurtrières. » Des religions...
Pas un mot de Daech, pas un mot de la ghettoïsation des banlieues, pas un mot des discriminations et du racisme, pas un mot des préjugés racistes et antisémites, pas un mot de l'éclatement des familles et de l'effondrement de l'autorité paternelle, pas un mot de la délinquance petite et grande, pas un mot des crimes crapuleux, pas un mot des troubles psychiatriques qui se généralisent. N'importe quel psy, n'importe quel sociologue, n'importe quel animateur vous diraient pourtant que tous ces ingrédients - et d'autres - entrent, autant que la religion et l'idéologie, dans le terreau de la violence en général et de la violence raciste en particulier - y compris antisémite.
Mon souhait le plus vif, chère Annette : retournez écrire vos excellents livres d’histoire et laissez les Manifestes politiciens aux politiciens…
D. V.
https://blogs.mediapart.fr/dominique-vidal/blog/260418/qu-alliez-vous-faire-annette-dans-cette-galere
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En tant que juive
·
24 avr. 2018
Pour répondre au « Manifeste
contre le nouvel antisémitisme », rédigé par Philippe Val, publié dans Le
Parisien du dimanche 22 avril et signé par près de 300 personnes, je
m’exprimerai, et c’est la première fois, en tant que juive. Ce n’est pas de
gaité de cœur, tant je ressens cela comme une réduction de moi-même.
ar si c’est une part de mon identité, de
l’histoire et de la mémoire dont j’ai hérité, c’est une part seulement. Certes,
j’ai beaucoup écrit sur la mémoire juive, ses aléas et son histoire, à une
époque où cela n’allait pas de soi et en me sentant bien sûr concernée. Mais
j’ai toujours revendiqué une identité plurielle, française, juive, parisienne
(j’aime tant cette ville), femme de ma génération faite d’expériences et de
souvenirs partagés, socio-anthropologue attirée par la diversité du monde et
bien d’autres choses.Rien d’exceptionnel, nous sommes tous et toutes pluriel(e)s. Si je me résous à m’exprimer de cette façon, malgré tout, c’est parce qu’il y a urgence. Et parce que je sais que cette parole peut être (un peu) plus audible, (un peu) plus acceptable, ce qui justement me désole. Car cela, déjà, est un symptôme : ce manifeste intimide et délégitime la critique, a fortiori si elle vient d’une personne non juive, et plus encore d’une personne de culture ou de foi musulmane. Comment oser discuter un manifeste qui défend les Juifs face aux attaques qu’ils subissent ?
Nul hasard d’ailleurs si dans les quelques textes courageux que j’ai pu lire, dont celui, formidable et douloureux, de Claude Askolovitch, il faut commencer par acter qu’il y a de l’antisémitisme dans ce pays et que des crimes antisémites y ont été perpétrés. Cette réalité est indéniable et grave. Mais l’on sent bien aussi que c’est un préalable indispensable pour ne pas être soupçonné de la minorer, par complaisance ou, au mieux, naïveté. C’est sans doute aussi pour ce préalable que certain(e)s ont signé, sans trop réfléchir (du moins faut-il l’espérer). Or, ce manifeste est pernicieux.
D’une part, parce qu’il enrôle le combat contre l’antisémitisme dans une revendication nationaliste et une captation identitaire dont il n’a que faire. Et d’autre part, parce qu’il agite la vieille et dangereuse thématique de la « concurrence des victimes », en opposant deux populations, au nom d’une hiérarchie des préjudices. D’un côté la lutte contre l’antisémitisme, juste, nécessaire, dans l’ombre portée de la Shoah. De l’autre la dénonciation, jugée exagérée, voire injustifiée, de l’islamophobie, qui « dissimule les chiffres du ministère de l’Intérieur : les Français juifs ont 25 fois plus de risques d’être agressés que leurs concitoyens musulmans. »
Las, « la bassesse électorale calcule que le vote musulman est dix fois supérieur au vote juif. » Selon cette comptabilité, cela pourrait empirer, d’où cet « avertissement solennel » selon lequel « La France sans les Juifs, [ne serait] plus la France ». Et son envers subliminal, mais explicite chez quelques signataires de ce manifeste : la France submergée par le « grand remplacement » musulman, ne serait plus la France. Les uns enrichissent le pays, son histoire et sa culture, ce qui est indéniable et a été longtemps nié. Les autres l’envahissent, et cette symétrie inversée est infâme, niant qu’à leur tour ils l’enrichissent.
Si le poids des chiffres ne suffit pas, on y ajoute le poids des mots : il s’agit « d’une épuration ethnique à bas bruit au pays d’Émile Zola et de Clemenceau ». Bref, il y a de vraies victimes, juives, et de fausses victimes, musulmanes, parmi lesquelles se recrutent les bourreaux. Ce face à face mortifère ne peut qu’attiser les peurs et les haines en prétendant les combattre. Le péril est là.
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Contre l’antisémitisme, avec détermination et sang-froid
·
23 avr. 2018
Je partage avec les signataires du
Manifeste des 300 une seule conviction : la lutte contre l’antisémitisme
constitue un impératif moral et politique majeur, dans une société encore
rongée par toutes les formes de racisme. Il en va de l’avenir de la démocratie
et donc de la République. Mais je ne suis d’accord, ni avec leur analyse du
phénomène, ni avec leur démarche pour le combattre.
Et pour cause : ils
ignorent complètement les indications que nous donne, depuis des années, la
Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), avec laquelle,
je le rappelle, les institutions et organismes communautaires juifs collaborent
pourtant étroitement. Le « Rapport sur la lutte contre le racisme,
l’antisémitisme et la xénophobie », que la Commission publie chaque année,
met à la fois à notre disposition un état de l’opinion et une évaluation des
violences perpétrées.
Quelles leçons se
dégagent du travail des sondeurs, des sociologues et du ministère de
l’Intérieur ?
- Que l’idéologie
antisémite n’a cessé de reculer parmi nos concitoyens depuis la Seconde Guerre
mondiale, au point d’y devenir marginale : 89 % d’entre eux
considèrent les Juifs comme « des Français comme les autres »,
soit une proportion supérieure de 8 points à celle observée pour les musulmans
et de 30 points comparée à celle des Roms ;
- Qu’en revanche, les
préjugés antisémites, bien qu’en diminution, restent influents, si bien que 35
% des Français pensent encore que « les Juifs ont un rapport particulier à
l’argent », 40 % que, « pour les Juifs français, Israël compte
plus que la France » ou 22 % que « les Juifs ont trop de pouvoir »;
- Que les violences
anti-juives, après un pic au début du siècle, ont connu depuis une décrue
progressive, confirmée en 2017. Les violences antimusulmans, elles, ont culminé
en 2015, alimentées par l’horreur des attentats terroristes, mais reflué elles
aussi depuis. Rapportés au nombre de personnes concernées, les chiffres
montrent que les Juifs constituent la principale cible des actes racistes, par
ailleurs moins nombreux mais plus violents ;
- Que, pour la première
fois depuis la Seconde Guerre mondiale, des Juifs ont été assassinés, en tant
que tels – indépendamment des attentats terroristes comme ceux de la synagogue
de la rue Copernic ou de la rue des Rosiers. Si, certains de ces meurtres sont
indiscutablement antisémites, comme ceux de Mohamed Merah ou d’Amedi Coulibaly,
d’autres imbriquent haine des Juifs, motivations crapuleuses, voire signes de
maladie mentale ;
- Que cet antisémitisme
– idéologie, préjugés, violences – est le fait de groupes divers. S’il reste
caractéristique de l’extrême droite, y compris du Front national dont la
« dédiabolisation » n’a pas éradiqué le vieux racisme anti-juif et le
négationnisme, cet antisémitisme s’est aussi développé parmi les enfants de
l’immigration. Mais une sociologue comme Nonna Mayer met en garde contre le
concept de « nouvel antisémitisme », inspiré des thèses de
Pierre-André Taguieff qui, écrit-elle, « voit un antisémitisme masqué
derrière la critique d’Israël et du sionisme, au nom de l’antiracisme et des
droits de l’homme, et porté tant par l’islamisme radical que par les idéologies
tiers-mondistes d’extrême gauche ».
Ces analyses, on en
conviendra, tranchent avec le simplisme et l’alarmisme du Manifeste de Philippe
Val. Tout ce qui est excessif ne compte pas, disait Talleyrand : comment
peut-on parler, à propos des Juifs français, de « terreur » ou
d’« épuration ethnique » ? Mais surtout les pistes que
suggèrent les signataires sont de fausses pistes, le plus souvent
dangereuses :
- Faire du seul islam
radical la cause de la violence antijuive, c’est ignorer une partie importante
du phénomène. D’abord parce que, je l’ai rappelé, l’antisémitisme de l’extrême
droite reste vivace et souvent violent. Ensuite parce que, même parmi les
jeunes de banlieue, la violence – comme d’ailleurs le djihadisme – n’a pas
qu’une dimension idéologique ou religieuse : elle s’enracine aussi, n’en
déplaise aux signataires, dans la désespérance sociale, elle-même produite par
les discriminations économiques, sociales et ethniques qui les frappent dans
notre société. Autrement dit, la vigilance et la répression nécessaires doivent
aller de pair avec des efforts d’intégration considérables. Pour que la
République se réconcilie avec sa jeunesse, y compris immigrée.
- Dénoncer « l’antisémitisme
d’une partie de la gauche radicale qui a trouvé dans l’antisionisme l’alibi
pour transformer les bourreaux des Juifs en victimes de la société » (sic),
c’est tout simplement infâme. Mais d’où sort ce fantasme d’une extrême gauche
antisémite en France aujourd‘hui ? De qui parle-t-on ? Des communistes ?
Des insoumis ? Des écologistes ? Des trotskistes ? Des chrétiens
de gauche ? Aucun de ces partis, groupes ou mouvements n’a jamais flirté,
de près ou de loin, avec la haine des Juifs ! Au contraire, c’est de ce
côté-là que les Juifs ont trouvé, à l’heure du plus grand péril, leurs
défenseurs les plus héroïques. Faut-il rappeler qu’en France, contrairement à
la plupart des autres pays occupés, la solidarité populaire, des communistes
aux gaullistes en passant par les chrétiens, a permis à près de quatre
cinquièmes des Juifs d’échapper au génocide ?
- Infâme, cette
affirmation relève aussi de l’analphabétisme historique. L’antisémitisme est un
délit, poursuivi à juste titre, comme toutes les formes de racisme, par les
lois, anciennes et récentes, de la République. L’antisionisme, lui, est une
opinion, selon laquelle Theodor Herzl a eu tort de considérer les Juifs comme
inassimilables et de prôner en conséquence leur rassemblement dans un État qui
leur soit propre. L’immense majorité des Juifs, jusqu’en 1939, s’est opposée au
projet sioniste : à cette date, la communauté juive de Palestine ne
représente que 2,5 % de la population juive mondiale. Après le génocide
nazi, des centaines de milliers de survivants, qui n’avaient pas où aller, faute
de visas américains, ont choisi de rebâtir leur vie en Israël. Il en ira de
même pour les Juifs des pays arabes, puis pour les Juifs soviétiques, venus par
nécessité plus que par choix sioniste. Et, malgré ces vagues d’immigration, la
majorité des Juifs vivent ailleurs qu’en Israël, et ils s’intègrent si bien en
Amérique et en Europe que la majorité d’entre eux y concluent des mariages
« mixtes ». En quoi ces rappels historiques relèveraient-ils de
l’antisémitisme ?
- Avec la conclusion du
Manifeste, on sombre dans l’absurdité pure et simple. Les signataires demandent
que « les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des
juifs, des chrétiens et des incroyants soient frappés d’obsolescence par les
autorités théologiques, comme le furent les incohérences de la Bible et
l’antisémitisme catholique aboli par Vatican II, afin qu’aucun croyant ne
puisse s’appuyer sur un texte sacré pour commettre un crime ». J’avoue
avoir du mal à imaginer que tant de personnalités ignorent un fait
simple : si l’Église catholique a pu renoncer dans son discours à la
dénonciation des Juifs comme un « peuple déicide »,
responsable de siècles de massacres en Europe, c’est qu’elle s’organise autour
d’une structure hiérarchique, avec un clergé, un pape et des conciles. Tel
n’est pas le cas de l’islam, qui ne dispose pas d’« autorités
théologiques » à même de modifier des versets du Coran. Il en va
d’ailleurs de même du judaïsme, où personne n’est en droit de censurer les
commentaires du Talmud contre les goyim et encore moins les nombreux
appels au génocide que contient l’Ancien Testament – et que pourtant des
dirigeants, religieux et politiques, invoquent pour justifier le sort fait aux
Palestiniens. Si les Livres saints étaient amendables, ça se saurait !
- Voilà, pour conclure,
le grand absent du « Manifeste » : le conflit
israélo-palestinien. Cette lâcheté, sans doute nécessaire pour bricoler un
groupe aussi hétéroclite, est absurde. Qui osera le nier ? Les massacres
de ces dernières semaines contre les manifestations de Gaza, justifiés par une
partie des signataires, provoquent par exemple plus d’antisémitisme que tous
les versets dénoncés du Coran. De quand date la dernière explosion de violences
contre les Juifs dans notre pays, sinon de la Seconde Intifada et de sa
répression brutale ? Et la droite et l’extrême droite israéliennes nous
annoncent bien pire, avec l’annexion annoncée de la Cisjordanie, l’enterrement
de la solution des deux États et la perspective d’un seul État où les
Palestiniens annexés avec leur terre n’auraient pas le droit de vote… La paix
au Proche-Orient ne fera pas disparaître miraculeusement l’antisémitisme, mais
elle y contribuera décisivement : raison de plus pour s’engager sur ce
chemin.
Un dernier mot :
hiérarchiser les racismes, c’est tomber dans le racisme. Et hiérarchiser le
combat contre le racisme, c’est le saboter. Cette lutte indispensable, nous la
remporterons ensemble ou jamais. Avec détermination et sang froid.
Dominique Vidal.
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L'islamophobie ne sera jamais une réponse à l'antisémitisme
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23 avr. 2018
Il n’y a pas «d’antisémitisme
musulman», tout comme il n’y a pas «d’islamophobie juive». Il y a par contre
des comportements et des actes antisémites, parmi lesquels certains sont commis
(aussi et entre autres) par des musulmans. Et il y a des comportements et des
actes islamophobes, parmi lesquels certains sont commis (aussi et entre autres)
par des juifs...
L’expression politique d’un racisme totalement assumé.
Le temps que nous traversons est de ceux-là et le « manifeste contre le nouvel antisémitisme » paru ce dimanche, rassemblant plus de 300 signatures de personnalités, où il est question « d’épuration ethnique » des Juifs et « d’obsolescence » de versets du Coran, en est une bien coupable culmination.
Puisqu’il n’est apparemment plus question d’avoir un débat rationnel dans ce moment de rapports de force, de désaveux, de clivages et de confrontations, qu’il nous soit tout de même permis de faire quelques remarques et rappels d’évidences pour des historiens qui, pour leur salut, n’ont pas encore l’âge de lire ces lignes, avec l’espoir de les voir un jour rire avec tendresse de ces parents dont l’amnésie (souvent) consentie ne les empêchait pas de crier « plus jamais ça ».
1) Il n’y a pas « d’antisémitisme musulman », tout comme il n’y a pas « d’islamophobie juive ». Il y a par contre des comportements et des actes antisémites, parmi lesquels certains sont commis (aussi et entre autres) par des musulmans. Et il y a des comportements et des actes islamophobes, parmi lesquels certains sont commis (aussi et entre autres) par des juifs. Je parle ici des deux groupes que l'on cherche à antagoniser, mais cela est valable quelle que soit l'appartenance. C’est une considération strictement statistique et non un déterminisme causal ou prédictif. L’ensemble des travaux universitaires et des études de terrain confirme cela avec constance. Il n’y a rien dans l’appartenance musulmane qui conditionne et prédestine une personne à des comportements d’intolérance, d’exclusion ou de violence envers des juifs (ou toute autre personne), tout comme il n’y a rien dans l’appartenance juive (ou toute autre appartenance) qui conditionne automatiquement les personnes à la violence, à la colonisation ou au rejet de l’autre. Il est confondant de devoir le rappeler (notamment à quelques philosophes) mais les êtres humains étant doués de raison et du libre arbitre, leurs comportements, leurs déclarations et les idées qu’ils propagent relèvent de leur responsabilité individuelle. Pas de celle des millions (ou milliards) de personnes qui auraient l'heur de partager, par ailleurs, leur religion ou leur couleur de peau. Il n’y a pas de déterminisme ethnoculturel ni religieux des comportements fautifs. Les faits sont têtus et les mensonges que contient ce manifeste, même répétés 300 fois, ne deviendront pas pour autant une vérité.
2) Notre système juridique, dans sa philosophie comme dans son application, est basé sur la notion de responsabilité individuelle. Les seuls responsables d’un crime (fut-il haineux) sont ceux qui le commettent (la notion de « complicité » d’un acte est comprise et précisément décrite dans ce dispositif). Plus vite on comprendra cela, mieux on sera armés, du point de vue de l’analyse causale comme des moyens de prévention et de répression, pour répondre aux enjeux de la violence contemporaine, notamment lorsque ses motifs sont racistes ou politiques. Il est honteux de devoir rappeler (notamment à des personnes qui ont été ministres et, à ce titre, eussent gagné à se familiariser avec les lois du pays et les traités ratifiés par la France) une notion répétée dans une multitude de textes, nationaux et internationaux et parfaitement résumée dans la déclaration interministérielle de l’OSCE à Belgrade, le 4 décembre 2015, ratifiée par les 57 pays membres de l’organisation (dont la France) :
« Le terrorisme et l’extrémisme violent ne peuvent ni ne doivent être associés à aucune race, ethnicité, nationalité ou religion »
Par conséquent, il serait bon, soit que nos contempteurs du « nouvel antisémitisme » assument leur constant rejet des législations et textes en vigueur en matière de libertés fondamentales et de droits humains, soit, à minima, qu’ils les lisent…
3) L’antisémitisme est une réalité contemporaine dont la nature, à plusieurs reprises meurtrière, est d’une constante actualité. En huit années de travail sur les questions de racisme(s), je n’ai jamais croisé une personne pour sérieusement contredire cette évidence. Qui peut dire aujourd’hui que cette question est prise à la légère par les pouvoirs publics et les instances en charge de la lutte contre le racisme ? Cette réalité et les formes opérantes qu’elle recouvre (discours de haine et insultes antisémites sur internet partout en Europe, mobilisations politiques – notamment, mais pas exclusivement, en Europe de l’Est -, actes et meurtres antisémites, y compris se revendiquant de mouvements djihadistes) fait l’objet de moyens de prévention et de répression constamment accrus, à juste titre. Ces moyens s’inscrivent dans des dispositifs juridiques censés adresser tous les motifs haineux (portant sur les critères protégés d’appartenance. Lire ce rappel du Défenseur des Droits pour en comprendre la portée). Des moyens supplémentaires spécifiques ont été déployés dans plusieurs pays européens, qu’il s’agisse des budgets alloués à la lutte contre l’antisémitisme (allant jusqu’à un facteur variant de 1 à 50 selon les pays, comparés aux autres formes de racisme) ou de la prise en compte politique au plus haut niveau de l’Etat, avec le risque parfois de construire les communautés juives comme des communautés d’exception, transformant la menace (bien réelle) de la violence haineuse les visant en une condition sociale et politique les assignant et les exposant. Aucun de ces dispositifs, notamment ceux qui sont les plus efficaces en prévention comme en répression, ne prévoient ni ne nécessitent une lecture essentialiste ou raciste du profil des assaillants, dont on observera (attention au choc) qu’ils ont des motivations, des appartenances et des passages à l’acte très différents. Pourquoi ? Parce que du point de vue de la causalité criminelle et haineuse, l’appartenance ethnoculturelle ou religieuse d’un agresseur n’explique rien à priori. Ce sont ses dynamiques, ses déclarations et surtout ses choix personnels, qui portent et expriment la causalité et la responsabilité de ses actes. Il n'y a donc qu'un seul et même antisémitisme, hier comme aujourd'hui, qui construit les juifs comme un problème puis justifie la haine et la violence qui les vise.
4) Ce manifeste est explicitement raciste. Le racisme, c’est de construire la différence de l’autre comme un problème. C’est de se servir de son appartenance, de sa couleur de peau, de sa nationalité ou de sa religion pour l’y assigner, le stigmatiser, le mettre à l’index en lui faisant porter plus que le poids de ses actes et de ses choix, soit très précisément ce à quoi se livrent, sans la moindre honte, les signataires de ce texte. En liant le passage à l’acte antisémite à l’appartenance religieuse des personnes comme un déterminisme, puis en faisant peser la responsabilité de leur prévention sur les épaules des musulmans, sommés d’escamoter des morceaux de leur livre sacré pour plaire à ces inquisiteurs de plateaux, ils franchissent une double ligne rouge. D’une part, ils s’ingèrent explicitement dans la liberté de culte et d’organisation des communautés musulmanes, seules libres de définir ce en quoi elles croient ainsi que le lien qu’elles entretiennent à leurs textes sacrés, qui ont depuis leur révélation fait l’objet d’une immense pluralité d’interprétations et d’exégèses, reflétant au passage la diversité et la vitalité de ces communautés. D’autre part, ils identifient un critère protégé (la religion d’appartenance supposée) comme un facteur causal de comportements criminels (les actes antisémites), soit la définition même d’un stéréotype raciste. Il est enfin utile de relever que la majorité des signataires de ce manifeste de la honte se revendiquent d’un universalisme de tartuffes : ils ne « voient pas les couleurs ni les religions » ; sauf pour les mettre en cause.
Ceux-là mêmes qui, au nom de l’universelle république, passent leur temps à accuser les associations antiracistes de tous les maux dès qu’elles s’attachent à lutter spécifiquement et efficacement contre la négrophobie, l’islamophobie ou la romaphobie, en prétextant leur rejet des modes d’organisations autonomes, sont soudainement libérés de leur cécité lorsqu’il s’agit de faire une analyse raciste et/ou religieuse des profils criminels… Car en fait et selon eux, les couleurs et les religions n'existent pas lorsqu'elles sont des choix d'appartenance consentis, mais deviennent opérantes lorsqu'elles sont des catégories d'assignation et de mise en cause. Soit précisément la construction socio-politique d'une appartenance problématique, que l'on nomme usuellement racisme.
Enfin, puisque l’éducation est répétition (même quand les cancres font semblant de ne pas entendre), il convient de rappeler pour la énième fois que l’islamophobie n’est pas la critique de l’islam en tant que religion ou idéologie (une critique dont chacun pourra juger de la rareté dans la France de 2018), mais rien de moins (ni de plus) qu’une forme de racisme contemporaine, visant des personnes à raison de leur appartenance, réelle ou supposée, à la religion musulmane et qui se traduit par des actes (qui tombent sous le coup de la loi, la religion étant un critère protégé) et des discours.
5) L’analyse sur un terrain purement théologique de l’antisémitisme et le lien qui est fait avec l’islam est une faute qui dénote une méconnaissance totale du fait religieux musulman.
D’abord parce qu’elle omet, comme nous l’avons montré, que ce sont les croyants qui construisent leur rapport au religieux et que les textes, sans interprétation et compréhension personnelle de la part des personnes qui se les approprient, n’ont pas de puissance performative.
Ensuite parce qu’elle passe à côté de l’immensité démographique et sociologique que représentent les communautés musulmanes. Rappel : il y a plus de 1,3 milliards de musulmans à travers le monde. S’ils étaient des antisémites et des adeptes de la violence, il n’y aurait aujourd’hui plus grand monde pour en débattre. Or ce que l’on remarque, c’est l’incroyable diversité des opinions et des façons de vivre leur foi qu’ont les musulmans du monde entier. Il y a donc un islam et des musulmans. Et ceux-là n’ont pas attendu l’injonction de qui que ce soit pour proposer des lectures contextuelles des sources religieuses de l’islam, y compris en rappelant l’évidence : que toute forme d’intolérance, de violence et de rejet de l’autre, notamment sur la base de son appartenance nationale, ethnoculturelle et/ou religieuse, est fondamentalement contraire aux préceptes de l’islam (ce que des dignitaires musulmans français avaient notamment réitéré il y a peu, ici - point 23).
Enfin, parce qu’elle ignore qu’il n’y a pas de clergé en islam. Pas d’autorité unifiée qui dicterait à 1,3 milliards de personnes (ni même aux 4,5 millions d’entre eux qui vivent en France) la manière dont ils devraient se comporter. Le Coran est complété des hadiths (faits et déclarations du Prophète – asws) et ses versets sont éclairés par les « asbab an-nuzul » (les conditions et le contexte de révélation) qui donnent des indications sur la portée des versets et leur champ thématique d’application. C’est la mise en commun et l’analyse conjointe de ces sources et du contexte d'étude, qui permet aux musulmans (et parmi eux les exégètes) de proposer une compréhension ou une interprétation du sens des versets. À titre indicatif, cet exercice requiert selon les cursus 7 à 10 ans d’études en sciences islamiques et ne confère à ceux qui s’y livrent qu’un rôle consultatif sur le plan théologique. Par conséquent, croire que l’incantation de 300 signataires aboutirait à l’abrogation de versets de la part d’obéissants dignitaires religieux, qui se traduirait ensuite par un impact direct sur des hordes mahométanes dont on aura dressé avec constance le détestable portrait d’antisémites, relève non pas de la lutte contre la violence politique mais de l’acte de foi pure. Ce qui ne serait grotesque que si certains de nos signataires se revendiquaient par ailleurs de la laïcité...
6) Disons maintenant un mot de la démarche politique que constitue ce manifeste, rassemblant plus de 300 personnalités, dont plusieurs ont occupé des fonctions d’importance (trois premiers ministres, plusieurs ministres et un président). Il est d’abord à noter que ces fervents républicains (appelant cycliquement au « barrage contre l’extrême droite » avant d’être saisis d’une soudaine amnésie les lendemains d’élection) n’ont eu aucun mal à co-signer un texte à teneur raciste avec des polémistes de la droite la plus réactionnaire et des activistes ouvertement islamophobes. Je laisserai à d’autres le soin de relever méthodiquement ces saillies, dont la seule constance est le rejet de l’autre, pour me contenter d’observer que cette œuvre commune que les signataires auront à porter en mémoire, n’est que l’aboutissement d’une idée que l’un des leurs, George Bensoussan a porté avec ferveur, selon laquelle l’antisémitisme des arabo-musulmans se tète « avec le lait de la mère » (propos pour lesquels il est actuellement en attente de jugement de la Cour d’appel de Paris, suite à l’action du CCIF, de la LDH, du MRAP et du parquet de Paris).
Comment interpréter l’ampleur politique de cette position, ralliant une partie de cet ancien monde désormais acquis à la grande réaction, allant de la droite la plus dure à la mouvance vallsiste ?
Nous avons démontré, dans les points précédents, qu’une telle position était :
·
contraire à l’état des connaissances
en sciences sociales et à ce que nous savons du passage à l’acte haineux
·
contraire au droit, aux textes,
traités internationaux, ainsi aux engagements de la France, dans leur
philosophie comme dans leur application
·
inefficace, non-explicative voire
contre-productive sur le plan de la lutte contre l’antisémitisme
·
raciste, à travers le lien qui est
fait entre l’appartenance religieuse musulmane et l’antisémitisme
·
inopérante sur le plan théologique
et contraire à la laïcité
Dès lors, puisqu’elle ne fait sens ni sur le
terrain analytique, ni sur le terrain juridique, ni sur le terrain opérationnel
de la lutte contre tous les racismes, c’est bel et bien sur le plan politique
qu’elle trouve tout son sens, avec plusieurs motivations à l’œuvre.Certains des signataires ont une motivation purement idéologique et ce texte ne fait que répondre à leurs obsessions réactionnaires contre tout ce qui viendrait mettre en cause leurs privilèges ou leur vision raciste de la société française. Il faut les entendre et les lire, à longueur d’ouvrages et faisant la tournée des plateaux télévisés disserter, ad nauseam, de la fin de la liberté d’expression, de « la France qui n’est plus la France » et du déclin français qui les a, cruelle ironie, choisis comme premiers de cordée…
D’autres signataires ont, pour reprendre leur expression, la « bassesse électorale » de compter que le vote raciste, qui permet aux candidats d’extrême droite d’être bien placés à chaque élection, est très réceptif à la mise en cause des Noirs, des Arabes, des Roms, des musulmans, des migrants et des quartiers populaires. Par conséquent, chaque occasion est bonne pour se signaler, même s’il faut au passage piétiner les principes et la devise du pays dont on se revendique patriote.
On savait que Manuel Valls errait dans les limbes de l’indignité, acculé à envisager l’exil politique à Barcelone, dont on lui apprendra (sans vouloir le dissuader le moins du monde de goûter aux vertus d’un lointain voyage, puis en ayant pris le soin de prescrire une dose préventive de paracetamol) qu’elle est la première grande ville à adopter un plan d’ampleur contre l’islamophobie. À défaut, il existe d’autres terres où ses espoirs politiques (et colorimétriques) pourraient être couronnés de succès. Ici par exemple.
On savait également que Nicolas Sarkozy et Laurent Wauquiez étaient en quête de nouvelles idées politiques (sic). L’un pour que son nom soit autrement évoqué dans la presse que comme une « racaille » en attente d’être « nettoyée au karcher » judiciaire. L’autre, jamais avare de partager sa maitrise de la langue arabe et de la théologie islamique, aura sûrement voulu signaler sa disponibilité pour aider les musulmans à mieux comprendre leur religion. À n’en point douter, un Jupiter avisé ne tardera pas à leur proposer un poste de grand mufti.
Ce que l’on savait moins, par contre, c’est la façon dont un homme politique de la stature de Bernard Cazeneuve se retrouverait parmi les signataires d’un tel texte, après avoir pendant longtemps été une conscience de Gauche. À moins que son discernement se soit égaré dans l’une des manifestations qu’il a interdites et réprimées ou lors des milliers de perquisitions qu’il a diligentées. Avec l’efficacité que l’on connait hélas désormais.
Le cerveau d'une partie de nos élites politiques est devenu semblable au lit de Procuste: les idées trop petites y sont étalées jusqu'au point de rupture. Les idées trop grandes n'y rentrent tout simplement pas, sauf en les tronquant jusqu'à les faire périr. C'est donc sans surprise que l'on observera se réaliser en boucle le même axiome bête et autoritaire: quand on ne comprend pas quelque chose, on gagne toujours à le supprimer. Qu'il s'agisse d'un bout de tissus sur la tête de quelque femme musulmane, d'un geste de solidarité envers les migrants ou d'une expérience humaine dans la ZAD de Notre Dame des Landes.
D’autres encore, parmi les signataires, ont trouvé dans ce texte une occasion de plus d’instrumentaliser des violences antisémites pour faire avancer leurs intérêts idéologiques, s’agissant du conflit israélo-palestinien. Monter les juifs et les musulmans les uns contre les autres en France est une stratégie qui permet pour eux d’atteindre un double objectif :
- présenter la politique coloniale israélienne comme l’avant-garde de la lutte contre le djihadisme et ce, même quand les colonies s’étendent constamment et que l’armée israélienne tue des civils palestiniens sans la moindre pression, comme c’est le cas à Gaza depuis des semaines, dans le mépris des résolutions internationales et dans l’impunité la plus totale
- criminaliser le soutien aux Palestiniens en Europe, en faisant une confusion délibérée entre critique du sionisme et antisémitisme. En adoptant une telle position, les plus aveugles soutiens de la politique israélienne rejoignent la ligne des antisémites les plus viscéraux. Les premiers disent : « critiquer Israël, c’est critiquer les juifs ». Les seconds répondent : « pour critiquer Israël, il faut critiquer les juifs ». Le soutien apporté à la politique explicitement antisémite du gouvernement hongrois en est une flagrante illustration.
Sur le plan international, je n’ai jamais fait mystère de mon soutien aux Palestiniens et de ma critique fondamentale de la politique israélienne, que je considère profondément coloniale et meurtrière, mais de la même manière que je ne tolère pas que les musulmans soient assignés à la violence de personnes qui se revendiquent de leur foi, je ne commettrai pas l'injustice d’appliquer, aux juifs ou à qui que ce soit d’autre, les mêmes procédés purement racistes. J'observe avec tristesse les indignations tout aussi constantes que sélectives de certains, dont l'intensité est inversement proportionnelle à la distance kilométrique qui nous sépare des victimes innocentes de la violence et de la terreur, en attendant le jour où nos responsables politiques auront à répondre, de leurs silences comme de leurs actes.
Enfin, il y a (espérons-le sincèrement sans trop s’attarder) des signataires qui ont apporté leur caution à ce texte par pur opportunisme ou sans trop en saisir la portée. À ceux-là, j'aimerais dire une chose simple: vous n’êtes pas moins responsables que les autres, mais vous avez toujours le luxe de revoir votre position. Car avec le temps, elle risque de devenir bien lourde à porter…
Une fois cette analyse posée, comment sortir par le haut de ce dialogue de sourds et avancer ?
D’abord en en tirant une leçon fondamentale pour les consciences de Gauche et, plus largement, pour toutes celles et ceux pour qui les mots « liberté, égalité, fraternité » sont autre chose qu’un slogan vidé de son sens. Voici cette leçon :
C’est bien fait pour nous.
Car voilà ce qui arrive quand on est hésitants dans notre prise en charge de toutes les formes de racisme contemporaines. Les esprits les plus réactionnaires du pays et les intolérants les plus décomplexés n’ont pas attendu d’être d’accord sur tout pour adopter une position commune et explicitement raciste à l’égard de millions d’entre nous. Ils n’ont pas attendu l’alignement de paradigmes et de courants de pensée dont la diversité est par ailleurs une richesse pour comprendre qu’ils avaient (eux dans leurs détestations, nous dans nos solidarités) des causes communes à défendre et à faire avancer. Et ils ont encore moins attendu de savoir ce qu’en diraient les trolls sur les réseaux sociaux avant de décider s’ils allaient où non prendre position sur l’islamophobie, sur la négrophobie, sur la romaphobie, sur le traitement des migrants et des réfugiés, sur les violences policières ou le traitement des quartiers populaires.
Donc sans surprise, à chaque fois que l’on capitulera, dans nos idées comme dans nos mobilisations sur ces questions, c’est cette frange réactionnaire qui s’exprimera, chaque jour de manière plus libre et plus décomplexée, en cherchant à faire pression sur les politiques publiques dès lors armées comme des politiques d’exclusion. Avec un impact asymétrique: pour nos amis de Gauche, ce sera juste un renoncement de plus à des positions de principe, tandis que pour les populations visées, cela viendra aggraver encore un peu plus l'expérience de l'exclusion et de la mise en cause auxquelles elles sont quotidiennement confrontées.
Pour autant, il ne faut pas répondre aux réactionnaires par la réaction, mais par la constance de l’action.
Il ne faut pas accepter les lignes de clivage qui nous sont imposées et qui voudraient donner à penser que des communautés d’appartenance posent des antagonismes et des ruptures indépassables, car la réalité de ce qu’est notre peuple nous montre tout autre chose. Chaque jour, les gens vivent ensemble. Ils grandissent ensemble, étudient ensemble, travaillent ensemble, se marient et construisent ensemble.
Je vois les communautés juives et musulmanes en France (pour ne parler que de l’objet de ce manifeste auquel je réponds dans ce texte) comme des communautés sœurs qui, l’une comme l’autre, vivent des formes de racisme et d’exclusion malheureusement trop contemporaines et qui, dans les moyens d’y répondre, ont beaucoup à partager. C’est pour cela qu’à titre personnel, je n’ai jamais accepté la stratégie de clivage et de mise en concurrence des uns et des autres, trop souvent activée sur le plan politique national, par des personnes qui en vérité méprisent la condition des uns comme des autres. Je me suis également refusé à tomber dans le piège des "deux poids deux mesures" qui, en plus d'envenimer les débats, se solde au final par une restriction des libertés de tous. Remettons les choses dans le bon sens: si des avancées sont faites dans l’une des luttes contre les racismes, alors cela doit permettre de faire avance les causes de tous et de créer des solidarités, en rapprochant les expériences et en amenant les gens à se décentrer de leur position pour voir ce que d’autres vivent, ce que d’autres endurent et leur éviter d’un jour se retrouver à signer un manifeste d’une telle abjection, sinon par adhésion idéologique, du moins par aveuglement ou par ressentiment.
Il y a donc des recommandations claires qui se dégagent:
- prise en compte égalitaire et inclusive de toutes les formes de racisme contemporaines
- mise en oeuvre thématique des moyens de lutte contre les racismes, auprès des associations de terrain
- échange des bonnes pratiques et entraide entre les associations chargées de la lutte contre l'antisémitisme, l'islamophobie, la négrophobie, etc.
- respect symétrique du principe de laïcité et non ingérence des pouvoirs publics et politiques sur le plan théologique
- respect strict des textes et traités en vigueur, notamment en matière de lutte contre les violences haineuses et le terrorisme
- organisation d'instances de dialogue et d'échange sur toutes les questions qui font litige
- prise en compte de ces dynamiques au plus haut niveau de responsabilité politique
Toute personne cherchant réellement à lutter, contre l'antisémitisme comme contre toute autre forme de violence, aura à coeur de rejoindre une telle démarche dans ces grandes lignes.
J’espère avoir suffisamment de clarté pour adopter, à mon échelle et dans mon travail, la seule position qui soit cohérente : la lutte contre toutes les formes de racisme et contre toutes les violations de droits humains, en y incluant l’antisémitisme, la négrophobie, la romaphobie, l’islamophobie et toutes les autres atteintes à la dignité humaine, tout en cherchant à rapprocher les gens plutôt qu’à les diviser.
C’est là ce à quoi nous devrions tous aspirer.
Il est triste de devoir le rappeler.
Il est grave de l’avoir oublié.
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Face à l'antisémitisme, faut-il rendre des versets du Coran obsolètes ? "Il faut changer de perception, pas de texte"
INTERVIEW – Le manifeste contre le
nouvel antisémitisme, publié dimanche dans Le Parisien, demande aux autorités
musulmanes "de frapper d’obsolescence certains versets du Coran". Une
proposition qui ne convainc pas Tareq Oubrou, imam à la mosquée de Bordeaux.
23 avr. 16:46 - Propos recueillis
par Michel Véron
Il dénonce une
"épuration ethnique à bas bruit" dans certains quartiers. Le
manifeste "contre le nouvel antisémitisme", publié dimanche dans Le
Parisien et signé par 300 personnalités, n’est évidemment pas passé inaperçu.
Si l’antisémitisme perdure - voire s'intensifie - encore en France en 2018,
c’est notamment en raison, selon ses auteurs, de l’aveuglement de la société
française sur les causes de ce fléau. Ils déplorent que "la radicalisation
islamiste – et l’antisémitisme qu’elle véhicule – (soit) considérée
exclusivement par une partie des élites françaises comme l’expression d’une
révolte sociale". Ils réclament ainsi "que les versets du Coran
appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants
soient frappés d’obsolescence par les autorités théologiques".
Or, pour Tareq Oubrou,
imam à la mosquée de Bordeaux, le mal ne provient pas du texte mais de
l’interprétation qui en est faite. A ses yeux, un travail de pédagogie serait
plus judicieux et pertinent pour lutter efficacement contre
l’antisémitisme.
LCI.fr : Que
pensez-vous de cette tribune ?
Tareq Oubrou : Elle
évoque un problème connu de tout le monde. L’antisémitisme qui se développe au
sein d’une certaine population en France est à ce titre inquiétant. Faire ce
constat est une chose, en apporter des réponses en est une autre.
LCI.fr : Etes-vous
favorable au fait, comme le suggère la tribune, de frapper d’obsolescence
"les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des
chrétiens et des incroyants" ?
Tareq Oubrou :
Cette proposition suppose que l’antisémitisme attribué à l’islamisme trouve sa
justification ontologique dans le Coran, ce qui est une erreur. Ceux qui sont
antisémites le sont pour plusieurs raisons : l’exclusion, le sentiment d’être
dominé, le complotisme qui gangrène toute la société et le conflit
israélo-palestinien. Généralement, le texte devient prétexte. D'autant que dans
les textes, on peut trouver tout et son contraire, tout simplement parce que le
Coran a été révélé dans des circonstances particulières. C’était une époque
émaillée de guerres, ce qui justifie cette variation des passages du Coran en
réponse à des réalités circonstancielles. Même si l’on supprime les versets
dont la lecture serait problématique, cela n’éradiquera pas l’antisémitisme si
les personnes concernées ont la haine du juif. Il faut changer de perception,
pas de texte.
LCI.fr : Comme
l’affirme la tribune, estimez-vous que certaines banlieues françaises sont
devenues des territoires où la sécurité des juifs est en danger ? Et si oui,
comment en est-on arrivé là ?
Tareq Oubrou :
Selon les statistiques, on a l’impression véritablement que les juifs ne
peuvent pas résider dans des quartiers, c’est un constat. Le problème vient de
l’introduction de la religion dans le conflit israélo-palestinien, qui oppose
pourtant deux entités politiques. Cela entraîne une confusion nourrie par un
sentiment d’injustice qu’éprouve un certain nombre de jeunes qui voient que la
communauté juive de France est alliée systématiquement à la politique du
gouvernement d’Israël. On demande aux musulmans de condamner le condamnable
mais jamais les juifs ne condamnent les exactions commises au nom d’une
politique. Du coup, certains jeunes rendent tous les juifs de France complices
d’une politique d’un gouvernement. Et donc, par un mécanisme d’association, on
passe d’une posture politique à une posture dogmatique et religieuse. C’est
cela qui crée le conflit des religions.
LCI.fr : Que
suggérez-vous pour y remédier ?
Tareq Oubrou : Face
à l’antisémitisme, chacun doit assumer sa responsabilité : le politique, les
médias, l’école et les imams également qui doivent faire un travail important
par un procédé de théologie préventive afin d’éduquer nos enfants
religieusement parlant. Nous avons face à nous des esprits vulnérables et pas
assez cultivés en matière religieuse. Il faut prendre en compte cette
psychologie sociale d’une certaine jeunesse perturbée. Mais ce n’est pas le cas
de tout le monde, on ne parle là que d’une minorité dans une minorité. Tout
ceci sont des explications mais bien évidemment, rien ne justifie
l’antisémitisme, ni le terrorisme.
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"Attribuer l'antisémitisme à l'islam est presque un blasphème", réagit le recteur de la grande mosquée de Bordeaux
Le manifeste contre le
"nouvel l'antisémitisme" alimenté par la "radicalisation
islamiste" est une "erreur intellectuelle monumentale", a
dénoncé lundi sur franceinfo Tareq Oubrou, le recteur de la grande
mosquée de Bordeaux (Gironde).
Au lendemain de la signature par 300
personnalités dans Le Parisien d'un manifeste
"contre le nouvel antisémitisme"
en France qui serait alimenté par la "radicalisation islamiste",
le recteur de la grande mosquée de Bordeaux (Gironde) a évoqué lundi 23
avril sur franceinfo une "erreur intellectuelle monumentale",
"presque un blasphème". Tareq Oubrou a également annoncé
que les imams vont publier à leur tour une tribune contre l'antisémitisme.franceinfo : Est-ce aux responsables de l'islam en France de montrer la voie contre l'antisémitisme?
Tareq Oubrou : Ce phénomène doit être abordé par tous ceux qui ont une certaine responsabilité : le politique, l'associatif, et aussi les imams, qui doivent procéder à une théologie préventive. Mais attribuer l'antisémitisme à l'islam est presque un blasphème, puisque les deux-tiers des prophètes du Coran sont des juifs ! Donc cela ne rime à rien. Dans la tribune, il est stipulé clairement que le Coran "appelle au meurtre des juifs et des chrétiens" : c'est une erreur monumentale, et d'une violence inouïe. Le Coran n'appelle pas au meurtre ; il appelle au combat des gens qui sont hostiles. C'est la même erreur que commettent un certain nombre d'ignares musulmans, des délinquants, qui prélèvent des textes isolés de leur contexte historique. Attribuer l'antisémitisme à une "génétique coranique" quelconque est une erreur intellectuelle monumentale ; la même erreur que commettent nos jeunes qui n'ont aucune culture religieuse.
Faut-il revoir l'interprétation de ces textes sacrés ?
Ces textes sont liés à une situation ponctuelle : quand des juifs, des chrétiens et des païens ont déclaré la guerre à la nouvelle religion naissante [l'islam]. Mais aujourd'hui, celui qui veut passer au crime ne va pas consulter le Coran. L'antisémitisme puise ses racines ailleurs : dans la vengeance, la jalousie ou l'ignorance. Tout le monde doit s'engager contre ce fléau-là, pas uniquement le monde religieux. Bien sûr que les imams doivent aussi faire leur travail, en éclairant les jeunes, mais le problème c'est que ces jeunes-là ne se réfèrent pas aux imams. Et puis il y a l'importation du conflit israélo-palestinien, et le mélange entre l'antisionisme et l'antisémitisme. Les imams doivent faire un effort pédagogique pour expliquer à nos jeunes qu'il ne faut pas tout mélanger.
La tribune rappelle aussi que les Français juifs ont 25 fois plus de risques d'être agressés que leurs concitoyens musulmans, selon les chiffres du ministère de l'Intérieur. Est-ce une comparaison pertinente?
C'est dramatique. C'est un vrai fléau. Nous-mêmes, les imams, nous allons publier [dans Le Monde] une tribune qui condamne ces actes barbares. Une tribune contre l'antisémitisme et le terrorisme. Ce sont des actes qui portent préjudice à la religion, à l'humanité. On ne peut pas s'attaquer à une population parce qu'elle a une religion particulière, ou qu'elle est une ethnie particulière. Comment s'attaquer à un juif alors que le Coran dit que nous avons choisi les enfants d'Israël en connaissance de cause ? Dieu se serait trompé ? L'antisémitisme est un acte blasphématoire, d'un point de vue théologique.
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